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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2621/2024

ATA/52/2025 du 14.01.2025 ( FPUBL ) , ADMIS

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2621/2024-FPUBL ATA/52/2025

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 14 janvier 2025

 

dans la cause

 

A______ recourant
représenté par Me Christian DANDRÈS, avocat

contre

DÉPARTEMENT DE L'INSTRUCTION PUBLIQUE, DE LA FORMATION ET DE LA JEUNESSE intimé



EN FAIT

A. a. A______, né le ______ 1960, a été engagé en qualité de maître d’enseignement général au sein de l’enseignement secondaire II du département de l’instruction publique, de la formation et de la jeunesse (ci-après : DIP) en 1984.

b. Par courrier du 29 août 2023, la direction générale de l’enseignement secondaire II (ci-après : DGES II) a invité les membres du personnel concernés par la thématique de la rente–pont AVS en 2024 à consulter la fiche du mémento des instructions de l'office du personnel de l'État (ci-après : MIOPE) « 06.02.04 Rente‑pont AVS » (ci‑après : la fiche MIOPE) ainsi qu’une brochure, transmise en annexe.

La lettre rappelait les conditions d’éligibilité à la rente-pont, parmi lesquelles celle de « ne pas bénéficier, dans les six mois qui suivent le départ projeté, d’une rente AVS ». Elle précisait que pour un départ au 31 août 2024, le personnel enseignant devait déposer sa requête avant le 29 février 2024.

c. Le 6 février 2024, A______ a sollicité du DIP l’octroi d’une rente‑pont AVS complète à compter du 1er septembre 2024 selon le formulaire idoine, lequel mentionnait la condition « d’être à plus de six mois de l’âge donnant droit à la rente AVS ordinaire ».

Le même jour, il a démissionné pour le terme du 31 août 2024.

d. Par courriel du 8 février 2024, le DIP a répondu négativement à la demande de rente-pont, sur la base de l’art. 3 let. b de la loi sur la rente-pont AVS du 3 octobre 2013 (LRP - B 5 20), exigeant d’être « à plus de six mois de l’âge donnant droit à une rente AVS ». Le 1er septembre 2024, l’intéressé ne serait pas à six mois de l’âge légal de la retraite, « soit au 4 février 2025 ».

e. Par courrier du 4 mars 2024, la DGES II a pris acte de la démission de A______.

f. Dans le cadre de l’échange de courriels qui a suivi, le directeur des ressources humaines de la DGES II a précisé, le 22 mars 2024, à A______, qu’il ne remplissait pas la condition de l’art. 3 let. b LRP « puisqu’il fallait sept mois entre la date de démission et la rente AVS ».

g. Par décision du 5 juin 2024, la conseillère d’État en charge du DIP a rejeté la demande de rente-pont AVS de A______.

L’art. 3 LRP précisait les conditions cumulatives auxquelles un membre du personnel pouvait bénéficier d’une rente AVS à la fin des rapports de service. La let. b n’était pas remplie.

Les travaux préparatoires précisaient que « la demande de versement de la rente AVS auprès de la caisse de compensation doit intervenir au moins six mois avant la prise de retraite définitive. Les complications administratives engendrées par le versement d’une rente-pont AVS pendant une période inférieure ou égale à six mois sont trop importantes ».

A______ ayant démissionné pour le 31 août 2024, le versement d’une rente-pont interviendrait entre les mois de septembre 2024 et février 2025, soit à six reprises. La condition de l’art. 3 let. b LRP évoquait une période supérieure à six mois à compter de l’âge ouvrant le droit à une rente AVS, soit un nombre de versement de rentes supérieur à six.

La fiche MIOPE citait expressément l’art. 3 LRP et la lecture du texte de loi ne permettait aucune autre interprétation.

B. a. Par acte du 5 juillet 2024, A______ a interjeté recours contre cette décision devant le Conseil d’État. Il a conclu à son annulation et à être mis au bénéfice de la rente-pont sollicitée.

L’interprétation faite par le DIP de l’art. 3 let. b LRP violait le principe de la légalité, de la bonne foi et de l’interdiction de l’arbitraire. Le texte de la disposition légale était clair, tout comme la pratique administrative publiée dans le MIOPE qui renvoyait à la brochure. Cette dernière mentionnait que la rente-pont était conditionnée notamment au fait « de ne pas bénéficier, dans les six mois qui suivent le départ projeté, d’une rente de l’AVS ». Cette formulation était reprise à l’identique dans le courrier de la DGES II du 29 août 2023.

Il avait sollicité sa mise à la retraite pour le 31 août 2024, date du « départ projeté », ainsi qu’une rente-pont à compter du 1er mars 2025. Plus de six mois séparaient ces deux dates.

En tous les cas, sa bonne foi devait être protégée. Il avait planifié son départ à la retraite plusieurs mois avant sa demande du 6 février 2024. Il s’était fié aux informations fournies par son employeur. Il aurait sollicité une mise à la retraite plus tôt si celui-là lui avait communiqué l’interprétation qu’il entendait faire de la disposition litigieuse.

b. À la suite d’un échange de vues entre le Conseil d’État et la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative), le recours a été transmis à cette dernière.

c. Le DIP a conclu au rejet du recours.

Le texte litigieux était clair puisqu’il indiquait la nécessité d’être à plus de six mois de l’âge donnant droit à une rente AVS. Cela revenait à dire qu’il fallait un minimum de sept mois entre la date de la démission et le premier versement de la rente AVS. La nécessité d’être à plus de six mois de ce premier versement impliquait également de facto que le nombre de rentes-pont versées devait être supérieur à six, soit au minimum sept, ce que les travaux préparatoires confirmaient.

Le grief de la bonne foi devait être écarté. La phrase incriminée, à savoir « ne pas bénéficier, dans les six mois qui suivent le départ projeté, d’une rente de l’AVS » ne pouvait être comprise autrement que ce qui était indiqué à l’art. 3 let. b LRP puisque le fait de bénéficier d’une rente AVS, pour reprendre les termes légaux, impliquait le versement d’une somme d’argent, lequel intervenait le mois qui suivait la date d’anniversaire.

Le recourant aurait pu prendre ses renseignements auprès de son employeur bien avant sa demande du 6 février 2024, dès lors qu’il était en possession de toutes les informations pertinentes dès la fin du mois d’août 2023. Il avait par ailleurs persisté dans sa démission pour le 31 août 2024 malgré les premiers retours négatifs. Il n’avait donc pas pris une décision sur la base de renseignements erronés donnés par l’administration. Il n’alléguait enfin pas de dommage financier et ne fournissait aucun élément de preuve à ce sujet.

d. Dans sa réplique, le recourant a persisté dans son explication selon laquelle « être à plus de six mois » signifiait que cette condition était remplie dès six mois et un jour. L’interprétation devait être littérale. La démission ne pouvant être donnée que six mois à l’avance pour la fin d’une année scolaire, il ne lui était plus possible de démissionner pour la fin du mois de juillet et ainsi se conformer à la lecture erronée de la loi, faite par le DIP. Son ex-employeur ne lui avait d’ailleurs jamais proposé d’accepter sa démission pour un délai plus court, par exemple la fin du mois de juillet, et ainsi lui permettre d’obtenir cette rente. Il en avait résulté un inconvénient majeur puisqu’il s’était retrouvé contraint de vivre sur ses économies de septembre 2024 à mars 2025.

e. Sur ce, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1.             Le recours a été interjeté en temps utile (art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 ‑ LPA ‑ E 5 10).

Il a été dûment transmis par le Conseil d’État à la chambre administrative, juridiction compétente, à la suite d’un échange de vues, conformément aux art. 11 et 13 al. 3 LPA, 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 (LOJ ‑ E 2 05) ainsi qu’à la jurisprudence (ATA/200/2015 du 24 février 2015).

Le recours est ainsi recevable.

2.             Le litige porte sur le droit du recourant à une rente-pont AVS entre le 1er septembre 2024 et le 28 février 2025.

2.1 La LRP a pour but de contribuer à l’aménagement des départs à la retraite. La loi instaure le versement d’une rente-pont AVS, financée par l’employeur, en cas de prise de retraite anticipée avant l’âge donnant droit à une rente AVS (art. 1 al. 1 et 2 LRP).

Elle est applicable notamment aux membres du personnel dont les rapports de service relèvent de la loi sur l’instruction publique du 17 septembre 2015 (LIP - C 1 10 ; art. 2 al. 2 LRP).

2.2 À teneur de l’art. 3 LRP, un membre du personnel peut bénéficier d’une rente‑pont AVS à la fin des rapports de service si, cumulativement, quatre conditions sont remplies.

Seule la deuxième est litigieuse soit : « il est à plus de six mois de l’âge donnant droit à une rente AVS » (art. 3 let. b LRP).

2.3 La fiche MIOPE, publiée le 13 octobre 2022, est divisée en trois parties.

Dans la première, elle cite le texte légal de plusieurs dispositions de la LRP, dont l’art. 3.

La deuxième, intitulée « commentaires », mentionne que la brochure « rente pont AVS » présente les informations générales relatives à la problématique. Suit une remarque sur le 13e salaire.

Il n’est rien mentionné sous le point 3 « Procédure/processus ».

2.4 La « brochure rente-pont AVS » rappelle les conditions de l’art. 3 LRP. Elle présente la condition de la let. b en des termes différents du texte légal puisqu’elle mentionne que le membre du personnel en activité peut demander à bénéficier de la rente-pont AVS si, au moment de son départ, il remplit la condition de « ne pas bénéficier, dans les six mois qui suivent le départ projeté, d’une rente de l’AVS ».

3.             Selon une jurisprudence constante du Tribunal fédéral, la loi s’interprète en premier lieu selon sa lettre (interprétation littérale). Si le texte légal n’est pas absolument clair, si plusieurs interprétations de celui-ci sont possibles, le juge recherchera la véritable portée de la norme en la dégageant de sa relation avec d’autres dispositions légales, de son contexte (interprétation systématique), du but poursuivi, de son esprit, ainsi que des valeurs sur lesquelles elle repose, singulièrement de l’intérêt protégé (interprétation téléologique), ainsi que de la volonté du législateur telle qu’elle ressort notamment des travaux préparatoires (interprétation historique) (ATF 148 II 299 consid. 7.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_293/2022 du 20 janvier 2023 consid. 5.1 ; ATA/182/2023 du 28 février 2023 consid. 5.4).

Bien que les travaux préparatoires ne soient pas directement déterminants pour l’interprétation et ne lient pas le juge, ils ne sont pas dénués d’intérêt et peuvent s’avérer utiles pour dégager le sens d’une norme (ATF 146 V 87 consid. 7.2.2). Les travaux préparatoires ne seront toutefois pris en considération que s’ils donnent une réponse claire à une disposition légale ambiguë et qu’ils ont trouvé expression dans le texte de la loi (ATF 122 III 469 consid. 5a ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_939/2011 du 7 août 2012 consid. 4).

4.             À teneur de l’art. 21 de la loi fédérale sur l’assurance-vieillesse et survivants du 20 décembre 1946 (LAVS - RS 831.10), les personnes qui ont 65 ans révolus (âge de référence) ont droit à une rente de vieillesse, sans réduction ni supplément (al. 1). Le droit à la rente prend naissance le premier jour du mois qui suit celui au cours duquel l’assuré atteint l’âge de référence. Il s’éteint par le décès de l’ayant droit (al. 2).

5.             En l’espèce, le recourant a démissionné par courrier du 6 février 2024, pour le 31 août 2024, et a sollicité, le 6 février 2024, une rente-pont complète à compter du 1er septembre 2024, étant précisé qu’il aura droit à sa rente AVS à compter du 1er mars 2025.

À teneur de la LRP, un membre du personnel peut bénéficier d’une rente-pont AVS à la fin des rapports de service s’« il est à plus de six mois de l’âge donnant droit à une rente AVS » (art. 3 let. b LRP).

La fin des rapports de service du recourant a eu lieu le 31 août 2024.

« L’âge donnant droit à une rente AVS » correspond au 4 février 2025, date à laquelle le recourant aura 65 ans, en application de l’art. 21 al. 1 LAVS. La date du 1er mars 2025 évoquée par le recourant correspond à la naissance du droit à la rente au sens de l’art. 21 al. 2 LAVS, non à l’âge pertinent donnant droit à celle-ci.

Dès lors, en l’absence d’une période de six mois entre le 31 août 2024 et le 4 février 2025, le recourant ne peut prétendre à percevoir une rente-pont au sens de l’art. 3 LRP.

Les travaux préparatoires confirment cette conclusion. Ils mentionnent que : « La demande de versement de la rente AVS auprès de la caisse de compensation doit intervenir au moins 6 mois avant la prise de retraite définitive. Les complications administratives engendrées par le versement d'une rente-pont AVS pendant une période inférieure ou égale à 6 mois sont trop importantes. » Ils évoquent ainsi une corrélation entre les démarches administratives nécessaires et une durée de rente minimale. Il en ressort que le versement d’une rente pendant six mois est exclu, car impliquant un déséquilibre entre les ressources étatiques nécessaires à l’octroi d’une rente-pont et la prestation proposée. Le législateur souhaitait ainsi offrir la possibilité d’une rente-pont, à condition que celle-ci porte sur le versement de plus de six rentes.

6.             Le recourant allègue que le refus de la rente-pont est contraire au principe de la bonne foi.

6.1 Ancré à l'art. 9 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), et valant pour l'ensemble de l'activité étatique, le principe de la bonne foi exige que l'administration et les administrés se comportent réciproquement de manière loyale (arrêt du Tribunal fédéral 2C_596/2022 du 8 novembre 2022 consid. 8.1). En particulier, l'administration doit s'abstenir de tout comportement propre à tromper l'administré et ne saurait tirer aucun avantage des conséquences d'une incorrection ou insuffisance de sa part (ATF 138 I 49 consid. 8.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_596/2022 du 8 novembre 2022 consid. 8.1). Par ailleurs, la jurisprudence a tiré du principe de la bonne foi et de l’interdiction du formalisme excessif le devoir qui s’impose à l’administration, dans certaines circonstances, d’informer d’office le justiciable qui commet ou s’apprête à commettre un vice de procédure, à condition que celui-ci soit aisément reconnaissable et qu’il puisse être réparé à temps, le cas échéant dans un bref délai (ATF 125 I 166 consid. 3a ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_354/2022 du 26 septembre 2022 consid. 3.1 ; ATA/220/2022 du 1er mars 2022 consid. 5).

6.2 Le principe de la bonne foi protège le citoyen dans la confiance légitime qu’il met dans les assurances reçues des autorités lorsqu'il a réglé sa conduite d'après des décisions, des déclarations ou un comportement déterminé de l'administration (ATF 143 V 95 consid. 3.6.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_204/2022 du 21 mars 2023 consid. 5.1). Selon la jurisprudence, un renseignement ou une décision erronés de l'administration peuvent obliger celle-ci à consentir à un administré un avantage contraire à la réglementation en vigueur, à condition que (1) l'autorité soit intervenue dans une situation concrète à l'égard de personnes déterminées, (2) qu'elle ait agi ou soit censée avoir agi dans les limites de ses compétences et (3) que l'administré n'ait pas pu se rendre compte immédiatement de l'inexactitude du renseignement obtenu. Il faut encore (4) qu'il se soit fondé sur les assurances ou le comportement dont il se prévaut pour prendre des dispositions auxquelles il ne saurait renoncer sans subir de préjudice et (5) que la réglementation n'ait pas changé depuis le moment où l'assurance a été donnée (ATF 146 I 105 consid. 5.1.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_204/2022 du 21 mars 2023 consid. 5.1).

6.3 En l’espèce, par courrier du 29 août 2023, la DGES II a invité les membres du personnel concernés par la thématique de la rente-pont AVS en 2024 à consulter la fiche MIOPE ainsi que la brochure, transmise en annexe. Ce courrier rappelait les conditions d’éligibilité à remplir au moment du départ. Toutefois, cette lettre ne citait pas les termes précis de la loi et mentionnait la condition litigeuse différemment, soit « ne pas bénéficier, dans les six mois qui suivent le départ projeté, d’une rente de l’AVS ». Or, le recourant remplissait cette condition dès lors que son départ était projeté au 31 août 2024 et qu’il ne percevrait pas de rente AVS de septembre 2024 à février 2025 inclus.

Le courrier renvoyait pour le surplus à la fiche MIOPE et à la brochure. Si ladite fiche cite l’art. 3 let. b LRP, parmi plusieurs autres dispositions légales pertinentes, elle ne fournit aucune information supplémentaire et renvoie à la brochure.

Cette dernière, censée « informer globalement sur la rente‑pont », ne rappelle pas le texte légal mais mentionne aussi la condition litigieuse dans les termes de « ne pas bénéficier, dans les six mois qui suivent le départ projeté, d’une rente de l’AVS », déformant le texte de loi et en modifiant le contenu. Pour le surplus, une mention est faite à l’art. 21 LAVS, sans que le texte ne soit fourni.

Dans sa réponse du 22 mars 2024, le DIP a précisé que l’art. 3 let. b LRP impliquait « sept mois entre la date d’émission et la rente AVS ». Si cette interprétation est juste, conformément au considérant qui précède, ni la disposition légale, ni la brochure, ni aucun autre document n’évoque la condition de sept versements. Même les travaux préparatoires se limitent à se référer à une période de six mois sans formuler le chiffre de sept, pourtant nécessaire s’agissant du versement de rentes.

Par ailleurs, la lettre du 29 août 2023 évoquait un délai au 29 février 2024 pour le personnel enseignant pour déposer la requête, pour un départ au 31 août 2024, délai que le recourant a non seulement respecté, mais anticipé de près d’un mois.

Il n'est pas contesté que la retraite anticipée ne peut être prise par un enseignant du DIP que pour la fin d'une année scolaire, soit à fin août. À teneur des travaux préparatoires, la durée de six mois minimum est nécessaire pour des questions administratives propres à l’État. Aucune autre justification n’impose cette durée. Outre que cette dernière est posée uniformément, pour toute l’administration, sans explications plus précises sur les « complications administratives », qu’elle ne souffrirait aucune exception, elle ne tient pas compte de la durée entre la date de la demande et l’octroi de la rente, temps pourtant utile pour entreprendre les démarches administratives. Appliqué au cas d’espèce, il n’est pas tenu compte de la période entre le 6 février 2024 et le 31 août 2024, soit près de sept mois, mais uniquement du fait que le recourant n’a sollicité une rente que pour six mois, durée trop courte pour éviter des « complications administratives ».

Il résulte de ce qui précède qu’au vu des informations imprécises et trompeuses fournies par l’intimé, le recourant ne pouvait pas se rendre compte immédiatement de l'inexactitude des renseignements fournis par le département.

Les autres conditions exigées pour retenir une violation du principe de la bonne foi sont aussi remplies. En effet, l'autorité est intervenue dans une situation concrète à l'égard de personnes déterminées, notamment en informant puis en refusant la rente‑pont concernée. Elle a agi dans les limites de ses compétences. Le recourant s’est fondé sur le contenu des documents pour prendre des dispositions auxquelles il ne peut plus renoncer. Contrairement à ce que soutient l’intimé, il ne lui était plus possible de démissionner pour une date antérieure au 31 août 2024. La décision querellée a des conséquences financières puisque l’intéresse ne percevra pas de rente-pont. Enfin, la réglementation n'a pas changé depuis le moment où les informations ont été données.

Dans ces conditions, refuser au recourant le versement d’une rente-pont viole le principe de la bonne foi.

Fondé, le recours sera admis. La cause sera renvoyée au DIP pour qu’il rende une décision conforme aux considérants du présent arrêt.

7.             Vu l’issue du litige, il ne sera pas perçu d’émolument (art. 87 al. 1 LPA) et une indemnité de procédure de CHF 1'000.- sera allouée au recourant, à la charge de l’État de Genève (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 5 juillet 2024 par A______ contre la décision du département de l'instruction publique, de la formation et de la jeunesse du 5 juin 2024 ;

au fond :

l’admet ;

annule la décision du département de l'instruction publique, de la formation et de la jeunesse du 5 juin 2024 ;

renvoie la cause au département de l’instruction publique, de la formation et de la jeunesse pour nouvelle décision au sens des considérants ;

dit qu’il n’est pas perçu d’émolument ;

alloue une indemnité de procédure de CHF 1'000.- à A______ à la charge de l’État de Genève ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), la présente décision peut être portée dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière de droit public, s'il porte sur les rapports de travail entre les parties et que la valeur litigieuse n'est pas inférieure à CHF 15'000.- ;

le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. La présente décision et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être jointes à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Christian DANDRÈS, avocat du recourant, ainsi qu'au département de l'instruction publique, de la formation et de la jeunesse.

Siégeant : Francine PAYOT ZEN-RUFFINEN, présidente, Florence KRAUSKOPF, Jean-Marc VERNIORY, Patrick CHENAUX, Claudio MASCOTTO, juges.

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

J. PASTEUR

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. PAYOT ZEN-RUFFINEN



Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

la greffière :