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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3149/2021

ATAS/297/2022 du 30.03.2022 ( LAA ) , ADMIS

Recours TF déposé le 03.05.2022, rendu le 03.02.2023, ADMIS, 8C_254/2022
En fait
En droit

rÉpublique et

1.1 canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/3149/2021 ATAS/297/2022

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 30 mars 2022

8ème Chambre

 

En la cause

Monsieur A______, domicilié à Carouge comparant avec élection de domicile en l'étude de Maître Sandra RODRIGUEZ

 

 

recourant

 

contre

GENERALI ASSURANCES GENERALES SA, sise avenue Perdtemps 23, Nyon 1

 

 

intimée

 


EN FAIT

 

1.        Monsieur A______ (ci-après: l'assuré ou le recourant), né le ______ 1978, marié depuis 2015 et père de jumeaux, travaillait au moment des faits à la B______SA. À ce titre, il était assuré auprès de GENERALI Assurances générales SA (ci-après: l'assurance-accidents ou l'intimée) contre le risque d'accident.

2.        Le 26 septembre 2006, il a été victime d'un accident de moto, lors duquel il a subi une fracture de la colonne vertébrale avec traumatisme médullaire provoquant une paraplégie complète au-dessous de D4.

3.        Les suites de l'accident ont été prises en charge par l'assurance-accidents.

4.        Dès le 1er octobre 2007, l'assuré a progressivement repris le travail.

5.        Une arthro-IRM de l'épaule droite réalisée le 13 juin 2014 a montré des remaniements dégénératifs débutants de l'articulation acromio-claviculaire.

6.        Alors que l'assuré travaillait à 70% pour l'office des assurances sociales du canton de Genève depuis le 1er avril 2012, l'assurance-accidents lui a octroyé, par décision du 15 décembre 2014, confirmée par décision sur opposition du 17 avril 2015, une rente d'invalidité de 20% dès le 1er avril 2012 et lui a refusé une allocation pour impotent.

7.        Dans le cadre de la procédure de recours contre cette décision, l'assurance-accidents a acquiescé d'allouer à l'assuré une rente d'invalidité de 30% dès le 1er avril 2012, étant précisé que ce dernier n'avait pas contesté le refus de l'allocation pour impotent.

8.        Par la suite, l'assuré s'est installé à son compte comme avocat indépendant.

9.        Selon le rapport du 13 mars 2018 du docteur C______, spécialiste FMH en médecine physique et rééducation au service ambulatoire de paraplégie de H______, l'assuré avait fait un faux mouvement vers l'arrière avec son bras gauche et avait ressenti un craquement dans l'épaule gauche. Depuis lors, il remarquait une augmentation des douleurs au niveau de cette épaule lors d'efforts et de certains mouvements.

10.    Un examen radiologique et une échographie des deux épaules réalisés le
21 février 2019 ont mis en évidence une arthropathie débutante de l'articulation acromio-claviculaire bilatérale et une lame de liquide dans la bourse sous-acromio-deltoïdienne gauche en lien avec une bursite faisant suspecter un conflit sous-acromial.

11.    Selon le certificat du 4 mars 2019 du docteur D______, spécialiste FMH en médecine interne, l'assuré souffrait de douleurs dans les deux épaules en lien avec des conflits sous-acromiaux, ce qui avait un fort impact sur sa vie quotidienne.

12.    Le 25 mars 2019, l'assuré a demandé la révision de la décision sur opposition du
17 avril 2015 et a sollicité une allocation pour impotent. En raison des douleurs dans les épaules, il était gêné dans tous les actes de la vie quotidienne, tels que transferts, habillement, déplacements et hygiène corporelle. Régulièrement, il devait demander de l'aide à son épouse pour les transferts du lit au fauteuil, du fauteuil aux toilettes ou à la douche et pour l'habillement, afin de ménager ses épaules.

13.    Selon le questionnaire pour l'évaluation du degré d'impotence établi le 5 juillet 2019 par l'assuré et un inspecteur de l'assurance-accidents, le premier avait besoin de l'aide régulière et importante d'autrui pour se vêtir, en raison des atteintes aux deux épaules. Il nécessitait de l'aide principalement pour les pantalons et épisodiquement pour les t-shirts, à cause d'une limitation au niveau de l'élévation des épaules. Il devait aussi solliciter de l'aide pour les transferts, en particulier pour se laver, prendre un bain et aller aux toilettes, lorsque son épouse était présente, ainsi que pour se déplacer à l'extérieur (monter sur les trottoirs avec un enfant dans les bras) et établir des contacts sociaux.

14.    Selon l'avis du 10 juillet 2019 du docteur E______, médecin-conseil de l'assurance-accidents, le rapport de causalité entre les scapulalgies et l'accident était tout au plus possible. Même en admettant une certaine surcharge des épaules suite à la paraplégie post-traumatique, cette surcharge ne pouvait expliquer à elle seule la survenue d'une arthropathie acromio-claviculaire débutante bilatérale, s'agissant d'une affection extrêmement courante et sans relation claire avec le traumatisme. En absence de lésion aux épaules lors de l'accident, il n'y avait pas de lien de causalité naturelle au moins partiel entre les atteintes à l'épaule et cet évènement.

15.    Par décision du 28 octobre 2019, l'assurance-accidents a refusé le droit aux prestations en lien avec les troubles aux deux épaules et a octroyé à l'assuré une allocation pour impotent de degré faible dès le 1er mars 2019, du fait que l'assuré avait besoin de l'aide régulière et importante pour se lever et se déplacer, étant privé de l'usage de ses jambes. Cette décision est entrée en force.

16.    Le 3 février 2021, la doctoresse F______, spécialiste en paraplégie, a prescrit à l'assuré un propulseur électrique "Triride" pour réduire les douleurs articulaires à l'épaule droite.

17.    Par courriel du 24 février 2021, l'assuré a demandé à l'assurance-accidents l'octroi d'un moyen auxiliaire de traction électrique "Triride". En raison des douleurs aux épaules et de la fatigue, il éprouvait certaines difficultés dans les déplacements en fauteuil roulant. Le moyen auxiliaire sollicité lui permettrait une autonomie plus importante et de diminuer les contraintes physiques.

18.    Par courriel du 25 février 2021, l'assurance-accidents a répondu à l'assuré que le dispositif de propulsion électrique requis était assimilé à un fauteuil roulant à moteur électrique et réservé aux assurés qui ne pouvaient pas utiliser un fauteuil roulant usuel par suite de paralysie ou d'autres infirmités des membres supérieurs et qui ne pouvaient se déplacer de façon indépendante qu'en fauteuil roulant électrique. En l'occurrence, l'assuré était en mesure de se déplacer de façon indépendante et de vaquer à ses occupations professionnelles et privées, ainsi que d'établir des contacts sociaux avec un fauteuil roulant manuel, malgré les difficultés décrites. Une traction électrique faciliterait certainement ses déplacements et ménagerait ses membres supérieurs, mais cela valait pour tous les assurés.

19.    Par courrier du 18 mars 2021, l'assuré a contesté le refus du moyen auxiliaire requis, par l'intermédiaire de son conseil. Son activité professionnelle en tant qu'avocat et juge assesseur impliquait quotidiennement en moyenne plus de dix transferts fauteuil roulant-voiture, du fait qu'il était contraint de faire en voiture les très nombreux déplacements pour se rendre aux audiences et divers rendez-vous. Compte tenu de l'absence totale de mobilité dans les membres inférieurs, ces transferts étaient très exigeants pour les membres supérieurs des personnes paraplégiques. De ce fait, il souffrait d'importantes douleurs dans les épaules. Ainsi, sans propulsion électrique, il ne lui serait plus possible de maintenir une activité professionnelle au même taux. Un système de propulsion électrique lui permettrait de se rendre en fauteuil roulant à ses rendez-vous et de diminuer les transferts. Le principe de l'économicité était rempli, puisqu'aucun autre moyen auxiliaire ne permettrait de soulager les épaules et que celui-ci éviterait de péjorer son état de santé. Selon le devis annexé à ce courrier, le coût d'un Triride special L14 était de CHF 8'961.-.

20.    Dans son rapport du 8 mars 2021, la Dresse F______ a relevé que le problème principal de l'assuré résidait actuellement dans les douleurs au niveau de l'épaule droite, très vraisemblablement à cause d'une surcharge et de l'arthrose. Pour ménager l'épaule, il y avait une indication pour un dispositif de propulsion électrique.

21.    Par décision du 29 avril 2021, l'assurance-accidents a confirmé le refus d'octroi du moyen auxiliaire requis. À sa précédente motivation, elle a jouté que la mobilité fonctionnelle des membres supérieurs n'avait pas subi d'atteinte lors de l'accident. De surcroît, elle avait déjà refusé, par sa décision du 28 octobre 2019, tout droit aux prestations en rapport avec les troubles des épaules.

22.    Par acte du 31 mai 2021, l'assuré a formé opposition à cette décision, en concluant à son annulation et à l'octroi d'un propulseur électrique pour fauteuil roulant de type Triride. Préalablement, il a requis une expertise neurologique indépendante sur la question du lien de causalité entre les atteintes aux épaules et l'accident. Pour l'essentiel, il a repris son argumentation précédente, tout en affirmant que les atteintes aux épaules trouvaient leur origine dans les transferts du fauteuil et vers le fauteuil, soit une surcharge chronique des épaules due à l'utilisation d'un fauteuil roulant. Quant à la décision du 28 octobre 2019, elle concernait uniquement le droit à une allocation pour impotent et non pas la mise à disposition d'un moyen auxiliaire. Enfin, son état de santé s'était aggravé depuis cette décision, puisqu'il souffrait depuis lors également de douleurs dans toute la ceinture scapulaire (dos, bras, nuque).

23.    Par décision du 20 août 2021, l'assurance-accidents a rejeté l'opposition. La décision du 28 octobre 2019, par laquelle elle avait nié le lien de causalité entre les atteintes aux épaules et l'accident, était entrée en force, de sorte que l'assuré était forclos de le contester. Cette décision portait bel et bien également sur le droit aux prestations en lien avec les troubles aux épaules. Quant à la reconnaissance du droit à l'allocation pour impotent de degré faible, elle était uniquement justifiée par le changement de jurisprudence du Tribunal fédéral en rapport avec l'acte de se lever/s'asseoir/se coucher et n'était donc pas liée à la présence de scapulalgies. L'assuré aurait dû s'opposer au refus du droit aux prestations en lien avec ses problèmes d'épaules et avait un intérêt digne de protection, même si l'allocation pour impotent lui avait été reconnue. Il ne pouvait par ailleurs être considéré, par analogie, que les prestations devaient être allouées en raison de lésions causées lors d'un traitement médical. L'octroi d'un dispositif de propulsion électrique était enfin exclu, dès le moment où l'assuré pouvait se déplacer de façon autonome en fauteuil roulant manuel, même si un tel moyen serait utile et constituerait la meilleure solution.

24.    Par acte du 13 septembre 2021, l'assuré a interjeté recours contre cette décision, par l'intermédiaire de son conseil, en concluant à son annulation et à l'octroi d'un dispositif de propulsion électrique pour fauteuil roulant de type "Triride", à hauteur de CHF 8'961.-, sous suite de dépens. Subsidiairement, il a conclu à la mise en œuvre d'une expertise neurologique et orthopédique. La décision du 28 octobre 2019 portait uniquement sur la révision de la décision de refus de l'allocation pour impotent du 17 avril 2015, de sorte que l'intimé ne pouvait exclure le lien de causalité entre les atteintes aux épaules et l'accident de manière définitive pour l'ensemble de ses prestations d'assurance, d'autant plus que son médecin-conseil avait qualifié le lien de causalité de possible. Ainsi, il n'avait pas d'intérêt digne de protection à contester uniquement l'absence de lien de causalité retenu, après avoir obtenu gain de cause sur sa demande de révision. Par ailleurs, les atteintes aux épaules étaient en lien de causalité avec l'accident, dans la mesure où les rapports médicaux établissaient que la dégradation de ces articulations était le résultat de près de quinze ans de transferts journaliers depuis le fauteuil et vers le fauteuil. Selon les médecins, l'atteinte aux épaules n'avait en outre pas été provoquée par l'activité sportive intense qu'il avait pratiquée auparavant. Cela justifiait l'application par analogie des dispositions légales concernant les lésions causées lors du traitement médical. L'intimée avait par ailleurs violé le principe inquisitoire en omettant d'instruire s'il y avait un lien de causalité entre l'accident, respectivement l'utilisation conforme des moyens auxiliaires prescrits dans le cadre du traitement médical, et les troubles aux épaules et la ceinture scapulaire. La nécessité de disposer d'un propulseur électrique pour fauteuil roulant était au demeurant attestée médicalement. En effet, les troubles aux épaules n'étaient pas compensés par le fauteuil roulant manuel et la voiture adaptée, à cause des nombreux transferts nécessaires. Selon la jurisprudence, il fallait également tenir compte des circonstances particulières de son cas, à savoir qu'il travaillait à 70% comme avocat indépendant et juge assesseur et qu'il était père de jumeaux en bas âge. Son activité professionnelle impliquait de nombreux transferts quotidiens. Il ne pouvait par ailleurs plus effectuer des sorties à l'extérieur avec ses enfants avec son fauteuil roulant manuel, faute de pouvoir les suivre et surveiller avec toute la sécurité requise, à défaut d'un dispositif de propulsion électrique. Compte tenu du soulagement des épaules que permettait un tel dispositif, il convenait aussi d'admettre le caractère économique ce moyen auxiliaire.

25.    Dans sa réponse du 12 octobre 2021, l'intimée a conclu au rejet du recours. Dans sa demande de révision de la décision de refus de l'allocation pour impotent, le recourant s'était prévalu expressément de douleurs aux épaules et avait ainsi allégué une péjoration de son état. Partant, l'intimée devait examiner préalablement si les atteintes aux épaules étaient en lien avec l'accident, afin d'examiner si les conditions de l'impotence étaient réalisées. Il était en outre reconnaissable pour le recourant que la décision du 28 octobre 2019 comportait deux objets séparés dans son dispositif. La présente procédure était la preuve que le recourant avait un intérêt digne de protection à contester uniquement la question de la causalité entre l'accident et les atteintes aux épaules. Dès lors que cette question avait été définitivement tranchée par une décision entrée en force, l'intimée n'avait pas à procéder à un nouvel examen du lien de causalité ni à entrer en matière sur une demande implicite de reconsidération. L'usage d'une chaise roulante pour un assuré paraplégique n'avait par ailleurs aucun but thérapeutique, mais servait uniquement à compenser la perte de fonction définitive des membres inférieurs, si bien que les dispositions légales concernant les lésions apparues lors du traitement médical n'étaient pas applicables. Si le ménagement des membres supérieurs et la prévention de douleurs étaient déterminants pour l'octroi du moyen auxiliaire requis, chaque assuré paraplégique pourrait y prétendre. Le cas du recourant ne se différenciait pas de ceux jugés par le Tribunal fédéral, pour admettre qu'il pouvait prétendre à ce dispositif. En effet, il était toujours en mesure de se déplacer de façon indépendante en fauteuil manuel, sans l'aide régulière et importante d'un tiers.

26.    Dans sa réplique du 1er novembre 2021, le recourant a persisté dans ses conclusions. Il n'avait aucun intérêt direct, concret et actuel à contester la décision du 18 octobre 2019 de l'intimée. Sur la base d'un rapport du 22 octobre 2021 du docteur G______, spécialiste en médecine intensive et anesthésie, il a persisté à soutenir que les problèmes aux épaules étaient en rapport avec l'usage d'un fauteuil roulant au degré de la vraisemblance prépondérante. Pour le surplus, il a repris sa précédente argumentation.

27.    Dans le rapport précité, le Dr G______ a exposé que la surcharge des épaules chez des personnes paraplégiques devant utiliser un fauteuil roulant était provoquée essentiellement par l'utilisation des bras pour avancer. Cette forte surcharge entraînait la plupart du temps un épaississement du tendon du muscle sus-épineux, lequel était responsable pour écarter et lever les membres supérieurs, ainsi que pour la tension de la capsule articulaire. Cet épaississement s'accompagnait parallèlement d'un fort rétrécissement de l'espace sous-acromial par lequel passait le tendon du muscle sus-épineux, de sorte que celui-ci était de plus en plus coincé et que la fonction de l'articulation de l'épaule était altérée (syndrome d'impingement). Ainsi, les personnes utilisant un fauteuil roulant étaient atteintes dans une beaucoup plus grande mesure de problèmes aux épaules que le reste de la population. En l'occurrence, le recourant se déplaçait en fauteuil roulant depuis 2006. L'utilisation des bras pour avancer, la charge du poids du corps lors des transferts et la levée des bras au niveau des yeux, voire au-dessus, continuellement nécessaire, avaient mené à une surcharge chronique des épaules typique et provoqué un épaississement du tendon du muscle sus-épineux avec les conséquences précitées. Partant, les atteintes aux épaules constituaient une conséquence de la paraplégie causée par l'accident au degré de la vraisemblance prépondérante.

28.    Dans sa duplique du 8 novembre 2021, l'intimée a maintenu ses conclusions. Le recourant avait un intérêt actuel et digne de protection de recourir contre la décision du 18 octobre 2019 sur la question du lien de causalité entre les troubles des épaules et l'accident, dès lors qu'il savait que la question pouvait se reposer en tout temps, en particulier pour le traitement médical des épaules. Si le recourant considérait que l'intimée n'avait pas le droit de rendre une décision de constatation sur ce point, en statuant parallèlement sur le droit à une allocation pour impotent, il aurait dû s'y opposer dans le délai légal. À défaut, il était forclos de contester cette constatation dans la présente procédure, si bien qu'il n'y avait pas lieu de prendre en considération le rapport du Dr G______. L'intimée a, à cet égard, relevé qu'elle n'était pas entrée en matière sur la demande de reconsidération implicite du recourant. Quoi qu'il en soit, le recourant était toujours apte à se déplacer en fauteuil roulant manuel. Du fait qu'il exerçait une activité intellectuelle, pouvant s'exercer en partie en télétravail, la nécessité des déplacements était limitée. Quant aux activités ménagères ou familiales, elles étaient définitivement restreintes en raison la paraplégie et la remise du moyen auxiliaire sollicité ne permettrait pas d'y remédier.

29.    Entendu le 25 février 2022, le recourant a déclaré ce qui suit:

"D'ores et déjà, j'ai acquis le dispositif électrique pour fauteuil roulant manuel.

J'ai aussi mal aux épaules en avançant avec le fauteuil roulant manuel, pas seulement lors des transferts.

En fauteuil roulant manuel, je peux me déplacer sur une distance d'environ 1 kilomètre, sans avoir trop de problèmes aux épaules.

Mon étude se trouve à environ 1 kilomètre de mon domicile et je peux m'y rendre en fauteuil roulant manuel, depuis que mon étude se trouve à Carouge.

Depuis la pandémie, je fais régulièrement du télétravail à mon domicile (4 jours par semaine en fonction des rendez-vous). En moyenne, je siège comme juge assesseur à votre chambre 1 fois par semaine. A cela s'ajoutent 2 à 3 rendez-vous à l'étude par semaine, parfois le même jour. J'ai par ailleurs environ une audience par mois en tant qu'avocat.

Par ailleurs, j'ai un rendez-vous chez mon physio à Plainpalais 1 fois par semaine et environ 1 rendez-vous médical 1 fois par mois.

Auparavant, mes enfants allaient a à la crèche qui était à environ 1 kilomètre de mon domicile. Toutefois, il y avait une montée (Batelle) que je ne pouvais pas faire en fauteuil roulant manuel. Aujourd'hui, les enfants vont à l'école qui est à la même distance, mais sans montée. Je pourrais donc m'y rendre en fauteuil roulant manuel.

Le dispositif électrique m'est aussi utile pour suivre les enfants au parc et lors des sorties. En fauteuil roulant manuel, je ne suis pas toujours suffisamment rapide, notamment lorsqu'ils font du vélo, de la trottinette et du skate.

Je précise à cet égard que l'utilisation fréquente du fauteuil manuel met à contribution également les poignets et les avant-bras. Lors des séances de physiothérapie, je suis soigné notamment pour les tensions à ces endroits.

Le dispositif électrique me permet également de faire plus facilement les courses et de transporter des charges plus importantes sur les genoux.

Les contraintes lors des transferts dans la voiture sont particulièrement importantes lorsque je dois prendre les enfants avec moi, par exemple pour les amener auparavant à la crèche. En effet je devais d'abord m'asseoir dans la voiture à l'arrière, puis les attacher et enfin ressortir de la voiture et me mettre à la place du conducteur. Grâce au dispositif électrique, je peux en outre attacher un chariot au fauteuil, afin de transporter un enfant, le second étant sur mes genoux.

Je pense que c'est grâce à ce dispositif que j'arrive à maintenir ma capacité de travail."

30.    Le 4 mars 2022, le recourant a produit la facture du 3 mars 2022 relative au dispositif de propulsion électrique pour fauteuil roulant manuel, laquelle s'élève à CHF 8'961.-.

31.    Sur ce, la cause a été gardée à juger.

 

EN DROIT

1.        Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 5 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05) en vigueur dès le 1er janvier 2011, la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît en instance unique des contestations prévues à l’art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l'assurance-accidents, du 20 mars 1981 (LAA - RS 832.20).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

2.        À teneur de l'art. 1 al. 1 LAA, les dispositions de la LPGA s'appliquent à l'assurance-accidents, à moins que la loi n'y déroge expressément.

3.        Le 1er janvier 2017, est entrée en vigueur la modification du 25 septembre 2015 de la LAA. Dans la mesure où l'accident est survenu avant cette date, le droit du recourant aux prestations d'assurance est soumis à l'ancien droit (cf. dispositions transitoires relatives à la modification du 25 septembre 2015; arrêt du Tribunal fédéral 8C_662/2016 du 23 mai 2017 consid. 2.2). Les dispositions légales seront citées ci-après dans leur teneur en vigueur jusqu'au 31 décembre 2016.

4.        Le délai de recours est de trente jours (art. 56 LPGA; art. 62 al. 1 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 [LPA - E 5 10]).

Interjeté dans la forme et le délai prévus par la loi, le recours est recevable.

5.        Le litige porte sur le droit à un dispositif de propulsion électrique pour fauteuil roulant manuel. Un tel dispositif est assimilé à un fauteuil roulant à moteur électrique (ATF 135 I 161 consid. 4 p. 164).

Selon l'intimée, la question de la causalité entre les atteintes aux épaules et l'accident doit être exclue de l'objet du litige, dès lors que cette question a été déjà tranchée définitivement par sa décision du 28 octobre 2019 entrée en force. Toutefois, au vu de ce qui suit, cette question peut rester ouverte.

6.        Selon l'art. 6 al. 1 LAA, les prestations d'assurance sont allouées en cas d'accident professionnel, d'accident non professionnel et de maladie professionnelle. Par accident, on entend toute atteinte dommageable, soudaine et involontaire, portée au corps humain par une cause extérieure extraordinaire qui compromet la santé physique, mentale ou psychique ou qui entraîne la mort (art. 4 LPGA; ATF 129 V 402 consid. 2.1, ATF 122 V 230 consid. 1 et les références).

La responsabilité de l’assureur-accidents s’étend, en principe, à toutes les conséquences dommageables qui se trouvent dans un rapport de causalité naturelle (ATF 119 V 335 consid. 1; ATF 118 V 286 consid. 1b et les références) et adéquate avec l’événement assuré (ATF 125 V 456 consid. 5a et les références).

Le droit à des prestations découlant d'un accident assuré suppose d'abord, entre l'événement dommageable de caractère accidentel et l'atteinte à la santé, un lien de causalité naturelle. Cette condition est réalisée lorsqu'il y a lieu d'admettre que, sans cet événement accidentel, le dommage ne se serait pas produit du tout ou qu'il ne serait pas survenu de la même manière. Il n'est pas nécessaire que l'accident soit la cause unique ou immédiate de l'atteinte à la santé: il suffit qu'associé éventuellement à d'autres facteurs, il ait provoqué l'atteinte à la santé, c'est-à-dire qu'il apparaisse comme la condition sine qua non de cette atteinte (ATF 142 V 435 consid. 1).

7.        Selon l'art. 11 LAA, l’assuré a droit aux moyens auxiliaires destinés à compenser un dommage corporel ou la perte d’une fonction. Le Conseil fédéral établit la liste de ces moyens auxiliaires (al. 1). Les moyens auxiliaires sont d’un modèle simple et adéquat (al. 2 1ère phrase). 

Par le biais de l'art. 19 de l’ordonnance sur l'assurance-accidents du 20 décembre 1982 (OLAA - RS 832.202), le Conseil fédéral a délégué au Département fédéral de l'intérieur la compétence de dresser la liste des moyens auxiliaires et d'édicter des dispositions sur la remise de ceux-ci. Ce département a édicté l'ordonnance sur la remise de moyens auxiliaires par l'assurance-accidents (OMAA [RS 832.205.12]) avec, en annexe, la liste des moyens auxiliaires. Selon l'art. 1 al. 1 OMAA, l'assuré a droit aux moyens auxiliaires figurant sur la liste en annexe, dans la mesure où ceux-ci compensent un dommage corporel ou la perte d'une fonction qui résulte d'un accident ou d'une maladie professionnelle. Le droit s'étend aux moyens auxiliaires nécessaires et adaptés à l'atteinte à la santé, d'un modèle simple et adéquat, ainsi qu'aux accessoires indispensables et aux adaptations qu'exige l'atteinte à la santé; le nombre et les caractéristiques des moyens auxiliaires doivent répondre tant aux exigences de la vie privée qu'à celles de la vie professionnelle (art. 1 er al. 2 OMAA). L'annexe à l'OMAA comprend notamment les fauteuils roulants sans moteur (ch. 9.01) et les fauteuils roulants à moteur électrique
(ch. 9.02). Les fauteuils roulants à moteur électrique sont accordés aux assurés incapables de marcher, qui ne peuvent utiliser un fauteuil roulant usuel par suite de paralysies ou d'autres infirmités des membres supérieurs et qui ne peuvent se déplacer de façon indépendante qu'en fauteuil roulant mû électriquement
(ch. 9.02 annexe à l'OMAA).

Le droit à ce moyen auxiliaire suppose que l’assuré ait besoin d’un fauteuil roulant, mais qu’il ne soit pas en mesure d’utiliser un fauteuil roulant mécanique et qu’il ne puisse se déplacer de manière autonome qu’avec un fauteuil roulant électrique (arrêt du Tribunal fédéral 9C_543/2014 du 17 novembre 2014 consid. 5). Le droit à un fauteuil roulant électrique est exclu pour les assurés qui peuvent se déplacer seuls en fauteuil roulant manuel, même dans les cas où un système électrique leur serait utile (ATF 140 V 538 consid. 5.2).

Comme pour tout moyen auxiliaire, la prise en charge des frais d'un fauteuil roulant électrique doit répondre aux critères de simplicité et d'adéquation (art. 11 al. 2 LAA; art. 1er al. 2 OMAA). Ces critères, qui sont l'expression du principe de proportionnalité, supposent, d'une part, que la prestation en cause est propre à atteindre le but fixé par la loi et apparaît nécessaire et suffisante à cette fin et, d'autre part, qu'il existe un rapport raisonnable entre le coût et l'utilité du moyen auxiliaire, compte tenu de l'ensemble des circonstances de fait et de droit du cas particulier (ATF 135 I 161 consid. 5.1 et les références; arrêt du Tribunal fédéral 9C_265/2012 du 12 octobre 2012 consid. 3.4; voir également ULRICH MEYER-BLASER, Zum Verhältnismässigkeitsgrundsatz im staatlichen Leistungsrecht, 1985, p. 82 ss et 123 ss).

Dans ce contexte, la jurisprudence a souligné que les buts légaux de réadaptation que sont le « déplacement » et « l'établissement de contacts avec son entourage » font référence aux lieux les plus proches situés hors du domicile dans lesquels s'établissent les contacts sociaux habituels de la population (ATF 135 I 161 consid. 6 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_34/2011 du 13 septembre 2011 consid. 4.3, in SVR 2012 IV n° 20 p. 89).

L'assurance sociale ne peut certes pas faire l'impasse sur l'évolution technologique que connaissent les moyens auxiliaires. Cependant, le droit des assurés à bénéficier des avancées technologiques dans ce domaine s'arrête là où finit l'obligation de l'assurance sociale de remettre un moyen auxiliaire nécessaire d'un modèle simple et adéquat. En effet, celle-ci n'a pas pour mission d'assurer les mesures qui sont les meilleures dans le cas particulier, mais seulement celles qui sont nécessaires et propres à atteindre le but visé (ATF 131 V 167 consid. 4.2).

8.        a. Selon la jurisprudence, l'existence d'une forte déclivité ou d'un emplacement inaccessible à un fauteuil roulant n'est pas en soi un motif suffisant pour admettre le droit à un dispositif de propulsion électrique car, le cas échéant, toute personne dépendante d'un fauteuil roulant pourrait prétendre à un tel dispositif. Une telle extension du droit n'est pas compatible avec le but consistant à accorder un fauteuil roulant électrique aux assurés qui ne peuvent utiliser un fauteuil roulant usuel par suite de paralysies ou d'autres infirmités des membres supérieurs et ne peuvent se déplacer de façon indépendante qu'en fauteuil roulant mû électriquement (ch. 9.02 annexe à l'OMAA). Bien que le ch. 9.02 annexe à l'OMAA indique qu'un assuré a droit à un fauteuil roulant électrique pour se « déplacer de façon indépendante », cela ne signifie pas que l'intéressé doit pouvoir circuler sur tous les terrains et dans tous les lieux possibles. Il ressort en effet du principe de proportionnalité qu'un rapport raisonnable doit exister, dans le cadre de l'assurance-accidents sociale, entre le but visé, le bénéfice supposé apporté par le moyen auxiliaire en question et le coût de celui-ci. Dans ce contexte, les exigences de la vie privée et de la vie professionnelle (art. 1 al. 2 OMAA) font référence aux lieux les plus proches situés hors du domicile dans lesquels s'établissent les contacts sociaux habituels de la population (ATF 135 I 161 consid. 6 ; SVR 2012 IV n°20 p. 89, arrêts du Tribunal fédéral 8C_34/2011 consid. 4.3 ; 9C_265/2012 du 12 octobre 2012 consid. 4.1 ; 8C_699/2013 du 3 juillet 2014 consid. 6.2-6.3). A cet égard, il est un fait notoire que, pour des raisons architecturales, de nombreux lieux, publics ou privés, ne sont pas ou que très difficilement accessibles aux personnes handicapées se déplaçant en chaise roulante (manuelle ou électrique). Si cet état de fait est la source d'inconvénients certains, puisqu'il tend, en comparaison avec la situation des personnes valides, à restreindre l'autonomie et la qualité du contact social des personnes à mobilité réduite, la jurisprudence a également souligné que l'assurance sociale n'avait pas pour mission d'assurer les mesures qui étaient les meilleures dans le cas particulier, mais seulement celles qui étaient nécessaires et propres à atteindre le but visé (ATF 131 V 167 consid. 4.2 et la référence citée ; arrêts du Tribunal fédéral 9C_265/2012 du 12 octobre 2012 consid. 4.2 ; 8C_699/2013 du 3 juillet 2014 consid. 6.2-6.3 ; à propos de l'interdiction de la discrimination à l'égard des personnes handicapées, voir ATF 134 I 105 consid. 5).

b. S'agissant d'un assuré, né en 1954, qui n’exerçait plus d’activité lucrative et était en mesure d'utiliser un fauteuil roulant manuel, sans qu’il doive recourir à l’aide d’une tierce personne, la chambre de céans a confirmé le refus d'octroi d'un dispositif de propulsion électrique, dès lors qu'il pouvait se déplacer hors de son domicile, fréquenter la majorité des lieux publics et, partant, entretenir des contacts sociaux en dehors de son domicile. L'assuré alléguait qu’il souffrait d’une ténosynovite du long chef du biceps et que la force de ses membres supérieurs était notablement réduite (ATAS/742/2019 du 21 août 2019).

9.        Le juge des assurances sociales fonde sa décision, sauf dispositions contraires de la loi, sur les faits qui, faute d’être établis de manière irréfutable, apparaissent comme les plus vraisemblables, c’est-à-dire qui présentent un degré de vraisemblance prépondérante. Il ne suffit donc pas qu’un fait puisse être considéré seulement comme une hypothèse possible. Parmi tous les éléments de fait allégués ou envisageables, le juge doit, le cas échéant, retenir ceux qui lui paraissent les plus probables (ATF 130 III 321 consid. 3.2 et 3.3 ; ATF 126 V 353 consid. 5b ; ATF 125 V 193 consid. 2 et les références). Aussi n’existe-t-il pas, en droit des assurances sociales, un principe selon lequel l’administration ou le juge devrait statuer, dans le doute, en faveur de l’assuré (ATF 126 V 319 consid. 5a).

Si l’administration ou le juge, se fondant sur une appréciation consciencieuse des preuves fournies par les investigations auxquelles ils doivent procéder d’office, sont convaincus que certains faits présentent un degré de vraisemblance prépondérante et que d’autres mesures probatoires ne pourraient plus modifier cette appréciation, il est superflu d’administrer d’autres preuves (appréciation anticipée des preuves ; ATF 122 II 464 consid. 4a; ATF 122 III 219 consid. 3c). Une telle manière de procéder ne viole pas le droit d’être entendu selon l’art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (RS 101 - Cst; SVR 2001 IV n. 10 p. 28 consid. 4b), la jurisprudence rendue sous l’empire de l’art. 4 aCst. étant toujours valable (ATF 124 V 90 consid. 4b ; ATF 122 V 157 consid. 1d).

10.    En l'espèce, l'intimée refuse en premier lieu d'octroyer le moyen auxiliaire requis au motif que les atteintes aux épaules ne sont pas dans un rapport de causalité avec l'accident.

Toutefois, ce qui est décisif n'est pas ce rapport de causalité, mais la question de savoir si le moyen auxiliaire sert à compenser un dommage corporel ou une perte de fonction due à l'accident. Or, le dispositif de propulsion électrique sert assurément in casu à remédier au fait que le recourant n'a plus l'usage de ses jambes. En effet, si le recourant pouvait marcher, il n'aurait pas besoin de ce moyen auxiliaire.

Certes, ce besoin trouve sa cause également dans une atteinte dont l'intimée a considéré, à tort ou à raison, qu'elle n'était pas liée à l'accident. Il convient toutefois de rappeler que la causalité naturelle d'une atteinte à la santé et l'accident est réalisée lorsqu'il y a lieu d'admettre que, sans cet événement accidentel, le dommage ne se serait pas produit du tout ou qu'il ne serait pas survenu de la même manière. Il n'est pas exigé que l'accident soit la cause unique ou immédiate de l'atteinte à la santé et il est suffisant qu'il apparaisse comme la condition sine qua non de cette atteinte. Il doit en aller de même lorsque, du fait d'une atteinte différente sans lien avec l'accident, l'assuré a besoin d'un moyen auxiliaire supplémentaire pour compenser la perte de fonction en rapport avec l'accident, comme en l'occurrence. Et cela ne doit pas seulement valoir dans le cas où la comorbidité justifiant un moyen auxiliaire supplémentaire existe au moment de l'accident, par exemple dans le cas d'une personne sans bras privée de ses jambes du fait de l'accident, mais également lorsque cette comorbidité se produit ultérieurement.

Au demeurant, l'OMAA n'exige pas un rapport de causalité entre les paralysies ou d'autres infirmités des membres supérieurs et l'accident pour le droit à un fauteuil électrique. La seule condition est que l'assuré ne puisse se déplacer de façon indépendante qu'en fauteuil roulant mû électriquement.

À cet égard, il sied de relever que, dans le cas jugé par la chambre de céans dans ATAS/742/2019 du 21 août 2019, la Caisse nationale suisse en cas d'accidents ne s'était pas posé la question du lien de causalité entre la ténosynovite du long chef du biceps et la diminution de force des membres supérieurs, d'une part, et l'accident, d'autre part. D'emblée, elle a admis que l'assuré pourrait prétendre à un dispositif de propulsion électrique pour son fauteuil roulant manuel, pour autant que les conditions de la simplicité et de l'adéquation soient remplies.

Partant, il y a lieu d'admettre que le droit à un dispositif de propulsion électrique n'est pas exclu du fait que les atteintes aux membres supérieurs ne sont pas dans un rapport de causalité avec l'accident.

11.    Cela étant, il sied d'examiner si l'appareil de traction électrique pour fauteuil roulant requis remplit les critères de simplicité et d'adéquation.

Il est incontestable que le recourant est encore en mesure de se déplacer en fauteuil roulant manuel. Toutefois, il souffre d'une arthropathie débutante de l'articulation acromio-claviculaire bilatérale avec lame de liquide dans la bourse sous-acromio-deltoïdienne gauche en lien avec une bursite faisant suspecter un conflit sous-acromial. De ce fait, il allègue que tous les transferts du fauteuil roulant et vers le fauteuil roulant sont douloureux, ce qui paraît tout à fait plausible et est attesté par ses médecins. En comparution personnelle, il a outre déclaré que le seul fait d'avancer en fauteuil roulant manuel lui faisait également mal aux épaules. C'est la raison pour laquelle la Dresse F______ a prescrit à l'assuré un propulseur électrique "Triride" pour réduire les douleurs articulaires à l'épaule droite.

Par ailleurs, le recourant exerce une activité professionnelle en tant qu'avocat indépendant et siège en tant qu'assesseur à la chambre de céans. Il allègue qu'il doit se déplacer à son cabinet et à ses différents rendez-vous en voiture, ce qui implique en moyenne dix transferts par jour. Avec le dispositif à propulsion électrique, il pourrait se déplacer en fauteuil roulant et ainsi éviter les transferts douloureux pour les épaules. Un appareil de traction lui permettrait en outre de mieux s'occuper de ses enfants et de les surveiller en toute sécurité.

En l'occurrence, l'Étude d'avocat du recourant se trouve dans le même quartier que son domicile et, selon les déclarations du recourant lors de son audition, il pourrait s'y rendre en fauteuil roulant manuel. La plupart du temps, il travaille toutefois à son domicile en télétravail. Outre les rendez-vous à son Étude d'avocat, à laquelle il pourrait se rendre en fauteuil roulant manuel, il doit se rendre environ une fois par semaine à la Cour de céans pour siéger en tant que juge assesseur et à une audience par mois aux tribunaux pour les clients de l'Étude. Pour l'exercice de sa profession, les déplacements en voiture sont ainsi limités à un peu plus d'une fois par semaine, ce qui implique environ cinq transferts par semaine.

Quant aux déplacements dans sa vie privée, le dispositif à traction électrique permet d'éviter des déplacements en voiture pour se rendre aux séances de physiothérapie, une fois par semaine, et à d'autres rendez-vous médicaux à Genève, environ une fois par mois. Cela représente encore environ cinq transferts par semaine qui pourraient être évités par l'utilisation d'un fauteuil roulant mû électriquement.

Concernant les commissions, il peut être attendu de la famille qu'elle s'organise pour les faire une fois par semaine. S'agissant des commissions d'appoint, elles peuvent être effectuées en fauteuil roulant manuel, dès lors que le domicile du recourant est proche des commerces.

Le recourant pourrait par ailleurs amener et aller chercher ses enfants à l'école en fauteuil roulant manuel, l'école n'étant pas très loin du domicile et sur un trajet à plat. Cela n'était cependant pas le cas, lorsque les jumeaux fréquentaient la crèche située sur le domaine occupé auparavant par l'Institut Battelle (aujourd'hui par l'Université de Genève et la Haute école de gestion - HEG).

Toutefois, pour sortir avec les enfants au parc, soit pratiquement tous les jours, la traction électrique présente un net avantage, non pas pour limiter les transferts, mais pour pouvoir suivre les enfants, en particulier lorsqu'ils se déplacent avec des engins à roulettes. Avec le dispositif requis, le recourant peut ainsi surveiller ses enfants avec une plus grande sécurité.

En résumé, le dispositif permet au recourant d'éviter dix transferts de et vers la voiture par semaine et d'assurer la sécurité des enfants sur les trajets et dans les parcs.

Il n'est pas contesté que les transferts sont douloureux. Ils doivent donc être évités dans la mesure du possible, d'autant plus qu'il paraît dans le cours normal des choses qu'une surcharge des membres supérieurs ne peut que péjorer les atteintes scapulaires, voire les provoquer, comme cela est attesté par le Dr G______. Aux dix transferts en semaine s'ajoutent, par ailleurs, d'autres transferts inévitables, lorsque le recourant ne peut être aidé, par exemple pour aller aux toilettes. En outre, le recourant est encore jeune, 44 ans en 2022, de sorte que la durée prévisible de son activité professionnelle sera d'une vingtaine d'années, à moins que d'autres atteintes à la santé le contraignent d'y mettre fin. De ce fait, il est particulièrement important d'éviter que les atteintes scapulaires se péjorent et restreignent à terme son autonomie dans une plus ample mesure.

Au vu de la nécessité de ménager les épaules dans la mesure du possible et de surveiller les enfants à l'extérieur, il appert que les circonstances du cas d'espèce doivent être assimilées à une impossibilité de se déplacer en fauteuil roulant manuel de façon autonome pour l'établissement de contacts avec l'entourage dans les lieux les plus proches situés hors du domicile dans lesquels s'établissent les contacts sociaux habituels de la population. En effet, la vie professionnelle du recourant en tant qu'avocat et juge assesseur exige qu'il puisse se déplacer dans les tribunaux qui doivent alors être considérés comme lieux de contacts sociaux habituels. Or, à cause des scapulalgies, ces déplacements, qui impliquent l'usage de la voiture et ainsi des transferts du et vers le fauteuil roulant, doivent être évités. Dans la vie privée du recourant, les parcs constituent aussi des lieux de contacts sociaux habituels lors des sorties avec les enfants. Ne pouvant assurer leur sécurité en se mouvant en fauteuil roulant manuel, il devrait probablement limiter ces sorties. Par ailleurs, tous les assurés en fauteuil roulant ne souffrent pas d'atteintes aux membres supérieurs ni exercent une activité lucrative à 70%, tout en étant encore relativement jeunes, et ayant une famille avec des jumeaux en bas âge.

Le dispositif de propulsion électrique est ainsi propre à atteindre le but fixé par la loi, en permettant au recourant des déplacements professionnels et privés sans péjorer sa santé, ainsi que d'assumer ses responsabilités de père dans les lieux de contact sociaux habituels. Ce moyen auxiliaire est également nécessaire et suffisant. Enfin, son coût, de CHF 8'961.-, ne paraît pas excessif compte tenu de son utilité pour l'exercice et le maintien de sa profession et assumer les charges de la famille.

12.    Cela étant, le recours sera admis et l'intimée condamnée à rembourser au recourant les frais d'un dispositif de propulsion électrique pour fauteuil roulant de type "Triride", conformément au devis du 28 janvier 2021.

13.    Le recourant obtenant entièrement gain de cause, l'intimée sera condamnée à lui verser une indemnité de CHF 1'500.- à titre de dépens.

14.    La procédure est gratuite.

 

 


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

A la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        L'admet.

3.        Condamne l'intimée à rembourser au recourant les frais d'un dispositif de propulsion électrique pour fauteuil roulant de type "Triride" de CHF 8'961.-.

4.        Condamne l'intimée à verser au recourant une indemnité de CHF 1'500.- à titre de dépens.

5.        Dit que la procédure est gratuite.

6.      Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification par la voie du recours en matière civile auprès du Tribunal fédéral (av. du Tribunal fédéral 29, case postale, 1000 Lausanne 14), conformément aux art. 72 ss LTF; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

 

La greffière

 

Marguerite MFEGUE AYMON

 

 

 

 

La présidente

 

Maya CRAMER

 

 

 

 

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral de la santé publique par le greffe le