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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2597/2022

ATA/507/2025 du 06.05.2025 sur JTAPI/1006/2024 ( LCI ) , REJETE

Descripteurs : AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE ET DROIT PUBLIC DES CONSTRUCTIONS;CONSTRUCTION ET INSTALLATION;PERMIS DE CONSTRUIRE;LOGEMENT;TRAVAUX SOUMIS À AUTORISATION;RECONSIDÉRATION
Normes : LPA.48.al1; LPA.67; RCI.10A; LCI.59.al4bis; LCI.59.al4; LCI.72
Résumé : Recours déposé par des voisins contre une autorisation de construire six villas. Dès lors que la reconsidération facultative de l’autorisation de construire portant sur l’ajout de places de parking est conforme au droit, qu’un préavis favorable de la commune n’était pas nécessaire et que les instances compétentes qui devaient être consultées ont rendu des préavis favorables, parfois sous conditions impératives, le recours est rejeté.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2597/2022-LCI ATA/507/2025

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 6 mai 2025

3ème section

 

dans la cause

A______

B______ et C______

D______

E______

F______ et G______

H______

I______ et J______ recourants
représentés par Me Paul HANNA, avocat

contre

K______ SA et L______ SA
représentées par Me Mark MULLER, avocat

et

DÉPARTEMENT DU TERRITOIRE - OAC intimés

_________

Recours contre le jugement du TAPI administratif de première instance du 9 octobre 2024 (JTAPI/1006/2024)


EN FAIT

A. a. K______ SA (ci-après : K______) et L______ SA (ci-après : L______) sont copropriétaires, depuis le 3 novembre 2021, de la parcelle n° 1’179 de la commune de M______, d’une surface de 1'808 m², située en 5e zone à bâtir au sens de l’art. 19 al. 3 de la loi d’application de la loi fédérale sur l’aménagement du territoire du 4 juin 1987 (LaLAT- L 1 30), à l’adresse chemin de N______ ______.

Auparavant, cette parcelle appartenait à une société immobilière.

b. Le 6 novembre 2019, K______ a déposé auprès du département du territoire (ci‑après : le département) une demande définitive d’autorisation de construire (DD 1______) en vue de l’édification, sur la parcelle précitée, de six villas à très haute performance énergétique (ci-après : THPE ; taux de 47.70%), avec garage souterrain et couvert à vélos.

Les villas seraient réparties en deux blocs de deux villas contiguës et de deux villas, toutes reliées par des constructions de peu d’importance (ci-après : CDPI) ; le projet impliquait l’abattage d’arbres. Douze places de parking habitants en sous-sol et deux places visiteurs en surface étaient prévues. L’accès des engins du service du feu était prévu par le chemin de N______, d’une largeur d’environ 6.75 m, côté route de O______.

c. Lors de l’instruction de cette demande, les préavis usuels ont été requis et émis.

En particulier, l’office cantonal des transports (ci-après: OCT) a rendu un préavis favorable le 20 janvier 2020, sans observations, la police du feu a requis, le 7 janvier 2020, la modification du projet et la commission d’architecture (ci-après : CA) a préavisé défavorablement le 14 janvier 2020, relevant une implantation incohérente par rapport au contexte bâti environnant, un projet dense s’étalant sur la parcelle au détriment de la végétation et de l’arborisation environnantes, des espaces résiduels entre les villas inutiles et contraignant l’apport supplémentaire de surface végétale, une rampe invasive, un sous-sol conséquent ainsi qu’une architecture banale, sans qualité. La commune a rendu un préavis défavorable le 29 janvier 2020, se prononçant en défaveur de la dérogation selon l’art. 59 al. 4 de la loi sur les constructions et les installations diverses du 14 avril 1988 (LCI - L 5 05).

d. Une deuxième version du projet a été déposée. Il comprenait toujours six maisons, les divisait en deux blocs de trois villas contiguës, reliées par une CDPI et prévoyait douze places de parking habitants et deux visiteurs, toutes en surface.

La police du feu a préavisé favorablement, sous conditions, le 15 juillet 2020, la CA en a fait de même le 21 juillet 2020. Elle s’est déclarée favorable à la dérogation selon l’art. 59 al. 4 LCI puisque le projet répondait à ses remarques du 14 janvier 2020. L’OCT a rendu un préavis favorable, sans observation, le 23 juillet 2020. La commune s’est à nouveau prononcée, par préavis du 28 août 2020, en défaveur du projet modifié ; elle a notamment requis de réduire le nombre de places de stationnement à une place automobile par logement, au vu de la proximité et de la qualité des transports publics.

e. Une troisième version du projet a été déposée auprès du département le 15 janvier 2021. Elle comprenait toujours six villas contiguës, projetées en deux blocs de trois désaxés, et huit places de parking, sept pour les habitants et une place de parking visiteurs, ceci pour se conformer au préavis communal du 28 août 2020.

La CA, l’OCT et la police du feu n’ont pas été consultés. Le 21 janvier 2021, la direction des autorisations de construire (ci-après : DAC) a requis la modification du projet, faisant valoir que le bureau au rez-de-chaussée devait disposer d’une vue droite d’au moins 4 m sur toute la largeur de l’ouverture en vertu des art. 72 et 73 LCI. Le 19 février 2021, l’office cantonal de l’agriculture et de la nature (ci‑après : OCAN) a émis un préavis favorable, sous conditions, requérant notamment le respect du préavis liant n° 2______, lequel prévoyait qu’il fallait replanter des arbres pour un montant d’au moins CHF 24’800.- et fournir, avant les abattages, un projet chiffré de replantation pour accord préalable ; le projet de replantation devait être revu afin d’intégrer des arbres similaires à la forme érigée le long du chemin N______. La commune s’est encore prononcée, par préavis du 31 mars 2021, en défaveur de cette version du projet.

f. Le 21 avril 2021, de nouveaux plans ont été déposés auprès du département prévoyant six places de parking habitants et une place visiteurs, afin de se conformer à l’exigence formulée par la DAC. La CA, l’OCT et la police du feu n’ont pas été consultés pour cette quatrième version du projet.

g. Par décision du 15 juillet 2021, publiée dans le Feuille d’avis officielle de la République et canton de Genève (ci-après : FAO) du même jour, le département a délivré l’autorisation globale DD 1______.

h. Le 14 septembre 2021, A______, B______ et C______, D______, E______, F______ et G______, H______, I______ et J______ (ci-après : les voisins) ont interjeté recours auprès du Tribunal administratif de première instance (ci‑après : TAPI) contre l’autorisation précitée, concluant principalement à son annulation. Ils ont entre autres griefs soulevé celui d’une violation des règles en matière de stationnement dès lors que seules sept places de parking étaient prévues au lieu de douze.

i. Le 4 janvier 2022, l’OCT a rendu un préavis favorable, sans observation (il ne s’est pas prononcé sur les dérogations au règlement d’application de la loi sur la prévention des sinistres, l’organisation et l’intervention des sapeurs-pompiers du 25 juillet 1990 - RPSSP - F 4 05.01). Le service de l’air, du bruit et des rayonnements non ionisants (ci-après : SABRA) a quant à lui préavisé favorablement, sous conditions.

j. Le 7 septembre 2022, après que K______ et le département lui ont transmis leurs observations, le TAPI a constaté que le recours du 14 septembre 2021 était devenu sans objet et a rayé la cause du rôle (JTAPI/925/2022).

k. Le 15 juin 2022, le département avait rendu une nouvelle décision annulant et remplaçant celle du 15 juillet 2021.

Le détail de la procédure qui a abouti au prononcé de cette décision est le suivant :

- le 15 février 2022, K______ a écrit au département pour requérir la reprise de l’instruction du dossier DD 1______ en vue d’une reconsidération et du prononcé d’une nouvelle décision ;

bien que contestant les arguments soulevés dans le recours du 14 septembre 2021, elle déposait, « par prudence », un projet modifié afin de répondre au grief ayant trait à la violation du règlement relatif aux places de stationnement sur fonds privés du 16 décembre 2015 (RPSFP - L 5 05.10) ainsi qu’à un autre concernant l’installation des pompes à chaleur (ci-après : PAC) ; elle sollicitait la reprise de l’instruction du dossier, la reconsidération de la décision du 15 juillet 2021 et le maintien du numéro du dossier DD 1______ « afin que la nouvelle décision conserve tous les droits liés au dépôt de la demande en novembre 2019 » ; diverses pièces ont été produites ; les plans déposés prévoyaient deux places de parc pour chaque villa contiguë, soit douze au total ;

- au cours de l’instruction de cette demande, le département n’a consulté, au motif de la modification mineure du projet, que certaines instances de préavis : le 22 mars 2022, la CA s’est prononcée favorablement, sans observation ; le 28 mars 2022, l’OCT a préavisé favorablement, avec le souhait que la place visiteurs soit attribuée à la villa A (soit celle la plus proche du chemin de N______) ; le même jour, l’office cantonal de l’eau (ci-après: OCEau) a rendu un préavis favorable, sous conditions ; toujours le même jour, la commune a renouvelé son préavis défavorable du 31 mars 2021 ; le 8 avril 2022, le SABRA a préavisé favorablement, sous conditions ; la DAC n’a pas été consultée ;

- le 15 juin 2022, le département a reconsidéré sa décision DD 1______ et rendu une décision globale, publiée dans la FAO du même jour, délivrant l’autorisation de construire DD 1______ – RE ;

en son point 5, cette décision dispose que les conditions figurant dans les préavis du SABRA du 8 avril 2022, de l’OCEau du 28 mars 2022, de la direction de la mensuration officielle du 11 décembre 2019, du service des monuments et des sites du 12 février 2020, de la police du feu du 15 juillet 2020, de l’office cantonal de l’énergie du 30 juillet 2020, de l’OCAN du 19 février 2021 ainsi que son préavis liant n° 2______, faisant partie intégrante de l’autorisation, doivent être respectées. En son point 11, elle établit que la présente autorisation annulait et remplaçait l’autorisation DD 1______ délivrée le 15 juillet 2021 ;

- le même jour, le département en a informé le TAPI et la commune.

B. a. Par acte du 16 août 2022, les voisins ont recouru auprès du TAPI contre l’autorisation DD 1______ – RE du 15 juin 2022, concluant à son annulation et à ce qu’il leur soit donné acte que l’autorisation de construire DD 1______ délivrée le 15 juillet 2021 avait été annulée.

aa. La décision entreprise devait être qualifiée de « décision sur demande d’autorisation » – qui représentait le moyen par lequel un administré sollicitait d’une autorité administrative une décision sur la base d’un état de fait qui lui était présenté – et non de « décision sur reconsidération », qui supposait le maintien de l’état de fait existant. Le département n’avait pas « re-décidé » sur la base des faits tels qu’ils avaient été établis, mais sur la base d’un nouveau projet. Or, le fait de ne pas avoir modifié sa décision de base, mais d’en rendre une nouvelle consacrait de nombreuses violations à la loi. Ainsi, les art. 2 LCI et 9 de son règlement d’application du 27 février 1978 (RCI - L 5 05.01), concernant les pièces devant être déposées par le demandeur et les indications devant être fournies quant aux objets destinés à occuper le sous-sol de façon permanente, avaient été violés. Il en allait de même de l’art. 3 LCI concernant la publication de la demande d’autorisation de construire dans la FAO, la procédure d’observations et la transmission du dossier aux communes, départements et organismes intéressés.

ab. L’art. 59 al. 4bis LCI n’avait pas été respecté. Le plan directeur communal (ci‑après : PDCom) de M______ de 2e génération avait été adopté le 18 novembre 2021 et approuvé par le Conseil d’État le 3 mars 2022, de sorte qu’un préavis communal favorable était nécessaire dans la mesure où la demande d’autorisation de construire avait été déposée le 15 février 2022. Or, la commune avait préavisé défavorablement le projet.

Il y avait également un problème avec l’absence de préavis de la CA. Celle-ci n’avait pas été appelée à se prononcer sur les troisième et quatrième versions du projet, alors même que les modifications opérées étaient de nature à justifier une nouvelle analyse de sa part. À priori, elle s’était prononcée sur la 5e version du projet, mais son dernier préavis ne comportait aucun commentaire, malgré les modifications de faible qualité apportées au projet. Aucune dérogation à l’art. 59 al. 4 LCI n’y avait par ailleurs été accordée. Le projet ne s’intégrait pas avec le caractère, l’harmonie et l’aménagement du quartier. La CA avait vivement critiqué sa première version, mettant notamment en évidence une implantation incohérente par rapport au contexte bâti environnant, un projet trop dense et une architecture banale, sans qualité. Le projet n’ayant globalement pas évolué, elle aurait dû persister dans sa position en rendant le second préavis. Il en allait de même s’agissant de la 5e version du projet, qui prévoyait encore moins de végétation que les précédentes. En tout état, le projet autorisé créait un malheureux précédent dans le quartier puisqu’il s’agissait du premier projet en ordre contigu du secteur.

ac. Les plans visés ne varietur n’indiquaient pas les voies d’accès des services d’incendie et de secours (ci-après : SIS) depuis le chemin de N______, à savoir la largeur de la chaussée à l’entrée de la parcelle, les rayons et largeurs de chaussées minimaux en virage, de sorte qu’il n’était pas possible en l’état de vérifier la conformité du projet avec la directive n° 7 du RPSSP (ci-après : directive n° 7). En outre, bien que la police du feu avait rendu un préavis favorable sur les deux premières versions du projet, elle ne s’était pas prononcée sur la dernière version des plans. Ainsi, la question des accès incendie n’avait pas été examinée de manière approfondie et ils étaient légitimés à penser que la police du feu n’avait pas pu instruire la dernière version du dossier en ayant connaissance de tous les éléments contextuels. Fondamentalement, ils voyaient mal à quel endroit précis une zone de travail de 5 m sur 12 m pourrait être implantée. L’absence de tels équipements de sécurité était contraire à la directive n° 7 et représentait un danger pour le voisinage, dans l’hypothèse où les pompiers ne parviendraient pas à maîtriser à temps un incendie.

ad. L’autorisation litigieuse autorisait l’abattage de neuf arbres d’une valeur totale de CHF 24’800.-, de sorte que le préavis liant du 4 mars 2021 avait conditionné l’abattage de ceux-ci à la replantation d’arbres pour un montant identique, au minimum. Pourtant, selon la requête pour abattage d’arbres de juillet 2020, la requérante ne planterait que cinq arbres, pour un montant total de CHF 11’005.-, en compensation. Un montant supplémentaire de CHF 4’402.- avait été admis pour leur plantation et le reste des mesures compensatoires était constitué d’« autres mesures d’intérêt pour la nature », à savoir de la création d’une haie indigène pour un montant total de CHF 10'502.80. Ces autres mesures excédaient de plus d’un tiers la valeur totale de compensation requise et la requérante n’avait pas démontré que la compensation serait difficile ou impossible, ce qui n’avait d’ailleurs pas été reconnu dans le préavis. Il paraissait curieux que tel puisse être le cas, les trois dernières variantes du projet de construction ayant abandonné le principe d’un parking enterré et le faible impact du sous-sol sur la parcelle, projeté sous l’assiette des six constructions, permettait aisément la replantation d’arbres sur tout son pourtour. L’abattage de neuf arbres portait gravement atteinte à la qualité paysagère du site et les mesures de compensation autorisées par l’OCAN se révélaient insuffisantes pour suppléer à cet abattage.

b. Le département ainsi que K______ et L______ ont conclu au rejet du recours.

c. Le 11 novembre 2022, les voisins ont persisté dans leurs conclusions.

Certes, l’art. 67 al. 2 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10) autorisait l’autorité de première instance à reconsidérer ou retirer sa décision en cours de procédure, mais ne détaillait pas le pouvoir « incomplet » qui lui était laissé. À leur sens, ainsi que retenu par deux auteurs de doctrine, le département n’était pas en droit d’administrer de nouvelles preuves, comme par exemple examiner des plans modifiés. Partant, l’art. 67 al. 2 LPA n’autorisait pas le département à examiner de nouveaux éléments et rendre une nouvelle décision portant sur un objet différent ; dans un tel cas, une nouvelle requête devait être déposée. Le département ne s’était pas limité à demander certaines clarifications auprès de services (tel un préavis manquant), mais avait rouvert un dossier clos et examiné un nouveau projet avec le dépôt de nouveaux documents. Un tel procédé permettrait au département de pouvoir systématiquement réparer un vice matériel entachant une autorisation de construire, faisant fi des exigences formelles de la LCI et du RCI et agissant comme une sorte d’autorité d’opposition et faisant perdre aux tribunaux leur vocation d’organe de contrôle des décisions.

d. Le département ainsi que K______ et L______ ont ensuite persisté dans leurs conclusions.

e. Le 28 mars 2023, le TAPI a interpellé le département pour qu’il lui transmette un préavis de la DAC sur la dernière version du projet. Il ressortait du dossier que cette instance avait, le 21 janvier 2021, requis la modification de la version du projet prévoyant huit places de stationnement au motif que le bureau au rez-de-chaussée devait disposer d’une vue droite d’au moins 4 m sur toute la largeur de l’ouverture, et qu’elle avait ensuite préavisé favorablement la version successive du projet, qui ne prévoyait plus que sept places de parking. La décision litigieuse prévoyant treize places de stationnement, la DAC devait se prononcer à ce sujet, en particulier sur la problématique de la vue droite d’au moins 4 m sur toute la largeur de l’ouverture si celle-ci était encore d’actualité dans la version autorisée par la décision attaquée.

Le 21 avril 2023, le département a transmis au TAPI le préavis favorable avec dérogations de la DAC, daté du même jour. Les pièces donnant sur les places de stationnement s’avéraient être, comme pour la version n° 4 du projet qui avait été préavisée favorablement, affectées à des cuisines. Or, il admettait que les vues droites ne soient pas respectées pour ce type d’affectation. En effet, une cuisine n’était pas une pièce destinée au long séjour et à la détente, au contraire de l’affectation desdites pièces en tant que bureaux dans les versions n° 3 et antérieures du projet. Le préavis se prononçait favorablement quant à une dérogation à l’art. 59 al. 4 let. a LCI.

f. Par jugement du 22 juin 2023, après un échange d’écritures relatif à la portée de l’art. 72 LCI et à la recevabilité d’un grief ayant trait à cette disposition, le TAPI a donné acte aux voisins que l’autorisation DD 1______ délivrée le 15 juillet 2021 avait été annulée et admis le recours du 16 août 2022.

À teneur de la législation en vigueur et de la jurisprudence, rien ne limitait le département pour entrer en matière sur une demande en reconsidération et ce même si la décision en cause était pendante devant le TAPI. Le département n’avait ni abusé ni excédé de son pouvoir d’appréciation en acceptant, après avoir consulté certaines instances de préavis, de reconsidérer sa décision du 15 juillet 2021 et d’en prononcer une nouvelle. Il n’y avait dès lors pas lieu de considérer la demande en reconsidération comme une nouvelle demande distincte. Le projet déposé le 15 février 2022 n’était, au sens de l’art. 10A RCI, pas sensiblement différent de celui autorisé le 15 juillet 2021.

L’art. 72 LCI exigeait formellement que les cuisines soient pourvues de baies et d’une vue droite indépendamment de leur utilisation. Le marquage des places de parking au sol ne pouvait certes pas porter atteinte aux vues droites. En revanche, il aurait pour effet qu’un véhicule y serait stationné, pour un temps plus ou moins long, ce qui porterait atteinte à ces vues. Cette disposition avait ainsi été violée.

C. a. Le 28 août 2023, K______ et L______ ont formé recours contre ce jugement auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci‑après : la chambre administrative). Ils ont conclu à son annulation et à la confirmation de l’autorisation de construire DD 1______ du 15 juin 2022, subsidiairement au renvoi de la cause au TAPI pour nouvelle décision dans le sens des considérants.

b. Par arrêt du 27 février 2024 (ATA/257/2024), après que les parties ont fait valoir leur point de vue, la chambre administrative a admis le recours du 28 août 2023, annulé le jugement du 22 juin 2023 et renvoyé la cause au TAPI pour examen des autres griefs.

À la demande du TAPI, le département lui avait transmis un préavis favorable de la DAC daté du 21 avril 2023 dont il ressortait que les pièces donnant sur les places de stationnement s’avéraient être, comme pour la version n° 4 du projet préavisée favorablement, affectées à des cuisines et non plus des bureaux comme prévu jusqu’à la version n° 3 du projet, étant rappelé que c’était la version n° 4 qui faisait l’objet de l’autorisation querellée. Le département avait alors précisé qu’il admettait que les vues droites ne soient pas respectées pour ce type d’affectation. Ce n’était ainsi qu’à la suite de l’intervention spontanée du TAPI et la réception de ce préavis que les voisins avaient relevé, le 15 mai 2023, que la LCI n’offrait pas de pouvoir d’appréciation au département sur ce point, les cuisines étant expressément citées à l’art. 72 LCI. Les cuisines devaient disposer de vues droites, ce qui excluait des places de stationnement devant ces pièces. Le département avait alors rétorqué que les voisins ne disposaient d’aucun intérêt digne de protection en lien avec une prétendue absence de vues droites suffisantes au rez-de-chaussée.

Le TAPI s’était certes prononcé sur la qualité pour recourir des voisins, mais pas sur la recevabilité de ce dernier grief, formulé dans les circonstances précitées. Or, conformément à la jurisprudence en lien notamment avec la question du respect du vide d’étages, on ne discernait a fortiori pas quel avantage pratique et direct les voisins auraient à se plaindre de la luminosité et de l’aération dans les cuisines des futurs occupants. Aussi, comme il l’avait fait dans une précédente affaire concernant des vides d’étages et trouvant application à plus forte raison en l’occurrence, le TAPI n’aurait pas dû entrer en matière sur le grief d’une violation de l’art. 72 LCI. Ce grief devait être déclaré irrecevable.

c. Par arrêt 1C_232/2024 du 26 avril 2024, le Tribunal fédéral a déclaré le recours interjeté à l’encontre de l’ATA/257/2024 irrecevable, jugeant que ce dernier ne pouvait pas faire l’objet d’un recours immédiat.

d. Le 9 octobre 2024, le TAPI a déclaré recevable le recours du 16 août 2022 contre la décision du 15 juin 2022. Il a donné acte aux voisins que l’autorisation de construire DD 1______ délivrée le 15 juillet 2021 avait été annulée et rejeté le recours.

da. Dans son jugement JTAPI/702/2023 du 22 juin 2023, il avait déjà retenu que le département n’avait ni abusé ni excédé de son pouvoir d’appréciation en acceptant de reconsidérer sa décision du 15 juillet 2021 et d’en prononcer une nouvelle, après avoir consulté certaines instances de préavis, de sorte qu’il n’y avait pas lieu de considérer la demande en reconsidération comme une nouvelle demande distincte. Il rejetait à nouveau, pour les motifs déjà retenus dans son précédent jugement et qui demeuraient toujours valables, tant ce grief que les autres en découlant et relatifs à une violation des art. 2 et 3 LCI et 9 RCI.

db. Le dépôt auprès du département de la demande d’autorisation de construire avait eu lieu en novembre 2019, et non en février 2022 comme le soutenaient à tort les recourants. En effet, la demande en reconsidération du 15 février 2022 n’était pas à considérer comme une nouvelle demande distincte au sens de l’art. 10A al. 2 RCI, lequel stipulait que la demande qui avait pour objet un projet sensiblement différent du projet initial ou qui portait sur l’adjonction au projet initial d’un ouvrage séparé et d’une certaine importance était traitée comme une demande nouvelle et distincte. L’art. 156 al. 5 LCI, en tant que disposition transitoire, faisait échec à l’application de l’art. 59 al. 4bis LCI aux demandes d’autorisation de construire déposées, comme en l’espèce, avant le 27 novembre 2020. C’était en conséquence l’art. 59 al. 4 LCI, dans sa teneur jusqu’au 27 novembre 2020, qui était applicable à la demande litigieuse. Il s’ensuivait qu’un préavis favorable de la commune n’était pas nécessaire pour la délivrance de l’autorisation. La décision querellée ne consacrait par conséquent aucune violation de l’art. 59 al. 4bis LCI.

dc. La parcelle ne faisant l’objet d’aucun plan localisé de quartier, les normes de la zone 5, et plus particulièrement l’art. 59 al. 4 LCI, étaient applicables à la demande d’autorisation de construire, ce qui n’était pas contesté.

La CA avait examiné à plusieurs reprises le projet. Dans son premier préavis du 14 janvier 2020 fort critique, et dès lors défavorable, elle avait relevé une implantation incohérente par rapport au contexte bâti environnant, un projet dense s’étalant sur la parcelle au détriment de la végétation et de l’arborisation environnantes, des espaces résiduels entre les villas inutiles et contraignant l’apport supplémentaire de surface végétale, une rampe invasive, un sous-sol conséquent ainsi qu’une architecture banale, sans qualité. Elle avait délivré un second préavis, cette fois-ci favorable, le 21 juillet 2020 : elle s’y était déclarée favorable à la dérogation selon l’art. 59 al. 4 LCI puisque le projet répondait aux remarques formulées dans son premier préavis. La CA ne s’était ensuite pas prononcée sur les deux versions successives du projet, mais elle s’était à nouveau déterminée sur la dernière version du projet. L’absence de détermination sur les versions nos 3 et 4 ne portait donc pas à conséquence, un préavis favorable sans observation ayant été rendu sur la dernière version du projet.

À l’instar du département, le TAPI estimait que si cette ultime version du projet ne lui convenait pas, la CA l’aurait fait valoir à cette occasion. Certes, il était malheureux que son dernier préavis ne mentionne pas la dérogation selon l’art. 59 al. 4 LCI, mais ce manque ne signifiait pas que la CA s’opposait à cette dérogation dans la mesure où elle l’avait accordée lors de son second préavis du 21 juillet 2020 et que les modifications subséquentes du projet ne portaient pas sur la densité de la construction. On pouvait renoncer à sanctionner l’absence de mention de dérogation à l’art. 59 al. 4 LCI dès lors qu’il était évident et manifeste que les conditions d’octroi d’une telle dérogation étaient réalisées hors de tout doute raisonnable, ainsi que le confirmait d’ailleurs la DAC dans son préavis du 21 avril 2024. En outre, le défaut de publication de cette dérogation, pour autant qu’il soit avéré puisque la décision entreprise mentionnait « vu l’art. 59 al. 1 let. a LCI », n’entraînait pas la nullité de l’autorisation délivrée. L’office de l’urbanisme (ci-après : OU) et l’OCT avaient aussi émis des préavis, tous favorables ; aucune réserve n’avait été faite sur la compatibilité du projet avec le caractère, l’harmonie et l’aménagement du quartier. Aucune des instances de préavis précitées, dont la consultation était soit obligatoire soit nécessaire dans le cadre d’une éventuelle application de la dérogation prévue par l’art. 59 al. 4 LCI, ne s’était opposée à une telle dérogation.

La commune n’avait certes émis que des préavis défavorables, dont le dernier du 28 mars 2022 faisait notamment valoir qu’elle « ne disposait pas d’une planification directrice permettant d’envisager, sous conditions, un indice d’utilisation des sols (ci-après : IUS) dépassant les maxima ordinaires de la LCI prévoyant certains secteurs de 5e zone » de sorte qu’aucune dérogation à l’art. 59 al. 4 LCI n’était envisageable et qu’une telle dérogation en ce lieu serait inopportune vu les enjeux de nécessaire gradation et transition entre les immeubles des parcelles alentour. Cela étant, outre le fait que le préavis de la commune n’était pas contraignant, son poids devait être relativisé face aux préavis favorables de toutes les autres instances consultées, auxquels il devait céder le pas. Il ne pouvait enfin être fait abstraction de l’intérêt privé du propriétaire souhaitant construire conformément à l’affectation de la zone et aux règles de densité prévues à l’art. 59 al. 4 let. a LCI, eu égard à la garantie de la propriété.

L’affirmation des voisins selon laquelle le projet ne s’intégrait pas avec le caractère, l’harmonie et l’aménagement du quartier ne relevait que de leur propre appréciation et était contredite par les préavis favorables des instances spécialisées, qui avaient analysé le projet à plusieurs reprises sans émettre de réserve sur ses dimensions. L’IUS de ce dernier, soit 47.70%, était par ailleurs conforme aux rapports de surface autorisés par l’art. 59 al. 4 LCI. En outre, la construction de six villas contiguës dans un quartier composé de maisons individuelles n’était pas incompatible avec les exigences de l’art. 59 al. 4 LCI. En effet, la modification de l’aménagement de tels quartiers avait déjà été entamée dans de nombreuses communes afin de pallier les problématiques d’aménagement du territoire, conformément à la volonté du législateur. Le reproche des voisins n’apparaissait donc pas fondé. Enfin, le bâtiment projeté permettait de contribuer à offrir une réponse à la pénurie notoire de logements qui sévissait à Genève tout en contribuant à répondre aux problèmes de l’exiguïté du territoire. Il s’inscrivait dans ce contexte pleinement dans l’objectif d’une densification sans modification de zone de la zone 5 prévu par la fiche A04 du PDCn, en favorisant l’habitat contigu ou groupé.

Rien ne permettait de retenir que l’autorité intimée, qui avait notamment suivi les préavis de la CA, de l’OU et de l’OCT, aurait abusé de son pouvoir d’appréciation en considérant que le projet était compatible avec le caractère, l’harmonie et l’aménagement du quartier et que les circonstances justifiaient l’octroi d’une dérogation. Les voisins ne parvenaient pas à l’établir.

dd. Même en admettant qu’il fallait appliquer l’art. 96 al. 1 RCI, question laissée indécise, force était de constater que la police du feu avait préavisé favorablement le projet et que rien ne laissait penser qu’elle n’aurait pas dûment examiné ses caractéristiques. Eu égard à ces éléments ainsi qu’au lien direct que ces questions entretenaient avec des aspects techniques, il convenait de s’en remettre à l’avis de l’instance spécialisée. Au demeurant, une voie d’accès depuis le chemin de N______ menait aux six villas, ce qui les rendait facilement accessibles aux engins du service du feu au sens de l’art. 96 al. 1 LCI. Ces engins pourraient même stationner sur le chemin de N______ afin de permettre une intervention sur les villas, dont la plus éloigné se trouvait à un peu moins de 47 m dudit chemin. Pour le surplus, la bonne réalisation du projet serait contrôlée au plus tard lors du dépôt d’un dossier de plans conformes à l’exécution et d’une attestation de conformité établie par un mandataire professionnellement qualifié, laquelle devrait certifier que la construction était conforme à l’autorisation de construire, aux conditions de celle‑ci – en particulier celles du dernier préavis de la police du feu – ainsi qu’aux lois et règlements applicables au moment de son entrée en force. Dans ce cadre, devrait notamment être produite une attestation de conformité certifiant que la directive n° 7 avait été respectée. Les conditions d’accès des véhicules du SIS et l’existence d’une place de travail apparaissaient ainsi remplies.

de. En estimant que l’abattage de neuf arbres portait gravement atteinte à la qualité paysagère du site, les voisins ne faisaient que tenter de substituer leur propre appréciation, forcément subjective et biaisée, à celle objective de l’OCAN, autorité composée de spécialistes capables d’émettre un jugement dépourvu de subjectivisme et de considérations étrangères aux buts de protection fixés par la loi. Le fait que l’OCAN puis le département avaient procédé à une analyse différente de la leur ne permettait pas de retenir un abus ou un excès de leur pouvoir d’appréciation. Le TAPI, qui devait faire preuve de retenue et respecter la latitude de jugement conférée à l’OCAN, s’agissant d’un domaine faisant appel à des connaissances techniques, ne pouvait en corriger le résultat, en l’occurrence parfaitement défendable, en fonction d’une autre conception, sauf à statuer en opportunité, ce que la loi lui interdisait de faire (art. 61 al. 2 LPA).

S’agissant des mesures de compensation, le préavis liant de l’OCAN ne prévoyait pas un nombre spécifique d’arbres à replanter, imposant la replantation d’arbres pour un certain montant et conditionnant les abattages à la fourniture d’un projet chiffré de replantation, avec pour effet que le respect de ces conditions serait examiné plus tard. Il en résultait que le grief concernant l’absence de compensation adéquate était prématuré, le projet de replantation figurant sur le plan d’aménagement paysager n’étant qu’indicatif.

D. a. Le 11 novembre 2024, les voisins ont recouru contre ce jugement auprès de la chambre administrative. Ils ont conclu qu’il leur soit donné acte de ce qu’ils ne remettaient pas en cause les chiffres 1 et 2 du dispositif du jugement entrepris, en ce sens qu’il déclarait recevable leur recours et leur donnait acte du fait que l’autorisation de construire DD 1______ délivrée le 15 juillet 2021 était annulée, à l’admission du recours contre les chiffres 3 et 4 du dispositif du jugement, à l’annulation du jugement et de l’autorisation de construire DD 1______ – RE délivrée le 15 juin 2022.

aa. Le grief de la violation de l’art. 72 LCI avait été spontanément soulevé par le TAPI le 28 mars 2023. Ils avaient pu se déterminer à ce sujet à deux reprises, les 15 mai et 9 juin 2023 sans que leurs arguments incluent de nouveaux griefs. Dans le jugement en cause, le TAPI avait retenu que la « position de la DAC et du département, […], ne peut être suivie puisqu’elle contrevient à l’art. 72 LCI, ce que le TAPI peut constater de sa propre initiative, que celui-ci soit ou non invoqué par les recourants ». Dans l’ATA/257/2024, la chambre administrative avait déclaré irrecevable le grief de violation de l’art. 72 LCI en retenant à tort qu’ils avaient invoqué ce grief. Elle avait admis le recours et renvoyé la cause au TAPI pour examen des autres griefs. Le Tribunal fédéral avait ensuite déclaré irrecevable leur recours au motif que ce dernier ne pouvait pas faire l’objet d’un recours immédiat. En cas de rejet de leur recours, ils porteraient à nouveau ce grief devant le Tribunal fédéral.

ab. Le projet autorisé ne correspondait pas à celui qui avait été initialement déposé.

K______ avait demandé la reconsidération de la décision du 15 juillet 2021 en accompagnant sa requête des documents suivants : un courrier de son mandataire, un plan d’ensemble dans sa version du 8 février 2022, un formulaire de requête de stationnement sur fonds privés N03, un plan d’aménagement paysager du 4 février 2022, un rapport acoustique du 8 février 2022, un formulaire d’attestation du respect des exigences de protection contre le bruit pour PAC du 8 février 2022 et un extrait du plan cadastral du 11 février 2022.

Cette demande en reconsidération se fondait en réalité sur une série d’éléments nouveaux et non sur la base des faits établis par le département pour rendre la décision du 15 juillet 2021. Au-delà des termes employés par la requérante, la décision du 15 juin 2022 devait être qualifiée de décision sur demande d’autorisation au sens des art. 2 ss LCI et non en reconsidération qui supposait le maintien de l’état de fait existant. Indépendamment de la question de savoir si le département entendait agir par le biais d’une reconsidération obligatoire ou facultative, celui-ci n’avait pas « re-décidé » sur la base des faits tels qu’ils avaient été établis, mais sur la base d’un nouveau projet. Dès lors qu’elle avait été annulée sans qu’une décision de renvoi soit prononcé, la DD 1______ avait été mise à néant.

En conséquence, la nouvelle version du projet aurait dû être publiée dans la FAO au même titre qu’une nouvelle autorisation, en respectant le principe de double mise à l’enquête. Il fallait considérer que les promoteurs avaient renoncé au bénéfice de l’autorisation initiale et en avaient sollicité une nouvelle, avec un nouveau numéro d’autorisation. Les nouvelles pratiques et les nouvelles normes, notamment en matière d’indice de verdure, auraient ainsi été appliquées et ils n’auraient pas été contraints de recourir. Si une nouvelle publication avait eu lieu, les tiers auraient compris que le projet avait été modifié une fois de plus. Or, les tiers n’avaient pas pu exprimer leur point de vue.

Ce qui précédait était confirmé par le fait que le département n’avait pas modifié sa décision de base, mais en avait rendu une nouvelle, en mentionnant les éléments nouveaux (plans version n° 5 ; préavis sur cette version) et en annulant celle de base. Si la voie de la reconsidération avait permis de révoquer la décision du 15 juillet 2021 qui consacrait de graves violations du RPSFP, elle ne permettait pas de donner naissance à la décision du 15 juin 2022. Le département était en droit de révoquer la décision du 15 juillet 2021 qui était viciée mais il ne pouvait pas rendre une nouvelle décision car cela supposait l’apport d’un nouveau dossier ce qui ne correspondait pas à la définition de la reconsidération.

Le TAPI n’avait pas précisé si le département avait agi par le biais d’une reconsidération obligatoire ou facultative. Toutefois, il ressortait du jugement querellé, d’une part, que le TAPI s’était référé à la liberté d’appréciation du département pour entrer en matière sur une reconsidération et, d’autre part, qu’il ne précisait pas si les éléments nouveaux du projet modifié constituaient ou pas des faits nouveaux. Il découlait de ce raisonnement que le département avait agi par le biais d’une reconsidération facultative.

Afin de déterminer si le département avait excédé ou abusé de son pouvoir d’appréciation, le TAPI avait fait l’analogie avec la demande complémentaire prévue à l’art. 10A RCI. Il avait retenu que pour qu’il y ait un abus voire un excès, la demande en reconsidération devait concerner un projet sensiblement différent. Il avait estimé que l’ajout de places de parking n’altérait pas de manière substantielle les caractéristiques principales du projet et que le projet modifié ne portait pas sur l’adjonction d’un ouvrage séparé d’une certaine importance. Or, le projet modifié prévoyait de doubler le nombre de places de stationnement sur cinq des six villas, côté nord, au détriment d’éléments végétaux, ce qui avait fait l’objet de cinq préavis supplémentaires. Ce doublement introduisait des modifications importantes à plusieurs niveaux : doubler les places de parking pouvait modifier l’implantation générale du projet en augmentant la capacité d’accueil des véhicules, ce qui allait au-delà du simple ajustement ; réduire la surface végétale pour augmenter des places de stationnement altérait l’esthétique du site et pouvait avoir des répercussions environnementales. En outre, les espaces végétaux jouaient souvent un rôle dans l’atténuation des nuisances (bruit, pollution) et dans la gestion des eaux de ruissellement, aspects qui pouvaient nécessiter une nouvelle analyse d’impact. Le TAPI avait minimisé l’impact de l’ajout de places de stationnement en retenant qu’il ne s’agissait pas d’un ouvrage séparé d’une certaine importance. En effet, cette modification avait nécessité cinq préavis supplémentaires.

Le TAPI avait fait une analogie avec la demande complémentaire prévue à l’art. 10A LCI en omettant de citer l’al. 6 de cette disposition qui prévoyait que l’autorisation complémentaire suivait, quant à sa validité, le sort de l’autorisation principale. L’intention du législateur avait été de lier la demande complémentaire à la demande principale et ainsi de restreindre la portée de la demande complémentaire et donc l’application de la notion de projet modifié sensiblement différent. Par conséquent, si on appliquait l’art. 10A LCI par analogie, la décision du 15 juin 2022 aurait dû suivre celle du 15 juillet 2021 et par conséquent aurait dû être annulée.

aba. En empruntant la voie de la reconsidération et non celle de la demande d’autorisation au sens de l’art. 2 LCI, la décision du 15 juin 2022 consacrait de nombreuses violations à la loi, à savoir des art. 2 et 9 RCI qui concernaient les pièces qui devaient être déposées par le demandeur et les indications que celui-ci devait fournir à propos des objets destinés à occuper le sous-sol de façon permanente, mais aussi de l’art. 3 LCI concernant la publication de la demande d’autorisation dans la FAO, la procédure d’observations et la transmission du dossier aux communes, départements et organismes intéressés.

abb. L’art. 59 al. 4bis LCI avait été violé.

ac. Le TAPI avait considéré que le projet respectait les critères d’intégration dans le quartier et que la dérogation à l’art. 59 al. 4 LCI était justifiée. Le TAPI avait accordé un poids disproportionné au préavis final favorable de la CA en ne tenant pas compte de ses critiques initiales sur l’implantation, la densité et l’architecture du projet, jugée banale et sans qualité. Or, ces aspects n’avaient pas été substantiellement modifiés dans les versions ultérieures du projet. La CA n’ayant pas été consultée sur les versions 3 et 4 du projet, il était difficile de conclure que les modifications apportées répondaient réellement aux préoccupations initiales. L’absence de nouvelles critiques dans le dernier préavis ne signifiait pas nécessairement une approbation complète, et la décision du TAPI de s’y fier aveuglément sans reconsidérer les objections de la CA était discutable. Le fait que la CA ne s’était pas prononcée sur la question de la dérogation dans son dernier préavis, après avoir initialement soulevé des objections sérieuses, créait une ambiguïté quant à son approbation réelle du projet dans sa version finale. En omettant de se prononcer explicitement sur la dérogation, la CA n’avait pas confirmé, de manière claire, que les modifications apportées répondaient aux exigences de densité imposées par l’art. 59 al. 4 LCI. Ce silence ne devait pas être interprété comme une acceptation tacite, d’autant plus que la question de la densité restait un point central pour l’intégration du projet dans un quartier de maisons individuelles. Le TAPI aurait dû exiger une clarification de la CA.

Bien que la commune eût émis un avis défavorable, invoquant l’absence de planification pour envisager une dérogation et l’importance de préserver une gradation entre les constructions du secteur, le TAPI avait estimé que cet avis, non contraignant, devait céder face aux autres préavis favorables. Le TAPI avait ainsi minimisé l’importance de ce préavis défavorable et méconnu l’importance de préserver l’identité locale et l’aménagement harmonieux du secteur. La dérogation à la densité risquait d’ouvrir la porte à une densification progressive du quartier. Le TAPI aurait dû procéder à une analyse plus approfondie des critiques initiales de la CA et du préavis négatif de la commune.

Le fait que la CA avait rendu un préavis favorable sans que le projet ne subisse de modifications significatives remettait en question la cohérence de cette évaluation ce que le TAPI n’avait pas pris en compte. Le TAPI s’était référé à l’IUS et affirmé que celui-ci respectait les limites de l’art. 59 al. 4 LCI. Pourtant, l’IUS ne constituait qu’un des nombreux critères d’évaluation d’un projet de construction. Se baser sur ce seul indice pour justifier la compatibilité du projet avec le caractère du quartier négligeait des aspects qualitatifs et visuels, tels que l’échelle des constructions, leur alignement et la conservation des espaces verts. Enfin, si la densification permettait de lutter contre la pénurie de logements, cela ne suffisait pas pour justifier une densification qui porterait atteinte au caractère établi d’un quartier. L’autorisation en cause créait un précédent en introduisant pour la première fois un habitat contigu dans le secteur, ce qui n’était pas compatible avec la typologie du quartier et risquait d’ouvrir la voie à des projets similaires compromettant l’identité locale.

ad. Le TAPI avait omis de relever que la police du feu ne s’était pas prononcée sur la dernière version des plans. Ainsi, la question des accès incendie n’avait pas été examinée de manière approfondie. Le TAPI ajoutait que le projet serait contrôlé plus tard lors du dépôt d’un dossier de plans conformes à l’exécution et d’une attestation de conformité. Toutefois, la sécurité incendie ne pouvait être reportée. La mise en place d’une zone de travail pour les services du feu dépendait d’un accord de l’ensemble des copropriétaires du chemin. Cet accord n’avait pas été obtenu. Sans une garantie préalable de cet aménagement, les services de secours pourraient se retrouver dans l’incapacité d’intervenir efficacement en cas d’incendie. L’absence de validation des mesures de sécurité contrevenait donc à la directive n° 7. Reporter cette vérification à une phase ultérieure exposait le voisinage à un risque grave et inutile. Si les aménagements requis n’étaient pas conformes, il serait potentiellement impossible d’y remédier à un stade avancé du projet, laissant le voisinage sans protection.

ae. L’art. 14 du règlement sur la conservation de la végétation arborée du 27 octobre 1999 (RCVA - L 4 05.04) avait été violé.

af. La chambre administrative avait violé l’art. 69 al. 1 LPA.

b. K______ et L______ ont conclu au rejet du recours.

ba. Le projet que K______ avait déposé en juillet 2021 n’était pas sensiblement différent de celui proposé initialement en ce sens qu’il n’altérait pas de manière substantielle les caractéristiques du premier. La principale modification concernait l’ajout de quelques places de stationnements ce qui n’emportait aucune augmentation de la hauteur ou de la profondeur du futur immeuble, ni de modification importante de l’emprise au sol. Le projet final était le fruit des différents échanges entre K______ et les autorités, de sorte que la décision du 15 juin 2022 tenait compte de l’ensemble des éléments de fait qui avaient motivé celle du 15 juillet 2021 et demeuraient pertinents. L’office des autorisations de construire (ci-après : OAC) avait indiqué que les préavis émis préalablement faisait partie intégrante de la décision du 15 juin 2022.

L’autorisation se fondait sur des éléments nouveaux, ce que la reconsidération facultative autorisait. L’analogie faite par le TAPI avec l’art. 10A RCI était convaincante, un abus du pouvoir d’appréciation ne pouvant pas être retenu lorsque la demande en reconsidération aurait de toute façon rempli les critères d’une demande complémentaire. Contrairement à ce qu’affirmaient les recourants, la DD 1______ n’avait pas été mise à néant. Le département était en droit de rendre une décision en reconsidération qui ne constituait pas une nouvelle décision sur demande d’autorisation distincte. Ce se serait faire preuve de formalisme excessif que de mettre cette décision à néant et de les obliger à solliciter une nouvelle demande.

bb. Les recourants ne retiraient aucun avantage pratique des griefs qu’ils soulevaient s’agissant des violations des art. 2 et 3 LCI ainsi que 9 RCI. Le respect des normes relatives aux formalités des procédures d’autorisations de construire n’intéressait que l’autorité et ne revêtait aucun intérêt pratique pour les voisins.

bc. L’art. 59 al.4bis LCI n’était pas applicable, la demande d’autorisation ayant été déposée avant le 28 novembre 2020. Un préavis communal favorable n’était pas nécessaire. Le projet autorisé n’avait pas apporté de modification essentielle par rapport au projet préavisé par la CA le 21 juillet 2020. Celle-ci s’était prononcée favorablement à l’octroi d’une dérogation à l’art. 59 al. 4 LCI.

bd. Les recourants substituaient leur propre appréciation à celle de la CA en soutenant que les modifications apportées au projet ne pouvaient pas être de nature à la faire changer d’avis. Or, la CA avait fini par rendre un préavis favorable avec dérogation à l’art. 59 al. 4 LCI tout en précisant que le projet répondait aux remarques qu’elle avait émises dans son précédent préavis. Il en découlait que la commission chargée de juger de la compatibilité du projet avec le caractère, l’harmonie et l’aménagement du quartier avait été convaincue par le projet modifié.

be. Le projet visait la construction de villas, de sorte que les modalités prévues par la directive n° 7 ne s’appliquaient pas. Cela étant, cette directive était quoi qu’il en respectée. La police du feu avait estimé que la sécurité des futurs habitants et du voisinage en lien avec d’éventuels incendies était garantie.

bf. Les griefs des recourants relatifs à l’absence de compensation adéquate étaient prématurés dès lors que le projet de replantation figurant sur le plan d’aménagement n’était qu’indicatif et que l’OCAN serait appelé à examiner le projet de replantation plus tard, comme cela ressortait de son préavis.

c. Le 13 décembre 2024, le département a conclu au rejet du recours.

d. Le 31 janvier 2025, les recourants ont répliqué et persisté dans leurs conclusions.

Il ressortait de la doctrine et de la jurisprudence que si l’autorité avait le droit, sur la base du dossier existant, de modifier sa décision ou de la révoquer, elle ne pouvait pas administrer de nouvelles preuves (par exemple examiner des plans modifiés). Si elle administrait de nouvelles preuves et rendait ensuite une décision en reconsidération, elle abusait de son pouvoir d’appréciation. Or, le département avait rouvert l’instruction pour instruire de nouvelles pièces et rendre une nouvelle décision. Il ne s’était pas limité à demander des clarifications mais avait rouvert un dossier clos et examiné un nouveau projet qui avait nécessité de nouveaux documents, dont des plans différents et d’autres préavis. Le département avait administré de nouvelles preuves et abusé de son pouvoir d’appréciation en rendant une décision en reconsidération plutôt qu’une décision sur demande d’autorisation de construire.

Ils admettaient qu’à la suite de l’annulation de la décision attaquée, ils n’avaient plus d’intérêt juridique à ce que le TAPI se prononce sur leur recours. En revanche, ils contestaient l’absence de préjudice résultant de la nouvelle décision rendue en reconsidération en juin 2022. En effet, cette décision, en particulier les constructions qu’elle autorisait, méconnaissait de nombreuses dispositions notamment les nouvelles dispositions qui exigeaient un préavis favorable de la commune pour permettre une densité dérogatoire. Ils subissaient un préjudice en raison d’une densité artificiellement supérieure rendue possible par une fiction consistant à considérer que le permis annulé avait été déposé avant l’entrée en vigueur de l’art. 59 al. 4bis LCI.

Ils conservaient un avantage pratique à soulever les griefs de violations des art. 2 et 3 LCI ainsi que 9 RCI. En effet, si la nouvelle demande avait été introduite dans les règles de l’art, ils auraient été en mesure de participer pleinement à la procédure d’autorisation et de formuler des observations concernant les impacts du projet sur leurs propriétés. En outre, si la procédure avait été respectée, la densité du projet ne dépasserait pas 0.3 eu égard au préavis défavorable de la commune. Ils avaient été privés de leur droit de faire appliquer le nouveau droit à un projet venant remplacer un permis annulé.

e. Les parties ont été informées, le 3 février 2025, que la cause était gardée à juger.

f. Le 17 février 2025, K______ et L______ ont produit une duplique spontanée transmise aux parties.

g. Les arguments des parties et le contenu des pièces seront développés, en tant que de besoin, dans la partie en droit du présent arrêt.

EN DROIT

1.             Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ ‑ E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a LPA).

2.             Le litige porte sur la conformité au droit de l’autorisation de construire DD 1______ – RE délivrée le 15 juin 2022 et confirmée par le TAPI.

3.             Les recourants soulèvent tout d’abord le grief d’une mauvaise qualification de la décision entreprise qui serait, selon eux, une décision sur demande d’autorisation et non une décision en reconsidération. Ils soutiennent que le projet déposé le 15 février 2022 est différent du projet autorisé le 15 juillet 2021 et qu’en empruntant la voie de la reconsidération, la décision consacrerait des violations des art. 2 et 3 LCI, 9 RCI ainsi que 59 al. 4bis LCI.

3.1 Selon l’art. 67 LPA, intitulé effet dévolutif du recours, dès le dépôt du recours, le pouvoir de traiter l’affaire qui en est l’objet passe à l’autorité de recours (al. 1). Toutefois, l’autorité de première instance peut, en cours de procédure, reconsidérer ou retirer sa décision. En pareil cas, elle notifie, sans délai, sa nouvelle décision aux parties et en donne connaissance à l’autorité de recours (al. 2). L’autorité de recours continue à traiter le recours dans la mesure où la nouvelle décision ne l’a pas rendu sans objet (al. 3).

3.2 L’art. 48 al. 1 LPA prévoit que les demandes en reconsidération de décisions prises par les autorités administratives sont recevables lorsque : un motif de révision au sens de l’art. 80 let. a et b existe (let. a) ; les circonstances se sont modifiées dans une mesure notable depuis la première décision (let. b).

La demande en reconsidération au sens de l'art. 48 LPA doit être distinguée de la demande en reconsidération facultative, qui peut être déposée en tout temps, mais dans le cadre de laquelle l'autorité dispose d'un libre pouvoir d'appréciation (Stéphane GRODECKI/Romain JORDAN, Code annoté de procédure administrative genevoise, 2017, p. 160 n. 610). Si l'autorité est entrée en matière, de sa propre volonté, quand bien même elle n'y était pas obligée, mais a rendu une décision identique à la première, un recours contre cette décision sera possible. Selon le Tribunal fédéral, en matière d'assurances sociales, un tel recours ne pourra porter que sur la question de savoir si les conditions d'une reconsidération de la décision d'origine étaient remplies ou non (ATF 117 V 8 consid. 2). Hors de ce contexte particulier, le recours doit pouvoir porter sur le fond de la nouvelle décision (Thierry TANQUEREL, Manuel de droit administratif, 2e éd., 2018, p. 493 n. 1431).

3.3 Dans le système de la LCI, les avis ou préavis des communes, des départements et organismes intéressés ne lient pas les autorités (art. 3 al. 3 LCI). Ils n'ont qu'un caractère consultatif, sauf dispositions contraires et expresses de la loi ; l'autorité reste ainsi libre de s'en écarter pour des motifs pertinents et en raison d'un intérêt public supérieur (ATA/1157/2018 du 30 octobre 2018 consid. 5j et les références citées). Toutefois, lorsqu'un préavis est obligatoire, il convient de ne pas le minimiser (ATA/873/2018 du 28 août 2018 consid. 6b et les références citées). Dans le système prévu par l'art. 59 al. 4 let. a LCI, tant le préavis de la commune que celui de la CA ont cette caractéristique (ATA/873/2018 précité consid. 6b).

Il n'en demeure pas moins que la délivrance de telles autorisations de construire demeure de la compétence exclusive du département, à qui il appartient de statuer en tenant compte de tous les intérêts en présence (ATA/1273/2017 du 12 septembre 2017 consid. 11c et les références citées).

Selon une jurisprudence bien établie, la chambre de céans observe une certaine retenue pour éviter de substituer sa propre appréciation à celle des commissions de préavis pour autant que l'autorité inférieure suive l'avis de celles-ci. Les autorités de recours se limitent à examiner si le département ne s'écarte pas sans motif prépondérant et dûment établi du préavis de l'autorité technique consultative, composée de spécialistes capables d'émettre un jugement dépourvu de subjectivisme et de considérations étrangères aux buts de protection fixés par la loi (ATA/1344/2023 du 12 décembre 2023 consid. 2.8).

3.4 En l’espèce, la requérante a déposé la DD 1______ auprès du département le 6 novembre 2019. Après le dépôt d’une deuxième, d’une troisième puis d’une quatrième version du projet, cette autorité a délivré l’autorisation sollicitée le 15 juillet 2021. Les recourants ont saisi le TAPI d’un recours contre cette autorisation le 14 septembre 2021. Avant que le TAPI ne juge ce litige, la requérante, par courrier du 15 février 2022, a invité le département à « reprendre l’instruction du dossier et de reconsidérer la décision du 15 juillet 2021 ». Elle contestait les griefs soulevés par les voisins devant le TAPI, mais déposait « par prudence » un projet modifié en vue de la reconsidération de la DD 1______. Le projet comportait désormais deux places de parking par logement. Elle a joint à sa demande un courrier de son mandataire, un plan d’ensemble dans sa version du 8 février 2022, un formulaire de requête de stationnement sur fonds privé NO3, un plan d’aménagement paysager du 4 février 2022, un rapport acoustique du 8 février 2022, un formulaire d’attestation du respect des exigences de protection contre le bruit pour PAC et un extrait du plan cadastral du 11 février 2022. Plusieurs instances ont été consultées, à savoir la CA, qui s’est prononcée favorablement le 22 mars 2022, sans observation, l’OCT, qui a préavisé favorablement le 28 mars 2022, avec le souhait que la place visiteurs soit attribuée à la villa A (à savoir celle la plus proche du chemin de N______), l’OCEau, qui a rendu le même jour un préavis favorable sous conditions, la commune, qui a renouvelé le même jour son préavis défavorable du 31 mars 2021, et enfin le SABRA, qui a préavisé favorablement le 8 avril 2022, sous conditions.

Il ressort en outre du dossier que le projet approuvé en juillet 2021 concernait six villas contiguës projetées en deux blocs disloqués (47.7% THPE), sept places de parking, toutes situées côté nord, devant les villas, étant prévues. À teneur du plan d’ensemble dans sa version du 8 février 2022 et du plan d’aménagement paysager du 4 février 2022, le projet approuvé le 15 juin 2022 concerne toujours six villas contiguës projetées en deux blocs disloqués (47.7% THPE) mais il comporte douze places de parking, également situées côté nord, devant les villas, l’OCT sollicitant le déplacement de la place visiteurs devant la villa A.

3.4.1 Selon les recourants, l’augmentation du nombre de places de stationnement au détriment d’éléments végétaux introduirait des modifications importantes. Ils avancent tout d’abord que le fait de doubler les places de parking « pourrait modifier l’implantation générale du projet en augmentant le capacité d’accueil des véhicules ». Ce faisant, les recourants font preuve d’une attitude contradicoire, l’augmentation du nombre de places de parking de sept à douze étant le résultat du grief de non-conformité au RPSFP qu’ils avaient soulevé dans leur recours devant le TAPI le 14 septembre 2021. C’est en effet entre autres pour répondre à ce grief que la requérante a modifié son projet et sollicité du département qu’il reconsidère sa décision. Quoi qu’il en soit, le projet modifié concerne toujours six villas contiguës projetées en deux blocs disloqués (47.7% THPE) et il ne ressort pas du dossier que son implantation serait modifiée. Quant à la capacité d’accueil des véhicules, qui se trouve de fait augmentée, l’OCT, autorité compétente en matière de trafic et composée de spécialistes, a préavisé favorablement le nouveau projet le 28 mars 2022.

3.4.2 Les recourants indiquent ensuite qu’en réduisant la surface végétale pour augmenter les places de stationnement, le projet modifié altérerait l’esthétique du site mais qu’il pourrait aussi avoir des répercussions environnementales en supprimant des espaces verts qui jouent souvent un rôle dans l’atténuation des nuisances (bruit, pollution) et dans la gestion des eaux de ruissellement au détriment d’éléments végétaux. S’agissant de l’esthétique du site, question qui sera au surplus examinée plus loin, la CA a préavisé favorablement le projet modifié le 22 mars 2022. Quant au problème des eaux de ruissellement, l’OCEau a également préavisé favorablement le nouveau projet, à l’instar du SABRA, autorité compétente en matière de bruit et de pollution de l’air. Cela étant, il découle des pièces produites le 15 février 2022, en particulier du plan d’aménagement paysager du 4 février 2002 et du plan d’ensemble du 8 février 2022, que le nouveau projet diffère du premier en ce sens que le doublement des places de parking impose de renoncer à des plantations de végétaux prévues côté nord. En effet, il ressort du plan du rez‑de‑chaussée du 20 avril 2021 visé ne varietur le 15 juillet 2021, qu’il était alors envisagé d’implanter des végétaux à côté de chaque place de parking, une seule place étant alors prévue devant chaque villa. Il ressort du dossier que dans son premier préavis très critique du 14 janvier 2020, la CA s’était prononcée défavorablement, en raison notamment des effets du projet sur la végétation. Elle avait finalement, le 21 juillet 2020, préavisé favorablement le projet. Consultée à nouveau après le dépôt du projet modifié, la CA l’a préavisé favorablement sans émettre de commentaires quant à la disparition des plantations initialement prévues côté nord, alors même qu’elle avait précédemment témoigné être attentive à cet aspect des choses. Il n’apparaît pour le reste pas que le projet modifié aurait un effet sur les autres plantations prévues par le projet, le préavis de l’OCAN du 19 février 2021 restant pertinent en la matière. En conséquence, il n’apparaît pas que le doublement des places de parking, modification imposée par une mise en conformité avec le RPSFP, aurait justifié le dépôt d’une nouvelle demande d’autorisation de construire, les préavis pertinents ayant au surplus été recueillis.

3.4.3 Les premiers juges ont en outre estimé que la demande déposée en février 2022 n’était pas une demande complémentaire au sens de l’art. 10A RCI.

Cette disposition prévoit qu’est réputée complémentaire la demande qui a pour objet la modification d’une autorisation principale en vigueur, pour laquelle l'attestation de conformité n'a pas encore été adressée au département ou pour laquelle le permis d'occuper n'a pas encore été délivré (al. 1). La demande qui a pour objet un projet sensiblement différent du projet initial ou qui porte sur l'adjonction au projet initial d'un ouvrage séparé et d'une certaine importance est traitée comme une demande nouvelle et distincte (al. 2).

Dès lors qu’il est évident que la demande de février 2022 ne portait pas sur un ouvrage séparé, se pose la question de savoir si elle portait sur un projet sensiblement différent. Dans un ATA/1364/2023 du 19 décembre 2023 (consid. 8), la chambre de céans a tout d’abord rappelé que la limite entre un projet dont l'instruction peut se poursuivre en tant que variante et un projet nouveau devant faire l'objet d'une demande nouvelle est clairement posée par l'art. 10A RCI : c'est le « projet sensiblement différent » du projet initial qui constitue cette limite. Cette différence sensible peut découler d'aspects architecturaux, de l'implantation ou du volume du projet (ATA/1299/2019 du 27 août 2019 consid. 3). La présence de différences entre le projet initial et le projet autorisé est inhérente à l'évolution habituelle d'un dossier de construction entre le début et la fin de l'instruction, du fait qu'il est soumis aux instances consultées chargées d'émettre des préavis, dont les considérations sont susceptibles de conduire à des modifications du projet initial dont la demande a été publiée dans la FAO (ATA/1299/2019 précité consid. 3e). La chambre de céans a ensuite constaté que le projet concerné avait bien fait l’objet de modifications, à savoir que le nombre de bâtiments était passé de quatre à cinq ; le nombre d'étages des bâtiments situés à proximité de la zone agricole avait été réduit d'une unité et le nombre de logements était passé de 54 à 37. Le nombre de places de stationnement était passé de 97 à 80 et la densité globale du projet de 0.48 à 0.44. Si l’ajout d'un nouveau bâtiment n'était pas anodin, il convenait de considérer le projet dans sa globalité ainsi que de tenir compte du fait que ce dernier prévoyait déjà quatre bâtiments et que l'immeuble supplémentaire, à l'instar des autres modifications, n'avait pas eu pour effet de donner une autre orientation au projet ni d'en augmenter l'ampleur. Il apparaissait donc que le projet modifié ne différait pas notablement du projet déposé, mais en constituait une variante, si bien que le dépôt d'une nouvelle d'autorisation n'était pas nécessaire.

Au vu des éléments mis en évidence aux considérants précédents, et au regard de la jurisprudence précitée, il est évident que le projet déposé en février 2022 n’est pas sensiblement différent de celui déjà autorisé. Seul le nombre de places de parking a été modifié alors que le nombre de villas, leur orientation ou leur volume restent inchangés.

3.4.4 Il découle de ce qui précède que le département, saisi de la demande de reconsidération du 15 février 2022, qui sera qualifiée de facultative, était fondé à entrer en matière sur celle-ci. C’est par ailleurs à juste titre que le TAPI a retenu que le département n’avait ni abusé ni excédé de son pouvoir d’appréciation en acceptant de reconsidérer sa décision du 15 juillet 2021 et d’en prononcer une nouvelle. Les voisins, qui ont pu recourir contre cette nouvelle décision auprès du TAPI, puis devant la chambre de céans, n’ont pas été lésés dans leurs droits. Les éventuelles autres personnes qui auraient pu s’estimer lésées par l’autorisation nouvellement délivrée en juin 2022 ont été correctement informées de son existence, celle-ci ayant été publiée dans la FAO. Mal fondé, ce grief sera écarté.

3.4.5 Dès lors que, contrairement à ce que soutiennent les recourants, le département était fondé à suivre la voie de la reconsidération, leurs griefs en violation des art. 2 LCI (relatif à la procédure de demande d’autorisation) et 3 LCI (relatif à la procédure d’autorisation) ainsi que 9 RCI (relatif aux modalités du dépôt d’une demande définitive d’autorisation de construire), seront également écartés.

3.4.6 Les recourants soulèvent le grief de violation de l’art. 59 al. 4bis LCI en raison de l’absence d’un nouveau préavis de la commune. Selon eux, celui-ci était nécessaire, la demande d’autorisation de construire ayant été déposée le 15 février 2022.

L’art. 59 al. 4bis LCI prévoit que dans les communes qui n’ont pas défini de périmètres de densification accrue dans leur plan directeur communal, lorsque les circonstances le justifient et que cette mesure est compatible avec le caractère, l’harmonie et l’aménagement du quartier, le département peut accorder des dérogations conformes aux pourcentages et aux conditions de l’al. 4 let. a et b. Pour toutes les demandes d’autorisation de construire déposées avant le 1er janvier 2023 un préavis communal favorable est nécessaire. Cela étant, dans la mesure où, comme cela vient d’être examiné, la décision doit être qualifiée de décision en reconsidération et que la demande d’autorisation de construire sur laquelle elle porte a été déposée le 6 novembre 2019, l’art. 59 al. 4bis LCI n’est pas applicable. En effet, l’art. 59 al. 4bis LCI ne s’applique pas à un projet qui a été déposé avant le 28 novembre 2020 (arrêt du Tribunal fédéral 1C_642/2022 du 7 novembre 2023 consid. 4.2.3 ; ATA/54/2025 du 14 janvier 2025 consid. 8.3). Les considérants 9 et 10 que le TAPI consacre à cette question étant conformes au droit, il y sera renvoyé pour le surplus, ce que la jurisprudence admet (ATA/372/2025 du 1er avril 2025 consid. 3 et l’arrêt cité).

4.             Les recourants soulèvent ensuite le grief d’une violation de l’art. 59 al. 4 LCI. Ils reprochent au TAPI d’avoir accordé au préavis final favorable donné par la CA le 22 mars 2022 un poids disproportionné, sans tenir compte des critiques formulées dans un premier temps par cette instance sur l’implantation, la densité et l’architecture du projet. Selon eux, l’absence de nouvelles critiques dans le dernier préavis de la CA ne signifiait pas nécessairement une approbation complète. Le fait que la CA n’avait pas été consultée lors des étapes 3 et 4 du projet posait problème et le TAPI aurait en conséquence dû exiger une clarification de cette instance. Le TAPI avait en outre minimisé l’absence de mention explicite de la dérogation dans le dernier préavis de la CA, l’importance du préavis défavorable de la commune et méconnu l’importance de préserver l’identité locale et l’aménagement harmonieux du secteur. Le TAPI s’était référé à l’IUS et affirmé que celui-ci respectait les limites de l’art. 59 al. 4 LCI. Pourtant, l’IUS ne constituait qu’un des nombreux critères d’évaluation d’un projet de construction. Se baser sur ce seul indice pour justifier la compatibilité du projet avec le caractère du quartier négligeait des aspects qualitatifs et visuels, tels que l’échelle des constructions, leur alignement et la conservation des espaces verts. Enfin, si la densification permettait de lutter contre la pénurie de logements, cela ne suffisait pas pour justifier une densification qui porterait atteinte au caractère établi d’un quartier. L’autorisation en cause créait un précédent en introduisant pour la première fois un habitat contigu dans le secteur, ce qui n’était pas compatible avec la typologie du quartier et risquait d’ouvrir la voie à des projets similaires compromettant l’identité locale.

4.1 Selon l’art. 59 al. 4 let. a LCI, dans sa version applicable en l’espèce, lorsque les circonstances le justifient et que cette mesure est compatible avec le caractère, l’harmonie et l’aménagement du quartier, le département peut autoriser, après consultation de la commune et de la CA, un projet de construction en ordre contigu ou sous forme d’habitat groupé dont la surface de plancher habitable n’excède pas 40% de la surface du terrain, 44% lorsque la construction est conforme à un standard de HPE, 48% lorsque la construction est conforme à un standard THPE, reconnue comme telle par le service compétent.

4.2 Le caractère justifié des circonstances au sens de l'art. 59 al. 4 let. a LCI ne relève pas de l'opportunité mais de l'exercice d'un pouvoir d'appréciation dont la chambre de céans est habilitée, selon l'art. 61 al. 1 let. a LPA, à sanctionner l'excès ou l'abus (arrêt du Tribunal fédéral 1C_204/2021 du 28 octobre 2021 consid. 5.3 et l'arrêt cité).

4.3 La compatibilité du projet avec le caractère, l'harmonie et l'aménagement du quartier, exigée par l'art. 59 al. 4 LCI, est une clause d'esthétique, analogue à celle contenue à l'art. 15 LCI. Une telle clause fait appel à des notions juridiques imprécises ou indéterminées, dont le contenu varie selon les conceptions subjectives de celui qui les interprète et selon les circonstances de chaque cas d'espèce ; ces notions laissent à l'autorité une certaine latitude de jugement. Lorsqu'elle estime que l'autorité inférieure est mieux en mesure d'attribuer à une notion juridique indéterminée un sens approprié au cas à juger, l'autorité de recours s'impose alors une certaine retenue. Il en va ainsi lorsque l'interprétation de la norme juridique indéterminée fait appel à des connaissances spécialisées ou particulières en matière de comportement, de technique, en matière économique, de subventions et d'utilisation du sol, notamment en ce qui concerne l'esthétique des constructions (ATA/1344/2023 précité consid. 9.2 et l'arrêt cité).

4.4 En l’espèce, la CA a rendu, le 14 janvier 2020, un premier préavis défavorable et très critique à l’égard du projet. Elle a ensuite délivré un préavis favorable le 21 juillet 2020. S’il est vrai qu’elle ne s’est pas prononcée sur les versions 3 et 4, elle l’a fait le 22 mars 2022 sur la dernière version du projet, ce qui est déterminant dès lors qu’elle avait à cet instant une connaissance exhaustive du projet. On ne voit en conséquence pas pourquoi l’autorité intimée puis le TAPI auraient dû minimiser la portée de ce dernier préavis, délivré sans observation, voire estimer qu’il ne s’agissait pas d’une « approbation complète ». C’est au surplus à tort que les recourants reprochent au TAPI d’avoir minimisé l’importance du préavis défavorable de la commune. Les premiers juges ont en effet pris en compte ce préavis mais estimé, outre le fait qu’il n’était pas contraignant, que son poids devait être relativisé face aux préavis favorables de toutes les instances consultées auxquels il devait céder le pas. C’est également à tort que les recourants font grief au TAPI de s’être référé à l’IUS et de s’être basé sur ce seul indice pour justifier la compatibilité du projet avec le caractère du quartier. En effet, mis à part la référence aux nombreux préavis favorables rendus, les premiers juges ont à juste titre retenu que la construction de six villas contiguës dans un quartier composé de maisons individuelles n’était pas incompatible avec les exigences de l’art. 59 al. 4 LCI. Ils ont en outre retenu, toujours à juste titre, que la modification de l’aménagement de tels quartiers avait déjà été entamée dans de nombreuses communes afin de pallier les problématiques d’aménagement du territoire, conformément à la volonté du législateur (jugement litigieux, consid. 21).

4.5 Le TAPI a enfin estimé, également au considérant 21 du jugement litigieux, qu’il était regrettable que la CA n’ait pas mentionné la dérogation selon l’art. 59 al. 4 LCI sur son dernier préavis. Les premiers juges ont toutefois à juste titre retenu qu’il fallait renoncer à sanctionner l’absence de cette mention, dès lors que la CA s’était précédemment déclarée, le 21 juillet 2020, favorable à cette dérogation et qu’il était évident et manifeste que les conditions d’octroi d’une telle dérogation étaient, « hors de tout doute raisonnable », réalisées au moment de l’adoption du dernier préavis, lui aussi favorable.

Il découle de ce qui précède que le département était fondé, sans abuser de son pouvoir d’appréciation, à retenir que, compte tenu des circonstances, notamment la pénurie de logements, le projet était compatible avec le caractère, l’harmonie et l’aménagement du quartier. Ce grief sera écarté.

5.             Les recourants soulèvent également une violation de la directive n° 7. Ils estiment que le TAPI avait omis de relever que la police du feu ne s’était pas prononcée sur la dernière version des plans et qu’ainsi la question des accès incendie n’avait pas été examinée de manière approfondie. La mise en place d’une zone de travail pour les services du feu dépendait d’un accord de l’ensemble des copropriétaires du chemin. Cet accord n’avait pas été obtenu. Sans une garantie préalable de cet aménagement, les services de secours pourraient se retrouver dans l’incapacité d’intervenir efficacement en cas d’incendie. Reporter cette vérification à une phase ultérieure exposait le voisinage à un risque grave et inutile. Si les aménagements requis n’étaient pas conformes, il serait potentiellement impossible d’y remédier à un stade avancé du projet, laissant le voisinage sans protection.

5.1 Il est douteux que la directive n° 7 s’applique au cas d’espèce dès lors que selon son ch. 7. 2 (champ d’application), hormis les villas, toute construction au sens de l’art. 96 LCI doit être facilement accessible aux engins du service du feu. Cela étant, même à admettre qu’elle serait applicable, il ressort du dossier que la police du feu a préavisé le projet à deux reprises : le 7 janvier 2020, elle a demandé des modifications relatives au sous-sol puis, le 15 juillet 2020, elle a préavisé favorablement le projet, sous conditions. Or, il ne ressort pas de ces préavis que les accès incendie ou encore la sécurité des voisins auraient posé des problèmes. À ce propos, le TAPI a retenu de manière convaincante qu’une voie d’accès depuis le chemin de N______ menait aux six villas, ce qui les rendait facilement accessibles aux engins du service du feu, ces engins pouvant même stationner sur ce chemin afin de permettre une intervention sur les villas, dont la plus éloignée se trouve à un peu moins de 47 m dudit chemin. Il apparaît en outre que le chemin de N______ a une largeur d’environ 6.5 m, ce qui est supérieur aux 3.5 m prévu au ch. 7. 4 let. b de la directive 7.

Lorsque la police du feu a préavisé favorablement le projet, celui-ci prévoyait six villas divisées en deux blocs de trois villas contiguës reliées par une CDPI, ainsi que douze places de parking habitants et deux visiteurs. Le projet finalement adopté prévoit le même nombre de villas, un nombre de places de parking sensiblement identique et la disparition de la CDPI, les deux blocs séparés faisant place à deux blocs désaxés. On ne peut dès lors, au vu de ces modifications mineures, pas reprocher au département de ne pas avoir à nouveau sollicité la police du feu. En outre, comme l’ont retenu les premiers juges, la bonne réalisation du projet sera contrôlée au plus tard lors du dépôt d’un dossier de plans conformes à l’exécution et d’une attestation de conformité établie par un mandataire professionnellement qualifié, laquelle devra certifier que la construction est conforme à l’autorisation de construire, aux conditions de celle-ci, en particulier celles du dernier préavis de la police du feu, ainsi qu’aux lois et règlements applicables au moment de son entrée en force.

Ce grief sera écarté.

6.             Les recourants se plaignent d’une violation de l’art. 14 RCVA. Selon eux, le TAPI avait omis de préciser que la commune avait rejoint leur appréciation en relevant à plusieurs reprises que l’abattage de neuf arbres portait gravement atteinte à la qualité paysagère du site. L’argument du TAPI selon lequel leur vision était subjective se trouvait ainsi affaibli, la commune étant engagée dans la protection de la qualité paysagère et environnementale. L’OCAN avait imposé la replantation d’arbres et il apparaissait, d’après la requête pour abattage d’arbres de juillet 2020, que la requérante ne prévoyait de planter que cinq arbres, pour un montant de CHF 11'005.-, auxquels s’ajoutaient CHF 4'402.- pour leur plantation. Le reste des compensations était constitué par la création d’une haie indigène, pour un montant de CHF 10'502.80. Or, une telle haie ne constituait pas une replantation d’arbres car elle se composait de buissons ou d’arbustes de faible hauteur qui n’offraient pas les mêmes bénéfices écologiques, esthétiques et environnementaux en ne fournissant pas autant d’ombre et en captant moins de CO2.

6.1 L’art. 14 RCVA prévoit que les propriétaires, mandataires, requérants, constructeurs ou autres usagers de terrains sont tenus de veiller avec la plus grande attention à la préservation des arbres, haies vives et boqueteaux existants (al. 1). Il leur incombe : de traiter les arbres malades ou dépérissants (al. 2 let. a) ; de prendre, notamment lors de travaux, toutes précautions utiles pour assurer la survie des arbres, haies vives et boqueteaux, en se conformant aux directives édictées par le département (al. 2 let. b) ; d'appliquer les mesures arrêtées par le département destinées à prévenir et réparer les dégâts causés par des organismes nuisibles particulièrement dangereux (al. 2 let. c).

6.2 Si on ne peut nier que la commune est concernée par l’abattage d’arbres et les compensations qui en découlent, elle n’est pas l’autorité compétente en la matière. L’OCAN, autorité compétente et composée de spécialistes, a rendu un préavis liant favorable le 19 février 2021. Ce préavis liant ne prévoit pas un nombre d’arbres à replanter. Il impose en effet de replanter des arbres pour un montant de CHF 24'800.- au moins, sans précision du nombre d’arbres. Le préavis liant prévoit en outre qu’avant les abattages, un projet chiffré de replantation doit être fourni à l’OCAN pour accord préalable. Force est donc de constater que la question de la compensation sera examinée plus tard, le grief des recourants étant sur ce point prématuré. Il ressort enfin du préavis de l’OCAN que plusieurs mesures devront être prises pendant les travaux afin de préserver les arbres hors forêt situés à proximité du chantier.

Ce grief sera dès lors également écarté.

7.             Enfin, dans un dernier paragraphe de leur recours intitulé « violation de l’art. 72 LCI », les recourants soutiennent que la chambre de céans a, en déclarant irrecevable le grief de la violation de l’art. 72 LCI, violé l’art. 69 al. 1 LPA. L’application du droit d’office par le TAPI était primordial pour éviter que les problématiques de la LCI liées à la disposition interne des constructions nouvelles échappent systématiquement à tout contrôle, faute pour quiconque d’avoir un intérêt pratique à faire respecter les dispositions prévues par le législateur. Dans la partie en fait de leur recours, les recourants indiquent qu’en cas de rejet de leur recours, ils porteront à nouveau le grief de violation de l’art. 72 LCI devant le Tribunal fédéral.

7.1 Selon l’art. 69 al. 1 LPA, la juridiction administrative chargée de statuer est liée par les conclusions des parties. Elle n’est en revanche pas liée par les motifs que les parties invoquent.

L’art. 69 al. 3 LPA prévoit que si la juridiction administrative admet le recours, elle réforme la décision attaquée ou l’annule. Si elle le juge nécessaire, elle peut renvoyer l’affaire à l’autorité qui qui a statué pour nouvelle décision.

7.2 Selon l’art. 72 LCI, les pièces servant à l’habitation de jour ou de nuit, les cuisines et les locaux où l’on travaille en permanence doivent être pourvus de baies ouvrant directement sur l’extérieur et disposant d’un champ de vue libre dénommé vue droite. L’art. 73 LCI traite du calcul des vues droites.

Dans le cas d’espèce, les recourants ont recouru contre la décision en cause auprès du TAPI le 16 août 2022. Le 22 juin 2023, par substitution de motif, le TAPI a admis ce recours et annulé la décision. Les premiers juges ont estimé que l’autorisation de construire violait les art. 72 et 73 LCI. Saisi d’un recours déposé par les sociétés requérantes, qui ont notamment conclu à son annulation, la chambre de céans a annulé ce jugement et renvoyé la cause au TAPI le 27 février 2024. Elle a retenu que le TAPI n’aurait pas dû entrer en matière sur le grief d’une violation de l’art. 72 LCI et que ce grief aurait dû être déclaré irrecevable. Saisi à son tour d’un recours déposé par les recourants, le Tribunal fédéral l’a déclaré irrecevable, l’arrêt attaqué ne pouvant pas faire l’objet d’un recours immédiat devant cette instance. Contrairement à ce que soutiennent les recourants, la chambre de céans a dès lors agi conformément et dans les limites que lui imposent les al. 1 et 3 de l’art. 69 LPA. Le grief de violation de l’art. 69 al. 1 LPA sera en conséquence écarté.

Quant au grief de violation de l’art. 72 LCI, cette question a déjà été tranchée dans l’ATA/257/2024. Il convient de se référer à cet arrêt, les arguments des recourants n’étant pas de nature à en modifier les conclusions.

Il découle de ce qui précède que, mal fondé, le recours sera rejeté. Il est donné acte aux recourants qu’ils ne remettent pas en cause les ch. 1 et 2 du dispositif du jugement du TAPI, en ce sens qu’il déclare recevable leur recours et leur donne acte du fait que l’autorisation de construire DD 1______ délivrée le 15 juillet 2021 a été annulée.

8.             Vu l’issue du litige, un émolument de CHF 2'000.- sera mis à la charge solidaire des recourants qui succombent (art. 87 al. 1 LPA). Une indemnité de procédure de CHF 2’000.- sera allouée solidairement à K______ et L______ qui y ont conclu, à la charge solidaire des recourants.

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 11 novembre 2024 par A______, B______ et C______, D______, E______, F______ et G______, H______, I______ et J______ contre le jugement du TAPI administratif de première instance du 9 octobre 2024 ;

au fond :

le rejette ;

met un émolument de CHF 2'000.- à la charge solidaire de A______, B______ et C______, D______, E______, F______ et G______, H______, I______ et J______ ;

alloue une indemnité de procédure de CHF 2'000.- à K______ SA et L______ SA, prises solidairement, à la charge solidaire de A______, B______ et C______, D______, E______, F______ et G______, H______, I______ et J______ ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Me Paul HANNA, avocat des recourants, à Me Mark MULLER, avocat des intimées, au département du territoire - OAC ainsi qu'au Tribunal administratif de première instance.

Siégeant : Patrick CHENAUX, président, Francine PAYOT ZEN-RUFFINEN, Claudio MASCOTTO, juges.

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

J. PASTEUR

 

 

le président siégeant :

 

 

P. CHENAUX

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

la greffière :