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A/262/2023

ATA/1308/2023 du 05.12.2023 sur JTAPI/874/2023 ( PE ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/262/2023-PE ATA/1308/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 5 décembre 2023

2ème section

 

dans la cause

 

A______ recourant
représenté par Me Antoine BOESCH, avocat

contre

OFFICE CANTONAL DE LA POPULATION ET DES MIGRATIONS intimé

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 21 août 2023 (JTAPI/874/2023)


EN FAIT

A. A______, né le ______ 1971, est ressortissant du Kosovo.

B. a. Le 17 décembre 2018, A______, représenté par SWISS IMMIGRATION CONSULTING, a saisi l’office cantonal de la population et des migrations (ci‑après : OCPM) d’une demande d’autorisation de séjour dans le cadre de l’« opération Papyrus », précisant qu’il était arrivé à Genève en 2008, qu’il avait travaillé dans le domaine du bâtiment, qu’il était parfaitement intégré et avait de bonnes connaissances de la langue française. À l’exception d’une infraction pour séjour illégal, son casier judiciaire était vierge. Il ne faisait pas non plus l’objet de dettes et n’avait jamais émargé à l’assistance publique.

Il a notamment joint un formulaire M à teneur duquel il travaillait à plein temps, depuis le 5 mars 2018, auprès de B______, un document du 24 septembre 2018 attestant de son niveau de français A2, un document du 19 novembre 2018 de l’association C______ auprès de laquelle il avait œuvré en qualité de bénévole de 2008 à 2012, une attestation établie le 15 octobre 2012 par D______, auprès de laquelle il avait travaillé 14.5 jours entre 2008 et 2012, des attestations de salaires de E______ du 8 mars au 15 août 2013, en 2015 et de mars à novembre 2016, une attestation des F______ du 5 décembre 2018, indiquant qu’il avait bénéficié d’abonnements mensuels du 7 mai au 6 juin 2011, du 30 janvier au 29 février et du 21 juillet au 20 août 2012, de fin mars à début août et de fin août à début novembre 2013 et de mi-mars à fin juin 2014, une carte de base des F______ valable du 7 mai 2011 au 6 mai 2016, une attestation de l’Hospice général du 5 septembre 2018 indiquant qu’il n’était pas aidé financièrement, un extrait de son casier judiciaire daté du 26 juillet 2018, mentionnant sa condamnation du 31 mai 2017 (l’extrait actualisé le 2 juin 2020 est vierge) et un extrait du registre des poursuites vierge du 7 septembre 2018.

b. L’OCPM a sollicité divers renseignements et justificatifs, prouvant notamment la présence de l’intéressé à Genève de 2009 à 2010 et de 2015 à 2017.

c. A______ lui a notamment transmis une attestation du 31 octobre 2019 du garage G______, à teneur de laquelle il avait effectué des travaux de peinture en octobre et novembre 2009 en échange de la réparation de sa voiture ; un document établi le 29 octobre 2019 par H______ qui attestait l’avoir logé de mars à septembre 2010 en échange de travaux de jardinage ; un extrait de compte individuel établi par la caisse cantonale genevoise de compensation (ci-après : CCGC) le 25 octobre 2019, faisant état de revenus auprès de la société E______ de mars à août 2013, en avril 2014 et de janvier à décembre 2015, auprès de B______ de mars à novembre 2016, de mars à juillet 2017 et de janvier à décembre 2018 ; un document du 8 novembre 2019 de I______ attestant qu'elle avait été consultée par A______ le 4 février 2010 ; un reçu du 23 septembre 2009 pour un montant de CHF 2'300.- payé par J______, pour un travail de déménagement de meubles ainsi qu’un document établi le 8 novembre 2019 par le Docteur K______, médecin dentiste, attestant de traitements prodigués les 8 et 17 juillet 2009 ainsi que les 13 et 21 octobre puis le 9 novembre 2010.

d. Par courrier du 23 septembre 2022, l’OCPM lui a fait part de son intention de refuser de préaviser favorablement son dossier auprès du SEM en vue de l’octroi d’une autorisation de séjour et de prononcer son renvoi de Suisse.

Dans la mesure où il avait produit des documents falsifiés, notamment une attestation de travail, pour induire l’OCPM en erreur et obtenir frauduleusement une autorisation de séjour, il ne répondait pas aux critères de l’« opération Papyrus ».

Il ne remplissait pas non plus les conditions des art. 30 al. 1 let. b de la loi fédérale sur les étrangers et l'intégration du 16 décembre 2005 (LEI - RS 142.20) et 31 de l’ordonnance relative à l'admission, au séjour et à l'exercice d'une activité lucrative du 24 octobre 2007 (OASA - RS 142.201). Il avait maintenu des liens étroits avec son pays d’origine, puisqu’il avait obtenu un visa de retour pour se rendre au Kosovo où résidaient ses enfants et son épouse. Sa réinstallation y apparaissait raisonnablement exigible. Il n’avait pas fait preuve d’une intégration socio‑culturelle particulièrement remarquable, au vu de son comportement. Il n'avait pas non plus établi une très longue durée de séjour en Suisse ni aucun élément permettant de déroger à cette exigence.

e. Usant de son droit d’être entendu, A______ a retracé son parcours depuis son arrivée en Suisse. Il s’était retrouvé à la merci d’employeurs et d’autres personnes peu scrupuleux et notamment de L______, défavorablement connu des autorités genevoises. Ce dernier s’était fait passer pour un spécialiste du droit des étrangers, auprès de ses compatriotes kosovars ou albanais. Il les avait extorqués en contrepartie de diverses démarches visant à régulariser leurs conditions de séjour et n’avait pas hésité à produire des documents falsifiés à l’appui de leurs demandes, souvent à l’insu des intéressés.

Il semblait ainsi que durant une certaine période, l’apparition du nom de L______ dans certains dossiers de l’OCPM entrainait quasi automatiquement sa dénonciation auprès du Ministère public et le prononcé d’ordonnances pénales, également de manière quasi automatique, sans chercher à établir si les documents litigieux étaient effectivement faux. Dans ces circonstances, il avait été doublement victime, d’abord d’un employeur qui ne l’avait pas déclaré auprès de l’AVS, puis de son association involontaire avec L______, alors que son dossier de demande de régularisation était parfaitement solide.

Assisté d’P______, par le biais de SWISS IMMIGRATION CONSULTING, il avait déposé sa demande de régularisation le 14 décembre 2018, accompagnée de justificatifs. Il était ainsi établi qu’il travaillait auprès d’B______ depuis 2013.

Le document établi par D______ ne couvrait que 14,5 jours sur cinq ans, ce qui était tout à fait négligeable au regard des années durant lesquelles il avait travaillé en Suisse et qui ressortaient notamment des extraits de compte produits. L’existence de cet emploi et/ou sa déclaration auprès de la CCGC et son enjeu étaient insignifiants.

Le 6 juin 2022, il avait été entendu par la police sans la présence d’un avocat. L’ordonnance pénale n’indiquait pas sur quels points précis l’attestation de D______ serait falsifiée ni ce qui permettait d’affirmer qu’elle serait antidatée. Cela ne ressortait pas non plus du dossier de l’autorité intimée. Il était difficile de discerner quel intérêt il aurait eu à produire une attestation antidatée. Tant l’OCPM que le Ministère public avaient évoqué de manière vague et tendancieuse « des documents falsifiés », laissant entendre à tort que le dossier comportait plusieurs documents litigieux. Il avait effectivement travaillé pour cette entreprise, de sorte que l’attestation n’était pas un faux document, même s’il avait « sans doute travaillé plus » que ce qui était indiqué. Il en allait de même de l’omission de la société de le déclarer à l’AVS. Il convenait de rappeler que lorsque l’ordonnance pénale avait été rendue, il n’était pas assisté d’un avocat. Il n’avait alors pas saisi la portée de sa condamnation et ne s’y était pas opposée.

Il s’agissait du seul point litigieux de son dossier. L’OCPM n’avait jamais soutenu qu’il ne remplissait pas les autres conditions d’octroi de son autorisation de séjour. Il pouvait en particulier se prévaloir d’une excellente intégration.

Il concluait ainsi à l’octroi de l’autorisation sollicitée, subsidiairement à ce que l’instruction de son dossier soit complétée en auditionnant notamment ses logeurs, les représentants de son employeur et ceux de D______.

Il a notamment produit un extrait de compte individuel établi par la CGC le 21 juin 2022, faisant état de revenus auprès d’B______ de mars à août 2013, en avril 2014 et de janvier à décembre 2015, auprès d’B______ de mars à novembre 2016 et de mars à juillet 2017 ; auprès de M______ d’octobre à décembre 2017 ; auprès d’B______ et de janvier à décembre 2018, de janvier à décembre 2019, de janvier à décembre 2020, de janvier à décembre 2021.

f. Par décision du 5 décembre 2022, l’OCPM a refusé, pour les motifs qui ressortaient de sa lettre d’intention, de préaviser favorablement le dossier de A______ auprès du SEM, en vue de l’octroi d’une autorisation de séjour, et a prononcé son renvoi, lui impartissant un délai au 5 mars 2023 pour quitter la Suisse.

Il sera revenu ci-après, dans la partie « En droit » sur le contenu de cette décision.

g. Le 5 décembre 2022, A______ a produit ses bulletins de salaire de janvier à octobre 2022 ainsi qu’une attestation du 28 novembre 2022 des époux N______, attestant qu’ils connaissaient l’intéressé depuis 2013, qu’ils avaient conclu avec lui un contrat de « gardiennage et d’entretien » le 7 février 2022, prévoyant la mise à disposition d’un logement de service contre sa présence et des travaux d’entretien. Ils ont relevé qu’il s’agissait d’une personne sérieuse, fiable et compétente dans de nombreux domaines, et qui avait fait preuve d’une intégration totale.

h. Les 17 décembre 2020 et 5 juillet 2022, A______ a sollicité, sans toutefois l’obtenir, un visa de retour pour rendre visite à sa famille, son épouse et ses enfants, respectivement afin de se rendre au chevet de son fils qui avait subi une grave intervention chirurgicale. Le 23 janvier 2023, il a sollicité un visa de retour afin de se rendre au Kosovo, au chevet de son frère mourant.

C. a. Il ressort par ailleurs du dossier que le 30 mai 2017, le secrétariat d'État aux migrations (ci-après : SEM) a prononcé à son encontre, une interdiction d’entrée en Suisse (ci-après : IES), valable du 28 décembre 2018 au 28 mai 2020.

Cette décision lui a été notifiée le 4 février 2019.

b. Le 31 mai 2017, A______ a été condamné par le Ministère public de l’arrondissement de La Côte, Morges, à une peine pécuniaire de 40 jours-amende, avec sursis, délai d’épreuve de deux ans, pour entrée et séjour illégaux (art. 115 let. a et b LEI).

c. Le 22 novembre 2019, il a été entendu par la police genevoise, en qualité de prévenu, pour séjour illégal, exercice d’une activité lucrative sans autorisation et pour ne pas s’être conformé à une interdiction d'entrée (art. 115 LEI).

Il était venu en Suisse pour travailler, la première en 2009, puis à nouveau en 2010. Par la suite, il était revenu à plusieurs reprises en Suisse où il restait trois ou quatre mois. Il n’avait plus quitté la Suisse depuis 2017. Il travaillait en qualité de maçon auprès d’B______ depuis « 2012-2013 ». Ses quatre enfants vivaient au Kosovo avec son épouse. En Suisse, il avait un emploi, ainsi que deux oncles et des cousins avec lesquels il ne « parlait » pas. Il ne « parlait » plus non plus avec ses cousins au Kosovo qui pensaient qu’il était espion en Suisse. Il n’avait plus rien dans son pays d’origine. Sans argent, il ne pourrait plus s’occuper de ses enfants. Il savait qu’il faisait l’objet d’une interdiction d'entrée.

d. Le 2 novembre 2021, l’OCPM l’a dénoncé au Ministère public genevois, au motif notamment que l’attestation de travail établie par D______ pour la période de 2008 à 2012, signée le 15 octobre 2012, était antidatée. De plus, les cotisations sociales dues par cette société n’apparaissaient pas dans l’extrait de compte AVS.

e. Le 6 juin 2022, A______ a été entendu par la police genevoise, en qualité de prévenu, pour séjour illégal et exercice d’une activité lucrative sans autorisation (art. 115 LEI), comportement frauduleux à l’égard des autorités (art. 118 LEI), faux dans les titres art. 251 du Code pénal suisse du 21 décembre 1937 (CP - RS 311.0)] et pour ne pas avoir souscrit à une assurance maladie obligatoire (art. 92 let. a de la loi fédérale sur l'assurance-maladie du 18 mars 1994 - LAMal - RS 832.10).

Il a notamment déclaré qu’il était né au Kosovo. Il y avait suivi des études au gymnase et obtenu un diplôme. Il avait également suivi une formation de maçon dans son pays. Il y avait ensuite eu la guerre. Il avait travaillé et s’était marié en 1993 ou 1994. Il avait deux garçons et deux filles. Il était venu en Suisse en 2008 dans l’espoir d’une vie meilleure. Il avait fait l’objet d’une interdiction d'entrée en 2016 et avait été renvoyé au Kosovo. Il était toutefois revenu en 2017, car il ignorait qu’il faisait l’objet de cette mesure. Il avait ensuite été contrôlé par la police qui l’avait informé qu’il devait quitter la Suisse. Confronté à la pauvreté dans son pays, il était revenu en Suisse trois ou quatre mois plus tard. En 2019, après le dépôt de sa demande d’autorisation de séjour, il avait à nouveau été contrôlé à la frontière. Il n’avait ensuite plus quitté la Suisse jusqu’en 2021. Il avait alors obtenu un visa et s’était rendu à deux reprises au Kosovo, en l’espace de deux mois. Il n’avait aucune famille en Suisse. Il avait vécu dans des logements occupés par d’autres personnes et en avait été parfois chassé. Entre 2019 et 2021 il avait vécu à Bossey. Il se chargeait de petits travaux en échange du logement. Depuis mars 2021, il habitait à Troinex. Il s’occupait de deux personnes âgées qui avaient mis une pièce à sa disposition dans leur logement. Depuis le dépôt de sa demande d’autorisation de séjour, il avait « emprunté » l’adresse de son employeur, O______, pour recevoir son courrier.

Un avocat, un certain P______, l’avait aidé à déposer sa demande. Concernant l’interdiction d'entrée prononcée à son encontre, il s’était adressé à un autre avocat qui lui avait été recommandé par une connaissance. Il s’agissait de L______. Il lui avait versé CHF 900.- le 23 avril 2018, pour recourir contre cette mesure. Il s’était toutefois fait avoir par cette personne et n’avait plus voulu avoir à faire avec elle.

À son arrivée en 2010, il avait travaillé en qualité de déménageur auprès de D______. Il travaillait sur appel, à raison d’un ou deux jours par semaine, n’effectuant que très peu d’heures. Q______ en était le patron. Il le connaissait depuis une trentaine d’années. Leurs maisons étaient proches au Kosovo. Il s’était aperçu que les revenus perçus auprès de cette société ne figuraient pas sur son extrait de compte AVS. Il avait toutefois reçu une attestation. Il avait ensuite travaillé dans le domaine du bâtiment. Entre 2008 et 2013, il avait travaillé sur appel et n’avait pas été déclaré. Son salaire lui était remis en espèces. En Suisse, il avait deux oncles et des cousins avec lesquels il n’entretenait pas de contacts. Il ne les avait pas vus depuis six ou sept ans. Au Kosovo, il avait sa mère, son épouse, ses enfants, une sœur et un frère. Son père était décédé. Il ne pouvait pas retourner dans sa patrie, au risque de tout perdre. Il s’y sentait également comme un étranger.

f. Par ordonnance pénale du 7 juin 2022, le Ministère public a condamné A______ à une peine pécuniaire de 150 jours-amende, pour faux dans les titres (art. 251 ch. 1 CP), infractions aux art. 115 al. 1 let. c LEI, tentative d’infraction à l’art. 118 al. 1 LEI cum art. 22 al. 1 CP et infraction à l’art. 92 al. 1 let. a LAMal.

D. a. Par acte du 23 janvier 2023, A______ a recouru auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI) contre la décision de l’OCPM du 5 décembre 2022, concluant à ce que son dossier soit transmis au SEM avec un préavis favorable en vue de l’octroi de l’autorisation requise, le cas échéant, à ce que son dossier soit retourné à l’OCPM afin qu’il préavise favorablement la demande tendant à la régularisation de ses conditions de séjour ; subsidiairement à ce que le dossier soit retourné à l’OCPM pour complément d’instruction et nouvelle décision dans le sens des considérants du jugement à rendre. Il a préalablement sollicité son audition et celle de O______ et R______, organes d’B______, des époux N______, ainsi que de Monsieur S______ et Monsieur T______, anciens organes de D______, et à ce qu’il soit ordonné à l’OCPM de fournir, toutes pièces utiles à l’appui, les renseignements suivants : l'élément ou les éléments ayant déterminé l'OCPM à dénoncer son dossier auprès du Ministère public ; le nombre de demandes de régularisation de ressortissants kosovars que l'OCPM a dénoncé au Ministère public du 1er janvier 2017 au 31 décembre 2020, avec détail par année ; le nombre de dossiers dénoncés dans lesquels le nom de L______ (y compris variations d'orthographe) apparaissait ; combien de dossiers dénoncés faisaient l'objet d'une ordonnance pénale demeurant sans opposition, et sur ces derniers, combien concernaient des cas où les personnes visées n'avaient pas constitué d'avocat dans le cadre de la procédure pénale.

Il a repris les arguments déjà invoqués, reprochant à l’OCPM de ne pas avoir tenu compte de ses observations, violant ainsi son droit d’être entendu. L’OCPM ne pouvait soutenir qu’il avait produit des documents falsifiés. Cet office voyait dans l’ordonnance pénale entrée en force « une vérité absolue », alors que la procédure d'ordonnance pénale était une procédure simplifiée et que, s’il avait été assisté d'un avocat, il aurait sollicité du Ministère public des mesures d'instruction complémentaires. Un dossier plus complet n’aurait probablement pas abouti à la condamnation. L'OCPM persistait à se rattacher à un critère purement formel, soit l’ordonnance pénale entrée en force, ce qui traduisait une volonté de ne pas appliquer le droit et relevait de l'arbitraire.

Il avait produit des justificatifs autres que l’attestation de D______, démontrant sa présence continue en Suisse dès 2008. Il prenait acte du fait que l’OCPM ne contestait pas qu’il remplissait toutes les conditions nécessaires à sa régularisation dans le cadre de l’« opération Papyrus ». S’il devait être considéré que tel n’était pas le cas, il conviendrait alors de retenir que l’instruction de son dossier, sous l’angle des art. 30 al. 1 let. b LEI et l’art. 31 OASA n’avait pas suivi son cours, dès lors qu’elle avait été interrompue par la dénonciation au Ministère public.

b. L’OCPM a conclu au rejet du recours.

L’intéressé n’avait pas été en mesure de prouver à satisfaction de droit un séjour continu en Suisse de dix ans minimum sans interruption, avant le dépôt de sa requête. Pour ce seul motif déjà, il n’était pas éligible à l’« opération Papyrus ».

En outre, il avait été condamné par le Ministère public, notamment pour avoir produit des documents falsifiés dans le but d’obtenir une autorisation de séjour en Suisse. L’OCPM ne pouvait pas s’écarter de l’ordonnance de condamnation, qui était entrée en force. Même à admettre qu’il séjournait en Suisse depuis 2008, il avait vécu l’essentiel de sa vie dans son pays d’origine où vivent son épouse et ses quatre enfants et où il retournait régulièrement. L’intéressé n’avait pas fait preuve d’une intégration professionnelle exceptionnelle, au sens exigé par la jurisprudence, et sa réintégration au Kosovo n’était pas gravement compromise.

c. A______ a répliqué, reprochant à l’OCPM de ne pas avoir répondu aux arguments invoqués dans son recours, ce qui confirmait le grief de violation du droit d’être entendu.

En outre, jusqu’ici, l’autorité intimée n’avait pas remis sérieusement en cause le fait qu’il remplissait la condition du séjour ininterrompu de dix ans en Suisse, question qu’elle n’avait d’ailleurs pas instruite entièrement, compte tenu du prononcé de l’ordonnance pénale. Il en allait de même de celle de son intégration en Suisse et de sa réintégration au Kosovo.

d. Le 4 mai 2023, A______ a produit la copie d’un article paru dans un journal genevois, relatant l’acquittement d’une personne qui se trouvait dans une situation semblable à la sienne. Après avoir été victime de L______, elle avait été dénoncée par l’OCPM, puis condamné par le Ministère public. Elle avait toutefois fait opposition à l’ordonnance de condamnation prononcée à son encontre.

Ces circonstances constituaient une raison supplémentaire pour laquelle l’OCPM n'était pas ou plus fondé à invoquer à l'appui de sa décision la seule entrée en force de l’ordonnance pénale prononcée à son encontre. Il y avait au contraire lieu de procéder comme si celle-ci n'avait pas été rendue ou s’il avait été acquitté.

Dans la mesure où l'OCPM n'avait invoqué aucun autre argument à l'appui de la décision attaquée, ou alors que timidement et tardivement, cette dernière n’avait plus de fondement et devait être annulée.

e. Par jugement du 21 août 2023, le TAPI a rejeté le recours.

Le dossier étant complet, il n’y avait pas lieu de procéder à d’autres actes d’instruction. La décision était suffisamment motivée. L’intéressé n’avait pas établi être arrivé à Genève en 2008. Il avait déclaré avoir habité à Bossey entre 2019 et 2021. Il ne totalisait donc pas dix ans de séjour continu en Suisse. Son intégration socio-professionnelle n’était pas exceptionnelle. Il n’avait pas respecté l’interdiction d’entrer en Suisse. Il avait conservé des liens forts avec le Kosovo où habitait son épouse et ses enfants, notamment. Son retour dans son pays d’origine n’était donc pas gravement compromis.

E. a. Par acte déposé le 21 septembre 2023 à la chambre administrative de la Cour de justice, A______ a recouru contre ce jugement, dont il a demandé l’annulation, concluant, principalement, à ce que son dossier soit préavisé favorablement auprès du SEM en vue de l’octroi d’une autorisation de séjour. À titre préalable, il a requis l’effet suspensif, l’apport de la procédure pénale, son audition et celle de O______ et R______, (ses logeurs U______ et V______, S______ et T______ et à ce qu’il soit ordonné à l’OCPM d’indiquer quels éléments l’avaient conduit à le dénoncer au Ministère public, le nombre de demandes de régularisation de ressortissants du Kosovo l’OCPM avait dénoncé entre le 1er janvier 2017 et le 31 décembre 2020 au Ministère public, dans combien de tels dossiers apparaissait le nom de L______, combien avaient fait l’objet d’une ordonnance de condamnation sans opposition et combien concernaient des personnes sans avocat.

Il travaillait de manière déclarée depuis 2013 pour l’entreprise B______. L’apparition du nom de L______ dans son dossier avait « pollué » celui-ci. Il n’avait pas caché que son activité déployée en faveur de D______, à savoir 14.5 jours œuvrés de 2008 à 2012, n’avait pas été déclarée aux assurances sociales. L’ordonnance pénale était erronée. Il ne ressortait pas du dossier quels documents autres que celui établi par D______ constitueraient des faux et en quoi celui établi par cette dernière serait constitutif d’un faux au sens pénal.

L’OCPM s’était fondé sur l’ordonnance pénale pour motiver son refus et avait retenu subsidiairement qu’il ne remplissait pas les critères du cas d’extrême gravité. Or, l’attestation de D______ ne constituait pas un faux : il avait travaillé pour cette entreprise. L’OCPM ne pouvait ainsi se fonder sur la condamnation pénale. Remplissant tous les critères de l’« opération Papyrus », il devait se voir délivrer l’autorisation convoitée.

L’OCPM avait voilé son droit d’être entendu en ne se prononçant pas sur les arguments qu’il avait développés dans ses écritures des 23 novembre et 5 décembre 2022. Ce service s’était uniquement fondé sur sa condamnation pénale. Alors qu’il n’avait examiné qu’à titre subsidiaire, à savoir si les conditions prévues par l’« opération Papyrus » n’étaient pas remplies, l’existence d’un cas d’extrême gravité, l’OCPM avait finalement examiné ce point en remettant en cause son intégration professionnelle, ce qui n’était pas exigé par l’opération précitée.

Le TAPI avait retenu à tort qu’il ne séjournait pas en Suisse depuis 2008, que son intégration professionnelle n’était pas exceptionnelle et qu’il avait été condamné. Les critères relatifs à ses liens avec son pays d’origine et sa famille qui s’y trouve étaient sans pertinence dans le cadre de l’« opération Papyrus ».

b. L’OCPM a conclu au rejet du recours.

L’intéressé ne pouvait se prévaloir de la seule longue durée de son séjour en Suisse. Il n’avait pas obtempéré à l’interdiction d’entrer, fait l’objet de deux condamnations et ne présentait pas une intégration socio-professionnelle exceptionnelle. En bonne santé, rien ne s’opposait à sa réintégration au Kosovo où vivait son épouse et ses quatre enfants.

c. Dans sa réplique, le recourant s’est offusqué de la brièveté des déterminations de l’OCPM, qui refusait de discuter ses arguments. Ses condamnations liées à son statut de clandestin ne pouvaient lui être opposées. L’indigence de la prise de position de l’OCPM confirmait le bien-fondé du recours.

d. Sur ce, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1.             Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ ‑ E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 ‑ LPA ‑ E 5 10).

2.             Le recourant sollicite différents actes d’instruction.

2.1 Tel qu'il est garanti par l'art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), le droit d'être entendu comprend notamment le droit pour l'intéressé d'offrir des preuves pertinentes et d'obtenir qu'il soit donné suite à ses offres de preuves pertinentes, lorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre (ATF 142 III 48 consid. 4.1.1 ; 140 I 285 consid. 6.3.1). Le droit de faire administrer des preuves n'empêche cependant pas la juge de renoncer à l'administration de certaines preuves offertes et de procéder à une appréciation anticipée de ces dernières, en particulier si elle acquiert la certitude que celles-ci ne l'amèneront pas à modifier son opinion ou si le fait à établir résulte déjà des constatations ressortant du dossier (ATF 145 I 167 consid. 4.1. ; 140 I 285 consid. 6.3.1). En outre, il n'implique pas le droit à l’audition orale ni à celle de témoins (ATF 140 I 285 consid. 6.3.1).

2.2 En l’espèce, le TAPI a estimé que le dossier contenait les éléments suffisants pour statuer en connaissance de cause, de sorte que l’audition du recourant comme celle des témoins n’apparaissait pas utile. Les périodes d’emploi auprès de B______ ressortaient des attestations produites et celle des époux N______ figurait au dossier. Le recourant avait pu exposer ses arguments et produire toute pièce utile. Sa condamnation n’avait pas de portée décisive sur l’issue de la procédure.

Ce faisant, le TAPI a procédé à une appréciation anticipée des preuves, qui ne prête pas le flanc à la critique. En effet, le recourant a apporté des pièces au dossier et fourni des explications détaillées tant devant l’OCPM que devant le TAPI et la chambre de céans. Il n’expose pas en quoi son audition permettrait d’apporter des éléments supplémentaires. Par ailleurs, même si les témoins dont il souhaite l’audition venaient confirmer sa présence en Suisse depuis 2008 et le travail ininterrompu depuis lors effectué par ses différents employeurs et que les époux N______ confirmaient la teneur de leur attestation, cela ne serait pas de nature à modifier l’issue du litige, comme cela sera exposé ci-après. Il en va de même des éléments relatifs à la procédure pénale et ceux, plus généraux, relatifs aux dénonciations auxquelles l’OCPM a procédé en lien avec des faux documents établis par L______ et produits par des ressortissants kosovars avec leur demande de régularisation.

Il ne sera donc pas procédé aux actes d’instruction sollicités et il sera retenu que le TAPI n’a pas violé le droit d’être entendu du recourant en ne procédant pas à ceux‑ci.

3.             Le recourant reprend le reproche adressé à l’OCPM d’avoir insuffisamment motivé sa décision.

3.1 L'art. 29 al. 2 Cst. comprend également le droit d'obtenir une décision motivée (ATF 138 I 232 consid. 5.1 ; 129 I 232 consid. 3.2). L'autorité n'est toutefois pas tenue de prendre position sur tous les moyens des parties ; elle peut se limiter aux questions décisives (ATF 138 IV 81 consid. 2.2 ; 137 II 266 consid. 3.2). Dès lors que l'on peut discerner les motifs qui ont guidé la décision de l'autorité, le droit à une décision motivée est respecté même si la motivation présentée est erronée ; la motivation peut d'ailleurs être implicite et résulter des différents considérants de la décision (arrêt du Tribunal fédéral 9C_701/2018 du 27 novembre 2018 consid. 5.2).

3.2 Comme l’a relevé le TAPI, la décision querellée retient que le recourant a présenté une attestation de travail falsifiée dans le but de l’induire en erreur, que l’OCPM s’estimait lié par la condamnation pénale y relative, malgré le fait que l’intéressé en contestait la teneur et que son séjour n’était démontré que depuis 2013, de sorte qu’il ne remplissait pas les critères de l’« opération Papyrus ». Il avait, en outre, conservé des liens étroits avec son pays, ayant obtenu et requis plusieurs visas de retour. Il n’avait pas non plus démontré une intégration socio-professionnelle remarquable. Enfin, son renvoi était raisonnablement exigible, possible et licite.

Il ressort de ce qui précède que les motifs ayant guidé l’OCPM ressortent clairement de la décision. Contrairement à ce que soutient le recourant, l’autorité intimée n’avait pas l’obligation de discuter en détail tous ses arguments. Elle a, bien que succinctement, exposé pour quelle raison elle ne s’écartait pas de l’ordonnance pénale. Pour le surplus, n’étant tenue que d’examiner les arguments pertinents pour l’issue du litige, l’autorité pouvait ne pas discuter les éléments qui manquaient de pertinence.

Le recourant a bien compris la teneur de la décision, qu’il a contestée en réfutant les éléments qui y figurent. Partant, celle-ci répond aux exigences de motivation déduites de l’art. 29 Cst.

4.             Le recourant soutient qu’il remplit les conditions permettant l’octroi d’une autorisation de séjour pour cas d’extrême gravité, telles que prévues par l’« opération Papyrus ».

4.1 Le 1er janvier 2019 est entrée en vigueur une modification de la LEI et de l’OASA. Conformément à l'art. 126 al. 1 LEI, les demandes déposées, comme en l’espèce, avant le 1er janvier 2019 sont régies par l’ancien droit.

4.2 L'art. 30 al. 1 let. b LEI permet de déroger aux conditions d'admission en Suisse, telles que prévues aux art. 18 à 29 LEI, notamment aux fins de tenir compte des cas individuels d'une extrême gravité ou d'intérêts publics majeurs.

4.3 L'art. 31 al. 1 OASA, dans sa teneur au moment des faits, prévoit que pour apprécier l'existence d'un cas individuel d'extrême gravité, il convient de tenir compte notamment de l'intégration du requérant (let. a), du respect de l'ordre juridique suisse (let. b), de sa situation familiale, particulièrement de la période de scolarisation et de la durée de la scolarité des enfants (let. c), de sa situation financière ainsi que de sa volonté de prendre part à la vie économique et d'acquérir une formation (let. d), de la durée de sa présence en Suisse (let. e), de son état de santé (let. f) ainsi que des possibilités de réintégration dans l'État de provenance (let. g). Les critères énumérés par cette disposition, qui doivent impérativement être respectés, ne sont toutefois pas exhaustifs, d'autres éléments pouvant également entrer en considération, comme les circonstances concrètes ayant amené un étranger à séjourner illégalement en Suisse (directives LEI, état au 1er janvier 2021, ch. 5.6.12).

4.4 Les dispositions dérogatoires des art. 30 LEI et 31 OASA présentent un caractère exceptionnel, et les conditions pour la reconnaissance d'une telle situation doivent être appréciées de manière restrictive (ATF 128 II 200 consid. 4). Elles ne confèrent pas de droit à l'obtention d'une autorisation de séjour (ATF 138 II 393 consid. 3.1 ; 137 II 345 consid. 3.2.1). L'autorité doit néanmoins procéder à l'examen de l'ensemble des circonstances du cas d'espèce pour déterminer l'existence d'un cas de rigueur (ATF 128 II 200 consid. 4 ; 124 II 110 consid. 2).

4.5 La reconnaissance de l'existence d'un cas d'extrême gravité implique que l'étranger concerné se trouve dans une situation de détresse personnelle. Parmi les éléments déterminants pour la reconnaissance d'un cas d'extrême gravité, il convient en particulier de citer la très longue durée du séjour en Suisse, une intégration sociale particulièrement poussée, une réussite professionnelle remarquable, la personne étrangère possédant des connaissances professionnelles si spécifiques qu'elle ne pourrait les mettre en œuvre dans son pays d'origine ou une maladie grave ne pouvant être traitée qu'en Suisse (arrêt du Tribunal fédéral 2A.543/2001 du 25 avril 2002 consid. 5.2).

La question est ainsi de savoir si, en cas de retour dans le pays d'origine, les conditions de sa réintégration sociale, au regard de la situation personnelle, professionnelle et familiale de l'intéressé, seraient gravement compromises (arrêts du Tribunal fédéral 2C_621/2015 du 11 décembre 2015 consid. 5.2.1 ; 2C_369/2010 du 4 novembre 2010 consid. 4.1).

4.6 L'« opération Papyrus » développée par le canton de Genève a visé à régulariser la situation des personnes non ressortissantes de l’UE/AELE bien intégrées et répondant à différents critères, à savoir, selon le livret intitulé « Régulariser mon statut de séjour dans le cadre de Papyrus » (disponible sous https://www.ge.ch/regulariser-mon-statut-sejour-cadre-papyrus/criteres-respecter), avoir un emploi ; être indépendant financièrement ; ne pas avoir de dettes ; avoir séjourné à Genève de manière continue sans papiers pendant cinq ans minimum (pour les familles avec enfants scolarisés) ou dix ans minimum pour les autres catégories, à savoir les couples sans enfants et les célibataires ; faire preuve d'une intégration réussie ; absence de condamnation pénale (autre que séjour illégal).

L'« opération Papyrus » n'emporte aucune dérogation aux dispositions légales applicables à la reconnaissance de raisons personnelles majeures justifiant la poursuite du séjour en Suisse (art. 30 al. 1 let. b LEI), pas plus qu'à celles relatives à la reconnaissance d'un cas individuel d'extrême gravité (art. 31 al. 1 OASA), dont les critères peuvent entrer en ligne de compte pour l'examen desdites raisons personnelles majeures (ATA/584/2017 du 23 mai 2017 consid. 4c).

4.7 Bien que la durée du séjour en Suisse constitue un critère important lors de l'examen d'un cas d'extrême gravité, elle doit néanmoins être examinée à la lumière de l'ensemble des circonstances et être relativisée lorsque l'étranger a séjourné en Suisse de manière illégale, sous peine de récompenser l'obstination à violer la loi (ATF 130 II 39 consid. 3 ; arrêt du Tribunal fédéral 2D_13/2016 du 11 mars 2016 consid. 3.2).

4.8 Dans le cadre de l'exercice de leur pouvoir d'appréciation, les autorités compétentes doivent tenir compte des intérêts publics, de la situation personnelle de l'étranger ainsi que de son degré d'intégration (art. 96 al. 1 LEI). L'autorité compétente dispose d'un très large pouvoir d'appréciation dans le cadre de l'examen des conditions de l'art. 31 al. 1 OASA.

4.9 En l’espèce, le recourant soutient séjourner en Suisse depuis 2008. Même si ce fait était établi, la durée du séjour du recourant doit être relativisée au regard du fait qu’il a été effectué dans l’illégalité.

Le recourant soutient qu’il ne peut être tenu compte de ses condamnations pénales, l’une étant liée à son statut de clandestin et l’autre infondée. Or, même à considérer qu’il n’y aurait pas lieu de tenir compte de ses deux condamnations pénales – dont la première est, en effet, intimement liée à son statut de clandestin –, il apparaît que le recourant n’a pas respecté l’interdiction d’entrer prononcée à son encontre. Selon ses propres déclarations, le 6 juin 2022 à la police, il était sorti de Suisse en 2017 et y est revenu, alors que ladite interdiction était toujours valable. Il ne peut ainsi se targuer d’une intégration sociale réussie, n’ayant pas respecté l’ordre public suisse, élément expressément requis par l’« opération Papyrus ».

Par ailleurs, le recourant ne remplit pas les conditions permettant de retenir l’existence d’un cas de rigueur. Il ne peut se prévaloir d’une intégration sociale remarquable. Certes, il est financièrement indépendant, ne fait pas l'objet de poursuites, n’a pas recouru à l’aide sociale et justifie d’un niveau A2 de la langue française. Il ne soutient toutefois pas avoir noué à Genève des liens affectifs ou amicaux d’une intensité telle qu’il ne pourrait les poursuivre par le biais de moyens de télécommunication modernes une fois de retour au Kosovo. Il ne fait pas non plus valoir qu’il s’investirait d’une quelconque manière dans la vie associative, sportive ou culturelle à Genève.

Il n’est pas contesté qu’il a œuvré à Genève en tant qu’ouvrier dans le domaine du bâtiment. Cette activité ne présente toutefois pas un degré de réussite tel qu’il ne pourrait être exigé de sa part de la poursuivre dans son pays d’origine. Au contraire, il apparaît que le recourant pourra, en cas de retour dans son pays, mettre à profit l’expérience professionnelle et les connaissances de la langue française acquises durant son séjour en Suisse. Le recourant indique avoir quitté le Kosovo alors qu’il était âgé de 37 ans. Il y a donc passé son enfance, son adolescence et une partie de sa vie d’adulte. Il connaît donc les us et coutumes de son pays et en parle la langue. Il y est régulièrement retourné, y ayant conservé des liens affectifs forts, son épouse et ses quatre enfants y vivant notamment. Le recourant est en bonne santé. Ainsi, quand bien même après plusieurs années passées à l’étranger, il traversera à son retour dans son pays une nécessaire phase de réadaptation, sa réintégration socio‑professionnelle ne parait pas gravement compromise.

Au vu de l’ensemble de ces éléments, l’OCPM n’a pas violé le droit ni abusé de son pouvoir d’appréciation en retenant que le recourant ne remplissait pas les conditions restrictives permettant l’octroi d’une autorisation de séjour pour cas de rigueur.

Il est encore observé que l’« opération Papyrus » se contentait de concrétiser les critères légaux fixés par la loi pour les cas de rigueur et que, comme cela vient d’être retenu, le recourant ne remplit pas les conditions des art. 30 al. 1 let. b LEI et 31 al. 1 OASA. Il ne saurait donc, pour ce motif non plus, se prévaloir de cette opération. Contrairement à ce que laisse entendre le recourant, l’OCPM se devait d’examiner l’ensemble des circonstances présentes, également lorsqu’il statuait sur des demandes présentées dans le cadre de l’« opération Papyrus ».

5.             Il convient encore d’examiner si le renvoi prononcé par l’OCPM est fondé.

5.1 Selon l'art. 64 al. 1 let. c LEI, l'autorité compétente rend une décision de renvoi ordinaire à l'encontre d'un étranger auquel l'autorisation de séjour est refusée ou dont l'autorisation n'est pas prolongée. Elle ne dispose à ce titre d'aucun pouvoir d'appréciation, le renvoi constituant la conséquence du rejet d'une demande d'autorisation. Le renvoi d'une personne étrangère ne peut être ordonné que si l'exécution de celui-ci est possible, licite ou peut être raisonnablement exigée (art. 83 al. 1 LEI).

5.2 En l'espèce, dès lors qu'il a, à juste titre, refusé l’octroi d’une autorisation de séjour au recourant, l'intimé devait prononcer son renvoi. Le recourant n’invoque aucun élément permettant de retenir que son renvoi ne serait pas possible, licite ou ne pourrait raisonnablement être exigé ; de tels éléments ne ressortent pas non plus du dossier.

Mal fondé, le recours sera rejeté.

Le présent arrêt rend sans objet la requête d’effet suspensif.

6.             Vu l'issue du recours, un émolument de CHF 550.- sera mis à la charge du recourant et aucune indemnité ne lui sera allouée (art. 87 LPA).

 

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 21 septembre 2023 par A______ contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 21 août 2023 ;

au fond :

le rejette ;

met un émolument de CHF 550.- à la charge de A______ ;

dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

dit que les éventuelles voies de recours contre le présent arrêt, les délais et conditions de recevabilité qui leur sont applicables, figurent dans la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), dont un extrait est reproduit ci-après. Le mémoire de recours doit être adressé au Tribunal fédéral suisse, av. du Tribunal fédéral 29, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Antoine BOESCH, avocat du recourant, à l'office cantonal de la population et des migrations, au Tribunal administratif de première instance ainsi qu'au secrétariat d'État aux migrations.

Siégeant : Jean-Marc VERNIORY, président, Florence KRAUSKOPF, Francine PAYOT ZEN-RUFFINEN, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

D. WERFFELI BASTIANELLI

 

 

le président siégeant :

 

 

J.-M. VERNIORY


Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

Genève, le la greffière :

 

 

 

 

 

 

Extraits de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110)
consultable sur le site: http://www.admin.ch/ch/f/rs/c173_110.html

Recours en matière de droit public
(art. 82 et ss LTF)

Recours constitutionnel subsidiaire
(art. 113 et ss LTF)

Art. 82 Principe

Le Tribunal fédéral connaît des recours :

a. contre les décisions rendues dans des causes de droit public ;

Art. 83 Exceptions

Le recours est irrecevable contre :

c. les décisions en matière de droit des étrangers qui concernent :

1. l’entrée en Suisse,

2. une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit,

3. l’admission provisoire,

4. l’expulsion fondée sur l’art. 121, al. 2, de la Constitution ou le renvoi,

5. les dérogations aux conditions d’admission,

6. la prolongation d’une autorisation frontalière, le déplacement de la résidence dans un autre canton, le changement d’emploi du titulaire d’une autorisation frontalière et la délivrance de documents de voyage aux étrangers sans pièces de légitimation ;

d. les décisions en matière d’asile qui ont été rendues :

1. par le Tribunal administratif fédéral,

2. par une autorité cantonale précédente et dont l’objet porte sur une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit ;

Art. 89 Qualité pour recourir

1 A qualité pour former un recours en matière de droit public quiconque :

a. a pris part à la procédure devant l’autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire ;

b. est particulièrement atteint par la décision ou l’acte normatif attaqué, et

c. a un intérêt digne de protection à son annulation ou à sa modification.

Art. 95 Droit suisse

Le recours peut être formé pour violation :

a. du droit fédéral ;

b. du droit international ;

c. de droits constitutionnels cantonaux ;

d. de dispositions cantonales sur le droit de vote des citoyens ainsi que sur les élections et votations populaires ;

e. du droit intercantonal.

Art. 100 Recours contre une décision

1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l’expédition complète.

______________________________________________

Art. 113 Principe

Le Tribunal fédéral connaît des recours constitutionnels contre les décisions des autorités cantonales de dernière instance qui ne peuvent faire l’objet d’aucun recours selon les art. 72 à 89.

Art. 115 Qualité pour recourir

A qualité pour former un recours constitutionnel quiconque :

a. a pris part à la procédure devant l’autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire et

b. a un intérêt juridique à l’annulation ou à la modification de la décision attaquée.

Art. 116 Motifs de recours

Le recours constitutionnel peut être formé pour violation des droits constitutionnels.

Art. 100 Recours contre une décision

1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l’expédition complète.

___________________________________________

 

Recours ordinaire simultané (art. 119 LTF)

1 Si une partie forme contre une décision un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire.

2 Le Tribunal fédéral statue sur les deux recours dans la même procédure.

3 Il examine les griefs invoqués selon les dispositions applicables au type de recours concerné.