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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/4421/2022

ATA/1354/2023 du 19.12.2023 ( LIPAD ) , PARTIELMNT ADMIS

Descripteurs : PRINCIPE DE LA TRANSPARENCE(EN GÉNÉRAL);PROTECTION DES DONNÉES;ACCÈS(EN GÉNÉRAL);DOCUMENT INTERNE;COMMUNICATION;PERSONNE CONCERNÉE(EN GÉNÉRAL);CONSULTATION DU DOSSIER;REJET DE LA DEMANDE;PRÉPOSÉ À LA PROTECTION DES DONNÉES;ACTE DE PROCÉDURE
Normes : Cst.29.al2; Cst-GE.9.al3; Cst-GE.28.al2; LPA.45; LIPAD.1.al1; LIPAD.1.al2.leta; LIPAD.1.al2.letb; LIPAD.3.al1.leta; LIPAD.24.al1; LIPAD.30.al1.leta; LIPAD.30.al3; LIPAD.30.al4; LIPAD.30.al5; RIPAD.10.al4
Résumé : recours partiellement admis contre une décision refusant au recourant l'accès à l'agenda d'un ancien procureur. Lorsqu'une procédure de médiation prévue par la LIPAD a été engagée, que le préposé a demandé à consulter le document requis mais que celui-ci ne lui a pas été transmis, l'absence de recommandation sur la communication du document requis emporte annulation de la décision rendue par l'autorité.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/4421/2022-LIPAD ATA/1354/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 19 décembre 2023

 

dans la cause

 

A______ recourant
représenté par Me Daniel KINZER, avocat

contre

COMMISSION DE GESTION DU POUVOIR JUDICIAIRE intimée

 



EN FAIT

A. a. A______, citoyen français et israélien, a fait l'objet, dès 2013, d'une procédure pénale conduite à Genève, enregistrée sous le numéro de cause P/1______/2013.

b. B______a été procureur de la République et canton de Genève jusqu'en 2019. Il a instruit, jusqu'à son départ du Ministère public dudit canton, la procédure pénale diligentée à l'encontre de A______.

B. a. Le 8 juin 2022, A______ a sollicité du service juridique du pouvoir judiciaire la remise des notes de frais de B______pour des voyages réalisés en octobre 2016, mars 2017 et février 2018 ainsi que son agenda pour les mêmes périodes.

b. Le Ministère public s'est opposé à la production de l'agenda, au motif que celui‑ci était uniquement destiné à un usage personnel et qu'il n'était pas partagé par l'intéressé avec les autres procureurs ou ses collaborateurs.

c. B______s'est également opposé à la communication de son agenda, au motif que celui-ci servait exclusivement à l'organisation de ses activités professionnelles et privées et qu'il était le seul à en avoir la maîtrise.

d. Le président de la commission de gestion du pouvoir judiciaire de la République et canton de Genève (ci-après : la commission de gestion) a autorisé la communication des notes de frais sollicitées. Il a en revanche refusé l'accès à l'agenda de l'ancien procureur, dans la mesure où cet agenda était uniquement destiné à l'usage personnel du précité pour la gestion de ses rendez-vous individuels.

e. Une séance de médiation a eu lieu entre A______, le préposé cantonal genevois à la protection des données et à la transparence (ci-après : le préposé) et la responsable des demandes d'accès du pouvoir judiciaire. La médiation n'a pas abouti.

f. La préposée adjointe a sollicité du service des affaires juridiques du pouvoir judiciaire la communication du document requis afin de pouvoir rendre sa recommandation.

g. B______a réitéré son refus de transmettre une copie de son agenda.

 

h. Le 3 novembre 2022, la préposée adjointe a exposé que, faute d'avoir pu consulter le document requis, elle ne pouvait pas rendre une recommandation sur sa consultation.

i. Par décision du 16 novembre 2022, le président de la commission de gestion a refusé à A______ l'accès à l'agenda de B______pour les mois d'octobre 2016, mars 2017 et février 2018.

L'agenda était uniquement destiné à l'usage personnel de l'ancien procureur pour la gestion de ses rendez-vous individuels. Il était le seul à en avoir la maîtrise et n'avait pas cédé ses droits d'accès à d'autres personnes, notamment sa greffière ou son greffier.

Le document requis n'était pas un instrument de conduite du Ministère public contenant des éléments relevant de l'activité et des processus de cette juridiction puisqu'il n'était destiné qu'à un usage personnel. De plus, il était uniquement utilisé comme aide-mémoire, si bien qu'il n'entrait pas dans la catégorie des documents accessibles selon la loi.

C. a. Par acte remis à la poste le 30 décembre 2022, A______ a interjeté recours auprès de la chambre administrative de la cour de justice (ci-après : chambre administrative) contre la décision précitée, concluant préalablement à ce qu'il soit ordonné au pouvoir judiciaire et à B______de remettre à la chambre administrative l'agenda de ce dernier pour les mois d'octobre 2016, mars 2017 et février 2018, et à ce que l'agenda soit soumis au préposé pour préavis. Principalement, il a conclu à l'annulation de la décision précitée et à ce qu'il soit ordonné au pouvoir judiciaire de lui remettre l'agenda de l'ancien procureur pour les périodes précitées.

Son droit d'être entendu avait été violé, dans la mesure où le pouvoir judiciaire et B______avaient refusé de remettre l'agenda au préposé.

L'agenda était partagé avec plusieurs personnes. Il s'agissait d'un élément de conduite du cabinet du procureur, investi de la charge de direction de la procédure pénale. Il s'agissait donc d'un document contenant des renseignements relatifs à l’accomplissement d’une tâche publique auquel il devait avoir accès.

b. La commission de gestion a conclu au rejet du recours.

c. B______a remis à la chambre de céans les tirages pour les mois d'octobre 2016, mars 2017 et février 2018 de son calendrier Outlook professionnel.

d. A______ a requis une nouvelle fois que les tirages précités soient soumis au préposé. À titre subsidiaire, il a demandé à être informé du contenu essentiel de la pièce en lien avec l'activité officielle de B______.

e. Le juge délégué a informé les parties que, dans la mesure où le litige concernait l'accès à la pièce litigieuse, il n'était pas question d'en divulguer le contenu. Il était en revanche possible de dire que les extraits de l'agenda considérés contenaient trois catégories d'occurrence, à savoir des rendez‑vous privés, des audiences concernant d'autres procédures pénales que celles visant A______ et trois occurrences concernant expressément – et deux potentiellement – la procédure pénale P/1______/2013.

f. A______ a persisté dans son argumentation et ses conclusions. Il a précisé que les trois occurrences concernant expressément – et deux potentiellement – la procédure pénale P/1______/2013 entraient dans le champ de la demande d'accès.

g. La commission de gestion ayant indiqué ne pas avoir d'observations complémentaires à formuler, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1. Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a et 63 al. 1 let. c de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10 ; art. 60 al. 1 de la loi sur l’information du public, l’accès aux documents et la protection des données personnelles du 5 octobre 2001 - LIPAD - A 2 08).

2.             Le recourant conclut préalablement à ce qu'il soit ordonné à l'ancien procureur de remettre à la chambre administrative son agenda pour les mois d'octobre 2016, mars 2017 et février 2018.

En l'occurrence, il a été donné suite à cette demande, de sorte qu'il n'y a pas lieu d'y revenir.

3.             Le recourant conclut également à ce que l'agenda soit soumis au préposé pour préavis. Subsidiairement, il demande à être informé du contenu essentiel de cette pièce en lien avec l'activité officielle de l'ancien procureur.

3.1 Selon l'art. 45 LPA, l’autorité peut interdire la consultation du dossier si l’intérêt public ou des intérêts privés prépondérants l’exigent (al. 1). Le refus d’autoriser la consultation des pièces ne peut s’étendre qu’à celles qu’il y a lieu de garder secrètes et ne peut concerner les propres mémoires des parties, les documents qu’elles ont produits comme moyens de preuves, les décisions qui leur ont été notifiées et les procès-verbaux relatifs aux déclarations qu’elles ont faites (al. 2). Une pièce dont la consultation est refusée à une partie ne peut être utilisée à son désavantage que si l’autorité lui en a communiqué par écrit le contenu essentiel se rapportant à l’affaire et lui a donné en outre l’occasion de s’exprimer et de proposer les contre‑preuves (al. 3).

3.2 En l'occurrence, le litige concerne précisément l'accès à la pièce litigieuse. Par conséquent, comme les parties en ont été informées, il ne saurait être question de faire une application directe de l'art. 45 al. 3 LPA, sauf à vider la présente procédure de son objet en faisant droit, sans analyser le fond du litige, à la conclusion principale du recourant. Il apparaît néanmoins que le juge délégué a donné à ce dernier, dans la mesure utile, des informations sur le contenu de la pièce, si bien que sa demande a été satisfaite.

Pour le reste, la question de la transmission de l'agenda au préposé est sans objet, compte tenu de l'issue du recours.

4.             Dans un grief d'ordre formel qu'il convient d'examiner en premier lieu, le recourant se plaint d'une violation de son droit d'être entendu, dans la mesure où l'intimée et l'ancien procureur ont refusé de remettre l'agenda au préposé, qui n'a ainsi pas pu rendre de recommandation.

4.1 Tel qu’il est garanti par l'art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), le droit d’être entendu comprend notamment le droit pour les parties de faire valoir leur point de vue avant qu’une décision ne soit prise, d’avoir accès au dossier, de participer à l’administration des preuves, d’en prendre connaissance et de se déterminer à leur propos (ATF 148 II 73 consid. 7.3.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_700/2022 du 28 novembre 2022 consid. 3 et les références citées).

4.2 En l'espèce, comme on le verra ci-après, la formulation d'une recommandation par le préposé est un aspect procédural qui ne constitue pas une composante du droit d'être entendu des parties. Par conséquent, l'absence de recommandation n'emporte aucune conséquence juridique sous cet angle-là.

Le grief sera donc écarté.

5.             Le litige porte sur la conformité au droit de la décision querellée, par laquelle l'intimée a refusé de donner au recourant l'accès à l'agenda de l'ancien procureur pour les mois d'octobre 2016, mars 2017 et février 2018.

5.1 La juridiction administrative chargée de statuer est liée par les conclusions des parties. Elle n’est en revanche pas liée par les motifs que les parties invoquent (art. 69 al. 1 LPA). Si la juridiction administrative admet le recours, elle réforme la décision attaquée ou l’annule. Si elle le juge nécessaire, elle peut renvoyer l’affaire à l’autorité qui a statué pour nouvelle décision (art. 69 al. 3 LPA).

 

5.2 À Genève, l'activité publique s'exerce de manière transparente, conformément aux règles de la bonne foi, dans le respect du droit fédéral et du droit international (art. 9 al. 3 Constitution de la République et canton de Genève du 14 octobre 2012 - Cst‑GE - A 2 00). Toute personne a le droit de prendre connaissance des informations et d’accéder aux documents officiels, à moins qu’un intérêt prépondérant ne s’y oppose (art. 28 al. 2 Cst-GE). Il a déjà été jugé que cette disposition n’avait pas une portée plus large que la LIPAD (arrêt du Tribunal fédéral 1C_379/2014 du 29 janvier 2015 consid. 5.4).

La LIPAD régit l’information relative aux activités des institutions et la protection des données personnelles (art. 1 al. 1 LIPAD). Elle poursuit deux objectifs, à savoir, d’une part, favoriser la libre formation de l’opinion et la participation à la vie publique ainsi que, d’autre part, protéger les droits fondamentaux des personnes physiques ou morales de droit privé quant aux données personnelles les concernant (art. 1 al. 2 let. a et b LIPAD).

La LIPAD comporte deux volets. Le premier concerne l’information du public et l’accès aux documents ; il est réglé dans le titre II (art. 5 ss LIPAD). Le second porte sur la protection des données personnelles, dont la réglementation est prévue au titre III (art. 35 ss LIPAD).

La LIPAD s’applique, sous réserve de son art. 3 al. 3 et 5, non pertinents en l'occurrence, aux pouvoirs exécutif, législatif et judiciaire cantonaux, ainsi que leurs administrations et les commissions qui en dépendent (art. 3 al. 1 let. a LIPAD).

L’art. 24 al. 1 LIPAD prévoit que toute personne, physique ou morale, a accès aux documents en possession des institutions, sauf exception prévue ou réservée par cette loi.

5.3 Dans le cadre d'une procédure d'accès à des documents au sens de la LIPAD, le préposé cantonal est saisi par une requête écrite de médiation sommairement motivée notamment lorsque la demande d'accès d'un requérant n'est pas satisfaite (art. 30 al. 1 let. a LIPAD). Le préposé cantonal recueille de manière informelle l’avis des institutions et personnes concernées. La consultation sur place des documents faisant l’objet d’une requête de médiation ne peut lui être refusée, à charge pour lui de veiller à leur absolue confidentialité (art. 30 al. 3 LIPAD). Le document dont l’accès est contesté doit, sur demande du préposé cantonal, lui être communiqué. Cette communication se fait en principe au moyen de la consultation sur place du document ; exceptionnellement, le préposé cantonal peut en recevoir une copie, à charge pour lui de la restituer ou de la détruire à la fin de la procédure de médiation (art. 10 al. 4 du règlement d'application de la loi sur l'information du public, l'accès aux documents et la protection des données personnelles du 21 décembre 2011 - RIPAD - A 2 08.01). Il importe que le préposé cantonal ait pleinement accès aux documents concernés, mais aussi que toute mesure soit prise pour que la procédure de médiation ne lève pas par elle-même la confidentialité litigieuse reconnue provisoirement aux documents en question. En cas de recours, la médiation représentera une pièce du dossier (Mémorial des séances du Grand Conseil de la République et canton de Genève [ci-après : MGC] 2000 45/VIII 7705).

Dans un arrêt récent, le Tribunal fédéral a confirmé le caractère obligatoire de la transmission au préposé des documents faisant l’objet d’une requête de médiation lorsque ce dernier en a fait la demande. Il a en effet relevé que, dans le cas particulier, si le préposé avait demandé à recevoir une version non-caviardée du document, cela n'aurait pas pu lui être refusé en application de l'art. 30 al. 3 LIPAD (arrêt du Tribunal fédéral 1C_590/2022, 1C_597/2022 et 1C_132/2023 du 16 novembre 2023 consid. 5.1.2).

Si la médiation aboutit, l’affaire est classée (art. 30 al. 4 LIPAD). À défaut, le préposé cantonal formule, à l’adresse du requérant ainsi que de l’institution ou des institutions concernées, une recommandation écrite sur la communication du document considéré (art. 30 al. 5 LIPAD). L'art. 30 al. 5 LIPAD exige que le préposé prenne position quant à la communication du document (MGC 2007-2008 XII A 14101).

L'art. 30 LIPAD contient une importante innovation, soit l’institution d’un médiateur, à savoir le préposé, chargé de veiller à la bonne application de la LIPAD. Cette solution n’exclut pas mais diffère au besoin l’engagement de procédures contentieuses, en étant propre à réduire l’ampleur d’un tel contentieux juridictionnel du fait des solutions qui ne manqueront pas d’être généralement trouvées par le biais de la médiation (MGC 2000 45/VIII 7703).

5.4 En l'espèce, la demande d'accès à l'agenda de l'ancien procureur a été adressée au pouvoir judiciaire, soit une institution publique à laquelle la LIPAD s'applique, si bien que la demande n'est pas d'emblée exclue du champ d'application de cette loi.

L'intimée n'ayant pas donné une suite favorable à la demande d'accès du recourant, une procédure de médiation n'ayant finalement pas abouti a été mise en œuvre.

Au cours de cette procédure, ni l'intimée ni l'ancien procureur n'ont remis la pièce sollicitée au préposé, malgré la demande expresse de ce dernier et en dépit du fait que, comme l'a rappelé le Tribunal fédéral, ils avaient l'obligation de la lui communiquer, le préposé devant avoir pleinement accès aux documents concernés pour se prononcer. Dans ces circonstances, ce dernier a déclaré ne pas être en mesure de rendre une recommandation sur la communication de ce document. La procédure est donc viciée au regard des exigences procédurales de l'art. 30 al. 3 et 5 LIPAD.

Reste à déterminer la conséquence qu'emporte un tel vice. Cette question, à laquelle la loi ne répond pas, ne semble pas avoir été tranchée.

Lorsqu'une procédure de médiation a été engagée, la formulation d'une recommandation par le préposé, sur la base du contenu du document requis, ne constitue pas une simple prescription d'ordre mais une exigence formelle qui ne peut être éludée, sauf à vider la loi de son sens et de son but. En effet, il ressort tant du texte de la LIPAD que des travaux préparatoires relatifs à cette loi que le préposé cantonal a un poids prépondérant puisqu'il est chargé de veiller à sa bonne application, et surtout qu'il a l'obligation – et non pas la simple faculté – de prendre position sur la communication du document litigieux. Sa recommandation, même si elle n'est pas contraignante, est au demeurant importante puisqu'elle permet d'orienter l'autorité dans sa future décision. Il sera à cet égard précisé qu'une recommandation par laquelle le préposé s'abstiendrait, comme en l'espèce, de prendre position n'est pas suffisante pour répondre aux exigences de l'art. 30 al. 5 LIPAD.

Il s'ensuit que l'absence de recommandation sur la communication du document requis constitue un vice procédural incompatible avec les exigences découlant de la procédure de médiation et qui doit ainsi emporter l'annulation de la décision considérée. Il en va du reste de même dans d'autres domaines en cas d'absence d'un préavis obligatoire (en droit des constructions : ATA/590/2017 du 23 mai 2017).

Le recours sera donc partiellement admis. La décision querellée sera annulée et la cause renvoyée à l'intimée afin qu'elle prenne une nouvelle décision après que le préposé aura rendu une recommandation sur la communication du document requis, lequel lui sera transmis par la chambre de céans dès l'entrée en force du présent arrêt.

6.             Vu l'issue du litige, aucun émolument ne sera perçu (art. 87 al. 1 LPA) et une indemnité de procédure de CHF 500.- sera allouée au recourant, qui obtient partiellement gain de cause, à la charge de l'intimée (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 30 décembre 2022 par A______ contre la décision de la commission de gestion du pouvoir judiciaire du 16 novembre 2022 ;

au fond :

l'admet partiellement ;

annule la décision de la commission de gestion du pouvoir judiciaire du 16 novembre 2022 ;

renvoie la cause à la commission de gestion du pouvoir judiciaire pour nouvelle décision dans le sens des considérants ;

dit qu'elle transmettra au préposé cantonal genevois à la protection des données et à la transparence l'agenda Outlook de B______pour les mois d'octobre 2016, mars 2017 et février 2018, dès l'entrée en force du présent arrêt ;

dit qu'il n'est pas perçu d'émolument ;

alloue à A______ une indemnité de procédure de CHF 500.-, à la charge de la commission de gestion du pouvoir judiciaire ;

dit que conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature de la recourante ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Daniel KINZER, avocat du recourant, à la commission de gestion du pouvoir judiciaire ainsi qu'au préposé cantonal à la protection des données et à la transparence.

Siégeant : Jean-Marc VERNIORY, président, Valérie MONTANI, Blaise PAGAN, Cédric-Laurent MICHEL, Eleanor McGREGOR, juges.

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

J. PASTEUR

 

 

le président siégeant :

 

 

J.-M. VERNIORY

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

la greffière :

 

 

 

 


 

OPINION SÉPARÉE

 

(art. 119 Cst-GE et 28 al. 4 et 5 du règlement de la Cour de Justice - RCJ ‑ E 2 05.47)

 

Je ne suis pas d’accord avec la solution contenue dans le présent arrêt, mais estime que le recours aurait dû être rejeté, pour les motifs qui suivent.

Comme l’autorité intimée, je pense que l’agenda professionnel Outlook litigieux n’est pas un document susceptible d’être objet d’un droit d’accès pour les administrés, au sens des art. 24 ss de la loi sur l’information du public, l’accès aux documents et la protection des données personnelles du 5 octobre 2001 (LIPAD ‑ A 2 08). En effet, contrairement à la situation tranchée par l’ATF 142 II 324 (traduit in JdT 2017 I 13), l’agenda présentement en cause ne me paraît pas avoir servi d’instrument pour la conduite du cabinet ou de la juridiction du magistrat concerné (cf. consid. 2.5 dudit ATF), ni avoir contenu des renseignements relatifs à l’accomplissement d’une tâche publique (art. 25 al. 1 LIPAD), mais était utilisé par ce magistrat uniquement pour son usage personnel, comme aide‑mémoire équivalent à des notes à usage personnel (art. 25 al. 4 LIPAD), ce d’autant plus que ledit magistrat y a également inscrit des rendez-vous d’ordre privé. Ceci implique à mon avis qu’en l’absence – constatée d’emblée – d’un document au sens de la LIPAD, le préposé cantonal genevois à la protection des données et à la transparence n’a pas à examiner une requête écrite de médiation (cf. art. 30 al. 1 LIPAD a contrario).

Subsidiairement, même si la solution prévue par l’arrêt était suivie, il ne faudrait pas transmettre au préposé cantonal genevois à la protection des données et à la transparence l’agenda Outlook avec les inscriptions à caractère privé, celles-ci devant à tout le moins être caviardées. En effet, les inscriptions à caractère privé me paraissent relever du droit au respect de la vie privée et familiale garanti par les art. 13 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101) et 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 (CEDH - RS 0.101), même à l’égard dudit préposé cantonal et quand bien même celui-ci est soumis à un devoir de confidentialité (cf. art. 30 al. 3 LIPAD). Il à cet égard relevé que la qualité de partie n’a pas été accordée au magistrat concerné bien que ses droits fondamentaux soient à mon avis touchés. Au demeurant, on peut à mon sens d’emblée considérer que ces inscriptions à caractère privé ne pourront pas être communiquées au recourant (cf. notamment art. 26 al. 2 let. g LIPAD).