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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3343/2023

ATA/265/2024 du 27.02.2024 ( AIDSO ) , ADMIS

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3343/2023-AIDSO ATA/265/2024

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 27 février 2024

2ème section

 

dans la cause

 

A______ recourante
représentée par Me Corinne CORMINBOEUF HARARI, avocate

contre

SERVICE DES PRESTATIONS COMPLÉMENTAIRES intimé

 



EN FAIT

A. a. A______, née en 1985, est la mère de B______, né le ______ 2014 de sa relation avec C______, lequel est bénéficiaire d’une rente de l’assurance-invalidité (ci-après : AI).

b. Après avoir vécu ensemble, A______ et C______ se sont séparés en septembre 2022 et ont convenu d’une garde partagée de B______.

B. a. Le 15 septembre 2022, A______ a transmis au service des prestations complémentaires (ci-après : SPC) un formulaire de demande de prestations complémentaires familiales (ci-après : PCFam). Elle y indiquait ne percevoir aucune pension alimentaire pour l’entretien de son fils étant donné la garde partagée convenue avec C______.

b. Le 18 octobre 2022, le SPC a mis A______ au bénéfice de PCFam et de prestations d’aide sociale avec effet au 1er septembre 2022.

c. Dans le cadre de l’examen périodique du dossier, le SPC a recalculé le droit aux prestations de A______ pour la période du 1er septembre 2022 au 30 juin 2023 et a, par décision du 29 juin 2023, ordonné la restitution des PCFam et des prestations d’aide sociale versées en trop, d’un montant total de CHF 6'524.-, dont CHF 4'812.- pour l’aide sociale.

Les plans de calcul indiquaient notamment pour les dépenses reconnues un montant de CHF 18'108.- pour 2022 et de CHF 18'480.- pour 2023 à titre de « besoins/forfait » d’aide sociale. Pour le revenu déterminant ils mentionnaient, sous « rentes, indemnités et pension », un montant de CHF 13'044.- pour l’année 2022 et de CHF 13'370.- pour l’année 2023 à titre d’« indemnités d’une assurance » tant pour les PCFam que pour l’aide sociale.

d. Le 4 juillet 2023, A______ a formé opposition contre cette décision, indiquant qu’elle ne percevait pas les rentes octroyées à son ex-compagnon, y compris celles pour son fils, de sorte qu’il n’y avait pas lieu de lui imputer ces montants à titre de revenu.

e. Par décision du 5 septembre 2023, le SPC a rejeté l’opposition de A______.

B______ était au bénéfice d’une rente complémentaire de l’AI perçue par son père. Un calcul des prestations complémentaires à l’AI avait été établi pour B______ par décision du 14 mai 2020 dans le dossier de son père, dont il ressortait que ses dépenses étaient entièrement couvertes par ses ressources. Afin d’éviter une double prise en compte des besoins vitaux de B______ (une fois dans les calculs des prestations d’aide sociale et une fois dans ceux des prestations complémentaires à l’AI), il avait été tenu compte dans les calculs des prestations d’aide sociale, au chapitre du revenu déterminant, du montant relatif à la couverture des besoins vitaux en matière de prestations complémentaires cantonales à l’AI pour un enfant (CHF 13'370.- en 2023), ce qui était conforme à la législation en vigueur. L’argument en lien avec le refus du père de lui verser la rente complémentaire ne permettait pas une appréciation différente de la situation concernant la prise en compte des ressources de l’enfant dans le calcul des PCFam (sic).

f. Par décision du 5 septembre 2023 également, le SPC a rejeté l’opposition de A______ en matière de PCFam pour les mêmes motifs.

C. a. Par acte posté le 6 octobre 2023, enregistré sous cause n° A/3250/2023, A______ a interjeté recours auprès de la chambre des assurances sociales de la Cour de justice (ci-après : la chambre des assurances sociales) contre ces deux décisions, concluant à leur annulation, à ce qu’il soit dit qu’elle n’était pas débitrice des montants réclamés, à ce qu’il soit procédé à un nouveau calcul de sa situation, sans imputation des prestations complémentaires AI pour son fils, et à ce que les montants rétroactifs dus lui soient versés.

Les décisions ne tenaient pas compte de la réalité de sa situation familiale, à savoir la garde partagée sur l’enfant, étant précisé que C______ réclamait désormais sa garde complète devant le Tribunal de première instance (ci-après : TPI). Le SPC n’avait pas pris en compte le revenu effectif qu’elle avait à disposition puisqu’elle ne percevait pas les prestations complémentaires AI, qui étaient versées au père. Le SPC ne s’était d’ailleurs pas prononcé sur ce point.

b. Par arrêt du 16 octobre 2023, la chambre des assurances sociales a déclaré irrecevable le recours dirigé contre la décision du 5 septembre 2023 en matière d’aide sociale et a transmis la cause à la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) pour raison de compétence.

c. Une cause n° A/3343/2023 a été ouverte à la chambre administrative.

d. Le 15 novembre 2023, le SPC a conclu au rejet du recours dans la cause n° A/3343/2023.

B______ avait droit à une rente complémentaire enfant de l’AI par son père, de sorte qu’il pouvait prétendre à des prestations complémentaires à l’AI, lesquelles devaient être demandées avant les prestations d’aide sociale. Afin d’éviter une double prise en compte des besoins vitaux de l’enfant, il avait été tenu compte, dans les calculs des prestations d’aide sociale, au chapitre du revenu déterminant, du montant relatif à la couverture des besoins vitaux en matière de prestations complémentaires cantonales à l’AI pour un enfant, à savoir CHF 13'370.- en 2023. Cette manière de procéder était favorable à A______, dès lors que les ressources effectives de l’enfant étaient supérieures à ce montant selon les éléments au dossier et s’élevaient à un montant annuel de CHF 19'080.- (soit CHF 9'732.- à titre de rente pour enfant d’invalide, CHF 5'616.- à titre de rente pour enfant d’invalide de la LPP et CHF 3'732.- à titre d’allocations familiales).

L’intégration des besoins vitaux en matière de prestations complémentaires cantonales à l’AI dans le calcul des prestations d’aide sociale était liée à la hiérarchie des prestations sociales et était sans rapport avec la répartition des ressources de l’enfant entre les parents. Cette répartition n’entrait pas en ligne de compte dans le calcul des prestations d’aide sociale, étant précisé que ce calcul tenait compte non seulement de l’ensemble des revenus, mais également de l’ensemble des dépenses de l’enfant. Il n’était ainsi pas déterminant que seule une partie des ressources susmentionnées soit encaissée par A______ et le reste par le père de l’enfant. Par ailleurs, auparavant, l’enfant B______ ne pouvait pas formellement bénéficier de prestations complémentaire à l’AI en raison d’un dépassement des barèmes, étant précisé qu’il faisait l’objet d’un calcul commun avec son père. Cela étant, l’ancien calcul des prestations complémentaires AI ne reflétait plus la situation actuelle, de telle sorte que le droit auxdites prestations devait être réévalué, indépendamment de la présente procédure.

e. Le 19 décembre 2023, A______ a persisté dans son recours.

Il ne pouvait pas être tenu compte des prestations perçues par son fils dans le calcul de ses charges et revenus puisqu’elle n’en percevait pas un centime et qu’elles étaient versées à son ancien compagnon exclusivement en raison du handicap dont il souffrait et du fait qu’il avait la charge de son fils la moitié du temps. Il convenait ainsi de tenir compte de la réalité de la répartition des charges entre les parents qui découlait de la garde alternée qu’ils exerçaient tous deux sur l’enfant et du fait qu’elle ne faisait plus partie du même groupe familial que son ex-compagnon depuis leur séparation, tous deux ayant constitué des domiciles distincts. C’était ainsi à tort que le SPC retenait que sa manière de procéder lui était favorable. La procédure devant le TPI était toujours pendante et les parties avaient convenu de maintenir la garde alternée en l’état.

Il convenait d’ordonner au SPC de fournir le dossier de C______ afin de connaître les montants des prestations complémentaires qui lui étaient versées ainsi que les montants retenus pour le calcul de ses revenus et charges, notamment concernant leur enfant. Son ex-compagnon devait également être entendu pour qu’il puisse confirmer la répartition des charges convenues, la garde alternée mise en place et l’absence de tout partage des prestations qu’il percevait.

f. Le 2 février 2024, A______ a indiqué qu’un accord avait été trouvé avec C______ et a produit la transaction conclue avec ce dernier devant le TPI le même jour selon laquelle une garde alternée sur B______ était instaurée, ce dernier conservant son domicile légal auprès de sa mère. C______ s’engageait à verser à cette dernière un montant de CHF 300.- par mois à titre de répartition des rentes AI complémentaires reçues par B______ à compter du 1er février 2024. A______ s’engageait à transmettre à C______ la décision sur recours concernant les prestations reçues du SPC, et C______ s’engageait, sur la base de ladite décision, à verser au SPC la moitié du montant réclamé, mais au minimum CHF 2'400.-.

g. Sur quoi, la cause n° A/3343/2023 a été gardée à juger, ce dont les parties ont été informées.

EN DROIT

1) 1.1 Interjeté en temps utile, le recours est recevable de ce point de vue (art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

1.2 Conformément à l’art. 134 al. 3 let. a de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales connaît en instance unique des contestations prévues à l’art. 43 de la loi cantonale sur les prestations cantonales complémentaires du 25 octobre 1968 (LPCC - J 4 25) concernant les PCFam au sens de l’art. 36A LPCC.

La chambre administrative est l’autorité compétente pour connaître d’un recours en matière d’aide sociale (art. 52 de la loi sur l’insertion et l’aide sociale individuelle du 22 mars 2007 - LIASI - J 4 04), y compris lorsqu’il émane du SPC, qui gère et verse les prestations d’aide sociale pour certaines personnes, notamment celles au bénéfice de PCFam (art. 3 al. 2 LIASI), pour le compte de l’Hospice général (arrêt du Tribunal fédéral 8C_1041/2012 du 11 juillet 2013 consid. 1.2).

La chambre de céans est ainsi compétente pour juger du cas d’espèce s’agissant de la décision sur opposition du 5 septembre 2023 qui porte sur les prestations d’aide sociale. En revanche, elle n’est pas compétente pour statuer sur un recours formé contre une décision portant sur les PCFam, si bien que les conclusions en lien avec celles-ci sont irrecevables, étant précisé qu’elles font l’objet de la cause n° A/3250/2023, pendante devant la chambre des assurances sociales.

2) La recourante requiert son audition ainsi que celle de son ex-compagnon et la production du dossier le concernant auprès de l’autorité intimée.

2.1 Garanti à l’art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), le droit d’être entendu comprend notamment le droit pour l’intéressé d’offrir des preuves pertinentes, d’obtenir qu’il soit donné suite à ses offres de preuves pertinentes et de participer à l’administration des preuves essentielles lorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre (ATF 148 II 73 consid. 7.3.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_148/2023 du 18 octobre 2023 consid. 4.2). Le juge peut cependant renoncer à procéder à des mesures d’instruction lorsque les preuves administrées lui ont permis de forger sa conviction et que, procédant à une appréciation anticipée des preuves qui lui sont encore proposées, il a la certitude que ces dernières ne pourraient l’amener à modifier son opinion (ATF 145 I 167 consid. 4.1). Le droit d’être entendu découlant de l’art. 29 Cst. ne garantit pas, de façon générale, le droit d’être entendu oralement (ATF 140 I 68 consid. 9.6.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_67/2023 du 20 septembre 2023 consid. 3.1) ni celui d’obtenir l’audition de témoins (ATF 130 II 425 consid. 2.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_521/2022 du 26 avril 2023 consid. 4.2).

2.2 En l’espèce, la recourante a eu l’occasion d’exposer ses arguments et de produire les pièces qu’elle jugeait nécessaires pour appuyer ses écritures, tant devant l’autorité intimée que devant la chambre de céans. Elle n’expose du reste pas quels éléments supplémentaires son audition apporterait à l’instruction de la cause qu’elle n’aurait pas pu développer par écrit, étant rappelé que la recourante ne dispose d’aucun droit à être entendue oralement par la chambre de céans. Il en va de même de l’audition de témoins, en l’occurrence de l’ex-compagnon de la recourante, qui doit être refusée pour les mêmes motifs. Il n’y a pas non plus lieu d’ordonner la production du dossier de son ancien compagnon auprès du SPC, exorbitant au présent litige, étant précisé que la réponse au recours de l’autorité intimée indique les montants perçus par l’enfant. Le dossier contenant tous les éléments permettant à la chambre de céans de trancher le litige, il ne sera pas donné suite à la demande de la recourante.

3) Le litige porte sur le point de savoir si c’est à juste titre que l’autorité intimée a tenu compte des prestations complémentaires cantonales à l’AI pour enfant dans le calcul du droit aux prestations d’aide sociale de la recourante.

3.1 Aux termes de l’art. 12 Cst., quiconque est dans une situation de détresse et n’est pas en mesure de subvenir à son entretien a le droit d’être aidé et assisté et de recevoir les moyens indispensables pour mener une existence conforme à la dignité humaine. L’art. 39 de la Constitution de la République et canton de Genève du 14 octobre 2012 (Cst-GE - A 2 00) contient une garantie similaire.

3.2 En droit genevois, la LIASI et son règlement d’exécution du 25 juillet 2007 (RIASI - J 4 04.01) concrétisent ces dispositions constitutionnelles. La LIASI a pour but de prévenir l’exclusion sociale et d’aider les personnes qui en souffrent à se réinsérer dans un environnement social et professionnel (art. 1 al. 1 LIASI) ainsi que de soutenir les efforts des bénéficiaires de la loi à se réinsérer sur le marché du travail et dans la vie sociale en général. Elle vise aussi à garantir à ceux qui se trouvent dans la détresse matérielle et morale des conditions d’existence conformes à la dignité humaine (art. 1 al. 2 LIASI).

Les prestations de l’aide sociale individuelle sont fournies notamment sous forme de prestations financières (art. 2 let. b LIASI), qui sont subsidiaires à toute autre source de revenu (art. 9 al. 1 LIASI).

3.3 Ont droit à des prestations ordinaires d’aide financière instaurées par l’art. 2 let. b LIASI, les personnes majeures (art. 8 al. 1 LIASI), ayant leur domicile et leur résidence effective sur le territoire du canton de Genève (art. 11 al. 1 let. a LIASI), qui ne sont pas en mesure de subvenir à leur entretien ou à celui des membres de leur famille dont elles ont la charge (art. 8 al. 1 et 11 al. 1 let. b LIASI) et répondent aux autres conditions de la loi (art. 11 al. 1 let. c LIASI), soit aux art. 21 à 28 LIASI.

3.3.1 Ont droit aux prestations d’aide financière les personnes dont le revenu mensuel déterminant n’atteint pas le montant destiné à la couverture des besoins de base et dont la fortune ne dépasse pas les limites fixées par règlement du Conseil d’État (art. 21 al. 1 LIASI). Font notamment partie des besoins de base le forfait pour l’entretien fixé par règlement du Conseil d’État (art. 21 al. 2 let. a LIASI).

En 2023, la prestation mensuelle de base s’élevait, pour une personne, à CHF 1'006.-, montant multiplié par 1,53 s’il s’agit de deux personnes (art. 2 al. 1 let. a RIASI). La prestation de base couvre les besoins suivants : l’alimentation (let. a), l’habillement (let. b), la consommation d’énergie, sans les charges locatives (let. c), l’entretien du ménage (let. d), l’achats de menus articles courants (let. e), les frais de santé (tels que médicaments achetés sans ordonnance), sans franchise ni quote-part (let. f), le transport (let. g), la communication (let. h), les loisirs et la formation (let. i), les soins corporels (let. j), l’équipement personnel (tel que fournitures de bureau ; let. k) et les divers (let. l ; art. 3 al. 2 LIASI).

3.3.2 Selon l’art. 22 al. 1 LIASI, sont pris en compte les revenus et les déductions sur le revenu prévus aux art. 4 et 5 de la loi sur le revenu déterminant unifié du 19 mai 2005 (LRDU - J 4 06), sous réserve des exceptions figurant aux al. 2 et 3, lesquelles ne sont pas pertinentes en l’espèce. Les ressources des membres du groupe familial sont assimilées à celles de l’intéressé (art. 22 al. 6 LIASI).

L’art. 4 al. 1 RDU contient une liste des éléments qui doivent être retenus à titre de revenus, parmi lesquels figurent, à la let. f, les prestations provenant de la prévoyance au sens de l’art. 25 de la loi sur l’imposition des personnes physiques du 27 septembre 2009 (LIPP - D 3 08), à l’exclusion de l’allocation pour impotent et de la contribution d’assistance au sens des dispositions de la loi fédérale sur l’assurance-vieillesse et survivants du 20 décembre 1946 (LAVS - RS 831.10) et de la loi fédérale sur l’AI du 19 juin 1959 (LAI - RS 831.20 ; art. 4 al. 1 let. f LRDU). Selon l’art. 25 al. 1 LIPP, sont imposables tous les revenus provenant de l’assurance-vieillesse et survivants, de l’assurance-invalidité ainsi que tous ceux provenant d’institutions de prévoyance professionnelle ou fournies selon des formes reconnues de prévoyance individuelle liée, y compris les prestations en capital et le remboursement des versements, primes et cotisations.

Figurent également dans la liste de l’art. 4 al. 1 LRDU, à la let. h, les autres prestations sociales non comprises dans l’art. 13 LRDU. L’art. 13 LRDU contient une liste de prestations sociales dans laquelle figurent notamment les prestations complémentaires cantonales à l’AI (al. 1 let. b ch. 5). Il s’agit, selon cette disposition, de prestations de comblement.

Selon les travaux législatifs relatifs à la modification de l’art. 4 al. 1 let. h LRDU, cette lettre précise que « seules les prestations sociales non comprises dans la hiérarchie des prestations visée à l’article 13 sont prises en compte dans le RDU socle » (Exposé des motifs relatif au PL 11'326, Mémorial du Grand Conseil [ci‑après : MGC] des 19-20 décembre 2013, session III, p. 21 ; ATA/213/2023 du 7 mars 2023 consid. 2.2). Par ailleurs, lors de la même modification, l’art. 4 al. 1 let. p LRDU, qui prévoyait la prise en compte des revenus perçus en vertu des dispositions fédérale et cantonale sur les prestations complémentaires à l’AVS et à l’AI pour la détermination du revenu déterminant, a été abrogé étant donné que les prestations complémentaires AVS/AI et les PCFam faisaient désormais partie de la hiérarchie des prestations selon l’art. 13 LRDU (Exposé des motifs relatif au PL 11'326, MGC des 19-20 décembre 2013, session III, p. 21), étant précisé que celles-ci sont exonérées de l’impôt (art. 27 let. i LIPP).

Les déductions sont exhaustivement mentionnées à l’art. 5 LRDU (ATA/204/2021 du 23 février 2021 consid. 4b).

3.3.3 Selon l’art. 24 LIASI, intitulé « calcul du revenu déterminant », le revenu déterminant le droit aux prestations d’aide financière est égal au revenu calculé en application de l’art. 22 de la loi, augmenté d’un quinzième de la fortune calculée en application de l’art. 23 de la loi.

La LRDU contient également une disposition sur le calcul du revenu déterminant unifié à son art. 8 LRDU. Selon cette disposition, le calcul du RDU est individuel. Il s’applique aux personnes majeures et à l’ensemble des prestations sociales visées à l’art. 13 LRDU (al. 1). Le socle du RDU est égal au revenu calculé en application des art. 4 et 5 LRDU, augmenté d’un quinzième de la fortune calculée en application des art. 6 et 7 LRDU (al. 2). Lorsqu’une prestation catégorielle ou de comblement est octroyée en application de la hiérarchie des prestations sociales visée à l’art. 13 LRDU, son montant s’ajoute au socle du RDU selon l’al. 2 du présent article et le nouveau montant sert de base de calcul pour la prestation suivante. Les prestations accordées aux personnes mineures sont reportées dans le RDU du ou des parents concernés (al. 3).

3.4 Selon l’art. 36 LIASI, est considérée comme étant perçue indûment toute prestation qui a été touchée sans droit (al. 1). Le remboursement des prestations indûment touchées peut être réclamé si le bénéficiaire, sans avoir commis de faute ou de négligence, n’est pas de bonne foi (al. 3).

Le bénéficiaire qui était de bonne foi n’est tenu au remboursement, total ou partiel, que dans la mesure où il ne serait pas mis, de ce fait, dans une situation difficile (art. 42 LIASI)

4) En l’espèce, il ressort des plans de calcul annexés à la décision querellée qu’un montant de CHF 13'044.- pour 2022 et de CHF 13'370.- pour 2023 à titre d’« indemnités d’une assurance » a été retenu dans le calcul du revenu déterminant de la recourante pour la période du 1er septembre 2022 au 30 juin 2023.

L’autorité intimée justifie dans sa décision sur opposition la prise en compte de ces « indemnités d’une assurance » par l’application de l’art. 4 al. 1 let. f LRDU, selon lequel le socle du revenu déterminant unifié comprend l’ensemble des revenus, notamment les rentes AI. Si la perception d’une telle rente fait certes partie du socle du revenu déterminant unifié selon cette disposition en lien avec l’art. 25 LIPP, il n’en demeure pas moins que le SPC a expliqué avoir tenu compte dans les calculs de prestations d’aide sociale, au chapitre du revenu déterminant, du montant relatif à la couverture des besoins vitaux en matière de prestations complémentaires cantonales à l’AI pour un enfant, soit les montants susmentionnés selon l’art. 3 al. 1 let. i du règlement relatif aux prestations cantonales complémentaires à l’assurance-vieillesse et survivants et à l’assurance‑invalidité du 25 juin 1999 (RPCC-AVS/AI J 4 25.03). Or, conformément à l’art. 4 al. 1 let. h LRDU, applicable par le renvoi de l’art. 22 LIASI, seules les prestations sociales non comprises dans la hiérarchie des prestations visée à l’art. 13 sont prises en compte dans le socle du revenu déterminant unifié. Dès lors que les prestations complémentaires cantonales à l’AI figurent parmi la liste des prestations sociales de l’art. 13 LRDU, elles ne devaient pas être prises en compte dans le calcul du revenu déterminant au sens de l’art. 22 LIASI.

L’art. 8 al. 3 LRDU prévoit certes que le montant des prestations de comblement, dont font partie les prestations complémentaires cantonales à l’AI (art. 13 al. 1 let. b ch. 5 LRDU), s’ajoute au socle du RDU. Cette disposition ne trouve toutefois pas application ici. Elle figure en effet au chapitre IIA de la LRDU, intitulé « calcul du revenu déterminant unifié ». Or, le calcul du revenu déterminant est spécifiquement réglementé pour les prestations d’aide sociale à l’art. 24 LIASI, qui s’applique à titre de lex specialis. Cette disposition prévoit toutefois uniquement que le revenu déterminant le droit aux prestations d’aide financière est égal au revenu calculé en application de l’art. 22 LIASI, augmenté d’un quinzième de la fortune calculée en application de l’art. 23 LIASI. Contrairement à l’art. 8 LRDU, l’art. 24 LIASI n’inclut pas les prestations de comblement dans le calcul du revenu déterminant. Cette disposition, qui tient compte des spécificités de l’aide sociale, déroge ainsi au régime général prévu par la LRDU, comme l’a déjà jugé la chambre de céans (ATA/213/2023 précité consid. 2.6).

Par conséquent, c’est à tort que l’autorité intimée a tenu compte du montant relatif à la couverture des besoins vitaux en matière de prestations complémentaires cantonales à l’AI pour un enfant dans le revenu déterminant de la recourante pour le calcul de ses prestations d’aide sociale pour la période du 1er septembre 2022 au 30 juin 2023.

Le recours sera donc admis et la décision querellée annulée en tant qu’elle rejette l’opposition de la recourante du 4 juillet 2023. La cause sera renvoyée à l’autorité intimée pour nouveau calcul du droit aux prestations d’aide sociale de la recourante pour la période du 1er septembre 2022 au 30 juin 2023 au sens des considérants.

5) Vu la nature du litige, il ne sera pas perçu d’émolument (art. 87 al. 1 LPA et art. 11 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 - RFPA - E 5 10.03). Vu son issue, une indemnité de procédure de CHF 1'000.- sera allouée à la recourante, qui obtient gain de cause (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 6 octobre 2023 par A______ contre la décision sur opposition du service des prestations complémentaires du 5 septembre 2023 ;

au fond :

l’admet ;

annule la décision sur opposition du 5 septembre 2023 en tant qu’elle rejette l’opposition du 4 juillet 2023 ;

renvoie la cause au service des prestations complémentaires pour nouvelle décision au sens des considérants ;

dit qu’il n’est pas perçu d’émolument ;

alloue une indemnité de procédure de CHF 1'000.- à A______ ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, Schweizerhofquai 6, 6004 Lucerne, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Me Corinne CORMINBOEUF HARARI, avocate de la recourante, ainsi qu’au service des prestations complémentaires.

Siégeant : Claudio MASCOTTO, président, Florence KRAUSKOPF, Eleanor McGREGOR, juges.

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

F. SCHEFFRE

 

 

le président siégeant :

 

 

C. MASCOTTO

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :