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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3756/2022

ATA/12/2024 du 09.01.2024 ( FPUBL ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3756/2022-FPUBL ATA/12/2024

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 9 janvier 2024

 

dans la cause

 

A______ recourant
représenté par Me Daniela LINHARES, avocate

contre

COMMUNE B______ intimée
représentée par Me Audrey PION, avocate



EN FAIT

A. a. A______, né le ______ 1981, domicilié dans la commune B______ (ci-après : la commune), a été engagé par celle-ci, par contrat du 23 avril 2018 en qualité d’équipier au sein du service « environnement et espaces verts » (ci-après : le service) pour quatre périodes déterminées. Son supérieur hiérarchique était C______.

Par un second contrat de durée déterminée du 19 septembre 2018, A______ a été engagé en qualité d’auxiliaire patinoire pour la période du 1er novembre 2018 au 15 mars 2019. Selon l’évaluation du 7 mars 2019, il avait travaillé à la satisfaction de la commune.

Le 19 mars 2019, il a été engagé pour la période du 3 juin au 20 septembre 2019 en qualité d’équipier auxiliaire. Il dépendait directement de C______.

Par contrat de durée maximale du 29 octobre 2019, A______ a été engagé en qualité d’équipier auxiliaire à 50% du 11 novembre 2019 au 31 mars 2020 au plus tard, en fonction des besoins du service.

b. Le 10 mars 2020, il a été engagé par contrat de travail à durée indéterminée, en qualité d’agent de voirie de la commune à 100% dès le 1er avril 2020 pour un traitement de CHF 6’138.20 bruts par mois, 13x/an. Son supérieur hiérarchique était C______.

c. Le service a été dirigé par D______ jusqu’au 20 novembre 2020, C______ jusqu’au 28 février 2022 puis E______.

Une vingtaine de collaborateurs y travaillent, répartis principalement en deux secteurs : « espaces verts », dont la responsable était F______, et « voirie – manifestations » dont le poste a été vacant depuis une date non déterminée jusqu’au 1er juillet 2022, date d’arrivée de G______. La vacance a été assurée par la précitée.

d. L’évaluation de A______ effectuée le 3 juillet 2020 était bonne. Il était décrit comme consciencieux, s’impliquant pour une collaboration constructive avec son binôme et coopérant volontiers avec tous ses collègues. Il s’était intégré sans difficulté au sein de toute l’équipe. Le collaborateur se disait très satisfait.

L’évaluation du 17 décembre 2020 était bonne. Le collaborateur se disait satisfait.

B. a. Le 2 février 2021, A______ et H______, travaillant en binôme, ont été convoqués à une séance en présence de C______, F______, qui avait effectué les évaluations des 3 juillet et 17 décembre 2020, et I______. Selon le résumé adressé à J______, responsable des ressources humaines (ci-après : RRH), les travaux de balayage des voiries communales étaient effectués à satisfaction. Cependant, la collaboration entre les intéressés se péjorait et devenait très problématique. La séance devait permettre de confronter leurs points de vue et trouver les solutions qui s’imposaient pour la continuité de la collaboration.

b. A______ a été en incapacité de travail complète dès le 4 mars 2021. Il a repris à 50% le 16 mars et à 100% le 19 avril 2021.

c. L’évaluation au 4 mai 2021 effectuée par F______ était nuancée. Si les prestations fournies, les connaissances professionnelles et les compétences personnelles continuaient à répondre aux attentes, les compétences sociales étaient à améliorer. Référence était faite à une séance du 2 février 2021. L’intéressé devait poursuivre son engagement pour une collaboration constructive et des discussions professionnelles régulières avec son collègue. A______ se disait globalement très satisfait.

d. A______ a été en incapacité de travail complète, en raison d’une dépression, dès le 30 septembre 2021. Il a repris à 50% le 7 février 2022 et à 100% le 21 mars 2022.

e. Le 28 février 2022, C______ a pris sa retraite. E______ l’a remplacé.

f. L’évaluation du 21 mars 2022, effectuée par F______, était bonne, y compris sur les compétences sociales. A______ était décrit comme plus ouvert et mettant tout en œuvre pour que la collaboration et les relations avec ses collègues soient cordiales. Son attitude participait à retrouver une saine collaboration avec son binôme. Cela lui redonnait confiance. Son employeur souhaitait que cela se pérennise. L’avis du collaborateur était nuancé, mais globalement satisfait. Il était peu content des outils de travail à disposition mais très satisfait de l’ambiance et du climat de travail.

g. A______ a été nommé le 1er avril 2022.

h. Il a été en incapacité de travail complète dès le 1er septembre 2022 en raison d’une dépression. Il a repris à 50% le 7 septembre 2022.

i. L’annonce du retour au travail de A______ a suscité de fortes réactions notamment chez trois collègues, H______, K______ et L______, lesquels se sont plaints de « devoir être bienveillants et gentils sans le materner », du fait que A______ avait dû gérer des décès, rupture de couple et autres problèmes personnels qui avaient affecté son environnement de travail, exigeant de ses collègues d’importants efforts, et concluant que l’intéressé devait « se soigner et ne pouvait plus travailler en équipe ».

j. La RRH a eu différents entretiens à propos de la collaboration et de l’attitude de A______ avec ses collègues.

Selon le « suivi d’entretien » du 11 octobre 2022, signé par H______, celui‑ci avait évoqué, lors d’un premier entretien le 13 septembre 2022, des dysfonctionnements dans le comportement de A______. Trois « motifs » étaient cités et illustrés par des exemples : 1) A______ avait un comportement dangereux dans l’exercice de sa fonction, soit la conduite de la balayeuse ; 2) il avait une attitude et un comportement irrespectueux, sexistes, grossiers et insultants ; 3) il avait une attitude non collaborative et cherchait à nuire à autrui ; plusieurs exemples détaillaient les trois « motifs ».

Selon le « suivi d’entretien » du 11 octobre 2022, signé par M______, celui‑ci avait évoqué, lors d’un premier entretien le 22 septembre 2022, les mêmes trois motifs de dysfonctionnements du comportement de A______.

La RRH s’est entretenue par téléphone avec cinq autres collègues de l’intéressé et a entendu N______, stagiaire d’été.

k. Le mercredi 5 octobre 2022, E______ a informé A______ qu’il était attendu le lundi 10 octobre 2022 en présence d’un conseiller administratif, du secrétaire général de la commune et de lui-même afin d’être entendu sur les trois motifs, rapportés à sa hiérarchie.

l. Selon le suivi d’entretien du 10 octobre 2022, A______ réfutait la plupart des exemples étayant les trois « motifs » qui lui étaient reprochés.

Concernant le premier, il confirmait avoir roulé souvent très près de son binôme, jusqu’à parfois lui brosser les chaussures, sans que cela soit volontaire. De même, il lui était arrivé une ou deux fois d’emmener sa fille dans la cabine de la balayeuse pour lui faire faire un tour, à la place passager ou sur ses genoux, lorsqu’il passait près du préau de son école. Il contestait « serrer » les cyclistes en les dépassant et accélérer pour leur faire peur, prendre tout l’espace de la route en croisant et tirer vers la gauche, obligeant les véhicules venant en face à fortement ralentir et se décaler sur la droite, être fréquemment au téléphone pour des conversations privées lors de la conduite de la balayeuse et n’être pas systématiquement en « mains libres » lors de la conduite dudit véhicule.

S’agissant du second « motif », il confirmait klaxonner son collègue à l’œuvre avec la souffleuse, depuis la cabine de la balayeuse, pour lui « faire savoir qu’il y avait des endroits à nettoyer » car « c’était sa manière de faire ». Concernant le reproche selon lequel il avait un discours « antifrançais » auprès de qui voulait l’entendre et notamment des personnes employées dans le cadre des « jobs d’été », dans des termes tels que « la zone la plus sale c’est la ZIPLO à cause des Frouzes », il confirmait que les dégradations sur la voie publique étaient dues aux véhicules à plaques françaises et que ses propos n’étaient pas contre les frontaliers. Il était vrai qu’il avait vidé la tonne à eaux usagées de la balayeuse sur une stagiaire d’été, mais il n’avait pas vu qu’elle était là. Il contestait avoir des regards appuyés sur les femmes et les jeunes filles en stage d’été, avoir insulté les véhicules à plaques françaises selon les termes « sale Frouze de merde », avoir hélé une femme alors qu’il effectuait un plein à la station-service en lui disant « T’as de beaux nénés, mais t’es trop moche, je te baiserais pas ! », avoir critiqué et dénigré régulièrement sa hiérarchie et ses collègues en disant : « c’est tous des merdes » ou le « gros » en parlant de M______, s’être adressée à une stagiaire d’été en évoquant sa sœur en des termes « j’espère qu’elle est bonne ta sœur ! Elle est mieux que toi ou moins bien que toi ? », avoir dénigré et critiqué ses collègues auprès des stagiaires d’été et cherché à leur soutirer des informations sur ce qu’ils auraient pu dire à son sujet.

Enfin, s’agissant du 3ème « motif », il admettait qu’il avait été, mais uniquement par le passé, régulièrement dans la critique, la remise en question de chaque demande et avait formulé des remarques souvent négatives. Tel n’était plus le cas. Il contestait se plaindre souvent des personnes avec qui il devait travailler, avoir demandé à M______ de bâcler les travaux des préaux afin que les écoles ne soient pas prêtes pour la rentrée et que F______ soit sanctionnée, avoir dit ouvertement « on n’est pas dans le privé et en étant à la commune on va faire tranquille », avoir demandé à H______ d’aller débroussailler puis être allé se plaindre à la hiérarchie de ce que le précité débroussaillait, avoir dit qu’il avait activé un contact à la ville de Genève pour « pourrir M______ » qui y avait postulé, afin qu’il ne soit pas engagé.

À l’issue de l’entretien, A______ a été libéré de son obligation de travailler.

m. Il a été en incapacité de travail complète dès le 10 octobre 2022.

n. Le 11 octobre 2022, A______ a sollicité un nouvel entretien auprès de la RRH pour dénoncer une situation qu’il qualifiait de mobbing à son égard de la part de plusieurs de ses collègues. Son attitude était due au fait que ceux-ci l’avaient mis à l’écart.

o. Par décision du 14 octobre 2022, le conseil administratif de la commune a prononcé le licenciement avec effet immédiat de A______.

C. a. Par acte du 14 novembre 2022, ce dernier a interjeté recours devant la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre cette décision. Il a conclu à ce qu’il soit dit que son licenciement était injustifié et abusif ; cela fait, le licenciement devait être annulé et il devait être réintégré avec effet immédiat dans ses fonctions. Subsidiairement, la commune devait être condamnée à lui verser une indemnité de CHF 13'756.50 bruts, équivalent à deux mois de salaire, pour licenciement immédiat injustifié, et CHF 41'269.50 pour licenciement abusif, avec intérêts à 5% l’an dès le 14 octobre 2022. Préalablement, l’effet suspensif devait être octroyé, il devait être réintégré avec effet immédiat et une audience de comparution des parties et d’enquêtes devait être ordonnée. Les coordonnées de sept témoins étaient détaillées.

À son départ, à la retraite, C______ l’avait mis en garde contre ses collègues, se rendant compte qu’ils le discriminaient. Ces problèmes s’étaient effectivement concrétisés au départ à la retraite du précité et d’D______, ancien chef du service. À l’arrivée en fonction de E______, il lui avait fait part des problèmes rencontrés notamment avec H______. En mars 2022, à sa reprise après son congé maladie, ses collègues l’appelaient « le dépressif » ou « le Calimero ». Il avait appris par les stagiaires d’été que ses collègues le qualifiaient de « gros connard », d’« antisocial », de « gros con » et qu’une pétition avait été lancée contre lui afin de le faire licencier. Il en avait parlé à E______ et à la RRH. Cette dernière lui avait indiqué qu’il devait la prévenir si ces agissements persistaient. Le comportement de ses collègues l’avait plongé dans une dépression nécessitant un arrêt de travail. Le Dr S______, psychiatre, avait attesté, le 26 octobre 2022, que « le patient me décrit des difficultés relationnelles avec certains de ses collègues de travail depuis plus d’une année où il s’est senti harcelé, rejeté, vivant un malaise grandissant, sans soutien effectif de sa hiérarchie ». Alors qu’il avait dénoncé les faits de harcèlement dont il était victime, il avait été licencié à la suite de plaintes des personnes qui, précisément, le harcelaient. L’enquête disciplinaire aurait dû être menée par une entreprise externe et neutre et non par son employeur. Il avait demandé en vain à pouvoir s’adresser au conseil administratif et au secrétaire général, la RRH et E______ le renvoyant à faire recours contre la décision. Après son licenciement, plusieurs employés de la commune l’avaient contacté pour venir témoigner en sa faveur. Ils avaient toutefois peur des représailles et d’être licenciés. H______ avait aussi pris, à plusieurs reprises, son fils dans la balayeuse, eu plusieurs accrochages avec ledit véhicule et en avait même cassé la direction. Il n’avait toutefois jamais été inquiété.

La commune avait violé les art. 37 et 102 du statut du personnel de la commune B______ du 20 mai 2014 (LC 33 151 ; ci-après : le statut) ainsi que 337 de la loi fédérale du 30 mars 1911, complétant le Code civil suisse (CO, Code des obligations - RS 220). La commune l’avait licencié sans avertissement. Elle n’avait entendu aucun des témoins qu’il avait cités et n’avait pas pris en compte ses arguments. Les motifs à l’appui de la résiliation des rapports de travail étaient contestés. Il avait toujours été courtois et cordial, même à l’égard de H______.

La commune avait de surcroît violé l’art. 35 du statut en résiliant de manière abusive le contrat de travail. Il avait fait valoir les semaines et les mois précédents son licenciement des prétentions découlant des rapports de travail. Il avait notamment mentionné à ses supérieurs et à la RRH qu’il était harcelé au travail depuis plusieurs mois. Ce comportement l’avait conduit à faire une dépression, attestée par certificat médical. Plusieurs employés lui avaient indiqué que certains collaborateurs, notamment H______, œuvraient pour qu’il soit licencié, à l’instar de la pétition préparée dans l’optique de la faire signer à tous les employés de la commune.

b. La commune s’est opposée à la requête en restitution de l’effet suspensif.

c. Par décision du 16 décembre 2022, le vice-président de la chambre administrative a rejeté la requête de mesures provisionnelles.

d. La commune a conclu au rejet du recours.

e. Dans sa réplique, A______ a relevé que ses collègues n’avaient jamais eu d’empathie à son égard, notamment lors du décès de son père et de son divorce qui l’avaient beaucoup affecté. Ils l’avaient au contraire dénigré. E______, au courant de ses problèmes de santé, n’avait pas été compréhensif, comme en témoignait le contenu du courriel relevant : « je dois aussi consacrer mon énergie au groupe pas à cet individu seulement ».

f. Dans sa duplique, la commune a précisé avoir mandaté une entreprise externe pour jouer le rôle de « personne de confiance ». Ce service avait été présenté à tous les collaborateurs sous l’acronyme « TOM », de la documentation leur avait été remise et était accessible en tout temps sur l’intranet de la commune. La commission du personnel était par ailleurs disponible en cas de difficultés avec des collègues pour aider et orienter un collaborateur.

g. Des audiences de comparution personnelle et d’enquêtes se sont déroulées les 31 août et 12 octobre 2023.

ga. A______ a précisé être toujours en totale incapacité de travail en raison de sa dépression. Il était au chômage. Dès son arrivée, en mai 2018, il avait senti une certaine animosité à son égard de certains de ses collègues au motif de sa bonne entente avec ses supérieurs. Cela se manifestait par des « petites piques ». Il avait pensé que cela était usuel, avec chaque nouvel arrivant, mais cela ne s’était pas calmé. Certains pensaient qu’il avait été pistonné par la commune et bénéficiait de protection au sein de l’administration. Il en avait parlé à ses deux supérieurs, C______ et D______, qui lui avaient conseillé d’attendre un peu.

Quand il avait eu un contrat à durée indéterminée, il s’entendait globalement bien avec tous ses collègues, mais des petites frictions étaient apparues avec H______, qui s’étaient aggravées, aboutissant à la médiation de février 2021. Par la suite, il avait estimé « avoir fait sa part », mais celui-là avait créé une sorte d’alliance principalement avec L______ et K______.

Il avait appris l’existence de la pétition à son encontre en août 2022 par une stagiaire d’été et en avait parlé à G______, son nouveau chef direct.

Il s’était adressé à « TOM » en septembre 2022, à sa reprise de travail, sur conseils de la RRH et de E______. Il n’avait pas réussi à les joindre. Les intervenants de « TOM » l’avaient rappelé trois semaines plus tard, alors qu’il était déjà licencié. Il n’avait pas pris contact avec eux plus tôt, car il avait l’espoir que les choses s’apaiseraient, à la suite des changements intervenus dans la hiérarchie, du Covid et de ses difficultés d’ordre personnel.

Il contestait avoir « serré » les cyclistes avec la balayeuse. Il avait été amendé une fois pour avoir conduit en téléphonant, infraction qu’il n’avait pas contestée. Il s’agissait de l’une des seules fois où il avait été au téléphone, celui-ci lui servant plutôt à mettre de la musique. Il lui était arrivé parfois de proférer des insultes, que les conducteurs soient suisses ou français, si le véhicule concerné adoptait une conduite dangereuse à son égard. Il contestait avoir dit « T’as de beaux nénés, mais t’es trop moche, je te baiserais pas ! » à une cliente d’une station-service de la commune. Il habitait B______, y connaissait tout le monde et ses enfants y étaient scolarisés. Il ne se serait pas permis une telle phrase. Il n’était pas exclu qu’il ait prononcé une phrase du style « Elle est charmante, c’est dommage qu’elle fasse la gueule ! », mais rien de plus. Il ignorait pourquoi M______ avait évoqué une telle phrase. Il contestait aussi dénigrer ses collègues. Il contestait avoir dit à une stagiaire d’été « j’espère qu’elle est bonne ta sœur ! Elle est mieux que toi ou moins bien que toi ? ». Il avait éventuellement évoqué la question de savoir si elle était aussi charmante et jolie qu’elle. C’était un milieu masculin. On entendait un peu de tout. Tout le monde avait un langage lourd et il ne pensait pas être le pire.

Le 5 octobre 2022, E______ l’avait informé oralement d’un entretien qui se tiendrait le 10 octobre 2022. À cette occasion, son supérieur lui avait montré le courrier avec les trois « motifs » évoqués à son encontre. On ne lui avait pas dit qu’il pourrait être assisté par quelqu’un. Il avait essayé d’appeler la RRH, mais ils n’avaient pas réussi à se joindre. Il s’était présenté le 10 octobre 2022, seul. Personne ne lui avait parlé d’une possibilité d’enquête, confiée à une entreprise neutre, sinon il l’aurait sollicitée. Il connaissait l’existence de la commission du personnel et avait contacté sa présidente entre le 5 et le 10 octobre 2022. Elle lui avait répondu que la situation semblait être grave et qu’elle ne voulait pas entrer en matière, ne voyant pas comment le défendre. Il avait conservé d’excellents contacts avec plusieurs de ses anciens collègues, avec lesquels il avait toujours des activités en commun.

gb. D______ avait travaillé pour la commune de janvier 2004 au 30 novembre 2020. Il avait commencé comme simple employé à la voirie et était devenu chef d’équipe dans le service. Il avait fait la connaissance de A______ à son engagement en 2018 et avait de bonnes relations avec lui. Celui-ci était apprécié de ses supérieurs. Il ignorait s’il l’était aussi de ses collègues. Il était en charge de quatre à cinq personnes, dont le recourant. En cas de difficulté entre collègues, ces derniers ne venaient pas s’ouvrir auprès de lui. Il n’avait pas souvenir d’un entretien avec A______ et C______ à propos de difficultés de celui-là avec ses collègues. Il était satisfait du travail de A______. Contrairement à certains, ce dernier conduisait bien et faisait bien son travail.

gc. E______ avait commencé au service de la commune le 1er mars 2022 en qualité de responsable du service. A______ avait un comportement solitaire, assez renfermé. « S’agissant de sa capacité à travailler en équipe, c’était un peu compliqué ». Il y avait eu des tensions avec H______. Cette problématique lui avait été relayée par l’équipe, A______ compris. Il existait aussi des tensions avec les autres membres de l’équipe en lien avec des demandes du recourant, assez régulières, de modifier l’organisation convenue avec l’équipe. Cette attitude était déstabilisante pour le groupe et « pas forcément toujours constructive ».

À sa prise d’emploi, il avait reçu tous les collaborateurs du service individuellement, dont A______. Il n’avait pas de souvenir particulier de cet entretien par rapport aux autres menés à cette époque, notamment pas qu’il lui ait parlé de problèmes avec ses collègues. Il avait relu ses notes d’entretien avant son audition devant la chambre administrative et rien de tel n’y apparaissait. L’entretien de septembre 2022, avec la RRH et A______, avait été prévu pour discuter de la reprise de son emploi à temps partiel suite à son incapacité totale de travailler. Ils avaient compris qu’il était important pour le collaborateur de reprendre son travail et de voir des gens, mais que, médicalement, le médecin n’y était que moyennement favorable. L’entretien était « assez tendu par rapport à son envie et l’on sentait une tension à l’intérieur de lui ». Il n’avait pas le souvenir que A______ ait, à cette occasion, évoqué des problèmes avec d’autres membres de l’équipe, du mobbing ou du harcèlement.

C’était à l’annonce, à l’équipe, du retour partiel de A______ qu’il y avait eu une « sorte d’explosion de faits, d’éléments qui [lui avaient] été rapportés ». Il en avait parlé à la RRH et ils avaient entendu toutes les personnes du service voirie, sauf une qui n’était plus active. Il était présent aux entretiens avec H______ et M______ et confirmait que le contenu des comptes rendus était conforme. Il n’était pas présent pour l’audition de N______, stagiaire d’été, et n’avait pas participé aux entretiens téléphoniques avec cinq autres employés.

Lors de l’entretien du 10 octobre 2022, A______ avait pu se prononcer sur les griefs émis à son encontre. L’entretien avait duré au minimum 45 minutes. À son arrivée, le processus de la nomination de l’intéressé était déjà entamé auprès de F______, laquelle était venue le voir et souhaitait que la nomination soit éventuellement repoussée. Il lui avait indiqué qu’en l’absence de faits précis, cela lui semblait difficile. Il reconnaissait qu’il pouvait y avoir une divergence entre l’intervention de F______ et l’évaluation du 21 mars 2022. Il y était toutefois noté que « leur collaboration est aujourd’hui satisfaisante », cette phrase faisant référence aux problèmes qui s’étaient produits par le passé.

gd. C______ avait travaillé à la commune de 1987 à la fin du mois de février 2022, en dernier lieu en qualité de chef du service. Il avait la responsabilité d’une vingtaine de personnes. Il avait fait la connaissance de A______ lorsqu’il avait été engagé de façon saisonnière pour la patinoire de la commune et avait de bonnes relations avec lui. Ce dernier faisait bien son travail et était précis. Il s’agissait d’une « bonne personne », agréable. S’il avait un petit souci, il venait lui en parler. A______ respectait les règles imposées par la commune. Il n’avait jamais eu besoin de l’avertir. Il y avait eu des problèmes avec H______ qui venait parfois se plaindre que A______ ne l’avait pas regardé ou ne lui avait pas dit bonjour avec le sourire. C’était principalement lié à H______. La commune les avait mis « en relais » afin de limiter les contacts entre eux. H______ était quelqu’un de timoré, qui manquait de clairvoyance dans son travail. A______ était quelqu’un qui avait toujours dit les choses, « franc du collier », ce qui pouvait être un défaut ou une qualité.

Lors de la médiation, en février 2021, il avait, avec la responsable de secteur, écouté H______ et A______. Il leur avait dit que s’ils n’arrivaient pas à s’entendre, il y aurait des sanctions. Il avait, face à lui, quelqu’un qui pouvait parfois paraître désagréable avec ses collègues par son franc-parler, soit A______, et un « Calimero » qui se plaignait de tout, soit H______.

À l’arrivée de E______, ils s’étaient vus environ cinq heures autour d’une table pour le « passage de témoin ». Il y avait beaucoup de choses à aborder et ils n’avaient pas parlé du litige entre A______ et H______. Ils n’avaient d’ailleurs pas abordé les questions relationnelles au sein de l’équipe. Des groupes s’étaient formés dans le service. « Il n’y avait pas que le litige entre les deux prénommés. Comme partout, certains s’entendaient bien, il y avait des meneurs, d’autres étaient moins intégrés, certains se plaignaient du chef d’équipe, d’autres de collègues ». A______ lui avait dit que certains collègues lui répondaient mal ou ne l’estimaient pas, à son souvenir, sans préciser le nom des collègues. L’intéressé n’avait jamais pris rendez‑vous spécifiquement avec lui pour ces problématiques. Il avait été surpris du licenciement du recourant. « S’il y avait eu une sonnette d’alarme à l’époque, je l’aurais tirée ».

ge. O______ avait travaillé avec A______ environ six mois, fin 2020-début 2021. Celui-ci était très gentil, heureux de vivre. Au cours de leur collaboration, A______ s’était séparé de sa femme. Celui-ci s’était alors un peu retiré et s’était concentré sur lui. A______ et H______ ne s’entendaient pas forcément très mal, mais il était préférable qu’ils restent chacun de leur côté. Rien ne l’avait choqué dans le comportement du recourant, lorsqu’il était avec lui dans la balayeuse. Il était très respectueux des autres usagers de la route et n’était pas dangereux. Lors de discussions informelles après le travail, en l’absence de A______, certains collègues évoquaient leur envie de le voir partir. À son arrivée, il travaillait tant avec A______ qu’avec H______ ; par la suite, au vu des tensions entre eux, parfois uniquement avec l’un ou l’autre, voire aucun. Sa collaboration avec A______ était presque quotidienne. Il n’avait pas souvenir que H______ ait été agressif avec celui-là, en tous cas pas en sa présence. Il y avait vraiment eu un changement chez A______ après sa séparation. Sur la fin des six mois, ce dernier avait eu un arrêt maladie. À son retour, il avait passé de quelqu’un qui s’entendait bien avec les autres à quelqu’un qui était mis à l’écart. Certains parlaient de lui en disant « le dépressif ». Cette attitude l’avait choqué et cette minimisation de son état mental l’avait marqué.

gf. P______ avait travaillé du 28 juin au 16 juillet 2021 pour la commune en qualité de stagiaire d’été, dont environ une semaine au total avec A______. Il était une personne engagée, respectueuse de son travail, des personnes et du matériel. Il était sympathique. Elle l’avait rarement vu avec l’équipe, car il était plutôt mis de côté, à savoir que la plupart des gens ne lui parlaient pas. Lorsqu’elle travaillait avec d’autres personnes, ces dernières la questionnaient au sujet du recourant : « est-ce qu’il pleurniche beaucoup ? » « est‑ce qu’il est de mauvaise humeur ? » « est-ce qu’il se plaint ? ». Lorsqu’elle répondait que ça allait bien, les collègues lui disaient « tu verras, ça va arriver ». Le caractère que, notamment, Q______ et K______ décrivaient en évoquant le recourant ne correspondait pas à ce qu’elle connaissait de lui. Elle avait été dans la balayeuse avec A______ et s’était sentie en sécurité. Il lui était aussi arrivé qu’il soit dans la balayeuse et qu’elle soit à côté avec la souffleuse. Il lui en avait bien expliqué le fonctionnement et avait veillé à ce que cela ne soit pas trop lourd pour elle. Il était très respectueux. Elle n’avait pas assisté à des actes malveillants de l’équipe à l’encontre du recourant, mais uniquement à beaucoup de questionnements à son égard, plusieurs fois, plusieurs jours, comme si ses collègues s’attendaient à ce qu’elle acquiesce. Ils ne parlaient pas à A______, le mettaient de côté et « parlaient mal de lui dans son dos » en disant qu’il se plaignait tout le temps, était désagréable, pas respectueux, en dépression ou mettait une mauvaise ambiance alors qu’elle le trouvait sympathique. Elle s’étonnait que ces « attaques » ne proviennent que d’un petit groupe de personnes alors que le reste du personnel de la voirie avait un comportement tout à fait respectueux à l’égard l’intéressé, en tout cas de ce qu’elle en avait vu.

Depuis la fin de son stage, elle avait croisé de temps en temps A______ au match. Il lui avait expliqué qu’il avait été licencié. Elle en avait été très surprise. Ils en avaient discuté plusieurs fois, car elle était étonnée de ce licenciement, qu’elle trouvait injuste, et avait besoin de venir témoigner pour dire ce à quoi elle avait assisté. A______ était le plus respectueux de l’équipe. Il n’avait notamment pas eu de propos déplacés et n’avait jamais bu d’alcool alors qu’il devait conduire, contrairement à d’autres personnes. Elle habitait à côté de la voirie et craignait des conséquences à son témoignage. Elle avait déjà pu constater depuis une semaine, que certains ne la saluaient plus.

gg. R______ connaissait A______ depuis le milieu des années 90. Ils étaient des amis, même des « frères ». Celui-ci était simple, facile à vivre, voulait toujours aller de l’avant, disait ce qu’il pensait. Il osait dire ce qu’il pensait, sans jamais aller au conflit. Quand son ami lui avait parlé de son travail, dès le début il lui avait dit qu’il sentait qu’avec certaines personnes, cela allait mal se passer, mais que sinon l’ambiance était bonne, qu’il s’agissait du travail de ses rêves et qu’il était heureux. Ces tensions avec les personnes en question lui « passaient par-dessus » et il faisait avec. A______ était toujours motivé par son travail n’avait jamais perdu sa motivation. Il le connaissait depuis plus de 25 ans et ne l’avait jamais vu mal parler à une femme. A______ était une personne intelligente, respectueuse, qui avait à cœur de faire vivre sa commune, étant habitant de celle-ci.

gh. H______ avait travaillé avec A______ environ deux ans et demi, entre 2020 et 2022. Avant le départ à la retraite de C______ et D______, il y avait toujours un moment où cela allait professionnellement bien avec certains et où il y avait des problèmes avec d’autres. « En dehors du travail, cela allait bien surtout avec d’autres ». Il avait remarqué que K______ et L______ avaient pris en grippe A______, comme beaucoup de monde, à juste titre. À la fin, cela n’allait plus du tout avec personne dans le secteur « manifestations ». Il n’avait pas constaté que l’équipe « manifestations » allait boire des verres et laissait A______ travailler tout seul. Cela lui paraissait toutefois possible. A______ s’était retrouvé plusieurs fois en incapacité de travail, pour dépression physique et psychologique. À son avis, cette dépression était due à son divorce. Quand E______ avait annoncé le retour de A______ en septembre 2022, il avait demandé aux collègues du prénommé d’être gentils avec lui. L______ avait un peu « ouvert les vannes » en disant que ce n’était pas normal que ce soit à eux de s’intégrer alors que ce n’était pas réciproque. Tout le monde avait eu cette réaction.

Il avait eu un entretien en septembre 2022 avec la RRH et E______. On lui avait demandé de dire « tout ce qu’il avait pu vivre en bien et en mal, et son ressenti ». Il avait régulièrement, mais pas souvent, constaté des comportements inadéquats de A______ avec les membres de l’équipe. Il avait aussi constaté de tels comportements avec le public sur la route, par exemple « serrer un cycliste » ou de se rapprocher du centre de la voie dans un chemin étroit. Il l’avait entendu avoir des propos racistes. Il vivait très mal la situation : il n’avait plus de plaisir à venir au travail et avait envisagé d’en changer. Sa femme lui avait indiqué que cela se ressentait à la maison où il ne riait plus, ne souriait plus et était explosif. Il confirmait la teneur du compte rendu de son entretien. Il travaillait pour la commune depuis 2015. Il avait rencontré des problèmes avec une autre personne qui avait été licenciée. Il s’agissait de son binôme avant A______. Les problèmes n’étaient pas du même ordre qu’avec ce dernier, à savoir que « ce n’était pas comme ça violent ». Il n’avait pas pris son fils dans la balayeuse, sauf lors de la journée parents-enfants qui s’était déroulée après le licenciement du recourant. Il avait eu des touchettes avec la balayeuse (une fois une barrière et une fois un chéneau), mais pas d’accident. L’ambiance s’était améliorée depuis le départ du recourant.

gi. M______ avait travaillé avec A______ de juillet 2021 à août 2022. Celui-ci avait souvent eu des incapacités de travail pendant cette période en raison de problèmes de cervicales, de dos et de dépression. Il ignorait la cause de cette dernière. L’entretien téléphonique de septembre 2022 avec la RRH avait porté sur le comportement de A______, sa conduite dangereuse (accélération dans les giratoires pour faire peur aux vélos), les piques (à tous les collègues), le dénigrement, le racisme (« sale frouze de merde », « sale rital »), la façon de parler des autres. Il se souvenait avoir été à côté de lui dans la balayeuse, moteur éteint, lorsqu’il avait crié à une femme à la station-service « T’as des gros nénés, mais t’es moche, je te baiserais pas ! ». Il avait été très mal à l’aise. A______ fumait sans cesse dans le véhicule alors que lui-même était non‑fumeur.

En juillet 2021, il était présent lors de l’apéritif de départ de U______, stagiaire d’été. Il s’agissait d’une adolescente extrêmement timide. Lors de l’apéritif, elle avait demandé qu’on attende quelques minutes que sa sœur arrive. A______ avait alors demandé, devant tout le personnel du secteur, « elle est bonne ta sœur ? ». U______ n’avait pas su que répondre. A______ avait demandé « par rapport à toi, elle est mieux ou moins bien ? », ce à quoi U______ avait répondu : « elle est mieux ». Il n’oublierait jamais cet épisode. Il confirmait la teneur de son compte rendu d’entretien. A______ était « la personne la plus malveillante qu’[il avait] croisée ». Ce dernier lui avait fait du mal et avait fait du mal autour de lui. Il n’était pas content du licenciement du recourant, mais pensait que c’était juste. Il n’avait pas connaissance qu’une pétition ait circulé contre A______. Ce dernier avait « tout fait pour casser M. H______ ».

gj. Les parties ont renoncé aux auditions des autres témoins, étant précisé que la RRH n’a pas pu témoigner pour raisons de santé et est décédée entretemps.

h. Dans ses écritures après enquêtes, la commune a persisté dans ses conclusions.

i. Dans ses ultimes observations, le recourant a relevé que la qualité de son travail avait été confirmée par les témoins. Il avait été décrit comme respectueux, et C______ avait confirmé que c’était H______ qui avait adopté une attitude plaintive. Les critiques émises par ce dernier et M______ n’avaient aucun fondement et étaient fausses. Il avait déposé une plainte pénale contre eux pour faux témoignages. Les enquêtes avaient confirmé qu’il était maltraité par ses collègues.

j. Sur ce, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1.             Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ ‑ E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 ‑ LPA ‑ E 5 10 ; art. 106 du statut).

2.             Le litige porte sur le bien-fondé de la décision de résiliation immédiate des rapports de service du recourant pour justes motifs.

3.             À titre préalable, le recourant sollicitait une audience de comparution personnelle des parties, l’audition de plusieurs témoins, la production de l’intégralité de son dossier, notamment de ses évaluations entre 2018 et 2022, et à pouvoir compléter ses écritures.

Dès lors qu’il a été donné suite à la demande d’audiences et de production du dossier, que le recourant a pu s’exprimer dans plusieurs écritures ainsi qu’oralement et que les parties ont renoncé à l’audition d’autres témoins, les conclusions préalables n’ont plus d’objet.

4.             Le statut constitue le fondement de la politique communale en matière de gestion des ressources humaines et régit les rapports de travail entre la commune et son personnel (art. 1 al. 1 statut). Les rapports de travail sont soumis au droit public (art. 2 al. 1 statut). Ils sont régis par le statut, ses dispositions d'exécution et par les contrats individuels de travail conclus entre la commune et son personnel. S'il y a contradiction entre le statut et le contrat de travail, la disposition contenue dans le statut est applicable (art. 2 al. 2 statut). Si le statut n'en dispose pas autrement, les dispositions du Code des obligations sur le contrat de travail (art. 319 et suivants CO) sont applicables par analogie à titre de droit supplétif (art. 2 al. 3 statut).

4.1 La Commune veille à la protection de la personnalité et de la dignité du personnel par des mesures de prévention, d'information ou par tout autre moyen adéquat (art. 12 al. 1 statut). Chaque membre du personnel a droit à un traitement correct et respectueux de la part de ses supérieurs, de ses collègues et de toute autre personne, dans le cadre de son activité professionnelle ou dans d'autres lieux s'ils portent préjudice à la personne dans le cadre de son emploi (art. 12 al. 2 statut). La Commune met en place un système de gestion des conflits adéquat, selon les dispositions de l'art. 103 (art. 12 al. 3 statut). Toute forme de harcèlement est interdite, passible de sanctions disciplinaires pouvant aller jusqu'au licenciement immédiat (art. 12 al. 4 statut).

Par harcèlement sexuel, on entend tout comportement importun de caractère sexuel ou tout autre comportement fondé sur l'appartenance sexuelle, qui porte atteinte à la dignité de la personne sur son lieu de travail, en particulier le fait de proférer des menaces, de promettre des avantages, d'imposer des contraintes ou d'exercer des pressions de toute nature sur une personne en vue d'obtenir d'elle des faveurs de nature sexuelle (art. 12 al. 5 statut). Le harcèlement sexuel peut notamment prendre la forme de propos ou plaisanteries sexistes, d'exposition ou d'envoi d'images pornographiques, de contacts physiques déplaisants, d'avances accompagnées de promesses de récompenses, de menaces de représailles ou autres pressions (art. 12 al. 6 statut).

Par harcèlement psychologique (ou mobbing), on entend tout enchaînement de propos ou d'agissements hostiles, répétés fréquemment pendant une période assez longue, par lesquels une ou plusieurs personnes tendent à déstabiliser, à isoler, à marginaliser, voire à exclure une ou plusieurs personnes de leur lieu de travail (art. 12 al. 7 statut).

4.1.1 À teneur de l’art. 103 du statut, le personnel communal et les responsables de service s'efforcent de résoudre les conflits par la discussion (al. 1). Le Conseil administratif établit une procédure de gestion interne ou externe des conflits. Toute personne qui, dans sa relation de travail avec d'autres collaborateurs, rencontre d'importantes difficultés qui peuvent porter atteinte à sa personnalité, est victime de harcèlement ou rencontre un conflit de travail, peut librement faire appel à la procédure interne ou externe de gestion des conflits (al. 2). Toutes représailles envers des personnes victimes ou mises en causes sont passibles de sanctions (al. 3). Selon la gravité des faits, le Conseil administratif ouvre immédiatement une enquête administrative au sens de l'art. 100. La procédure d'enquête vise à établir l'existence des faits et, le cas échéant, à proposer des mesures adéquates (al. 4).

4.1.2 À teneur de l’art. 100 du statut, lorsque l'instruction d'une cause le justifie, le Conseil administratif peut confier une enquête administrative à une ou plusieurs personnes choisies au sein ou à l'extérieur de l'administration communale (al. 1). La personne concernée est informée par écrit de l'ouverture de l'enquête administrative et de son droit de se faire assister. Elle peut participer à toutes les audiences d'enquêtes et requérir des mesures d'instruction (al. 2). Au terme de l'enquête, le Conseil administratif communique le rapport à la personne concernée et lui impartit un délai de réponse (al. 3).

4.1.3 Toute personne qui estime vivre une situation conflictuelle dans le cadre de son travail peut s’adresser à sa hiérarchie et/ou au responsable des ressources humaines pour que ceux-ci interviennent sous la forme la plus adéquate. Après validation de la demande par le Conseil administratif, une action proportionnée et juste est mise en place. Si la médiation est choisie, le responsable des ressources humaines est alors en charge de proposer un organisme spécialisé et les frais incombent à l'administration communale (art. 29 du Règlement du personnel de l’Administration municipale B______ du 25 septembre 2018 ; LC 33 151 ; ci-après : le règlement).

4.2 Les membres du personnel ont un devoir de fidélité envers la commune. Ils sont tenus en toutes circonstances d'agir conformément à ses intérêts légitimes et n'accomplir aucun acte susceptible de porter préjudice aux intérêts de la commune (art. 82 al. 1 statut). Aucun comportement ne doit être de nature à porter atteinte à l'image de la commune ou de son personnel, ou de nuire à la confiance portée par les habitants à ceux-ci. Tout membre du personnel doit se montrer digne de la considération et de la confiance que sa fonction exige (art. 82 al. 2 statut).

Les devoirs du personnel sont définis dans le chapitre VII du Statut (art. 82 ss statut). Tout manquement relevé pourra faire l’objet d’une réprimande écrite notifiée par le responsable de service et/ou par le Secrétaire général. Ce document sera versé au dossier personnel du collaborateur (al. 1). Si le comportement n’est pas immédiatement rectifié ou dans le cas de 2 réprimandes formulées dans un intervalle d’une année, l’art. 102 du Statut sera appliqué (al. 2 de l’art. 27 du règlement).

4.3 Toute personne qui adopte, dans le cadre du travail, un comportement illicite, un comportement ou des propos inconvenants ou portant atteinte aux intérêts de la commune de quelque manière que ce soit est passible d'un avertissement par le Conseiller administratif délégué (art. 102 al. 1 statut). L'avertissement est prononcé et notifié par lettre motivée après que le membre du personnel intéressé a été entendu par le Conseiller administratif délégué. Cet avertissement ne peut plus être invoqué après 4 ans (art. 102 al. 2 statut).

4.4 Chacune des parties peut résilier les rapports de travail avec effet immédiat pour justes motifs (art. 37 al. 1 statut). Sont notamment considérés comme justes motifs toutes les circonstances qui, selon les règles de la bonne foi, ne permettent pas d'exiger de la partie qui donne le congé la continuation des rapports de travail (art. 37 al. 2 statut). En cas de résiliation avec effet immédiat par la commune, le membre du personnel doit être entendu préalablement. La résiliation avec effet immédiat fait l'objet d'une décision motivée (art. 37 al. 3 statut).

Si la chambre administrative retient que la résiliation du contrat d'un membre du personnel est contraire au statut ou abusif au sens de l'art. 336 CO, elle peut proposer au Conseil administratif la réintégration du membre du personnel concerné (art. 107 al. 1 statut). En cas de refus du Conseil administratif, la chambre administrative alloue au collaborateur une indemnité dont le montant ne peut être inférieur à 1 mois et supérieur à 6 mois du dernier traitement brut à l'exclusion de tout autre élément de rémunération (art. 107 al. 2 statut).

5.             L'art. 3 al. 1 de la loi fédérale sur l’égalité entre femmes et hommes du 24 mars 1995 (loi sur l’égalité, LEg - RS 151.1) interdit de discriminer les travailleurs à raison du sexe. L'art. 4 LEg définit le harcèlement sexuel comme un comportement importun de caractère sexuel ou tout autre comportement fondé sur l'appartenance sexuelle, qui porte atteinte à la dignité de la personne sur son lieu de travail, en particulier le fait de proférer des menaces, de promettre des avantages, d'imposer des contraintes ou d'exercer des pressions de toute nature sur une personne en vue d'obtenir d'elle des faveurs de nature sexuelle. 

Le harcèlement sexuel peut prendre différentes formes : remarques sexistes, commentaires grossiers ou embarrassants, usage de matériel pornographique, attouchements, invitations gênantes, avances accompagnées de promesses de récompense ou de menaces de représailles (Message du 24 février 1993 concernant la LEg, FF 1993 I 1219 ch. 31 ad art. 7). Bien que l'art. 4 LEg ne se réfère qu'à des cas d'abus d'autorité, la définition englobe tous les comportements importuns de caractère sexuel, soit également ceux qui contribuent à rendre le climat de travail hostile, par exemple des plaisanteries déplacées (ATF 126 III 395 consid. 7b/bb ; arrêts du Tribunal fédéral 4A_544/2018 du 29 août 2019 consid. 3.1 et les arrêts cités ; 4A_18/2018 du 21 novembre 2018 consid. 3.1). 

6.             Le Tribunal fédéral a résumé les critères à prendre en considération en cas de résiliation immédiate des rapports de travail dans le droit privé et dans le droit public (ATF 138 I 113 consid. 6). Il a notamment rappelé que la jurisprudence relative à l'art. 337 CO, selon laquelle la partie qui résilie un contrat de travail en invoquant de justes motifs ne dispose que d'un court délai de réflexion pour signifier la rupture immédiate des relations de travail (ATF 130 III 28 consid. 4.4), n'était pas sans autre transposable en matière de rapports de travail de droit public. En ce domaine, le licenciement se fait en général par voie de décision motivée; il est souvent précédé d'une enquête, en particulier quand il s'agit d'étayer ou d'infirmer des soupçons. Durant l'enquête, l'intéressé bénéficie des garanties propres à la procédure administrative. En particulier, le droit d'être entendu doit être respecté. Indépendamment de ces garanties, les contingences liées aux procédures internes d'une administration ne permettent souvent pas de prendre une décision immédiate, surtout lorsque la décision ne peut pas être prise par le supérieur hiérarchique direct mais qu'elle dépend d'une autorité de nomination qui se réunit périodiquement seulement et qui doit confier une instruction à l'un de ses membres ou à un enquêteur externe à l'administration (arrêt du Tribunal fédéral 8C_170/2009 du 25 août 2009 consid. 6.2.1, JdT 2010 I 101). Le Tribunal fédéral a néanmoins précisé que si les spécificités de la procédure administrative qui s'imposaient à l'employeur de droit public pour mettre fin aux rapports de service permettaient de lui accorder un délai de réaction plus long qu'en droit privé, il ne devait pas pour autant laisser traîner les choses, ni tarder à informer l'employé qu'une résiliation immédiate des rapports de service était envisagée (ATF 138 I 113 consid. 6.5).

6.1 La résiliation immédiate pour justes motifs est une mesure exceptionnelle. Conformément aux principes dégagés par la jurisprudence en droit privé, mais qui peuvent être appliqués par analogie au droit de la fonction publique (ATF 143 II 443 consid. 7.3), elle doit être admise de manière restrictive. Seul un manquement particulièrement grave du travailleur justifie son licenciement immédiat ; lorsqu'il est moins grave, le manquement ne peut entraîner une résiliation immédiate que s'il a été répété malgré un avertissement (ATF 142 III 579 consid. 4.2 et les arrêts cités). Par manquement du travailleur, on entend en règle générale la violation d'une obligation découlant du contrat de travail, mais d'autres incidents peuvent également justifier une résiliation immédiate (ATF 137 III 303 consid. 2.1.1 ; 130  III 28 consid. 4.1). Ce qui est déterminant, c'est que les faits invoqués à l'appui du congé immédiat aient entraîné la perte du rapport de confiance, qui constitue le fondement du contrat de travail (ATF 137 III 303 consid. 2.1.1). Les justes motifs de renvoi avec effet immédiat d'un titulaire de fonction publique peuvent procéder de toutes les circonstances qui, selon les règles de la bonne foi, excluent la poursuite des rapports de service ; de toute nature, ils peuvent relever d'évènements ou de circonstances que l'intéressé ne pouvait pas éviter ou, au contraire, d'activités, de comportements ou de situations qui lui sont imputables. Les conditions justifiant une résiliation ne se déterminent pas de façon abstraite ou générale, mais dépendent concrètement de la position et des responsabilités de l'intéressé, de la nature et de la durée des rapports de travail ainsi que du genre et de l'importance du manquement (ATF 142 III 579 consid. 4.2 ; 137 III 303 consid. 2.1.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 8C_800/2016 du 12 décembre 2017 consid. 3.4 ; 4A_112/2017 du 30 août 2017 consid. 3.2 et les références citées).

6.2 Selon la jurisprudence du Tribunal fédéral, un fonctionnaire a l'obligation d'adopter un comportement qui inspire le respect et qui soit digne de confiance. Sa position exige qu'il s'abstienne de tout ce qui peut porter atteinte aux intérêts de l'État. Il doit en particulier s'abstenir de tout comportement de nature à entamer la confiance du public dans l'intégrité de l'administration et de ses employés ou à le rendre moins digne de confiance aux yeux de son employeur. Il est sans importance que le comportement répréhensible ait été connu ou non du public et ait attiré l'attention (arrêt du Tribunal fédéral 8C_336/2019 du 9 juillet 2020 consid. 3.3.2 et les arrêts cités).

6.3 L'employeur jouit d'un large pouvoir d'appréciation pour juger si les manquements d'un travailleur sont susceptibles de rendre la continuation des rapports de service incompatible avec le bon fonctionnement de l'administration. En tant que les rapports de service relèvent du droit public, il doit néanmoins respecter le principe de la proportionnalité (art. 5 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 - Cst. - RS 101). Celui-ci exige qu'une mesure restrictive soit apte à produire les résultats escomptés (règle de l'aptitude) et que ceux-ci ne puissent pas être atteints par une mesure moins incisive (règle de la nécessité) ; en outre, il interdit toute limitation allant au-delà du but visé et il exige un rapport raisonnable entre celui-ci et les intérêts publics ou privés compromis (principe de la proportionnalité au sens étroit, impliquant une pesée des intérêts ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_15/2019 du 3 août 2020 consid. 7.2 et les arrêts cités).

6.4 Selon la jurisprudence cantonale, une absence de harcèlement psychologique est présumée, lorsqu'un employé s'en plaint dans une procédure de licenciement sans avoir saisi le groupe de confiance, alors même que ladite institution était à sa disposition et spécialisée dans la problématique (arrêt du Tribunal fédéral 8C_148/2023 du 18 octobre 2023 consid. 7 et les références cantonales citées).

7.             En l’espèce, le recourant estime que le licenciement immédiat n’était pas justifié.

7.1 Il ressort du témoignage de E______, chef de service depuis le 1er mars 2022, que ce n’est qu’à l’annonce, à l’équipe, du retour partiel de A______, le 7 septembre 2022, que d’autres comportements problématiques du recourant que ceux déjà connus ont été portés à la connaissance de la commune. Le témoin a ainsi évoqué une « sorte d’explosion de faits, d’éléments qui [lui avaient] été rapportés ». Il en avait parlé à la RRH et ils avaient entendu toutes les personnes du service voirie, sauf une qui n’était plus active. Ces entretiens ont été menés par la RRH, aujourd’hui décédée, assistée, pour certains des rendez-vous, par E______. Le contenu des principaux entretiens, soit ceux de H______ le 13 septembre 2023 et M______ le 22 septembre ont fait l’objet de comptes rendus écrit et signés le 11 octobre 2022.

Au vu du résultat de l’instruction menée par la commune, le recourant a été convoqué le mercredi 5 octobre 2022 à un entretien fixé le lundi 10 octobre, étant rappelé qu’il était en incapacité partielle de travailler. Lors de ce rendez‑vous, après lui avoir exposé les trois « motifs » retenus à son encontre, précisé les exemples y relatifs et l’avoir entendu, les représentants de la commune ont indiqué que le dossier était transmis au Conseil administratif, pour décision. Le licenciement avec effet immédiat a été prononcé quatre jours plus tard, le vendredi 14 octobre 2022.

Les délais précités sont compatibles avec les contingences liées aux procédures internes de l’administration et le recourant ne les critique, à juste titre, pas.

7.2 La commune retient trois « motifs » à l’appui du licenciement à savoir : 1) un comportement dangereux dans l’exercice de sa fonction, soit la conduite de la balayeuse ; 2) une attitude et un comportement irrespectueux, sexiste, grossier et insultant ; 3) une attitude non collaborative et de chercher à nuire à autrui. Elle a illustré chacun des motifs par plusieurs exemples.

Le recourant a admis certains comportements décrits au titre d’exemples. Il n’a ainsi, notamment, pas contesté avoir emmené sa fille dans la cabine de la balayeuse à raison d’une ou deux fois, avoir eu un discours « antifrançais » en ce sens que les « frontaliers de la ZIPLO salissaient la voie publique » tout en considérant qu’il ne s’agissait pas d’un discours anti-frontaliers. Il a de même admis avoir, par le passé, été régulièrement dans la critique, la remise en question de chaque demande et avoir souvent formulé des remarques négatives.

Plusieurs témoins ont relevé son caractère agréable, respectueux et la qualité du travail qu’il fournissait. Certains témoignages doivent être relativisés, la stagiaire d’été entendue n’ayant travaillé que du 28 juin au 16 juillet 2021 à ses côtés, O______ n’ayant été collègue que pendant six mois à fin 2020, début 2021 et R______ étant un ami de longue date. Certes, ses anciens chefs de service ont tenu à son égard des propos élogieux et ses évaluations de l’époque étaient globalement bonnes. Ceci n’exclut toutefois pas des comportements ultérieurs non compatibles avec les obligations et constitutifs de justes motifs de licenciement. Ainsi, H______ et M______ ont confirmé que le recourant avait tenu des propos grossiers à l’encontre d’une femme dans une station-service en disant « T’as des gros nénés, mais t’es moche, je te baiserais pas ! », ainsi qu’à l’égard d’une jeune stagiaire d’été en lui demandant « elle est bonne ta sœur ? », et en rajoutant « par rapport à toi, elle est mieux ou moins bien ? » obligeant la jeune femme, en public, à répondre. Ces propos, d’une extrême grossièreté, formulés à l’égard d’une femme fréquentant la commune pour les premiers et d’une jeune employée de la commune pour les seconds, en présence du personnel, sont d’une gravité certaine.

Interrogé en audience sur les phrases précitées, le recourant n’a contesté ni avoir nterpellé une femme à la station-service ni avoir questionné la jeune stagiaire d’été sur sa sœur. Il a reformulé les propos qu’il aurait tenus lesquels n’apparaissent toutefois pas crédibles. Il a finalement précisé ne pas être le pire en termes de grossièreté au sein du service, admettant indirectement qu’il avait adopté une attitude grossière et non conforme à ses obligations. Le recourant a ainsi adopté un comportement de nature à entamer la confiance du public dans l'intégrité de l'administration et de ses employés. Sa position, tant en public, au volant d’un véhicule floqué aux armoiries de la commune qu’à l’interne, à l’égard d’une jeune stagiaire d’été, porte atteinte aux intérêts de la commune. Si, certes, dans les deux cas il n’avait pas une position hiérarchique importante ou des responsabilités, il n’a toutefois pas su adapter son comportement au public ni se rendre compte qu’à l’égard de la jeune femme il représentait le statut d’employé de la commune, plus âgé et expérimenté. Ce dernier comportement relève de surcroît d’un harcèlement sexuel au sens de l’art. 4 LEg.

Il n’est pas allégué ni a fortiori démontré que les éventuels comportements inadéquats de ses collègues à l’instar d’autres collaborateurs qui auraient pris leur enfant dans la balayeuse, ou qui auraient tenu des propos peu respectueux, atteindraient un seuil de gravité comparable aux manquements reprochés au recourant.

Si, certes, il apparaît que le recourant a rencontré des difficulté d’ordre personnel, et si l’absence d’empathie de ses collègues ressort de leurs déclarations, à l’instar du fait qu’ils ne souhaitaient plus, à compter de septembre 2022 notamment « être gentils », ou de la dureté des propos de son collègue le qualifiant de « personne la plus malveillante qu’[il avait] croisée », le recourant ne peut être suivi lorsqu’il se plaint de mobbing ou de harcèlement. En effet, il ne conteste pas que la commune offre un interlocuteur externe pour ce type de problématique qu’il n’a pas souhaité interpeller avant l’automne 2022 alors qu’il évoque des tensions depuis 2020 environ. Or, selon la jurisprudence précitée, une absence de harcèlement psychologique est présumée, lorsqu'un employé s'en plaint dans une procédure de licenciement sans avoir saisi le groupe de confiance, en l’espèce « TOM », alors même que ladite institution était à sa disposition et spécialisée dans la problématique. De même il ne peut être suivi lorsqu’il reproche à sa hiérarchie de ne pas l’avoir soutenu. Il ne ressort en effet pas des témoignages de ses anciens supérieurs hiérarchiques, qu’il s’agisse de C______, D______ ou même E______, qu’il se soit ouvert auprès d’eux. Enfin, il ressort de ses propres évaluations qu’il considérait que l’ambiance de travail était « très bonne », ce qui, bien que l’existence de tensions entre les collaborateurs soit établie, infirme les allégations de mobbing à son encontre.

En conséquence, le comportement irrespectueux, sexiste, grossier et insultant adopté tant à l’égard de l’usagère de la station-service que de la stagiaire d’été, cumulés aux faits reconnus par le recourant suffisent à retenir qu’il existait des manquements de nature à rompre le lien de confiance indispensable au maintien des rapports de service. Il n’est pas nécessaire d’établir la réalité de chacun des exemples mentionnés à l’appui des trois « motifs » reprochés au recourant. Un avertissement n’était pas nécessaire au vu de la gravité des comportements établis.

Au vu de la rupture claire et irrémédiable du rapport de confiance ainsi que du large pouvoir d’appréciation reconnu à l’autorité intimée, de la durée relativement faible des rapports de service, soit environ cinq ans en tenant compte des contrats de durée déterminée et trois ans pour celui de durée indéterminée, de la gravité des comportements, la continuation des rapports de service jusqu’au délai ordinaire de résiliation, soit pendant trois mois pour la fin d’un mois (art. 30 al. 2 statut, sous réserve de la problématique du congé en temps inopportun de l’art. 336c de la loi fédérale du 30 mars 1911, complétant le Code civil suisse [CO, Code des obligations - RS 220] réservée par l’art. 36 du statut), ne pouvait pas être exigée de la commune. Partant, la décision querellée respecte également le principe de la proportionnalité.

Ce qui précède conduit au rejet des conclusions en lien avec le caractère abusif du congé.

8.             Il ne sera pas perçu d’émolument, le recourant plaidant au bénéfice de l’assistance juridique (art. 87 al. 1 LPA). Aucune indemnité de procédure ne sera allouée à la commune, dans la mesure où elle compte plus de 10'000 habitants, soit une taille suffisante pour disposer d'un service juridique et est par conséquent apte à assurer la défense de ses intérêts sans recourir aux services d'un avocat (ATA/792/2022 du 9 août 2022 ; ATA/1223/2021 du 16 novembre 2021 ; art. 87 al. 2 LPA).

Compte tenu des conclusions du recours, la valeur litigieuse est supérieure à CHF 15'000.- (art. 112 al. 1 let. d de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 - LTF - RS 173.110).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 14 novembre 2022 par A______ contre la décision de la commune B______ du 14 octobre 2022 ;

au fond :

le rejette ;

dit qu’il n’est pas perçu d’émolument ;

dit qu'il n'est pas alloué d'indemnité de procédure ;

dit que conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière de droit public, s’il porte sur les rapports de travail entre les parties et que la valeur litigieuse n’est pas inférieure à CHF 15'000.- ;

le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, avenue du Tribunal fédéral 29, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Me Daniela LINHARES, avocate du recourant, ainsi qu'à Me Audrey PION, avocate de la commune B______.

Siégeant : Jean-Marc VERNIORY, président, Florence KRAUSKOPF, Alessandra CAMBI FAVRE-BULLE, Francine PAYOT ZEN-RUFFINEN, Claudio MASCOTTO, juges.

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

F. SCHEFFRE

 

 

le président siégeant :

 

 

J.-M. VERNIORY

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :