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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/1370/2023

ATA/955/2024 du 20.08.2024 sur JTAPI/1395/2023 ( AMENAG ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/1370/2023-AMENAG ATA/955/2024

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 20 août 2024

 

dans la cause

 

A______ SA recourante
représentée par Me Alix JOB, avocate

contre

DÉPARTEMENT DU TERRITOIRE - OCAN intimé

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 14 décembre 2023 (JTAPI/1395/2023)


EN FAIT

A. a. Les parcelles nos 1'592 et 1'593 de la commune du Grand-Saconnex, sises chemin B______ ______, en zone agricole pour la première et en zone 5 pour la seconde, appartiennent à la A______ SA (ci-après : la propriétaire), dont C______ est l’administrateur unique avec signature individuelle.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 


b. À teneur du système d’information du territoire à Genève (ci-après : SITG), ces deux parcelles comportent deux boisements inscrits au cadastre forestier.

Le premier (zone n° 1) est situé sur la parcelle n° 1'592 et longe les parcelles nos 1'707, 1'708, 2'264 et 2'279, qui appartiennent à des tiers et sont contiguës à la parcelle n° 1'592.

Le second (zone n° 2) s’étend sur les parcelles nos 1'592, 1'593 et 2'278, cette dernière appartenant également à un tiers.

Ce second boisement a fait l’objet, s’agissant de sa partie située entre la parcelle n° 2'278 et les parcelles nos 1'592 et 1'593, d’une décision en constatation de la nature forestière n° 2018-29c rendue par l’office cantonal de l’agriculture et de la nature (ci-après : OCAN) le 14 novembre 2018, publiée dans la Feuille d'avis officielle de la République et canton de Genève (ci-après : FAO) du même jour, suite à un projet de construction sur la parcelle n° 2'278, qui n’avait finalement pas abouti. Cette décision, qui se référait aux trois parcelles précitées, au protocole n° 2018-29c et au relevé figurant au plan 1536.3 du 18 septembre 2018, a été transmise par l’OCAN à la propriétaire le 14 novembre 2018 mentionnant sous « concerne » les parcelles nos 1'592 et 1'593, avec indication des voies de recours. En l’absence de contestation, cette décision de constatation de nature forestière 2018-29c est entrée en force.

c. Dans le cadre d’une étude de faisabilité, la propriétaire, par le biais du bureau de géomètres D______ SA, a déposé auprès de l’OCAN, le 17 novembre 2022, une requête en constatation de la nature forestière ou non forestière des boisements sis sur les parcelles nos 1'592 et 1'593.

d. Le 25 novembre 2022, l’OCAN, se référant aux requêtes en constatation de nature forestière nos 1______ et 2______ et à la requête en constatation de nature non forestière n° 3______, a informé la propriétaire avoir procédé à la mise à jour du cadastre forestier par le levé de la lisière des boisés des parcelles lui appartenant et lui a imparti un délai de trente jours pour formuler des observations écrites.

À teneur du plan provisoire joint, étaient concernées par les requêtes en constatation de nature forestière la zone n° 1 (sise sur la parcelle n° 1'592) et la zone n° 2 (sise sur les parcelles nos 1'592 et 1'593). La requête en constatation de nature non forestière portait quant à elle sur la zone n° 3 (sise sur la parcelle n° 1'593).

e. Le 23 décembre 2022, la propriétaire a demandé à l’OCAN la tenue d’un transport sur place puis à la redéfinition des limites de la zone forestière conformément au plan qu’elle produisait et la confirmation de la constatation de nature forestière, pour le surplus.

Quant à la requête n° 1______ (zone n° 1), le levé de lisière tel qu’effectué par l’OCAN incluait une zone sise en bordure de la parcelle n° 1'593 totalement dépourvue d’arbres susceptibles d’exercer des fonctions forestières, comme démontré par les photographies qu’elle produisait. Cette zone n’avait fait l’objet d’aucun défrichement ni abattage mais avait uniquement été entretenue, afin d’éviter l’expansion des espèces invasives qui la constituaient principalement, soit des laurelles et des pousses de houx, essences non concernées par l’annexe 9 de l’ordonnance sur la protection des végétaux du 28 février 2001 (OPV - RS 916.20). Ainsi, l’existence d’une forêt ne pouvait être admise s’agissant de cette portion et les limites en bordure de parcelle devaient être revues.

La requête n° 2______ (zone n° 2) se distinguait en ce qu’une partie de la lisière avait fait l’objet d’une décision n° 2018-29c du 14 novembre 2018, désormais entrée en force. Toutefois, la nature dynamique de la forêt prévalait dans les zones à bâtir tant qu’une constatation de nature forestière en bonne et due forme n’était pas intervenue par le prononcé d’une décision mentionnant les coordonnées, la situation et les dimensions de la forêt, comme requis par l’art. 12 de l’ordonnance sur les forêts du 30 novembre 1992 (OFo - RS 921.01). À défaut, le cadastre forestier n’avait qu’une valeur indicative. En outre, la mise à jour de ce cadastre s’effectuait lors de chaque constatation de nature forestière. In casu, la décision de 2018 précitée paraissait incomplète, dès lors que seule une partie des limites de lisières était concernée par le constat, soit la limite avec la parcelle n° 2'278. Ainsi, les conditions prévues par l’OFo n’étaient pas remplies. Il se justifiait dès lors de procéder à une mise à jour du cadastre et de redéfinir la zone longeant le chemin séparant les parcelles nos 1'593 et 2'278, qui consistait en une allée bordant ledit chemin et ne revêtait pas la qualité de forêt, tant en termes de densité que de peuplement ou de fonctions de biodiversité, comme démontré par les photographies jointes.

f. Le 17 janvier 2023, l’OCAN a proposé à la propriétaire la tenue d’un transport sur place le 8 février 2023.

Aucun procès-verbal de ce transport sur place ni d’éventuelles photographies des boisements concernés prises à cette occasion ne figurent au dossier.

g. Le 9 mars 2023, l’OCAN, se référant notamment au transport sur place du 8 février 2023, auquel la propriétaire avait participé, a informé cette dernière que ses observations du 23 décembre 2022 n’avaient pas été retenues.

Le peuplement de la zone n° 1 remplissait la qualité de forêt au sens de l’art. 2 de la loi fédérale sur les forêts du 4 octobre 1991 (LFo - RS 921.0) et aucun changement majeur n’avait été relevé concernant la zone n° 2 depuis le constat de 2018, de sorte que la décision entrée en force y relative ne saurait être remise en question. Enfin, la zone n° 3 n’était pas considérée comme forêt.

Était notamment joint le levé des boisés selon l’état des lieux du 19 octobre 2022 accompagné du plan n° 1260.21 du 10 novembre 2022.

h. Par décision n° 1______ du 9 mars 2023, l’OCAN a constaté la nature forestière au sens des art. 2 LFo et 2 de la loi sur les forêts du 20 mai 1999 (LForêts - M 5 10) de la zone n° 1 sise sur la parcelle n° 1'592, le relevé figurant au plan n° 1260.21 précité faisant partie intégrante de la décision.

À teneur du protocole en constatation de la nature forestière n° 1______ y relatif du 9 mars 2023, le peuplement était composé à 98% d’espèces indigènes – érable, chêne, orme, frêne, cerisier, pin, épicéa, tilleul – et à 2% d’espèce étrangère – marronnier –, tous âgés de plus de 30 ans. Quant à sa structure, ce boisement présentait un degré de couvert de 90% avec un étage intermédiaire – houx et ifs – et un sous-bois naturel et aucun équipement n’était présent. S’agissant de ses fonctions forestières, les fonctions de structure paysagère et de biodiversité étaient significatives (note de 2 sur une échelle de 3) et celles de protection, récréation et de production étaient de peu d’intérêt (1 sur 3). La rubrique « commentaire » précisait : « petit massif forestier issu d’un fond de parc entretenu de manière extensive, intéressant comme structure paysagère et îlot refuge pour la biodiversité ».

Selon l’extrait du SITG « dimensions peuplements 1 – 1______ », le boisement mesurait 94,48 m de long, sa largeur oscillait entre 9,46 m et 29,28 m et sa surface totale était d’un peu plus de 2'000 m2.

i. Par décision n° 2______ du 9 mars 2023, l’OCAN a constaté la nature forestière au sens des art. 2 LFo et 2 LForêts de la zone n° 2 sise sur les parcelles nos 1’592 et 1’593, le relevé figurant au plan n° 1260.21 faisant partie intégrante de la décision.

À teneur du protocole en constatation de la nature forestière n° 2______ y relatif du 9 mars 2023, le peuplement était composé à 98% d’espèces indigènes – érable, frêne, sapin, cerisier – et à 2% d’espèce étrangère – robinier –, tous âgés de plus de 30 ans. Quant à sa structure, ce boisement présentait un degré de couvert de 90% avec un étage intermédiaire – houx et ifs –, un sous-bois naturel. Une clôture était présente. S’agissant de ses fonctions forestières, les fonctions de structure paysagère et de biodiversité étaient significatives (2 sur 3) et celles de protection, récréation et de production étaient de peu d’intérêt (1 sur 3). La rubrique « commentaire » précisait : « petit massif forestier constitué d’une ancienne structure de parc laissée à l’état naturel ».

Selon l’extrait du SITG « largeur/longueur peuplement - 2______ », le boisement mesure 133,2 m de long, sa largeur est de 10,91 m au point le plus étroit et de 16,48 m au point le plus large et sa surface totale est d’environ 1'700 m2.

Par décision n° 3______ du 9 mars 2023, l’OCAN, a constaté la nature non forestière de la zone n° 3 sise sur la parcelle n° 1’593, le relevé figurant au plan n° 1260.21 précité faisant partie intégrante de la décision.

À teneur du protocole en constatation de la nature non forestière n° 3______ y relatif du 9 mars 2023, le peuplement était composé à 98% d’espèces indigènes (érable, tilleul, épicéa, cerisier, frêne) et à 2% d’espèce étrangère (laurelle), tous âgés de plus de 30 ans. Quant à sa structure, ce boisement présentait un degré de couvert de 70% avec un étage intermédiaire – houx et ifs – sans sous-bois ni équipement. S’agissant de ses fonctions forestières, tant les fonctions de structure paysagère que celles de biodiversité, de protection, de récréation et de production étaient sans intérêt (0 sur 3). La rubrique « commentaire » précisait : « deux petites structures arborées séparées par une prairie, d’une surface de 353 m2 et l’autre de 157 m2 constituant une image paysagère de parc. Les fonctions paysagères ne sont pas applicables pour ces structures arborisées ».

B. a. Par acte du 24 avril 2023, la propriétaire a recouru auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI) contre la décision en constatation de la nature forestière n° 1______, concluant à la jonction de son recours avec celui déposé séparément le même jour contre la décision en constatation de la nature forestière n° 2______, à son admission, à l’annulation de la décision attaquée et au prononcé d’une décision de constatation de la nature non forestière de la parcelle n° 1'592. Subsidiairement, la cause devait être renvoyée à l’OCAN pour nouveau relevé des limites et nouvelle décision. Préalablement, un transport sur place et l’audition de C______ devaient être ordonnés.

La cause a été enregistrée sous la référence A/1370/2023.

La décision violait son droit d’être entendue. Elle s’appuyait uniquement sur le relevé des boisés du 10 novembre 2022 et sur le protocole établi par l’inspecteur des forêts qui contenait peu de précisions. L’OCAN n’avait pas consulté de commissions spécialisées, telles que notamment la commission consultative de la diversité biologique (ci-après : CCDB), qui aurait pu expliciter les caractéristiques du boisement et l’intérêt qu’il présentait pour la biodiversité. Ainsi, l’OCAN se contentait d’alléguer que la zone boisée présentait un tel intérêt, sans expliquer en quoi celui-ci consistait. En l’absence d’avis de spécialistes, il était impossible de prendre position sur l’existence ou non des fonctions forestières retenues par l’autorité intimée.

La décision violait la LFo et l’interdiction de l’arbitraire et constituait un abus du pouvoir d’appréciation.

Les parcelles nos 1'592 et 1'593 avaient appartenu durant plusieurs décennies à la famille de C______, qui avait grandi dans la maison bâtie sur la parcelle n° 1'592, avant de recevoir ces deux parcelles en héritage. Celles-ci avaient été agrémentées, environ cinquante ans plus tôt, pour des motifs esthétiques, d’un parc composé d’essences indigènes et exotiques. À la même époque, une clôture avait été installée autour de la zone concernée, contrairement aux constatations de l’OCAN. Le parc en question avait été entretenu, notamment afin d’éviter l’expansion des laurelles, qui le composaient en grande partie. Sa densité n’était pas homogène, dès lors que les zones situées en bordure du jardin et de la parcelle n° 1'593 étaient sensiblement plus clairsemées que la zone constituant le fond du parc initial. Cette zone ne comportait aucun point d’eau et était cernée, outre la clôture, par des parcelles construites sises en zone 5, de sorte qu’elle n’était reliée à aucune autre zone forestière. La zone boisée litigieuse ne constituait en outre pas une extension d’une forêt existante, un lien de passage entre deux massifs forestiers ni une installation spontanée d’un peuplement qui aurait été toléré. Ce boisement ne procurait pas davantage un milieu vital irremplaçable aux animaux sauvages et aux plantes. L’importance significative des fonctions de biodiversité et de structure du paysage – retenues à tort et non motivées – entrait en contradiction avec le fait que la surface concernée avait été aménagée et entretenue depuis plus de cinquante ans comme agrément d’habitat. Les photographies jointes démontraient l’entretien effectué, à tout le moins en bordure de zone, afin d’éviter précisément une densité trop importante et une expansion de la surface. Ainsi, l’OCAN avait abusé de son pouvoir d’appréciation en qualifiant la surface boisée de forêt, sauf à considérer que tout groupement d’arbres plantés sur une base volontaire et dans un souci d’esthétique, en zone constructible, devaient faire l’objet d’un cadastre forestier.

En outre, la position de l’OCAN contrevenait au principe d’égalité de traitement. En effet, entre 2013 et 2016, une autorisation de construire avait été délivrée en faveur de la parcelle n° 2'264 – voisine de la parcelle n° 1'592 – sans restriction liée à la zone arborisée précitée, qui présentait le même état. Il avait alors également été décidé que cette zone n’avait pas à faire l’objet d’un cadastrage, vraisemblablement en raison du fait que, intégralement bordée par des parcelles construites et délimitée par une clôture, elle était difficile d’accès pour la faune et/ou pour d’éventuels passants. Ceci était d’autant plus valable que la zone 1 était rattachée à la bande boisée n° 3 ayant fait l’objet d’une décision de constatation de sa nature non forestière, toutes deux présentant une composition et une densité similaire et étant séparées par la même prairie. Dès lors, la différence de traitement réservé à ces deux aires ne se fondait sur aucun motif objectif, ce qui violait l’interdiction de l’arbitraire. À titre subsidiaire, un traitement différencié devait à tout le moins être apporté s’agissant de cette surface en limite de parcelle, de sorte qu’il convenait de procéder à un nouveau levé des limites forestières et de constater que la parcelle n° 1'592 était de nature non forestière.

b. Par acte séparé du 24 avril 2023, la propriétaire a recouru auprès du TAPI contre la décision en constatation de la nature forestière n° 2______ du 9 mars 2023, concluant à la jonction de son recours avec celui déposé séparément le même jour contre la décision en constatation de la nature forestière n° 1______, à l’annulation de la décision attaquée et au prononcé d’une décision de constatation de la nature non forestière des parcelles nos 1'592 et 1'592 [recte : 1’593]. Subsidiairement une décision de constatation de la nature non forestière de la parcelle n° 1'593 devait être prononcée. Plus subsidiairement, la cause devait être renvoyée à l’OCAN pour nouveau relevé des limites et nouvelle décision. Préalablement, un transport sur place ainsi que l’audition de C______, E______, technicien forestier et F______ devait être ordonné.

Le recours a été enregistré sous la référence A/1371/2023.

Son droit d’être entendu avait été violé, pour les motifs exposés dans le recours contre la décision n° 1______.

La LFo et l’interdiction de l’arbitraire avaient été violés et un abus du pouvoir d’appréciation commis. En sus des considérations exposées dans son recours contre la décision n° 1______, la propriétaire a précisé que, dans un esprit de conciliation, elle avait d’abord requis que les levés de la zone n° 1 tels qu’effectués par l’OCAN soient revus, dans la mesure où ils incluaient une zone ayant fait l’objet d’un entretien régulier, de faible densité et ne comportant pas d’essences susceptibles d’exercer des fonctions forestières. La séparation entre la partie plus dense et la partie entretenue – précisément dans le but d’éviter l’extension du parc – et l’absence d’homogénéité pourraient être aisément observées par un transport sur place.

La décision de constatation de la nature forestière n° 2018-29c rendue par l’OCAN le 14 novembre 2018 était particulière, en ce que les limites de la zone cadastrée n’avaient pas été intégralement tracées, seul un tracé partiel ayant été établi. En outre, la limite tracée en 2018 par l’OCAN se superposait à la clôture traversant les arbres et se situait donc au milieu de la surface boisée, de sorte que la partie attenante à la parcelle n° 2'278 était considérée comme non forestière alors que la partie sise sur ses parcelles était considérée comme forestière. En d’autres termes, les arbres qui composaient cette surface boisée étaient, selon le côté de la barrière duquel ils se trouvaient, en zone forêt ou, à l’inverse, en zone « non-forêt ». Une telle situation confinant à l’absurde, elle était arbitraire. De plus, cette décision de 2018 ne mentionnait aucunement les dimensions et les limites de la zone concernée, seul un tracé en milieu de surface figurant en rouge sur le plan de l’OCAN y relatif. Partant, cette décision était incomplète, faute de remplir les conditions posées par l’art. 12 al. 2 OFo, avec pour conséquence que le cadastre foncier présentait, sur ce point, une valeur indicative uniquement. D’ailleurs, si tel n’avait pas été le cas, la décision attaquée serait tout simplement sans objet. Ainsi, la décision de 2018 ne constituait pas une décision de constatation de nature forestière en bonne et due forme et c’était à tort que l’OCAN s’était déclaré lié par celle-ci. La parcelle n° 1'593 étant située en zone à bâtir, la nature dynamique de la forêt prévalait, de sorte que cet office devait procéder à une nouvelle appréciation de la situation ou, à tout le moins, à un nouveau levé des limites.

Quant à la surface sise sur la zone n° 1'593, l’OCAN admettait lui-même qu’il s’agissait d’un fond de parc. Ainsi, il s’agissait d’un peuplement d’origine humaine et volontaire et non de l’extension d’une forêt existante, d’un lien de passage entre deux massifs forestiers ni de l’installation spontanée d’un peuplement qui aurait été tolérée. La zone était en outre cernée de part et d’autre par des zones constructibles. Les possibilités d’y accéder, tant pour la faune terrestre que pour d’éventuels passants étaient extrêmement limitées. On ne pouvait considérer que ce boisement procurait un milieu vital irremplaçable aux animaux sauvages et aux plantes.

Pour le surplus, la surface litigieuse était similaire à la zone n° 3, qualifiée de non forestière, au motif notamment qu’elle consistait en des structures arborées séparées par une prairie, soit en une image paysagère de parc. Or, cette même prairie séparait la surface litigieuse de ces structures arborées, de densité et de composition identiques. Partant, la différence de traitement appliqué à ces deux aires ne reposait sur aucun motif objectif et était arbitraire. La surface boisée concernée consistait en réalité en une allée bordant un chemin, à l’instar des arbres situés de l’autre côté de la clôture, pour lesquels l’OCAN n’avait pas constaté la nature forestière. De plus, la pointe située sur les parcelles nos 1'593 et 2'278 ne remplissait pas les conditions quantitatives cantonales, sa largeur étant inférieure à 12 m et elle n’était pas composée majoritairement d’essences indigènes, contrairement aux constatations de cet office. Partant, la décision querellée devait être annulée et il convenait de constater que la surface située sur la parcelle n° 1'593 était de nature non forestière. À titre subsidiaire, le TAPI devait à tout le moins enjoindre à l’OCAN de procéder à un nouveau relevé des lisières conforme au droit fédéral et cantonal.

c. Par décision incidente du 8 mai 2023, le TAPI a joint les procédures A/1370/2023 et A/1371/2023 sous la référence A/1370/2023.

d. Le 10 juillet 2023, l’OCAN a conclu au rejet des recours.

Aucune violation du droit d’être entendu n’avait été commise. Les décisions litigieuses comportaient l’ensemble des éléments requis et allaient même au-delà des exigences, dès lors qu’elles détaillaient l’évaluation des caractéristiques et fonctions retenues. Il était ainsi aisé de comprendre son appréciation et de la contester. Des informations complémentaires avaient en outre été fournies à la propriétaire lors du transport sur place effectué à sa demande. L’avis de spécialistes ne faisait nullement défaut, l’OCAN étant précisément composé de tels spécialistes et aucun préavis de la CCDB n’était requis, cette dernière étant parfois consultée lorsqu’un doute existait, ce qui n’était pas le cas.

Les décisions attaquées ne violaient pas la LFo. La zone n° 1 consistait en un petit massif forestier issu d’un fond de parc entretenu de manière extensive intéressant comme structure paysagère et îlot refuge pour la biodiversité. L’érable, le chêne, l’orme, le frêne, le cerisier, le pin et l’épicéa présents figuraient parmi les essences d’arbres et d’arbustes forestiers mentionnés dans la liste établie par l’Institut fédéral de recherches WSL. En outre, les critères de dimension, d’âge et de surface fixés par la LForêts étaient remplis. Le fait que les arbres concernés aient initialement été plantés et soient entretenus n’empêchait pas la qualification de forêt. La fonction d’îlot refuge pour la biodiversité de la zone n° 1 était significative. Ce petit massif enclavé dans une parcelle privée et clôturée ne subissait pas de pression du public, de sorte que la petite faune, les oiseaux et les insectes pouvaient s’y abriter pour bénéficier d’une certaine tranquillité. Il n’était pas nécessaire que ce dernier serve en sus de refuge pour la grande faune terrestre. Ce boisement avait également un rôle de protection esthétique du paysage, la forêt faisant partie intégrante de ce dernier et en constituant l’un des éléments caractéristiques essentiels. Ainsi, il jouait un rôle important dans l’urbanisation du secteur et présentait des qualités esthétiques, ces éléments intéressants ayant justifié que la fonction paysagère soit qualifiée de significative. Aucune inégalité de traitement n’était à déplorer avec l’octroi d’une autorisation de construire une habitation en 2016 sur la parcelle voisine n° 2'264. Cette procédure d’autorisation de construire était de la compétence de l’autorité chargée des constructions et non de celle de l’OCAN, de sorte que ces deux procédures portaient sur des objets différents. Or, l’OCAN ne s’était pas prononcé sur le caractère forestier ou non du boisement n° 1 dans le cadre de la procédure d’autorisation de construire de 2013 et statuait in casu sur la question pour la première fois. Ainsi, faute de situation semblable et/ou de détermination antérieure, aucun revirement ne pouvait lui être reproché.

La zone n° 2 consistait en un petit massif forestier constitué d’une ancienne structure de parc laissée à l’état naturel qui possédait les mêmes caractéristiques forestières (pourcentage d’essences indigènes et degré de couvert, présence d’un sous-bois et d’un étage intermédiaire) et les mêmes fonctions forestières que la zone n° 1, son origine étant en outre similaire. Partant, les mêmes considérations que celles formulées supra à propos de la zone n° 1 s’appliquaient à la zone n° 2. En sus, le constat 2______ s’appuyait en partie sur le constat 2018-29c qui avait fixé la lisière sud de ce boisement. En effet, la limite du peuplement n° 2 vis-à-vis de la parcelle n° 2'278 avait fait l’objet d’une procédure en constatation de la nature forestière partielle en 2018 (tracé rouge sur le plan de levé des boisés du 19 octobre 2022). Cette décision, rendue au terme d’une procédure conforme aux exigences et comprenant les éléments requis, était opposable à la propriétaire. Aucun changement majeur n’ayant été observé sur le terrain depuis lors, la délimitation de la forêt effectuée dans le cadre de la procédure 2______ litigieuse avait repris le levé de 2018, ce qui n’empêchait nullement la propriétaire de contester la qualification et la délimitation de la forêt figurant en vert sur le plan de levé des boisés du 19 octobre 2022. Le fait que le peuplement de la zone n° 2 ne mesurait pas 12 m de large sur toute son étendue ne modifiait pas l’appréciation des critères quantitatifs, étant relevé qu’une telle largeur était retenue sur une surface de 60 m2 seulement alors que la surface totale du boisement n° 2 excédait 1'700 m2. Enfin, la prétendue similarité entre les zones nos 2 et 3 tombait à faux. Les deux petits ensembles arborés de cette dernière zone n’avaient pas la même origine ni la même densité d’arbres et de couvert que les zones nos 1 et 2. Beaucoup plus étroits et régulièrement entretenus, le sous-bois ne s’y développait pas. Ils présentaient ainsi une structure de parc reconnaissable et n’exerçaient pas de fonction forestière.

e. Le 17 août 2023, la propriétaire a persisté dans ses conclusions.

La zone n° 1 n’offrait pas plus de protection pour les insectes et oiseaux qu’un parc aménagé en zone de propriété. L’OCAN n’avait d’ailleurs procédé à aucune analyse spécifique concernant la faune et la flore présente en ces lieux démontrant que ces arbres abriteraient des espèces propres aux forêts et/ou différentes de ce que l’on pourrait trouver dans n’importe quel jardin. L’allégation de protection esthétique n’était pas pertinente pour distinguer une zone de forêt d’une zone de parc, tout parc, allée ou jardin étant précisément implanté pour un tel motif. Une inégalité de traitement était à déplorer. Si une procédure d’autorisation de construire était bien distincte d’une procédure en constatation de la nature forestière, toutes deux étaient généralement liées, comme le démontrait d’ailleurs le fait que, quant à la zone n° 2, c’était, de l’aveu même de l’OCAN, à l’occasion d’un projet de construction sur la parcelle n° 2'278 qu’il s’était prononcé – de manière incomplète – sur la nature du boisement la jouxtant. L’on imaginait ainsi mal que l’OCAN n’ait pas été interpellé quelques années plus tôt quant à la nature du massif constituant la zone n° 1, ce d’autant qu’il était plus important, en termes de surface, que celui de la zone n° 2. En tout état, elle pouvait déduire de l’absence de réaction de l’autorité à ce moment‑là qu’il n'existerait aucune restriction à la constructibilité de son terrain et le comportement de l’autorité pouvait être opposé à cette dernière.

Les mêmes considérations s’appliquaient à la zone n° 2. De plus, dès lors que celle‑ci servait de délimitation entre deux parcelles et constituait une allée bordant un chemin qu’empruntaient des véhicules, les critiques relatives à l’appréciation du critère de biodiversité étaient d’autant plus justifiées. En outre, de l’aveu même de l’OCAN, le peuplement de la zone n° 2 ne mesurait pas 12 m de large sur toute son étendue. Ainsi, cette zone pouvait être qualifiée d’allée, certes longue, mais fine, ce qui suffisait à l’exclure de la protection accordée par la LForêt. En réalité, il apparaissait que l’OCAN s’estimait - à tort - lié par sa « décision » de 2018. Un transport sur place permettrait de confirmer que les zones nos 2 et 3 présentaient la même densité d’arbres et de couvert et le même degré d’entretien. Notamment, la structure de parc qui serait, selon l’OCAN, reconnaissable pour la zone n° 3 était similaire à celle de la zone n° 2, avec pour conséquence que la décision attaquée était arbitraire pour ce motif également.

f. Le 6 septembre 2023, l’OCAN a persisté dans ses conclusions.

Le TAPI ne pourrait pas rendre la décision en constatation de la nature non forestière à laquelle la propriétaire avait conclu, cette compétence étant du ressort de l’inspecteur cantonal des forêts.

Par jugement du 14 décembre 2023, le TAPI a écarté les demandes d’actes d’instruction et rejeté les recours.

Le droit d’être entendu de la propriétaire n’avait pas été violé. Les protocoles en constatation de la nature forestière du 9 mars 2023 relatifs aux deux décisions querellées mentionnaient explicitement les motifs ayant fondé les décisions. L’OCAN était composé de spécialistes et n’avait pas à consulter de commissions spécialisées, notamment la CCDB.

La zone n° 1 comportait un petit massif forestier issu d’un fond de parc entretenu de manière extensive. Elle était composée à 98% d’essences indigènes. L’érable, le chêne, l’orme, le frêne, le cerisier, le pin et l’épicéa présents dans la zone n° 1 figuraient parmi les essences d’arbres et d’arbustes forestiers mentionnés dans la liste établie par l’Institut fédéral de recherches WSL. Toutes les espèces étaient âgées de plus de 30 ans. Le degré de couvert de cette zone, de 90%, était relativement important. Le boisement comportait un étage intermédiaire composé de houx et de ifs ainsi qu’un sous-bois naturel. Il mesurait 94,4 m de long et entre 9,46 m et 29,28 m de large, pour une surface totale de plus de 2'000 m2, pouvant être qualifiée d’importante. Le boisement avait été initialement planté par action humaine et il était entretenu et clôturé, mais ces éléments n’étaient pas incompatibles avec la notion de forêt dès lors qu’ils n’empêchaient pas le boisement concerné de remplir ses fonctions forestières. Les critères quantitatifs de dimension, d’âge et de surface étaient remplis.

Le boisement n° 1 remplissait une fonction de structure paysagère significative, notée à hauteur de 2 sur une échelle de 3 et avait également un rôle de protection esthétique. La forêt faisait partie intégrante du paysage local et en constituait l’un des éléments caractéristiques essentiels. Le fait que la zone n° 1 était entourée de parcelles constructibles qui accueillaient des habitations ne permettait pas de parvenir à une autre conclusion. Il était d’autant plus important que des espaces boisés viennent structurer le paysage dans un tel environnement. Il convenait de retenir que ces derniers jouaient un rôle important dans l’urbanisation du secteur et présentaient notamment des qualités esthétiques. Partant, les éléments de la structure boisée n° 1, qui pouvaient être qualifiés d’intéressants, justifiaient que la fonction paysagère ait été considérée comme significative par l’autorité intimée.

Le boisement de la zone n° 1 possédait également une fonction de biodiversité significative à hauteur d’une échelle de 2 sur 3. L’aire, qualifiée de petit massif enclavé dans une parcelle privée et clôturée, ne subissait pas de pression du public, de sorte que la petite faune, les oiseaux et les insectes pouvaient s’y abriter pour bénéficier d’une certaine tranquillité. Le couvert des arbres était conséquent et par sa situation géographique le boisement constituait un îlot de verdure en zone bâtie. L'accès à cette parcelle, clôturée, était limité, notamment pour la grande faune, mais dès lors que la vie sauvage était davantage limitée en zone urbanisée qu’en campagne, il était cohérent de mesurer le degré de biodiversité d'une parcelle urbaine à l'aune de son environnement et de la vie qui pouvait s'y développer plutôt qu'à celle d'une forêt qui serait située en campagne. Le boisement litigieux servait de refuge pour la petite faune et les oiseaux de l’endroit et participait au maillage écologique du canton. La présence d’autres parcelles sises en zone constructible et accueillant d’ailleurs des habitations autour du boisement n° 1 ne modifiait pas cette conclusion, la petite faune et les oiseaux de l’endroit ayant précisément besoin en milieu bâti de zones boisées constituant un lieu de repos, de protection et de développement. Si plusieurs interprétations étaient soutenables, le juge n'avait pas à substituer sa propre appréciation à celle de l'autorité de première instance.

La propriétaire ne pouvait obtenir le même traitement que celui accordé au propriétaire de la parcelle n° 2'264 dès lors qu’il n’y avait pas d’égalité dans l’illégalité.

La propriétaire ne pouvait déduire de la délivrance de l’autorisation de construire précitée que la zone n° 1 n’avait pas la nature de forêt. La propriétaire n’avait pas démontré avoir reçu une quelconque assurance concrète de la part des autorités quant à la qualification en nature forestière ou non de la zone n° 1 sise sur sa parcelle en lien avec le fait qu’une autorisation de construire une habitation avait été délivrée antérieurement sur la parcelle n° 2'264. Le fait qu’elle avait déposé en novembre 2022 auprès de l’OCAN une requête en constatation de la nature forestière ou non forestière de ses parcelles démontrait au contraire qu’elle souhaitait que cet office se positionne sur la nature des boisements sis sur ces parcelles, ce qu’elle n’aurait pas eu à faire si, comme elle le prétendait, elle avait été convaincue, suite à une promesse concrète de l’autorité, de la nature desdits boisements. Elle n’avait pas prouvé qu’elle se serait fondée sur un éventuel renseignement de l’autorité pour prendre des dispositions non modifiables sans préjudice. Deux des conditions pour se prévaloir du principe de la bonne foi n’étaient ainsi pas remplies.

Les zones n° 1 et n° 3 n’étaient pas semblables. Il ne pouvait être tiré argument de leur traitement différent.

La zone n° 2 consistait en un petit massif forestier constitué d’une ancienne structure de parc laissée à l’état naturel. Elle était composée à 98% d’essences indigènes. L’érable, le frêne et le cerisier figuraient parmi les essences d’arbres et d’arbustes forestiers mentionnés dans la liste établie par l’Institut fédéral de recherches WSL. Comme pour la zone n° 1, toutes les espèces précitées étaient âgées de plus de 30 ans. Le degré de couvert de la zone, de 90%, était important. Le boisement comportait un étage intermédiaire composé de houx et de ifs ainsi qu’un sous-bois naturel. Il mesurait 133,2 m de long et de 10,91 m à 16,48 m de large, pour une surface totale d’environ 1’700 m2, pouvant être qualifiée d’importante. Le peuplement ne mesurait pas au moins 12 m de large sur toute son étendue, cependant il s’agissait, dans le cadre d’une constatation de nature forestière, d’examiner l’ensemble des critères, tant qualitatifs que quantitatifs, et le fait que l’un d’entre eux n’était pas rempli ne permettait pas de conclure à l’absence de forêt si les autres conditions étaient réalisées. Une largeur inférieure à 12 m était retenue sur une surface de 60 m2 seulement, alors que la surface totale du boisement n° 2 excédait 1'700 m2, et il ne fallait pas donner une importance démesurée à cet élément, sauf à vider de sa substance le but de la législation sur les forêts. Au vu des similitudes entre la zone n° 2 et la zone n° 1, les critères quantitatifs de dimension, d’âge et de surface fixés par la LForêts étaient également remplis s’agissant de la zone n° 2, pour les mêmes motifs que ceux exposés dans le développement relatif à la zone n° 1.

Le boisement constituant la zone n° 2 remplissait, tout comme celui occupant la zone n° 1, des fonctions de structure paysagère et de biodiversité significatives notées à hauteur de 2 sur une échelle de 3. Au vu de la proximité géographique directe et de la similitude entre les boisements il était renvoyé au développement concernant la zone n° 1. Les explications selon lesquelles le boisement était en réalité une allée bordant un chemin séparant les parcelles nos 1'593 et 2'278 qu’empruntaient des véhicules ne permettaient pas de parvenir à une autre conclusion. Les fonctions de structure paysagère et de biodiversité des boisements existants en zone bâtie devaient être examinées à l’aune de leur environnement et de son degré d’urbanisation et étaient d’autant plus importantes en milieu constructible.

La décision de constatation de la nature forestière n° 2018-29c du 14 novembre 2018 avait été publiée dans la FAO du même jour. Elle précisait explicitement qu’elle pouvait faire l’objet d’un recours auprès du TAPI, dans un délai de trente jours à compter de sa publication, et avait été transmise par l’OCAN à la propriétaire le 14 novembre 2018 accompagnée du protocole et du levé des boisés. Il n’avait pas été allégué qu’un recours aurait été interjeté contre cette décision s’agissant notamment d’un éventuel non-respect des conditions de forme applicables à son prononcé. Aucun motif de nullité invocable en tout temps ne ressortait des éléments au dossier quant à cette décision, qui bénéficiait de la force de chose décidée. La question de la validité de cette décision excédait par ailleurs l’objet du litige.

C. a. Par acte remis à la poste le 29 janvier 2024, la propriétaire a recouru auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre ce jugement, concluant à son annulation et à l’annulation des deux décisions du département, et à ce qu’il soit enjoint au département de constater la nature non forestière des zones concernées, subsidiairement à lui enjoindre de procéder à un nouveau relevé des limites puis de prononcer une nouvelle décision. Subsidiairement, la cause devait être renvoyée au département. Plus subsidiairement, un transport sur place devait être ordonné, le jugement et les décisions annulés et il devait être enjoint au département de constater la nature non forestière des zones concernées, subsidiairement de procéder à un nouveau relevé des limites puis de prononcer une nouvelle décision, plus subsidiairement la cause devait être renvoyée au TAPI pour nouvelle décision.

Son droit d’être entendue avait été violé. Le TAPI avait refusé de procéder à un transport sur place qui aurait permis de constater que les zones n° 1 et n° 2 présentaient des caractéristiques identiques à la zone n° 3, compte tenu notamment du transport sur place effectué par l’OCAN. Aucun procès-verbal n’avait toutefois été tenu à cette occasion. Les prises de vue et plans versés à la procédure permettaient certes d’apprécier les critères quantitatifs mais non les prétendues fonctions forestières retenues par l’OCAN ou encore la similitude des zones nos 1 et 2 avec la zone 3. Le TAPI avait relevé la plantation initiale des boisements et estimé notamment que l’OCAN n’avait apparemment pas abordé la question du boisement dans une précédente requête d’autorisation d’un voisin. Il aurait dû procéder au transport sur place.

Le jugement violait la LForêt, consacrait un abus du pouvoir d’appréciation et était entaché d’arbitraire. On ne distinguait pas dans le raisonnement du TAPI en quoi les boisements concernés présentaient des fonctions supérieures à celle d’un simple parc. Un parc remplissait les fonctions esthétiques qui caractérisaient selon le TAPI la forêt. Le TAPI avait repris les explications de l’OCAN, et notamment les valeurs de 2 sur 3 retenues, sans vérifier si elles se justifiaient. Le TAPI estimait qu’il fallait se montrer moins strict, à l’aune d’une parcelle urbaine et non d’une forêt située en campagne, alors que les boisements étaient situés en zone 5 et en zone agricole à proximité de nombreux autres boisements, ce qu’un transport sur place aurait permis de constater. On ne comprenait pas pourquoi la zone n° 3 n’avait pas également bénéficié de cette appréciation. Un transport sur place aurait également permis de confirmer que la densité entre les zones n° 1 et n° 3 ne différait pas, ou pas complètement. Les relevés de limites avaient été effectués sans tenir compte de la différence d’homogénéité au sein même des zones. Les photographies de la zone n° 1 montraient que la bande d’arbres isolés également reliée à la zone n° 3 était considérée comme faisant partie intégrante de la zone forêt, alors même qu’il n’y avait pas de sous-bois et que le degré de couvert était manifestement inférieur à 90%. L’OCAN avait à tort omis de tenir compte de la présence d’une clôture et n’avait pas jugé utile de protéger le boisement en 2016 lors d’une autorisation de construire. En omettant de tenir compte des différences concrètes, l’OCAN avait violé son pouvoir d’appréciation, ce que le TAPI aurait dû constater. Cela valait en particulier pour la zone n° 2 dont le TAPI avait constaté qu’elle ne remplissait pas les critères quantitatifs vu sa largeur. La décision portant sur cette zone était en soi arbitraire.

La décision portant sur la zone n° 2 était en soi arbitraire dès lors que la limite tracée en 2018, même entrée en force, passait au milieu de la zone, ce qui n’était pas contesté, distinguant zone non forestière pour les arbres à droite et forestière pour les arbres à gauche alors même qu’ils constituaient tous un groupe homogène, sans justification fondée sur des motifs objectifs.

b. Le 22 mars 2024, le département a conclu au rejet du recours.

Les dimensions des boisements des zones n° 1 et n° 2 retenues par le TAPI étaient issues des données du SITG. Celles des boisements de la zone n° 3 des surfaces indiquées dans le protocole de constatation de la nature non forestière du 9 mars 2023. La prétendue difficulté d’accès pour la faune au boisement n° 1 qui résulterait du jugement attaqué n’était pas avérée, et le TAPI avait estimé qu’il n’était pas douteux que le boisement servait de refuge pour la petite faune et les oiseaux.

Le dossier du TAPI contenait déjà de nombreux plans et photographies ainsi que les explications détaillées fournies à la recourante lors du transport sur place effectué à sa demande en sa présence et avec l’OCAN en février 2023. Si la recourante l’avait jugé utile, elle aurait pu produire une expertise privée ou un reportage photographique accompagné d’un plan pour convaincre le TAPI d’organiser un transport sur place. À défaut, c’était à juste titre que le TAPI ne l’avait pas jugé nécessaire.

Lorsque les valeurs fixées par les cantons étaient atteintes, la qualité de forêt devait être affirmée. Tel était le cas des boisements nos 1 et 2, qui remplissaient les critères quantitatifs et assuraient des fonctions forestières. Le seul fait qu’une surface boisée bordait une voie de circulation ou une zone industrielle ne permettait pas de lui refuser la qualité de forêt. La fonction d’îlot refuge pour la biodiversité avait été jugée significative en l’espèce. Le petit massif enclavé dans une parcelle privée et clôturée ne subissait pas de pression du public. Les parcelles forestières étaient plutôt rares dans la commune du Grand-Saconnex. Les zones d’affectation des parcelles étaient sans pertinence pour leur qualification. La qualification des boisements de parc par la recourante n’était soutenue par aucun avis de spécialiste. Les deux petits ensembles arborés de la zone n° 3 n’avaient pas la même origine ni la même densité d’arbres et de couvert que les deux autres zones. Ils étaient beaucoup plus étroits que les peuplements reconnus comme forêts et étaient régulièrement entretenus, de sorte que le sous-bois ne se développait pas, et présentaient ainsi une structure de parc reconnaissable sans exercer de fonction forestière, contrairement aux boisements des zones n° 1 et n° 2.

c. Le 25 avril 2024, la recourante a persisté dans ses conclusions.

La zone n° 3, qui se trouvait dans le prolongement de la zone n° 1, servait elle aussi de séparation avec les autres parcelles et constituait elle aussi un fond de parc, certes plus étroit, mais dont les caractéristiques étaient similaires à celles des autres boisements.

La limite fixée par l’OCAN ne reposait sur aucun critère objectif. La composition et la densité de la zone n° 1 n’était pas homogène et une large bande en limite de parcelle était composée d’arbres isolés et espacés dont la structure s’apparentait tout à fait à la zone n° 3. Les mêmes remarques s’appliquaient à la zone n° 2 dont la largeur était inférieure à 12 m et qui bordait une route.

Au vu des nombreuses incohérences de l’autorité, on ne pouvait considérer que sa position était exempte d’arbitraire.

d. Le 26 avril 2024, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

 

EN DROIT

1.             Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ ‑ E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 ‑ LPA ‑ E 5 10).

2.             La recourante conclut à titre subsidiaire à un transport sur place.

2.1 Tel qu’il est garanti par l’art. 29 al. 2 Cst., le droit d’être entendu comprend notamment le droit pour la personne intéressée de produire des preuves pertinentes, d’obtenir qu’il soit donné suite à ses offres de preuves pertinentes, de participer à l’administration des preuves essentielles ou, à tout le moins, de s’exprimer sur son résultat lorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre. Il n’empêche toutefois pas l’autorité de mettre un terme à l’instruction lorsque les preuves administrées lui ont permis de former sa conviction et que, procédant à une appréciation anticipée des preuves qui lui sont encore proposées, elle a la certitude que ces dernières ne pourraient pas l’amener à modifier son opinion (ATF 145 I 167 consid. 4.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_359/2022 du 20 avril 2023 consid. 3.1 et les références citées).

2.2 En l’espèce, un transport sur place n’est pas nécessaire, compte tenu des rapports, plans et photos figurant au dossier ainsi que des données accessibles via le SITG, qui permettent de déterminer la nature des boisements et sur lesquels les parties ont eu plusieurs fois l’occasion de s’exprimer.

Il ne sera pas donné suite à la demande d’actes d’instruction.

3.             Le litige a pour objet les décisions du département qualifiant de zones forestières les zones n° 1 et n° 2 situées en tout ou en partie sur les parcelles de la recourante.

3.1 Selon l'art. 61 al. 1 LPA, le recours peut être formé pour violation du droit, y compris l'excès et l'abus du pouvoir d'appréciation (let. a), ou pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (let. b). Les juridictions administratives n'ont pas la compétence pour apprécier l'opportunité de la décision attaquée, sauf exceptions prévues par la loi (art. 61 al. 2 LPA), non réalisées dans le cas d'espèce.

3.2 La LFo a pour but général la protection des forêts, notamment la conservation de l'aire forestière, qui ne doit pas être diminuée (art. 1 et 3 LFo).

Par « forêt », on entend toutes surfaces couvertes d'arbres ou d'arbustes forestiers à même d'exercer des fonctions forestières. Leur origine, leur mode d'exploitation et la mention au registre foncier ne sont pas pertinents (art. 2 al. 1 LFo). Ne sont pas considérés comme forêts les groupes d'arbres ou d'arbustes isolés, les haies, les allées, les jardins, les parcs et les espaces verts (art. 2 al. 3 LFo).

Dans le cadre fixé par le Conseil fédéral, les cantons peuvent préciser la largeur, la surface et l’âge minimaux que doit avoir un peuplement sur une surface conquise par la forêt ainsi que la largeur et la surface minimales que doit avoir un autre peuplement pour être considérés comme forêt. Si le peuplement en question exerce une fonction sociale ou protectrice particulièrement importante, les critères cantonaux ne sont pas applicables (art. 2 al. 4 LFo).

Selon l'art. 1 OFo, les cantons précisent les valeurs requises pour qu'une surface boisée soit reconnue comme forêt, dans les limites suivantes : (a) surface comprenant une lisière appropriée : 200 à 800 m2 ; (b) largeur comprenant une lisière appropriée : 10 à 12 m ; (c) âge du peuplement sur une surface conquise par la forêt : 10 à 20 ans.

Les critères quantitatifs que les cantons peuvent fixer, dans les limites de l'art. 1 al. 1 OFo, servent à clarifier la notion qualitative de forêt posée par le droit fédéral. Sauf circonstances particulières, la nature forestière doit être reconnue lorsque les critères quantitatifs sont satisfaits, de sorte que ces derniers constituent des seuils minimaux. On ne peut nier la qualité de forêt du simple fait que ces seuils ne sont pas atteints (ATF 125 II 440 consid. 3 ; arrêt du Tribunal fédéral 1A.13/2005 du 24 juin 2005 consid. 4.2). À l'inverse, même en présence de ces critères quantitatifs, les critères qualitatifs peuvent être décisifs pour la qualification de forêt (arrêts du Tribunal fédéral 1A.141/2001 du 20 mars 2002 consid. 4.1 publié in ZBl 104/2003 p. 380 et résumé in RDAF 2004 I 734 ; 1A.225/2005 du 17 octobre 2006 consid. 6.3). Dans cette appréciation, il n'y a pas lieu de procéder à une pondération des intérêts privés ou publics (ATF 124 II 85 consid. 3 et les références citées).

3.3 À Genève, la législation sur les forêts précise que sont considérés comme forêts les peuplements boisés présentant toutes les caractéristiques qualitatives d'une forêt, exerçant une fonction forestière qui sont, en principe, âgés d'au moins quinze ans, s'étendent sur une surface d'au moins 500 m² et ont une largeur minimale de 12 m, lisière appropriée comprise (art. 2 al. 1 LForêts).

La LFo et la LForêts n'énumèrent pas les caractéristiques nécessaires pour pouvoir qualifier une aire boisée de forêt. Selon l'exposé des motifs relatif à l'art. 2 al. 3 let. a LForêts, sont exclus du régime forestier les éléments de paysage ne présentant pas une structure marquée par la présence de diverses strates ou étages, caractérisant un peuplement forestier (Mémorial du Grand Conseil, 1997, p. 606 ss). Par ailleurs, sont également considérés comme forêt les cordons boisés situés au bord de cours d'eau (art. 2 al. 2 let. c LForêts) qui assurent la protection des berges et soulignent le paysage de façon marquée, remplissant ainsi l'une des fonctions forestières dont il est question à l'art. 1 let. c de la loi fédérale (let. c) (Mémorial des séances du Grand Conseil 1997 4/I610).

3.4 Du point de vue qualitatif, les fonctions de la forêt sont au nombre de trois, d'importance équivalente : protectrice, sociale et économique. Pour être qualifié de forêt, il suffit que le peuplement concerné apparaisse apte à assumer une ou quelques-unes des tâches de l'aire forestière (JdT 1998 I 501, consid. 3d.cc).

Une forêt exerce une fonction protectrice lorsqu'elle protège la population ou des valeurs matérielles contre des catastrophes naturelles. Elle exerce une fonction économique lorsque la matière première que représente le bois est exploitée (FF 1988 III pp. 157 ss, 172). Selon la jurisprudence du Tribunal fédéral, un peuplement remplit une fonction sociale lorsqu'en raison de sa structure, de sa nature et de sa configuration, il offre à l'homme une zone de délassement, lorsque, par sa forme, il structure le paysage, lorsqu'il offre une protection contre les influences nuisibles telles que le bruit ou les immissions, lorsqu'il assure des réserves en eau d'un point de vue tant qualitatif que quantitatif, ou encore lorsqu'il procure un milieu vital irremplaçable aux animaux sauvages ainsi qu'aux plantes de l'endroit (arrêt du Tribunal fédéral 1A.225/2005 du 17 octobre 2006 et les références citées).

L'énumération de ces fonctions n'est pas exhaustive et ne reflète pas non plus un ordre de valeur ; la loi ne fixe pas de hiérarchie des fonctions, celle-ci dépend au contraire des conditions concrètes déterminantes pour chaque surface de forêt (Hans-Peter JENNI, Pour que les arbres ne cachent pas la forêt : un guide à travers la nouvelle législation sur les forêts, in cahier de l'environnement, n° 210, OFEFP 1994, ad art. 1 al. 1 LFo, p. 31).

Il suffit généralement que le boisement revête l'une des fonctions forestières pour que lui soit reconnu la valeur qualitative d'une forêt (ATF 124 II 85 consid. 3d/cc ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_118/2019 du 19 juillet 2019 consid. 9 ; 1A.30/2004 du 11 août 2004 consid. 4). Ainsi la seule fonction paysagère peut-elle suffire (arrêts du Tribunal fédéral 1C/517/2022 et 1C_522/2022 du 18 août 2022 consid. 5.2).

3.5 Selon le Tribunal fédéral, en principe, l'autorité forestière compétente pour procéder à une constatation de la nature forestière au sens de l'art. 10 LFo doit se fonder sur la situation effective du terrain au moment où elle statue. Dans certaines circonstances, l'existence d'une forêt peut toutefois être admise malgré l'absence de boisement, en particulier lorsqu'il apparaît qu'un défrichement a eu lieu sans autorisation ; en effet, la suppression du couvert forestier sans autorisation de défricher ne modifie pas le caractère forestier du terrain concerné ; le moment déterminant pour évaluer la nature du boisement n'est alors plus celui de la décision de première instance. L'intérêt à la conservation de la forêt est reconnu de plein droit pour les surfaces d'où la forêt a été éliminée sans autorisation ; celles-ci sont assujetties à l'obligation de reboiser où elle compte et elles continuent ainsi d'appartenir à l'aire forestière (arrêt du Tribunal fédéral 1C_228/2019 du 29 avril 2020 consid. 2.1.1 et les références citées). Le même raisonnement a été tenu à propos d’un abattage d’arbres autorisé et réalisé postérieurement à la décision de constatation de la nature forestière (arrêts du Tribunal fédéral 1C_517/2021 et 1C_522/2021 précités consid. 3.2).

3.6 La nature forestière est constatée dans le cadre d'une procédure formelle. En application de l'art. 4 LForêts, il appartient à l'inspecteur des forêts de décider si un bien-fonds doit être ou non considéré comme forêt. La procédure est détaillée par le RForêts. Les décisions de constatation de la nature forestière sont publiées dans la FAO et comportent l'indication des délais et voies de recours (art. 9 al. 1 RForêts). Dans cette procédure, la prise de position de la CCDB ne constitue pas un préavis exigé par la loi pour que la décision de constatation de la nature d’un bien-fonds puisse être prise par l’inspecteur cantonal des forêts (art. 3 al. 2 de la loi instituant une commission consultative de la diversité biologique, a contrario - LCCDB - M 5 38).

3.7 Une décision viole le principe de l'égalité de traitement consacré à l'art. 8 al. 1 Cst., lorsqu'elle établit des distinctions juridiques qui ne se justifient par aucun motif raisonnable au regard de la situation de fait à réglementer ou qu'elle omet de faire des distinctions qui s'imposent au vu des circonstances, c'est-à-dire lorsque ce qui est semblable n'est pas traité de manière identique et ce qui est dissemblable ne l'est pas de manière différente. L'inégalité de traitement apparaît ainsi comme une forme particulière d'arbitraire, consistant à traiter de manière inégale ce qui devrait l'être de manière semblable ou inversement. Il faut que le traitement différent ou semblable injustifié se rapporte à une situation de fait importante. Les situations comparées ne doivent pas nécessairement être identiques en tous points, mais leur similitude doit être établie en ce qui concerne les éléments de fait pertinents pour la décision à prendre (ATF 146 II 56 consid. 9.1 ; 144 I 113 consid. 5.1.1).

3.8 En l’espèce, dans un premier grief, de nature formelle, la recourante reproche au TAPI d’avoir violé son droit d’être entendue en n’ordonnant pas le transport sur place qu’elle avait requis.

Il a été vu plus haut que les plans, images et documents figurant à la procédure suffisent pour déterminer si les boisements constituent des forêts, et qu’un transport sur place ne se justifiait pas pour instruire le recours devant la chambre de céans.

Pour les mêmes motifs, le TAPI n’avait pas à ordonner de transport sur place.

Le grief sera écarté.

Dans un second grief, la recourante se plaint d’abus du pouvoir d’appréciation, d’arbitraire et de la violation de la LForêt.

Le grief d’arbitraire se confond en l’espèce avec celui de violation de la loi dès lors que le pouvoir d’examen de la chambre de céans n’est pas limité. L’autorité a retenu que la zone n° 1, issue de la même origine que l’entier du massif, remplissait non seulement la qualité de forêt mais encore exerçait des fonctions forestières, en ce qu’elle était couverte d’arbres ou d’arbustes forestiers à même d’exercer des fonctions forestières, en particulier de biodiversité et paysagère. La zone n° 2 n’avait pas connu de changement majeur depuis la précédente évaluation, de sorte que celle-ci n’avait pas à être remise en question.

Selon la recourante, les boisements n° 1 et n° 2 ne présenteraient pas de fonctions supérieures à celles que présenterait un simple parc. La recourante perd de vue qu’une fois identifiée par l’autorité spécialisée, la fonction forestière qualifie la forêt, avec les conséquences que la loi y attache, et la distingue des parcs. Il n’est ainsi pas pertinent d’appliquer la fonction retenue à un parc à des fins de comparaison, sauf à qualifier celui-ci de forêt à son tour.

Le fait, souligné par la recourante, que les boisements résulteraient d’une plantation, qu’ils auraient été entretenus pour des raisons esthétiques et auraient un rapport direct avec l’habitat est sans pertinence pour leur qualification de forêts, et n’exclut en particulier par l’application de la LFo et de la LForêt comme semble le penser la recourante.

La recourante reproche au TAPI de n’avoir pas vérifié l’attribution par l’OCAN de la note 2 (« significatif ») pour les fonctions de biodiversité et de protection. Il n’appartient cependant pas au juge du substituer son appréciation à celle de l’autorité spécialisée. Cela étant, le protocole en constatation de la nature forestière du 9 mars 2023 établit des peuplements composés à 98% d’espèces indigènes, soit érable, chêne, orme, frêne, cerisier, pin, épicéa et tilleul, respectivement érable, frêne, sapin et cerisier, des étages intermédiaires, des sous-bois naturels et aucun équipement, ainsi qu’une couverture de 90%. La recourante ne rend pas vraisemblable que les fonctions de biodiversité et de protection ne pourraient être inférées de cette densité et de cette variété d’essences, qu’elle ne conteste par ailleurs pas.

La question de la taille de la faune bénéficiant des boisements n’est pas non plus pertinente, et l’OCAN a rappelé dans ses observations que la prétendue difficulté d’accès au boisement n° 1 pour la faune en raison de la présence d’une clôture n’était pas avérée.

Ainsi que l’a fait observer l’OCAN, les zones qualifiant les parcelles, en l’espèce la zone 5 et la zone agricole, sont sans influence sur la qualité de forêt des boisements que celles-ci abritent. Le fait pour le TAPI de considérer non dénuée de fondement la fonction de protection esthétique retenue par l’OCAN, ou encore pas incongrue la fonction de protection de la faune exprime tout au plus la réserve observée par le juge qui examine la position de l’instance spécialisée, mais n’affaiblit aucunement le raisonnement de l’autorité. La prise en considération par le même juge d’un contexte de zone bâtie ou urbanisée, pour peu qu’elle soit nécessaire pour confirmer la nature forestière, repose quoi qu’il en soit sur le constat objectif que les parcelles en cause se trouvent en bordure de la zone villas de la commune, et que par ailleurs les zones forestières dans cette même commune sont, comme l’a fait remarquer l’intimé, particulièrement rares.

La recourante fait ensuite grief à l’OCAN d’avoir distingué la zone n° 3. Celle-ci présente toutefois des qualités objectivement différentes des deux autres zones, ce que la recourante ne conteste pas. La zone n° 3 est certes alignée à un (petit) côté de la zone n° 1. Cette circonstance ne crée cependant pas d’homogénéité. L’OCAN a en effet constaté que la zone n° 3 n’avait pas de sous-bois, que son taux de couverture était de 70%, qu’elle était entretenue et que les deux structures arborées étaient séparées par une prairie et constituaient une image paysagère de parc. La recourante n’explique pas en quoi ces différences notables permettraient de conclure à une homogénéité ou à une ressemblance.

La recourante qualifie les constats de l’OCAN d’approximations. À tort, cette autorité ayant calculé avec précision la couverture, énuméré les essences présentes, dénombré les arbres et recensé et quantifié les qualités forestières.

Le fait que l’OCAN n’ait dans un premier temps pas pris en compte une clôture est indifférent pour la qualification de zone forestière, étant rappelé que la clôture ne fait certainement pas obstacle aux déplacements de la petite faune ni de l’avifaune. La recourante ne saurait en déduire un comportement contradictoire de l’autorité.

Le fait que la nature forestière n’ait pas été examinée par le passé à l’occasion de demandes d’autorisations de construire pour des parcelles voisines ne saurait être invoqué par la recourante, qui reconnaît elle-même ne pas disposer d’un droit à l’égalité dans l’illégalité. Surtout, la qualité de forêt se détermine au jour de la décision, et non dans le passé ou le futur (ATA/237/2024 du 27 février 2024 consid. 2.8.2).

La recourante fait valoir la largeur, par endroits inférieure à 12 m, de la zone n° 2. Elle perd de vue que cette circonstance est sans effet dès lors que d’autres critères permettent de qualifier le boisement de forêt (ATA/237/2024 précité consid. 2.7.1), si bien qu’elle ne saurait avoir pour effet de les relativiser, comme le soutient la recourante.

Enfin, la recourante se plaint d’arbitraire en ce que la limite tracée par l’OCAN en 2018 passe au milieu de la zone n° 2. Elle n’explicite pas son grief et n’expose pas en quoi un tel tracé, établi au surplus pour une décision entrée en force, devrait être tenu pour arbitraire, étant rappelé que ce grief se confond en l’espèce avec celui de violation de la loi.

Entièrement mal fondé, le recours sera rejeté.

4.             Vu l’issue du litige, un émolument de CHF 1'500.- sera mis à la charge de la recourante et aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 LPA).

 

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PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 29 janvier 2024 par A______ SA contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 14 décembre 2023 ;

au fond :

le rejette ;

met un émolument de CHF 1'500.- à la charge de A______ SA ;

dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), la présente décision peut être portée dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, avenue du Tribunal fédéral 29, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. La présente décision et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être jointes à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Me Alix JOB, avocate de la recourante, au département du territoire - OCAN, au Tribunal administratif de première instance ainsi qu'à l’office fédéral de l’environnement (OFEV).

Siégeant : Claudio MASCOTTO, président, Florence KRAUSKOPF, Jean-Marc VERNIORY, Francine PAYOT ZEN-RUFFINEN, Patrick CHENAUX, juges.

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

F. SCHEFFRE

 

 

le président siégeant :

 

 

C. MASCOTTO

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :