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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2096/2025

ATA/753/2025 du 08.07.2025 sur JTAPI/675/2025 ( MC ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2096/2025-MC ATA/753/2025

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 8 juillet 2025

1ère section

 

dans la cause

 

A______ recourant
représenté par Me Déborah GREAUME, avocate

contre

COMMISSAIRE DE POLICE intimé

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 20 juin 2025 (JTAPI/675/2025)


EN FAIT

A. a. A______ - aussi connu sous l’alias B______, né le ______ 1998 – de nationalité algérienne, né le ______ 1999, serait, selon ses dires, entré en Suisse en 2022.

b. Il est démuni de documents d’identité.

c. Il a été condamné par ordonnance pénale du 28 juillet 2023 par le Ministère public genevois (ci‑après : MP) pour tentative de vol (art. 22 et 139 al. 1 du Code pénal suisse du 21 décembre 1937 [CP - RS 311.0]).

d. Le même jour, il a fait l’objet d’une interdiction de pénétrer dans le canton de Genève pour une durée de douze mois.

Il a été condamné, pénalement, à quatre reprises pour non-respect de ladite interdiction (art. 119 de la loi fédérale sur les étrangers et l'intégration du 16 décembre 2005 [LEI - RS 142.20]).

e. Il a été incarcéré à la prison de Champ-Dollon le 28 février 2024 pour purger divers écrous.

f. Lors de son audition par la police le 29 février 2024, il a expliqué faire des allers‑retours entre la Suisse et la France. Il était revenu à Genève trois jours auparavant dans le but de récupérer son dossier médical. Il dormait dans la rue et dépendait de l'aide financière de personnes tierces pour subvenir à ses besoins. Il avait une fille de 2 ans, qui vivait avec sa mère, en France.

B. a. Par décision du 15 mars 2024, l'office cantonal de la population et des migrations (ci-après: OCPM) a prononcé le renvoi de Suisse et de l'espace Schengen de l'intéressé.

b. Le 13 septembre 2024, le Secrétariat d'État aux migrations (ci-après: SEM) a introduit auprès du Consulat général d'Algérie en Suisse une demande d'identification pour A______ et d'émission d'un laissez-passer.

c. Le 24 septembre 2024, dans le cadre d'un entretien de départ avec la Brigade migration et retour, l'intéressé a expliqué qu'il était diabétique et qu'il voulait se rendre en Espagne pour rejoindre la mère de son enfant même s'il était interdit de l'espace Schengen et n'était pas en possession d'un document de voyage valable.

d. Le 16 juin 2025, à sa libération de détention pénale, A______ a été remis aux services de police.

e. Le même jour, à 14h20, le commissaire de police a émis un ordre de mise en détention administrative à l'encontre du précité pour une durée de quatre mois.

Cette mesure se fondait sur sa condamnation pour vol et pour violation d'une interdiction de pénétrer dans une zone qui lui avait été interdite. La date du counseling n'était pas encore confirmée, les places octroyées au canton de Genève par le SEM (deux ou trois) pour les rendez-vous mensuels avec le consul d'Algérie ayant systématiquement été occupées jusqu'au mois de mai 2025 par des citoyens algériens déjà en détention administrative dans les centres de Favra et Frambois, ou faisant l'objet de « lourdes expulsions judiciaires ». L'intéressé avait toutefois été annoncé comme un candidat prioritaire à conduire au consulat. Une fois la présentation de l'intéressé au consul algérien effectuée, les services de police pourraient procéder à la réservation d'un vol en sa faveur, à moins qu'il se déclare rapidement, par écrit, volontaire au retour en Algérie et prenne contact avec le consulat algérien au téléphone. Dans ce dernier cas, un vol volontaire/DEPU pourrait être réservé avec un délai de trois semaines.

f. Lors de son audition devant le commissaire de police, A______ a déclaré s’opposer à son renvoi en Algérie.

g. Lors de son audition devant le Tribunal administratif de première instance (ci‑après TAPI), le 19 juin 2025, A______ a indiqué avoir subi deux opérations, une à la main et une colorectale durant sa détention pénale. Il souffrait en sus d’un diabète de type 1. Un retour en Algérie lui paraissait dès lors inenvisageable. Il avait déjà bénéficié de traitements médicaux à Almeria, Barcelone et Lyon. Il n’avait pas de titre de séjour en Espagne, mais comptait entreprendre des démarches à cette fin. S’il était remis en liberté, il se rendrait immédiatement à Barcelone où vivait son épouse d’un mariage religieux, leur enfant et une tante. Ses parents vivaient en Algérie, mais sa mère était décédée en 2012 et son père trois mois auparavant alors qu’il était en détention à Genève. Il n’avait en Algérie plus qu’une sœur qui vivait dans une grande ville à l’extérieur d’Alger. En Espagne, il aurait du travail dans le maraîchage ou comme poseur de placoplâtre.

La représentante du commissaire de police a précisé que la date de l’entretien consulaire était fixée au 26 juin 2025 et a déposé un échange de courriels y relatif.

h. Par jugement du 20 juin 2025, le TAPI a confirmé l’ordre de mise en détention du 16 juin 2025 pour une durée de quatre mois, la durée n’apparaissant pas disproportionnée eu égard aux démarches qu'il restait encore à effectuer avant qu'un vol ne puisse effectivement avoir lieu à destination de l'Algérie.

Les problèmes de santé de l’intéressé, attestés, ne contre-indiquaient pas a priori l'exécution de son renvoi par avion. Cette question devrait encore être examinée le moment venu par l'instance compétente. Ils ne faisaient pas non plus apparaître son renvoi comme inexigible au sens de l'art. 83 LEI. Enfin, aucun élément du dossier ne permettait de vérifier que le précité avait en Espagne une compagne et un enfant. En tout état, A______ n’y disposait d'aucun titre de séjour, de sorte que la question d'une réadmission dans ce pays ne se posait pas en l'état.

C. a. Par acte du 30 juin 2025, A______ a interjeté recours devant la chambre administrative de la cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre ce jugement. Il a conclu à son annulation, à sa libération immédiate et à son admission provisoire. Subsidiairement, il devait être immédiatement libéré et la cause renvoyée à l’OCPM pour instruction sur son état de santé et nouvelle décision. Préalablement, il devait être mis au bénéfice de l’assistance juridique.

Il souffrait d’un diabète de type 1 instable, de douleurs anales nécessitant une intervention chirurgicale à venir et son état de santé imposait un suivi médical régulier, des traitements lourds (notamment de l’insuline plusieurs fois par jour) et même des hospitalisations régulières. Il était de surcroît indigent et n’avait plus de famille en Algérie sauf une sœur avec laquelle il n’avait plus de contact. Une prise en charge adéquate ne pouvait être garantie dans son pays d’origine, en particulier en raison du manque d’accès aux outils de surveillance du glucose et des ruptures récurrentes et de longue durée dans l’approvisionnement en médicaments. Il existait dès lors un risque médical concret de dégradation très rapide de son état de santé au point de conduire de manière certaine à la mise en danger concrète de sa vie ou à une atteinte sérieuse, durable et notamment plus grave de son intégrité physique. Preuve en était son hospitalisation en soins aigus du 28 février au 8 mars 2024 au motif qu’il n’avait plus d’insuline à sa disposition.

Contrairement à ce qu’avait retenu le TAPI, son renvoi était impossible et inexigible.

b. Le commissaire de police a conclu au rejet du recours. Il n’était pas contesté que le recourant était atteint dans sa santé. Il ressortait des pièces versées à la procédure que les soins et, au besoin, l’intervention chirurgicale, nécessités par le recourant pouvaient être obtenus par celui-ci dans son pays d’origine. De surcroît, l’exécution du renvoi ne pourrait avoir lieu qu’après une analyse médicale effectuée par l’autorité compétente.

c. Dans sa réplique, le recourant a rappelé que les problèmes de santé, sa situation personnelle et l’absence de liens familiaux en Algérie étaient des obstacles à l’exécution de son renvoi. Contrairement à ce qu’avait soutenu le commissaire, le centre hospitalo-universitaire Moustapha d’Alger n’indiquait pas être à même de traiter le diabète atypique LADA. L’accès aux soins n’était accordé aux personnes désargentées que s’ils étaient titulaires d’une carte attestant de leur qualité de démuni, non assuré socialement. Or, il ne la possédait pas et ne serait pas à même de se la procurer compte tenu de sa situation familiale soit en l’absence de famille, d’endroit pour vivre et donc sans attestation de résidence possible ni aucun moyen financier dans son pays d’origine. De surcroît il lui faudrait attendre des mois avant de l’obtenir ce qui le placerait concrètement dans une situation de risque médical certain. Enfin, le consulting médical versé à la procédure par le commissaire de police mentionnait, d’une part, que le système de gestion de l’insuline comme Omnipod et le système de mesure du glucose Freestyle n’étaient pas disponibles en Algérie. D’autre part, l’ « analyse pays » du SEM n’était pas en mesure de juger si les traitements et médicaments disponibles étaient suffisants d’un point de vue médical. Il produisait un extrait de la Revue médicale suisse traitant des diabètes atypiques, dont le LADA (Latent Autoimmune Diabetes in Adults), défini comme une forme auto immune tardive du diabète, souvent initialement traitée comme un diabète de type 2 mais évoluant vers l’insulinodépendance.

d. Sur ce, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

e. Le contenu des pièces médicales produites sera détaillé en tant que de besoin dans la partie en droit du présent arrêt.

EN DROIT

1.             Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ ‑ E 2 05 ; art. 10 al. 1 de la loi d'application de la loi fédérale sur les étrangers du 16 juin 1988 - LaLEtr - F 2 10).

2.             Selon l'art. 10 al. 2 LaLEtr - F 2 10, la chambre administrative doit statuer dans les dix jours qui suivent sa saisine. Ayant reçu le recours le 1er juillet 2025 et statuant ce jour, elle respecte ce délai.

3.             Le recourant ne conteste pas que les conditions d'une mise en détention administrative sont remplies, ce qu’il convient néanmoins d’examiner brièvement.

3.1 La détention administrative porte une atteinte grave à la liberté personnelle et ne peut être ordonnée que dans le respect de l'art. 5 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 (CEDH ‑ RS 0.101; ATF 135 II 105 consid. 2.2.1) et de l'art. 31 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), ce qui suppose en premier lieu qu'elle repose sur une base légale et respecte le principe de la proportionnalité.

3.2 Selon l'art. 76 al. 1 let. b ch. 1 LEI, qui renvoie à l'art. 75 al. 1 let. h LEI, l'autorité compétente peut mettre en détention la personne condamnée pour crime (let. h), afin d'assurer l'exécution d’un renvoi ou d'expulsion. La notion de crime correspond à celle de l'art. 10 al. 2 du Code pénal suisse du 21 décembre 1937 (CP - RS 311.0).

3.3 Lorsqu'une décision de première instance de renvoi ou d'expulsion a été notifiée, l'autorité compétente peut, afin d'en assurer l'exécution, mettre en détention la personne concernée si des éléments concrets font craindre que ladite personne entende se soustraire à son refoulement, en particulier parce qu'elle ne se soumet pas à son obligation de collaborer (art. 76 al. 1 let. b ch. 3 LEI) ou si son comportement permet de conclure qu'elle se refuse à obtempérer aux instructions des autorités (art. 76 al. 1 let. b ch. 4 LEI). Les ch. 3 et 4 de l'art. 76 LEI décrivent tous deux les comportements permettant de conclure à l'existence d'un risque de fuite ou de disparition (arrêt du Tribunal fédéral 2C_128/2009 du 30 mars 2009 consid. 3.1).

3.4 En l’espèce, le recourant fait l’objet d’une décision de renvoi de l’OCPM du 15 mars 2024, définitive et exécutoire, et il a été condamné pour tentative de vol, infraction qualifiée de crime au sens de l’art. 10 al. 2 CP, si bien qu'une mise en détention administrative est justifiée à teneur de l'art. 76 al. 1 let. b ch. 1 cum 75 al. 1 let. h LEI.

Au surplus, la mise en détention du recourant pouvait également se fonder sur l'art. 76 al. 1 let. b ch. 3 et 4 LEI, dans la mesure où il est sans domicile connu et a confirmé à de nombreuses reprises son refus catégorique de retourner en Algérie.

4.             Le recourant soutient que l'exécution de son renvoi est impossible, notamment au vu de son état de santé physique.

4.1 Le juge de la détention administrative doit en principe seulement s'assurer qu'une décision de renvoi existe, sans avoir à vérifier la légalité de cette dernière. Ce n'est que lorsque la décision de renvoi apparaît manifestement inadmissible, soit arbitraire ou nulle, que le juge de la détention peut, voire doit, refuser ou mettre fin à la détention administrative (ATF 129 I 139 consid. 4.3.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_1177/2013 du 17 janvier 2014 consid. 2.2).

4.2 L’art. 80 al. 6 let. a LEI prévoit que la détention est levée lorsque le motif de la détention n’existe plus ou l’exécution du renvoi ou de l’expulsion s’avère impossible pour des raisons juridiques ou matérielles. L'exécution du renvoi est impossible lorsque le rapatriement est pratiquement exclu, même si l'identité et la nationalité de l'étranger sont connues et que les papiers requis peuvent être obtenus (arrêt du Tribunal fédéral 2C_984/2020 du 7 janvier 2021 consid. 4.1 et les références).

4.3 Le renvoi d'une personne étrangère ne peut être ordonné que si l'exécution de celui-ci est possible, licite ou peut être raisonnablement exigée (art. 83 al. 1 LEI). L'exécution n'est pas possible lorsque la personne concernée ne peut quitter la Suisse pour son État d'origine, son État de provenance ou un État tiers ni être renvoyée dans un de ces États (art. 83 al. 2 LEI). Elle n'est pas licite lorsqu'elle serait contraire aux engagements internationaux de la Suisse (art. 83 al. 3 LEI). Elle n'est pas raisonnablement exigible si elle met concrètement en danger la personne étrangère, par exemple en cas de guerre, de guerre civile, de violence généralisée ou de nécessité médicale (art. 83 al. 4 LEI).

4.4 S'agissant plus spécifiquement de l'exécution du renvoi des personnes en traitement médical en Suisse, celle-ci ne devient inexigible que dans la mesure où ces dernières ne pourraient plus recevoir les soins essentiels garantissant des conditions minimales d'existence. Par soins essentiels, il faut entendre les soins de médecine générale et d'urgence absolument nécessaires à la garantie de la dignité humaine. L'art. 83 al. 4 LEI, disposition exceptionnelle, ne saurait en revanche être interprété comme impliquant un droit général d'accès en Suisse à des mesures médicales visant à recouvrer la santé ou à la maintenir, au simple motif que l'infrastructure hospitalière et le savoir-faire médical dans le pays d'origine ou de destination de l'intéressé n'atteignent pas le standard élevé qu'on trouve en Suisse (ATAF 2011/50 du 2 mai 2011 consid. 8.3). La gravité de l'état de santé, d'une part, et l'accès à des soins essentiels, d'autre part, sont déterminants. Ainsi, l'exécution du renvoi demeure raisonnablement exigible si les troubles physiologiques ou psychiques ne peuvent être qualifiés de graves, à savoir s'ils ne sont pas tels qu'en l'absence de possibilités de traitement adéquat, l'état de santé de l'intéressé se dégraderait très rapidement au point de conduire d'une manière certaine à la mise en danger concrète de sa vie ou à une atteinte sérieuse, durable, et notablement plus grave de son intégrité physique (arrêt du TAF F-1602/2020 du 14 février 2022 consid. 5.3.4).

4.5 Selon la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme (ci‑après : CourEDH), l'exécution du renvoi ou de l'expulsion d'un malade physique ou mental est exceptionnellement susceptible de soulever une question sous l'angle de l'art. 3 CEDH si la maladie atteint un certain degré de gravité et qu'il est suffisamment établi que, en cas de renvoi vers l'État d'origine, la personne malade court un risque sérieux et concret d'être soumise à un traitement interdit par cette disposition (ACEDH N. c. Royaume-Uni du 27 mai 2008, req. n° 26565/05, § 29 ss ; arrêt du Tribunal fédéral 2D_3/2021 du 14 avril 2021 consid. 4.2).

Le renvoi d'un étranger malade vers un pays où les moyens de traiter sa maladie sont inférieurs à ceux disponibles dans l'État contractant reste compatible avec l'art. 3 CEDH, sauf dans des cas très exceptionnels, en présence de considérations humanitaires impérieuses (ACEDH N. c. Royaume-Uni précité § 42 ; Emre c. Suisse du 22 mai 2008, req. n° 42034/04, § 89). Dans un arrêt du 13 décembre 2016 (ACEDH Paposhvili c. Belgique, req. n° 41738/10, § 173 ss, not. 183), la Grande Chambre de la CourEDH a clarifié son approche en rapport avec l'éloignement de personnes gravement malades et a précisé qu'à côté des situations de décès imminent, il fallait entendre par « autres cas très exceptionnels » pouvant soulever un problème au regard de l'art. 3 CEDH les cas d'éloignement d'une personne gravement malade dans lesquels il y a des motifs sérieux de croire que cette personne, bien que ne courant pas de risque imminent de mourir, ferait face, en raison de l'absence de traitements adéquats dans le pays de destination ou de défaut d'accès à ceux-ci, à un risque réel d'être exposée à un déclin grave, rapide et irréversible de son état de santé entraînant des souffrances intenses ou à une réduction significative de son espérance de vie ; ces cas correspondent à un seuil élevé pour l'application de l'art. 3 CEDH dans les affaires relatives à l'éloignement des étrangers gravement malades. La CourEDH a aussi fixé diverses obligations procédurales dans ce cadre (ACEDH Savran c. Danemark du 7 décembre 2021, req. n° 57467/15, § 130).

4.6 L’Algérie, connait un régime de protection sociale généralisée couvrant tous les salariés contre les risques de maladie (arrêt du Tribunal administratif fédéral E‑1264/2022 du 25 mars 2022).

4.7 Le médecin mandaté par le SEM pour assurer, lors du départ, la surveillance médicale en vue de l’exécution d’un renvoi ou d’une expulsion a compétence pour décider si une personne est médicalement apte à être transportée dans le cadre de l’exécution d’un renvoi ou d’une expulsion (art. 15p de l’ordonnance sur l’exécution du renvoi et de l’expulsion d’étrangers, du 11 août 1999 [OERE - RS 142.281])

Le médecin visé à l’art. 15p OERE communique sans délai aux services visés à l’art. 71b al. 1 let. a et b LEI sa décision concernant l’aptitude au transport et les informations nécessaires à l’organisation du départ (art. 15r OERE).

4.8 En l’espèce, il n’est pas contesté que le recourant souffre de plusieurs pathologies.

Dans son recours, l’intéressé a évoqué une opération de la main droite, intervenue en août 2023. Il n’en fait toutefois plus mention ultérieurement et il peut être considéré que cette question est sans incidence sur l’issue du présent litige.

L’intéressé a invoqué un abcès périanal, intervenu après la décision de renvoi, impliquant une intervention chirurgicale le 8 juin 2024. S’il explique, pièces à l’appui, que des fils de Prolène 4.0 auraient été retirés à tort, qu’ils ont dû être reposés le 4 décembre 2024, qu’ils doivent être gardés trois mois avant que ne soit organisé une « fistulectomie avec lambeau d’avancement », seul est pertinent le fait que cette dernière n’aurait pas encore été réalisée.

Le recourant indique surtout souffrir d’un diabète atypique LADA. Le diagnostic principal de « diabète de type 1 ou LADA (Latent Autoimmun Diabetes of Adult) Anti-GAD + Anti-ilôts » ressort de plusieurs documents médicaux dont le rapport de consultation de diabétologie du 23 mai 2025 des Hôpitaux universitaires de Genève (ci-après : HUG). Celui-ci précise que l’intéressé, alors en détention pénale, allait être mis en liberté mi-juin. Une ordonnance de sortie avec insuline pour six mois, renouvelable pour la même période, ainsi que du matériel d’injection et de contrôle glycémique lui avaient été remis, avec la précision que la substitution par un générique de chacun des médicaments était autorisée. Le rapport précisait que le patient avait déjà pris contact avec un diabétologue à Lyon, puis prendrait contact avec un diabétologue espagnol dès qu’il arriverait à Barcelone. L’anamnèse évoquait des douleurs suite à la prise en charge d’un abcès fessier et précisait qu’une consultation post-opératoire était planifiée début juin 2025.

Il a enfin évoqué avoir commencé une grève de la faim. Or, de jurisprudence constante, la détermination du recourant de mener une telle grève n’est pas de nature à rendre la détention administrative litigieuse incompatible avec l'interdiction de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants (ATA/968/2019 du 4 juin 2019 consid. 4b et les références citées).

Les autres pièces produites couvrent la période d’août 2023 à décembre 2024. Si elles attestent des problématiques médicales rencontrées elles ne sont que peu pertinentes pour établir la situation de l’intéressé début juillet 2025.

En conséquence seules sont pertinentes les questions du suivi du diabète et de la fistulectomie.

Conformément à la jurisprudence précitée, le juge de la détention administrative doit seulement s'assurer qu'une décision de renvoi existe. Or, tel est le cas au vu de la décision de renvoi de l’OCPM du 15 mars 2024. L’exception prévue, à savoir que ce n'est que lorsque la décision de renvoi apparaît manifestement inadmissible, soit arbitraire ou nulle, que le juge de la détention peut, voire doit, refuser ou mettre fin à la détention administrative, n’apparaît pas réalisée en l’espèce. En effet, le commissaire a produit des documents, soit une plaquette de présentation du service de diabétologie endocrinologie et maladies métaboliques du centre hospitalo‑universitaire Mustapha ainsi qu’un consulting médical d’une personne victime d’un diabète insulino-dépendant de type 1 du 3 mai 2023 évoquant à tout le moins deux autres établissements hospitaliers où le traitement et le suivi dudit diabète est possible. Le recourant n’indique pas et ne produit aucun document qui préciserait quelle spécificité du diabète LADA ne pourrait être prise en charge en Algérie.

Il n’est pour le surplus pas allégué qu’il ne pourrait être procédé à la fistulectomie en Algérie, étant précisé que l’intéressé aurait pu y procéder depuis fin mars 2025 sans qu’il soit indiqué dans la procédure pour quel motif cela n’a pas encore été le cas. Ainsi, la lettre de sortie des soins aigus du 20 décembre 2024 mentionnait qu’il serait revu en proctologie dans quatre semaines et serait convoqué. Aucun document plus récent n’est produit en lien avec cette pathologie.

Il est de même produit copie du journal officiel algérien fixant les modalités d’accès aux soins en faveur des démunis non assurés sociaux. Le recourant ne peut être suivi lorsqu’il indique qu’à défaut de proches sur place pour l’épauler, il ne serait pas en mesure d’obtenir la carte d’assuré. Il ressort de la dernière consultation aux HUG qu’il avait déjà pris contact avec un diabétologue lyonnais et se mettrait prochainement en rapport avec un spécialiste à Barcelone, ce qui témoigne de son indépendance et de sa capacité à entreprendre les démarches nécessaires.

On doit ainsi retenir que les pathologies du recourant peuvent le cas échéant être traitées en Algérie, et qu’aucune des affections dont il fait état ne sont d’une gravité telle qu’un renvoi serait constitutif d’un traitement inhumain ou dégradant au sens de l’art. 3 CEDH.

De surcroît, l’intéressé sera encore vu par le médecin mandaté par le SEM pour assurer, lors du départ, la surveillance médicale en vue de l’exécution d’un renvoi.

Le grief sera ainsi écarté.

5.             5.1 Selon l'art. 76 al. 4 LEI, les démarches nécessaires à l'exécution du renvoi ou de l'expulsion doivent être entreprises sans tarder (« principe de célérité ou de diligence »).

5.2 La détention en phase préparatoire et la détention en vue du renvoi ou de l’expulsion visées aux art. 75 à 77 LEI ainsi que la détention pour insoumission visée à l’art. 78 LEI ne peuvent excéder six mois au total (art. 79 al. 1 LEI) ; la durée maximale de la détention peut, avec l’accord de l’autorité judiciaire cantonale, être prolongée de douze mois au plus, lorsque la personne concernée ne coopère pas avec l’autorité compétente et que l’obtention des documents nécessaires au départ auprès d’un État qui ne fait pas partie des États Schengen prend du retard (art. 79 al. 2 LEI).

5.3 Le principe de la proportionnalité, garanti par les art. 5 al. 2 et 36 al. 3 Cst., se compose des règles d'aptitude – qui exige que le moyen choisi soit propre à atteindre le but fixé –, de nécessité – qui impose qu'entre plusieurs moyens adaptés, l'on choisisse celui qui porte l'atteinte la moins grave aux intérêts privés – et de proportionnalité au sens étroit – qui met en balance les effets de la mesure choisie sur la situation de l'administré et le résultat escompté du point de vue de l'intérêt public (ATF 140 I 218 consid. 6.7.1 ; 136 IV 97 consid. 5.2.2).

5.4 En l’espèce, le recourant ne conteste pas, à juste titre, que les démarches ont été rapidement entreprises par les autorités.

La durée de la mise en détention a été dûment justifiée et confirmée à raison par le TAPI. Après l’audition par les autorités algériennes, il y a en effet lieu que celles‑ci répondent au SEM, puis émettent un laissez-passer, puis que les autorités suisses de migration réservent un vol et qu’elles puissent le cas échéant prendre d’autres mesures en cas d’échec de cette tentative, étant précisé que si ces étapes sont accomplies rapidement et que le recourant est rapatrié, sa détention administrative sera d’autant plus brève.

Il existe un intérêt public à la détention et l’éloignement de la Suisse du recourant, non autorisé à séjourner en Suisse où il a commis notamment un crime. Cet intérêt prime l’intérêt privé du recourant à ne pas être, momentanément, privé de sa liberté.

Enfin, il n'existe pas d'autres mesures moins contraignantes que la détention au vu de l'opposition manifestée à plusieurs reprises par le recourant à regagner son pays d'origine, étant rappelé que le recourant a été reconnu comme ressortissant algérien par les autorités de ce pays.

Le recours, mal fondé, sera rejeté.

6.             La procédure étant gratuite, aucun émolument ne sera perçu (art. 87 al. 1 LPA cum art. 12 al. 1 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 - RFPA - E 5 10.03). Vu l’issue du litige, aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 30 juin 2025 par A______ contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 20 juin 2025 ;

au fond :

le rejette ;

dit qu'il n'est pas perçu d'émolument, ni alloué d'indemnité de procédure ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Me Déborah GREAUME, avocate du recourant, au commissaire de police, à l'office cantonal de la population et des migrations, au Tribunal administratif de première instance, au secrétariat d’État aux migrations ainsi qu’au centre Frambois LMC, pour information.

Siégeant : Francine PAYOT ZEN-RUFFINEN, présidente, Florence KRAUSKOPF, Michèle PERNET, juges.

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

F. SCHEFFRE

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. PAYOT ZEN-RUFFINEN

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :