Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public
ATA/886/2025 du 19.08.2025 ( FORMA ) , PARTIELMNT ADMIS
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE | ||||
| POUVOIR JUDICIAIRE A/2292/2025-FORMA ATA/886/2025 COUR DE JUSTICE Chambre administrative Arrêt du 19 août 2025 |
| ||
dans la cause
A______, enfant mineur, agissant par sa mère B______ recourant
représenté par Me Romanos SKANDAMIS, avocat
contre
DÉPARTEMENT DE L'INSTRUCTION PUBLIQUE, DE LA
FORMATION ET DE LA JEUNESSE intimé
A. a. A______, né le ______2010, est domicilié à C______, dans la commune d’D______. Il vit avec sa mère B______.
b. Il a terminé sa 11e année du cycle d’orientation (ci-après : CO) E______, en section littéraire et scientifique. Il a été promu par tolérance, avec une moyenne générale de 4.4 (4.1 dans les disciplines principales) et une moyenne annuelle de 3.8 en allemand.
c. Le 28 mars 2025, B______ a rempli le formulaire en ligne pour l’inscription de son fils à l’enseignement secondaire II pour la rentrée 2025-2026. Elle a sélectionné l’option spécifique (ci-après : OS) « allemand ». Elle a également coché la case « confirmation », qui indiquait qu’elle avait « bien pris connaissance du caractère définitif des choix indiqués ».
d. Par courriel du 22 mai 2025, B______ a informé la direction générale de l’enseignement secondaire II (ci‑après : DGES-II) du département de l’instruction publique, de la formation et de la jeunesse (ci-après : le DIP) qu’elle avait commis une « énorme erreur » lors de l’inscription de son fils. Elle avait choisi l’OS « allemand », alors que son fils souhaitait être inscrit en « économie et droit ». Elle a invité l’autorité à lui indiquer les démarches à entreprendre pour modifier ce choix.
e. Par courriel du 23 mai 2025, la DGES-II a répondu qu’en vertu de l’art. 14 du règlement relatif à l'admission dans l'enseignement secondaire II du 14 avril 2021 (RAES II ‑ C 1 10.33), les choix d’option étaient définitifs.
f. Par courriel du même jour, B______ a indiqué avoir commis cette erreur car elle tenait réellement à ce que son fils persiste dans l’étude de l’allemand. Comme elle ne l’avait pas trouvé dans la liste des disciplines fondamentales, elle avait pensé à tort qu’elle devait saisir l’allemand comme OS. Il s’avérait que l’allemand en OS n’était enseigné qu’au collège F______. Or, ils habitaient à C______, si bien que ce choix était extrêmement dommageable pour son fils en termes de transport. Elle travaillait à 100% et éduquait seule son fils. Elle avait toujours respecté les contraintes et délais administratifs liés à sa scolarité. Elle souhaitait se voir accorder une dérogation. Son fils était passé de R2 à R3 en décembre et s’était beaucoup appliqué dans le but d’intégrer le collège. Un parcours en option spécifique « allemand » ne serait toutefois pas adapté et pourrait même être défavorable au développement de ses compétences scolaires.
g. Par décision du 28 mai 2025, la DGES-II a informé l’intéressée qu’il n’était pas possible de modifier l’inscription saisie en ligne, et cela afin de garantir un système équitable. Les choix d’option et de langues saisies dans le formulaire avaient un caractère définitif conformément à l’art. 14 RAES-II. Cette indication était également expressément mentionnée dans le formulaire d’inscription par un encarté de rappel comportant une case « confirmation » avec la mention « J’ai bien pris connaissance du caractère définitif des choix indiqués », qui avait dû être cochée avant la validation du formulaire.
B. a. Par acte du 27 juin 2025, B______, agissant pour son fils A______, a formé recours devant la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre cette décision, concluant à son annulation et à son admission en OS « économie et droit » au sein du collège G______ pour l’année 2025-2026, avec la discipline fondamentale « allemand », subsidiairement à son admission en OS « économie et droit », avec la discipline fondamentale « allemand », dans un collège situé à proximité de son domicile. À titre préalable, il a sollicité son audition, ainsi que celle de sa mère, et la mise en œuvre d’une expertise judiciaire.
L’art. 18 al. 1 du règlement relatif à la formation gymnasiale au collège de Genève du 29 juin 2016 (RGymCG – C 1 10.71) conférait un pouvoir d’appréciation au département concernant la possibilité de modifier l’option choisie lors de l’inscription. Toutefois, l’autorité avait décidé de refuser la modification sans faire usage de son pouvoir d’appréciation en la matière et sans tenir compte des particularités du cas d’espèce. Or, en l’occurrence, elle était dyslexique depuis son enfance et éprouvait encore de la difficulté à effectuer certaines tâches qui pouvaient paraître aisées pour des personnes ne souffrant pas de son handicap, tel que le remplissage de formulaires qui présentaient de multiples cases à cocher. Par erreur, elle avait coché la case « allemand ». Son intention était toutefois, conformément à la volonté de son fils, de l’inscrire en OS « économie et droit », tout en continuant l’apprentissage de l’allemand. Prise de confusion en raison des diverses rubriques, elle avait coché la mauvaise case, sans s’en rendre compte. Ce n’était que plus d’un mois plus tard que son fils, qui avait par hasard eu accès au formulaire, s’était rendu compte de sa méprise.
Les conséquences de son erreur étaient particulièrement lourdes. L’OS « allemand » n’était pas adaptée à son profil scolaire et pouvait être préjudiciable pour la suite de son parcours. Son fils avait consenti des efforts considérables pour améliorer ses résultats scolaires et se préparer à la maturité gymnasiale. Le fait de l’empêcher de suivre l’enseignement pour lequel il s’était préparé pourrait conduire à une perte de motivation, voire à un décrochage scolaire. S’ajoutait à cela que le collège F______ était le seul à proposer l’allemand en OS. Or, le domicile familial se situait sur la commune d’D______, à une heure de route du collège F______. Par ailleurs, en parallèle de ses études, il était capitaine de l’équipe junior de football de la commune et avait une place au sein de l’équipe du Rugby club d’D______. Il serait contraint de renoncer à ces activités compte tenu des temps de trajets pour se rendre au collège. Enfin, son inscription au collège F______ le priverait de son cercle social, dans la mesure où la majorité de ses amis étaient inscrits au collège G______.
La position de l’autorité selon laquelle toute modification ultérieure serait impossible, alors même que le système prévoyait nécessairement des ajustements en fonction de l’évolution des résultats finaux de l’année scolaire en cours apparaissait d’autant plus injustifiable. On peinait enfin à voir en quoi le principe de l’égalité de traitement serait compromis par la simple correction d’une erreur manifeste de saisie, qui avait été signalée dès sa découverte et avant que la répartition des élèves ne soit effectuée. Une telle rigidité apparaissait particulièrement nuisible dans le cas d’espèce sans pour autant servir un quelconque objectif d’intérêt général.
La décision avait été rendue en violation de l’art. 18 RGymCE, du principe de la proportionnalité et de l’interdiction du formalisme excessif.
Elle a produit un courrier manuscrit de son fils, daté du 29 juin 2025, par lequel il a indiqué que malgré des difficultés au deuxième semestre à la suite de son passage de R2 à R3, il avait travaillé sérieusement et avec application. Il avait dit à sa mère qu’il souhaitait être inscrit en « économie et droit ». Sa mère avait toutefois choisi « allemand » en OS. Il avait donc été inscrit au collège F______, qui était situé vers la gare, ce qui « compliquait les choses » car il habitait à C______ et souhaitait aller au collège G______. Or, le temps consacré au transport serait préjudiciable à ses activités sportives. L’OS « allemand » ne lui convenait pas du tout car il n’avait « jamais été bon » et n’appréciait pas cette matière. Enfin, son passage au collège F______ l’empêcherait de voir ses amis, qui allaient en majorité au collège G______.
Elle a également produit le bulletin scolaire de son fils, le formulaire d’« inscription et choix d’options à l’enseignement secondaire II » daté du 28 mars 2025, ainsi que la répartition des options dans les collèges pour la rentrée 2025, d’où il ressort que l’OS « allemand » n’est dispensée qu’au collège F______.
Elle n’était, en revanche, pas au bénéfice d’un certificat médical attestant de sa dyslexie, celle-ci n’ayant pas été diagnostiquée dans son enfance, raison pour laquelle elle sollicitait une expertise judiciaire.
b. Par réponse du 14 juillet 2025, la DGES-II a conclu au rejet du recours.
Le choix d’option et de profil effectué lors des inscriptions était définitif. Ainsi, un élève ne pouvait pas modifier l’option ou le profil choisi par la suite. Toutefois, la possibilité était offerte à l’élève de changer une fois qu’il était admis dans la filière au moment du passage d’une année scolaire à l’autre. Il était, au demeurant, clairement spécifié dans le formulaire d’inscription que le choix d’option était définitif. Pour pouvoir valider le formulaire, la mère de l’élève avait dû cocher la case attestant qu’elle avait pris connaissance du caractère définitif des choix indiqués. Elle avait donc pris connaissance de cette règle, et l’avait acceptée.
Il était possible que le trouble dont elle souffrait ait pu impacter son choix. Il ne pouvait toutefois justifier l’accord d’une dérogation relatif à un changement de profil. Le choix d’option permettait de définir le profil des élèves, étant précisé que dès ce moment, le profil scolaire de chaque élève devenait définitif et l’affectation à un établissement se faisait à ce moment en fonction de l’équilibre des effectifs des établissements. Ainsi, par respect du principe d’égalité de traitement entre les élèves, il n’était pas possible d’accorder le changement de profil.
Une demande de changement d’établissement constituait une mesure d’organisation interne qui ne pouvait pas faire l’objet d’un recours.
c. Le 16 juillet 2025, la chambre de céans a reçu une attestation de la supérieure hiérarchique de B______ confirmant qu’elle pouvait être sujette à des troubles dyslexiques en période de surcharge. Cela n’avait pas d’impact sur son travail et se résolvait par la relecture des écrits.
d. Lors d'une audience de comparution personnelle tenue le 6 août 2025, A______ a exposé qu'après avoir assisté dans le cours de sa scolarité à diverses séances d'information sur les options possibles, il avait décidé de choisir l'OS économie et droit, qui l'intéressait. Il en avait parlé avec sa mère, qui lui avait donné son accord. Celle-ci souhaitait par ailleurs qu'il poursuive l'étude de l'allemand comme deuxième langue nationale. C'était sa mère qui s'était occupée de l'inscription et elle ne lui en avait plus parlé avant le début des vacances de Pâques, pendant lesquelles il était absent. Environ un mois plus tard, il lui avait demandé si elle l'avait bien inscrit, ce qu'elle lui avait confirmé en lui montrant le formulaire. Il avait compris de son attitude qu'elle « pensait manifestement avoir tout fait juste ». Pour l'OS économie et droit, elle pensait recevoir par la suite, en même temps qu'une confirmation d'inscription de l'établissement scolaire, une feuille de choix lui permettant de sélectionner cette OS. Il avait toutefois constaté, en prenant connaissance du formulaire rempli par sa mère, que celle-ci l'avait inscrit en OS allemand.
Les transports entre son domicile et le collège F______ étaient problématiques, les trajets représentant deux heures par jour dans le meilleur des cas.
B______ a confirmé qu'il avait été convenu avec A______ que celui-ci choisisse l'OS économie et droit, qui l'intéressait, et qu'il continue à étudier l'allemand en seconde langue, ce à quoi elle tenait. Elle avait procédé seule à l'inscription, en ligne. Elle avait dû s'y reprendre à plusieurs reprises, car elle était régulièrement déconnectée après un certain temps. Elle était un peu stressée lorsqu'elle était arrivée à la page de choix des options. Elle avait cherché l'allemand dans les choix proposés sous « langue 2 » comme discipline fondamentale (ci-après : DF) mais ne l'avait pas trouvé. Elle avait donc coché la seule case mentionnant l'allemand. Elle n'avait ensuite pas réussi à cocher l'OS économie et droit mais s'était dit que cela viendrait plus tard. Elle n'avait pas tout de suite montré le formulaire à A______.
Elle avait dû refaire le formulaire à plusieurs reprises. Avant de l'envoyer, elle l'avait relu à plusieurs reprises également, et avait pris connaissance des mises en garde relatives au caractère définitif du choix. Elle n'avait pas eu le réflexe de demander à la centrale du DIP de l'aider. Elle exerçait la profession de conseillère académique. Elle souffrait d'une dyslexie qui n'avait pas été diagnostiquée pendant sa scolarité.
La représentante du DIP a expliqué que l'inscription à l'enseignement secondaire II ne pouvait se faire qu'en ligne. Des séances étaient cependant organisées, l'une pour la rive gauche et l'autre pour la rive droite, pour répondre aux questions des parents. Il existait par ailleurs une help-line pour venir en aide aux utilisateurs qui seraient confrontés à des difficultés techniques. Enfin, pendant la période des inscriptions, il était toujours possible d'appeler la DGES-II.
Une fois le formulaire rempli, un accusé de réception était adressé aux parents.
La dernière semaine de juin, soit après que les résultats scolaires définitifs étaient connus, les parents étaient informés de l'acceptation ou non des demandes d'inscription. L'attribution des élèves à un établissement scolaire intervenait ensuite dans le courant de l'été, après prise en considération de nombreux facteurs, dans le cadre d'un « lissage des effectifs ». Les établissements désignés adressaient ensuite directement aux parents une convocation pour la rentrée scolaire.
La liste des OS disponibles dans les divers établissements pouvait être consultée sur le site du DIP dès les mois de septembre/octobre de l'année précédant la rentrée concernée.
Lors du remplissage en ligne du formulaire d'inscription, le choix d'une OS conditionnait les choix disponibles dans la suite du formulaire. La représentante du DIP ne pouvait toutefois indiquer si, avant qu'une quelconque case ne soit cochée, l'allemand apparaissait dans les disciplines fondamentales pouvant être choisies.
e. Sur demande du juge délégué, le DIP a encore indiqué à la chambre administrative, par courrier du 7 août 2025, avoir reçu pour la rentrée 2025 5'139 demandes d'inscription pour les filières généralistes (soit le collège et l'ECG), le CFP commerce et le CFPP, dont 2'796 pour le collège et 1'403 pour l'ECG. Le nombre de demandes de modification d'inscriptions ne pouvait être déterminé, dès lors qu'elles pouvaient être formées par courriel, courrier ou téléphone et être adressées aux établissements ou administrations du collège ou de l'ECG. Ces demandes ne faisaient pas toutes l'objet d'une décision dès lors que certaines familles se contentaient d'une réponse orale ou par courriel les informant de l'impossibilité d'une modification.
La DGES II ne dérogeait jamais à l'application de l'art. 14 RAES-II.
f. Sur quoi, la cause a été gardée à juger, ce dont les parties ont été informées.
1. Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ ‑ E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 ‑ LPA ‑ E 5 10 ; art. 40 du règlement de l'enseignement secondaire II et tertiaire B du 29 juin 2016 - REST - C 1 10.31).
2. Le recourant conclut préalablement à son audition, à celle de sa mère et à la mise en œuvre d’une expertise judiciaire.
2.1 Tel qu’il est garanti par l’art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), le droit d’être entendu comprend notamment le droit pour l’intéressé d’offrir des preuves pertinentes, de prendre connaissance du dossier, d’obtenir qu’il soit donné suite à ses offres de preuves pertinentes, de participer à l’administration des preuves essentielles ou à tout le moins de s’exprimer sur son résultat, lorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre (ATF 145 I 73 consid. 7.2.2.1 ; 142 III 48 consid. 4.1.1). Le droit d’être entendu comprend aussi le droit pour la personne concernée de s’expliquer avant qu’une décision ne soit prise à son détriment et celui d’avoir accès au dossier. En tant que droit de participation, le droit d’être entendu englobe donc tous les droits qui doivent être attribués à une partie pour qu’elle puisse faire valoir efficacement son point de vue dans une procédure (ATF 148 II 73 consid. 7.3.1 ; 132 II 485 consid. 3.2).
Les garanties minimales en matière de droit d’être entendu découlant de l’art. 29 al. 2 Cst. n’impliquent pas une audition personnelle de l’intéressé, celui-ci devant simplement disposer d'une occasion de se déterminer sur les éléments propres à influer sur l’issue de la cause (art. 41 LPA ; ATF 140 I 68 consid. 9.6 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_1003/2017 du 21 juin 2018 consid. 3 et les arrêts cités ; ATA/723/2018 du 10 juillet 2018 et les arrêts cités).
L'expertise représente un moyen de preuve (art. 20 al. 2 let. e et 38ss LPA) ordonné lorsque l'établissement ou l'appréciation de faits pertinents requièrent des connaissances et compétences spécialisées - par exemple techniques, médicales, scientifiques, comptables - que l'administration ou le juge ne possèdent pas (ATA/133/2020 du 11 février 2020 ; ATA/592/2017 du 23 mai 2017 ; ATA/414/2017 du 11 avril 2017).
2.2 En l'espèce, la chambre administrative a procédé à l'audition du recourant et de sa mère.
Une expertise judiciaire est par ailleurs requise aux fins d'établir la dyslexie de cette dernière et son impact au quotidien. Le recourant a toutefois eu l’occasion de s’exprimer sur ce point et on ne voit pas en quoi son audition, ou celle de sa mère, apporterait des éléments supplémentaires à ceux déjà invoqués dans ses écritures. Il a également pu produire toutes pièces utiles, en particulier une attestation de l’employeuse de sa mère confirmant qu’elle pouvait être sujette à des troubles dyslexiques. Ce point ne nécessite, quoi qu’il en soit, pas d’instruction complémentaire pour les motifs qui vont suivre. Pour le reste, le dossier contient toutes les pièces utiles à sa résolution. La chambre de céans ne donnera donc pas suite aux demandes d’instruction.
3. Est litigieux le refus de l’autorité intimée de modifier le choix de l’option spécifique lors de l’inscription au collège du recourant pour la rentrée 2025-2026.
3.1 Selon l'art. 10 al. 1 de la loi sur l'instruction publique du 17 septembre 2015 (LIP - C 1 10), l'école publique a pour buts, dans le respect de la personnalité de chacun, notamment, de donner à chaque élève le moyen d'acquérir les meilleures connaissances et compétences dans la perspective de ses activités futures et de chercher à susciter chez lui le désir permanent d'apprendre et de se former (let. a), d'aider chaque élève à développer de manière équilibrée sa personnalité, sa créativité ainsi que ses aptitudes intellectuelles, manuelles, physiques et artistiques (let. b), et de veiller à respecter, dans la mesure des conditions requises, les choix de formation des élèves (let. c).
3.2 L'art. 85 al. 1 LIP prévoit que, pour le degré secondaire II, les conditions d'admission, de promotion et d'obtention des titres sont fixées par voie réglementaire. Le REST est applicable aux élèves et apprentis inscrits en formation gymnasiale (art. 1 let. c REST).
3.3 Le RGymCG fixe les dispositions régissant l’admission et la promotion des élèves, les conditions d’examens et d’obtention des titres, en précisant, le cas échéant, celles qui sont contenues dans d’autres lois et règlements (art. 1 al. 1 RGymCG). La formation gymnasiale est une formation de culture générale qui donne notamment accès aux études universitaires (al. 3). Elle fait suite à la 11e année de la scolarité obligatoire et comprend quatre années numérotées de 1 à 4 (al. 4).
Selon l’art. 4 RGymCG, le collège de Genève dispense un enseignement dans les disciplines réparties en disciplines fondamentales, options spécifiques, options complémentaires, disciplines obligatoires et disciplines particulières (al. 1). Les disciplines fondamentales proposées sont les suivantes : français, allemand, italien, anglais, latin, mathématiques (niveau normal et avancé), physique, biologie, chimie, histoire, géographie, philosophie, arts visuels, musique (al. 2). Les options spécifiques pouvant être proposées sont les suivantes : grec, latin, allemand, italien, anglais, espagnol, physique et applications des mathématiques, biologie et chimie, économie et droit, arts visuels, musique (al. 3).
Le chapitre III du règlement règle les modifications de niveau ou d’option, d’abandon d’option et abandon de disciplines aux art. 18ss RGymCG.
Selon l’art. 18 RGymCG, certaines modifications peuvent être apportées au choix initial du profil gymnasial, sous réserve d'éventuels rattrapages et examens. Ces changements ne peuvent intervenir que lors d'une inscription, au moment du passage d’une année scolaire à l'autre.
Les types de modification sont définis à l’art. 19 RGymCG : modifications de niveaux, de disciplines ou d’option spécifique. En cas de modification d’option spécifique, l’art. 19 RGymCG prévoit qu’en cas de modification de l’option spécifique, l’exigence d’une note égale ou supérieure à 4,0 dans l’option spécifique abandonnée est supprimée pour la promotion dans l’année suivante. Les autres conditions nécessaires pour la promotion restent valables (al. 6). La redéfinition du profil gymnasial de l’élève reste subordonnée aux règles générales définies à l’art. 18 RGymCG (al. 7). Une dérogation au sens de l’art. 30 al. 1 REST peut être accordée à l'élève (al. 8). Selon cette disposition, intitulée promotion par dérogation, la direction d’un établissement, sur proposition de la conférence des maîtres de la classe ou du groupe ou, dans des cas exceptionnels, de sa propre initiative, peut accorder la promotion à des élèves qui ne remplissent pas complètement les conditions de promotion et qui semblent présenter les aptitudes nécessaires pour suivre l’enseignement de l’année suivante avec succès.
3.4 Les conditions d'admission sont régies par le RAES-II (art. 12 RGymCG). Selon l’art. 14 RAES-II, le choix d’option et de profil effectué lors des inscriptions est définitif.
3.5 Le principe d'égalité de traitement, consacré à l'art. 8 al. 1 Cst., s'adresse tant au législateur (égalité dans la loi) qu'aux autorités administratives et judiciaires (égalité dans l'application de la loi ou égalité devant la loi), qui sont tenus de traiter de la même manière des situations semblables et de manière différente celles qui ne le sont pas (ATF 139 V 331 consid. 4.3 ; 137 V 334 consid. 6.2.1).
Une décision ou un arrêté viole le principe d'égalité consacré à l'art. 8 al. 1 Cst. lorsqu'il établit des distinctions juridiques qui ne se justifient par aucun motif raisonnable au regard de la situation de fait à réglementer ou qu'il omet de faire des distinctions qui s'imposent au vu des circonstances. Il faut que le traitement différent ou semblable injustifié se rapporte à une situation de fait importante.
3.6 Le principe de la proportionnalité (art. 5 et 36 al. 3 Cst.) exige qu'une mesure restrictive soit apte à produire les résultats escomptés (règle de l'aptitude) et que ceux-ci ne puissent être atteints par une mesure moins incisive (règle de la nécessité) ; en outre, il interdit toute limitation allant au-delà du but visé et il exige un rapport raisonnable entre celui-ci et les intérêts publics ou privés compromis (principe de la proportionnalité au sens étroit, impliquant une pesée des intérêts ; ATF 146 I 157 consid. 5.4 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_92/2023 du 12 février 2024 consid. 4.3).
3.7 La loi s'interprète en premier lieu selon sa lettre (interprétation littérale). Si le texte n'est pas absolument clair, si plusieurs interprétations sont possibles, il convient de rechercher quelle est la véritable portée de la norme, en la dégageant de tous les éléments à considérer, soit notamment des travaux préparatoires (interprétation historique), du but de la règle, de son esprit, ainsi que des valeurs sur lesquelles elle repose, singulièrement de l'intérêt protégé (interprétation téléologique) ou encore de sa relation avec d'autres dispositions légales (interprétation systématique). Le Tribunal fédéral ne privilégie aucune méthode d'interprétation, mais s'inspire d'un pluralisme pragmatique pour rechercher le sens véritable de la norme; il ne se fonde sur la compréhension littérale du texte que s'il en découle sans ambiguïté une solution matériellement juste (ATF 150 V 12 consid. 4.1 et les références citées ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_383/2023 du 20 février 2025 consid. 5.2). La chambre de céans suit la même approche (ATA/298/2025 du 25 mars 2025 consid. 6.3 ; ATA/1394/2024 du 28 novembre 2024 consid. 3.8 et l'arrêt cité).
4. Dans le cas d'espèce, il doit être retenu en fait que, au terme de ses réflexions et des discussions qu'il a eues avec sa mère, celle-ci et le recourant ont décidé de l'inscrire à l'OS économie et droit et de choisir l'allemand comme deuxième langue nationale (DF 2). Il est également établi que la volonté de la mère du recourant, lorsqu'elle a complété le formulaire d'inscription en ligne, était de transmettre fidèlement ce choix au DIP. Elle s'est toutefois trouvée confrontée à des difficultés d'ordre technique et de compréhension qui ont eu pour conséquence que le choix communiqué ne correspondait pas à celui, commun, du recourant et de sa mère. En d'autres termes, la communication initiale du choix fait par l'élève et sa mère – qui est toujours demeuré le même – était viciée.
Il s'agit donc de déterminer si, comme le soutient l'autorité intimée, l'art. 14 RAES-II fait obstacle à la correction ultérieure de ce vice.
Le texte de cette disposition ne donne pas de réponse univoque à cette question : il pose certes le principe de l'intangibilité du choix effectué lors des inscriptions mais ne précise pas ce qu'il en est lorsque, comme en l'espèce, le choix lui-même n'a pas changé mais qu'une erreur est survenue lors de sa communication.
Le but de l'art. 14 RAES-II consiste à permettre au département de connaître à un stade relativement précoce les intentions des personnes susceptibles de commencer une filière de l'enseignement secondaire II l'année scolaire suivante. À cette fin, il convient d'éviter que les personnes inscrites – soit quelque 5'300 élèves potentiels – reviennent sur les choix effectués. Les opérations de planification en vue de la prise en charge des nouveaux élèves, auxquels s'ajoutent les élèves redoublant et ceux changeant d'orientation, sont en effet d'une grande complexité et ne sauraient s'accommoder d'incertitudes sur les choix des élèves. Il existe donc un intérêt public important au respect du caractère définitif des inscriptions.
Il convient cela étant également de tenir compte, dans l'interprétation de l'art. 14 RAES-II, de l'intérêt au développement harmonieux des élèves compte tenu de leurs aptitudes et personnalité et, singulièrement, au respect de leur choix de formation, expressément protégé par l'art. 10 al. 1 let. c LIP. Il en résulte que, si l'art. 14 RAES-II peut certes être compris comme faisant en principe obstacle à une modification des choix d'option après l'inscription, il n'en va pas de même lorsque l'inscription ne correspond d'emblée pas au choix de l'élève et de ses parents au moment de ladite inscription.
Une telle interprétation s'impose d'autant plus dans le cas d'espèce au regard tant des circonstances dans lesquelles l'erreur de transmission est survenue que des conséquences qu'un refus de la corriger pourraient avoir pour le recourant.
S'il faut en effet admettre que la responsabilité principale de l'erreur incombe à la mère du recourant, qui, bien que confrontée à des difficultés techniques et s'avouant « stressée », a renoncé à demander de l'aide soit à un tiers soit à l'autorité intimée, il faut lui concéder que les modalités et formulaire d'inscription n'étaient pas, notamment pour des personnes non rompues à l'exercice consistant à remplir des formulaires en ligne, de nature à minimiser le risque d'erreurs du type s'étant effectivement produit. La mère du recourant a ainsi exposé que, voulant choisir l'allemand comme seconde langue nationale (DF 2), elle avait vainement cherché une mention de cette langue sous la rubrique DF 2 avant de se résoudre à cocher la seule case intitulée « allemand », qui se trouvait sous la rubrique OS. Ces explications n'ont pas été contredites par le DIP, dont la représentante lors de l'audience a confirmé que les choix d'OS conditionnaient ceux proposés dans la rubrique DF 2. Il apparaît ainsi vraisemblable que, si la mère du recourant avait pu commencer par choisir, sous la rubrique DF 2, la seconde langue nationale correspondant à son choix, elle aurait ensuite pu cocher la case « économie et droit » dans la rubrique OS.
Par ailleurs, l'absence de correction de l'erreur intervenue pourrait avoir des conséquences préjudiciables pour la suite de la scolarité du recourant. Outre le fait qu'il ne pourrait pas suivre l'enseignement d'économie et de droit pour lequel il a manifesté son intérêt, il se verrait contraint de suivre pendant au moins une année, dans le cadre d'une option spécifique, un enseignement relatif à une discipline – l'allemand – pour laquelle, à en juger par ses résultats de onzième année et ses explications, il n'a ni intérêt ni appétence. La possibilité de revenir à ses choix initiaux après la première année du collège n'est pas dénuée de caractère aléatoire dans la mesure où cela supposerait la réussite de cette année alors que le recourant, promu par tolérance et donc devant fournir des efforts accrus lors de la première année de collège, serait soumis à des exigences élevées en allemand.
Il doit encore être relevé que le principe de l'égalité de traitement ne s'oppose pas à la rectification de l'inscription du recourant. La situation de ce dernier, dont le choix d'options et de profil n'a pas changé mais dont l'inscription était erronée, doit en effet être distinguée de celles dans lesquelles l'inscription reflétait fidèlement les choix d'un élève, mais que ces choix se sont ensuite modifiés.
Le recours sera ainsi partiellement admis compte tenu des circonstances très particulières du cas d’espèce, et le DIP invité à rectifier l'inscription du recourant en ce sens que son choix d'OS est « économie et droit » et son choix de deuxième langue nationale (DF 2) l'allemand. Les conclusions du recourant relatives à l'établissement auquel il sera attribué sont en revanche exorbitantes à l'objet du litige, limité à la rectification de l'inscription.
5. Vu l’issue du litige, aucun émolument ne sera perçu (art. 87 al. 1 LPA), et une indemnité de procédure partielle de CHF 500.- sera allouée à la mère du recourant, à la charge de l'état de Genève (art. 87 al. 2 LPA).
* * * * *
PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE
à la forme :
déclare recevable le recours interjeté le 27 juin 2025 par A______ , agissant par sa mère B______ contre la décision de la direction générale de l’enseignement secondaire II du 28 mai 2025 ;
au fond :
l'admet partiellement ;
invite le département de l'instruction publique, de la formation et de la jeunesse à rectifier les choix d'option et le profil de A______, dans le sens des considérants ;
dit qu'il n'est pas perçu d'émolument ;
alloue à B______, à la charge de l'état de Genève, une indemnité de procédure de CHF 500.- ;
dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;
communique le présent arrêt à Me Romanos SKANDAMIS, avocat du recourant, ainsi qu'au département de l'instruction publique, de la formation et de la jeunesse.
Siégeant : Francine PAYOT ZEN-RUFFINEN, présidente, Florence KRAUSKOPF, Patrick CHENAUX, Eleanor McGREGOR, Michèle PERNET, juges.
Au nom de la chambre administrative :
le greffier-juriste :
F. SCHEFFRE
|
| la présidente siégeant :
F. PAYOT ZEN-RUFFINEN |
Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.
Genève, le
|
| la greffière :
|