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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/175/2023

ATA/1257/2023 du 21.11.2023 sur JTAPI/624/2023 ( PE ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/175/2023-PE ATA/1257/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 21 novembre 2023

2ème section

 

dans la cause

 

A______ recourant
représenté par Me Pierre OCHSNER, avocat

contre

OFFICE CANTONAL DE LA POPULATION ET DES MIGRATIONS intimé

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 6 juin 2023 (JTAPI/624/2023)


EN FAIT

A. a. A______, né le ______ 1986, est ressortissant du B______.

b. Par ordonnance pénale du 6 mars 2014, le Ministère public l’a condamné à une peine pécuniaire de 30 jours-amende à CHF 30.- avec sursis de trois ans, pour avoir séjourné sur le territoire suisse depuis le 14 décembre 2013 sans être au bénéfice des autorisations nécessaires.

c. Le 12 mai 2017, l’office cantonal de la population et des migrations (ci-après : OCPM) a reçu une première demande de permis de travail d’A______ pour un emploi salarié en qualité de coiffeur.

d. Le 20 octobre 2017, A______ a formé une demande de permis de travail, se prévalant d’un cas de rigueur ainsi que de l’« opération Papyrus ».

e. Le 14 mars 2018, l’OCPM l’a invité à lui faire parvenir des justificatifs complémentaires de résidence concernant les années 2007 à 2011.

f. Le 24 décembre 2018, A______ a déposé une demande de regroupement familial pour son épouse, C______, née le ______ 1990, et leurs trois enfants nés respectivement en 2009, 2011 et 2013.

g. Le 14 février 2019, l’OCPM l’a informé que la demande de regroupement familial était prématurée dans la mesure où il devait d’abord obtenir une autorisation de séjour. Il demeurait dans l’attente des justificatifs concernant les années 2007 à 2011 et sollicitait la remise de formulaires « Papyrus », M et OCIRT dûment complétés ainsi que d’autres attestations.

h. Le 4 mars 2019, A______ a remis divers documents.

i. Le 7 mars 2019, l’OCPM lui a répondu que les preuves de résidence à Genève pour les années 2008 à 2011 étaient insuffisantes et lui a remis la liste les justificatifs devant être fournis dans le cadre de l’« opération Papyrus ».

j. Le 18 mars 2019, A______ a indiqué avoir toujours habité à Genève. Ses enfants étaient inscrits à l’école à Genève et sa femme était en train d’apprendre le français.

k. Le 23 avril 2019, l’OCPM a été informé du fait qu’A______ ne travaillait plus au sein du salon de coiffure D______ depuis le 19 avril 2019.

l. Le 4 juin 2019, l’OCPM a fait part à A______ de son intention de refuser sa demande de régularisation de ses conditions de séjour en Suisse. La durée minimum de dix ans de séjour à Genève requise par l’« opération Papyrus » n’était pas démontrée à satisfaction de droit. Sa situation ne répondait pas non plus aux critères d’un cas individuel d’extrême gravité.

m. Le 13 août 2019, l’OCPM a informé le mandataire d’A______ qu’il annulait son intention de refuser sa demande de régularisation de ses conditions de séjour. Certains éléments du dossier devaient être revus et analysés plus largement sur la base de renseignements complémentaires à fournir ultérieurement.

n. Les 21 août et 23 septembre 2019, l’OCPM a réclamé notamment des justificatifs de résidence complémentaires autres que ceux déjà fournis pour les années 2009 à 2011.

o. Le 2 octobre 2019, A______ a expliqué qu’il n’avait pas été déclaré auprès de l’AVS pour les années 2009-2010. Il a produit le contrat de travail conclu avec son nouvel employeur.

p. Le 7 février 2020, le Ministère public a informé l’OCPM qu’une procédure pénale pour faux dans les titres était ouverte en lien avec des dossiers « Papyrus ». Il a ordonné le dépôt d’une copie de tous les dossiers traités notamment par le mandataire d’A______.

q. Le 10 février 2021, l’OCPM a été informé qu’A______ avait changé de mandataire.

r. Le 15 mars 2021, il a communiqué le dossier d’A______ au Ministère public.

s. Selon un rapport de police adressé au Ministère public le 24 février 2022, A______ avait été entendu le 16 mars 2021 en qualité de prévenu par la police dans le cadre de la procédure pénale P/1______/2021. Il lui était reproché des faux dans les titres, un comportement frauduleux à l’égard des autorités, des infractions à la loi fédérale sur les étrangers et l’intégration du 16 décembre 2005 (LEI - RS 142.20, anciennement dénommée loi fédérale sur les étrangers - LEtr) pour avoir notamment fourni de faux documents aux autorités dans la cadre de la demande « Papyrus ». Il avait admis avoir versé de l’argent à un tiers pour se procurer de faux documents visant à prouver son séjour en Suisse.

t. Le 19 mai 2022, l’OCPM a informé A______ de son intention de refuser sa demande de régularisation de ses conditions de séjour. Il avait avoué avoir produit des documents falsifiés dans le but d’obtenir une autorisation de séjour. Ce comportement ne répondait pas aux critères de l’« opération Papyrus » ni à ceux d’un cas individuel d’extrême gravité. La durée minimum de dix ans de présence en Suisse n’était pas démontrée à satisfaction de droit.

u. Par décision du 1er décembre 2022, l’OCPM a refusé de soumettre le dossier d’A______ avec un préavis positif au secrétariat d'État aux migrations (ci‑après : SEM) et a prononcé son renvoi de Suisse.

Il n’avait pas prouvé sa présence de dix ans en Suisse. Son comportement frauduleux afin d’obtenir une autorisation de séjour était en contradiction avec les critères de l’« opération Papyrus » et ceux d’un cas individuel d’extrême gravité.

Son épouse et ses enfants étant arrivés en Suisse postérieurement au dépôt de sa demande de régularisation, ils ne pouvaient pas être inclus dans celle-ci. Ils feraient l’objet d’un traitement différencié sous l’angle d’un regroupement familial et ne pouvaient pas lui permettre de bénéficier d’une condition de durée de séjour raccourcie de cinq ans.

Vu son comportement frauduleux et nonobstant le fait qu’aucune condamnation n’avait encore été prononcée, son intégration n’était pas celle que l’on pouvait attendre de tout étranger souhaitant la régularisation de son séjour.

Le fait d’avoir sollicité et obtenu cinq visas de retour au B______ afin de rendre visite à sa famille, tendait à constater que le centre de ses intérêts s’y trouvait.

B. a. Le 17 janvier 2023, A______ a recouru auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI) contre cette décision, concluant à son annulation et à l’octroi d’une autorisation de séjour en sa faveur. Il a conclu préalablement à son audition.

Il vivait en Suisse depuis 2007 et n’avait cessé d’y travailler depuis son arrivée. Il n’avait jamais eu recours à l’aide sociale et n’avait pas de dettes. Il avait certes ignoré la législation sur le séjour des étrangers en Suisse, mais sa possible condamnation n’atteignait pas la gravité exigée par le Tribunal administratif fédéral pour remettre en question son intégration et son respect de l’ordre juridique suisse. Ses enfants, âgés respectivement de 13, 11 et 9 ans, étaient tous les trois scolarisés et sa femme recherchait activement un emploi. Ils avaient noué des relations solides depuis leur arrivée à Genève et appris la langue et les us et coutumes. Leur centre de vie était désormais en Suisse et non plus au B______. La famille étant ainsi parfaitement intégrée, les conditions de l’« opération Papyrus » et d’un cas de rigueur étaient remplies. Leur renvoi n’était pas exigible et ne respectait pas le principe de proportionnalité.

b. Le 20 mars 2023, l’OCPM a conclu au rejet du recours

c. Le 11 avril 2023, A______ a persisté dans ses conclusions. Il a de surcroît conclu à l’obtention d’un titre de séjour pour sa famille.

d. Par jugement du 6 juin 2023, le TAPI a rejeté le recours et la demande de comparution personnelle.

Le recours ne portait que sur la demande de régularisation des conditions de séjour d’A______. La conclusion tendant à l’obtention d’un titre de séjour pour son épouse et ses enfants était irrecevable.

Il n’établissait pas un séjour continu d'au moins dix ans en Suisse au moment du dépôt de sa demande de régularisation ni qu’au moins un de ses enfants actuellement scolarisés avait effectué trois ans de scolarité à Genève avant le dépôt de la demande de régularisation, ou était arrivé en Suisse avant l’annonce officielle de l’« opération Papyrus » du 21 février 2017. Il ne répondait pas aux critères de cette opération.

Il avait séjourné près de cinq ans à peine en Suisse avant de déposer sa demande de régularisation en octobre 2017. Il n’établissait pas une intégration socio‑professionnelle remarquable. S’il n'avait pas encore fait l'objet d'une condamnation pénale pour faux dans les titres et comportement frauduleux à l’égard des autorités, les faits qui lui étaient reprochés et qu’il avait reconnus, tendaient à démontrer ses difficultés à respecter l'ordre juridique suisse.

Ses enfants l’avaient rejoint avec leur mère en 2018, alors qu’ils étaient âgés respectivement de 9, 7 et 5 ans. Bien qu'ils soient désormais intégrés au système scolaire genevois, ils n’étaient en Suisse que depuis près de cinq ans. Le fils ainé avait commencé sa scolarité au B______ où il avait par ailleurs vécu la majeure partie de sa vie. Son intégration en Suisse n’était pas encore si profonde et sa réintégration dans son pays d'origine n’apparaissait pas insurmontable. Son frère et sa sœur cadets n’avaient pas encore commencé leur adolescence, période importante dans le développement personnel, scolaire et professionnel entraînant souvent une intégration accrue dans un milieu déterminé. Ils avaient en outre gardé un lien avec le B______, au vu des demandes de visa de retour déposées. Ils en parlaient vraisemblablement la langue et en connaissaient les us et coutumes, s’agissant du pays d’origine de leurs deux parents. Ainsi, bien qu'indéniablement constitutive d'un important changement, leur réintégration au B______ et la poursuite de leur cursus scolaire dans ce pays ne semblaient pas compromises. Ils pourraient enfin compter sur le soutien de leurs deux parents auxquels ils restaient étroitement attachés vu leur jeune âge. Quant à l’épouse du recourant, il ne ressortait pas du dossier qu’elle était intégrée sur le plan socioprofessionnel.

C. a. Par acte remis à la poste le 10 juillet 2023, A______ a recouru auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre ce jugement, concluant à son annulation et à ce qu’une autorisation de séjour lui soit octroyée. Subsidiairement, la cause devait être renvoyée à l’OCPM pour nouvelle décision. Préalablement, sa comparution personnelle devait être ordonnée.

Il avait toujours travaillé depuis son arrivée en Suisse en 2007. Il gagnait un salaire de CHF 4'194.- net par mois en moyenne comme coiffeur. Il avait toujours pu subvenir seul à l’entretien de sa famille. Il n’avait ni dettes ni poursuites, n’avait pas bénéficié de l’aide sociale et avait un casier judiciaire vierge. Il n’avait toujours pas été condamné en relation avec les documents produits à l’OCPM. Toute la famille était assurée contre la maladie.

Les faits avaient été établis de manière manifestement inexacte. Il vivait en Suisse depuis près de 16 ans et était parfaitement intégré. Sa « possible condamnation concernant sa présence en Suisse » n’atteignait pas la gravité exigée pour remettre en question son intégration. Son centre de vie et celui de sa famille était en Suisse.

Le bien de ses enfants n’avait pas été pris en compte. S’il devait quitter la Suisse, ses enfants devraient le suivre, ce qui nuirait à leur développement harmonieux et global.

Lui et sa famille ne connaissaient plus leur pays d’origine. Ils étaient parfaitement intégrés en Suisse. Les perspectives d’une réinsertion au B______ faisaient défaut. Contraindre une personne ayant montré cette volonté d’intégration à quitter la Suisse reviendrait à inciter les séjours illégaux. Leur renvoi était inexigible.

Le principe de proportionnalité avait été violé.

b. Le 11 août 2023, l’OCPM a conclu au rejet du recours.

c. Le 18 septembre 2023, le recourant a persisté dans ses conclusions.

La procédure pénale courait toujours et la présomption d’innocence devait prévaloir. Rien ne pouvait être tiré de la procédure.

Il n’avait pas plus de preuves que celles apportées de son séjour en Suisse entre 2008 et 2011, où il travaillait sans autorisation pour subvenir à ses besoins vitaux et primaires.

Ses enfants comptabilisaient cinq ans de scolarisation. Cette durée représentait une grande proportion de leur vie vu leur jeune âge.

d. Le 20 septembre 2023, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1.             Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ ‑ E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 ‑ LPA ‑ E 5 10).

2.             Le recourant conclut préalablement à sa comparution personnelle.

2.1 Tel qu'il est garanti par l'art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), le droit d'être entendu comprend notamment le droit pour l'intéressé d'offrir des preuves pertinentes et d'obtenir qu'il y soit donné suite (ATF 132 II 485 consid. 3.2 ; 127 I 54 consid. 2b). Ce droit ne s'étend qu'aux éléments pertinents pour l'issue du litige et n'empêche pas le juge de renoncer à l'administration de certaines preuves et de procéder à une appréciation anticipée de ces dernières, s'il acquiert la certitude que celles-ci ne l'amèneront pas à modifier son opinion ou si le fait à établir résulte déjà des constatations ressortant du dossier (ATF 138 III 374 consid. 4.3.2 ; 131 I 153 consid. 3). En outre, il n'implique pas le droit d'être entendu oralement, ni celui d'obtenir l'audition de témoins (ATF 134 I 140 consid. 5.3 ; 130 II 425 consid. 2.1).

2.2 En l’espèce, le recourant s’est vu offrir l’occasion d’exposer ses arguments et de produire toute pièce utile devant l’OCPM, le TAPI et la chambre de céans. Il n’expose pas quels éléments décisifs pour l’issue de la procédure qu’il n’aurait pu produire par écrit son audition serait susceptible d’apporter.

Il ne sera pas donné suite à la demande d’acte d’instruction.

3.             Le recourant reproche à l’OCPM d’avoir refusé de lui octroyer une autorisation de séjour dans le cadre de l’« opération Papyrus » ou pour cas individuel d’extrême gravité.

3.1 Le 1er janvier 2019 est entrée en vigueur une modification de la LEI et de l’ordonnance relative à l'admission, au séjour et à l'exercice d'une activité lucrative du 24 octobre 2007 (OASA - RS 142.201). Conformément à l'art. 126 al. 1 LEI, les demandes déposées, comme en l’espèce, avant le 1er janvier 2019 sont régies par l’ancien droit.

3.2 L'art. 30 al. 1 let. b LEI permet de déroger aux conditions d'admission en Suisse, telles que prévues aux art. 18 à 29 LEI, notamment aux fins de tenir compte des cas individuels d'une extrême gravité ou d'intérêts publics majeurs.

3.3 L'art. 31 al. 1 OASA, dans sa teneur au moment des faits, prévoit que pour apprécier l'existence d'un cas individuel d'extrême gravité, il convient de tenir compte notamment de l'intégration du requérant (let. a), du respect de l'ordre juridique suisse (let. b), de sa situation familiale, particulièrement de la période de scolarisation et de la durée de la scolarité des enfants (let. c), de sa situation financière ainsi que de sa volonté de prendre part à la vie économique et d'acquérir une formation (let. d), de la durée de sa présence en Suisse (let. e), de son état de santé (let. f) ainsi que des possibilités de réintégration dans l'État de provenance (let. g). Les critères énumérés par cette disposition, qui doivent impérativement être respectés, ne sont toutefois pas exhaustifs, d'autres éléments pouvant également entrer en considération, comme les circonstances concrètes ayant amené un étranger à séjourner illégalement en Suisse (directives LEI, état au 1er janvier 2021, ch. 5.6.12).

3.4 Les dispositions dérogatoires des art. 30 LEI et 31 OASA présentent un caractère exceptionnel, et les conditions pour la reconnaissance d'une telle situation doivent être appréciées de manière restrictive (ATF 128 II 200 consid. 4). Elles ne confèrent pas de droit à l'obtention d'une autorisation de séjour (ATF 138 II 393 consid. 3.1 ; 137 II 345 consid. 3.2.1). L'autorité doit néanmoins procéder à l'examen de l'ensemble des circonstances du cas d'espèce pour déterminer l'existence d'un cas de rigueur (ATF 128 II 200 consid. 4 ; 124 II 110 consid. 2 ; ATA/38/2019 du 15 janvier 2019 consid. 4c ; directives LEI, ch. 5.6).

La reconnaissance de l'existence d'un cas d'extrême gravité implique que l'étranger concerné se trouve dans une situation de détresse personnelle. Parmi les éléments déterminants pour la reconnaissance d'un cas d'extrême gravité, il convient en particulier de citer la très longue durée du séjour en Suisse, une intégration sociale particulièrement poussée, une réussite professionnelle remarquable, la personne étrangère possédant des connaissances professionnelles si spécifiques qu'elle ne pourrait les mettre en œuvre dans son pays d'origine ou une maladie grave ne pouvant être traitée qu'en Suisse (arrêt du Tribunal fédéral 2A.543/2001 du 25 avril 2002 consid. 5.2).

La question est ainsi de savoir si, en cas de retour dans le pays d'origine, les conditions de sa réintégration sociale, au regard de la situation personnelle, professionnelle et familiale de l'intéressé, seraient gravement compromises (arrêts du Tribunal fédéral 2C_621/2015 du 11 décembre 2015 consid. 5.2.1 ; 2C_369/2010 du 4 novembre 2010 consid. 4.1).

3.5 Bien que la durée du séjour en Suisse constitue un critère important lors de l'examen d'un cas d'extrême gravité, elle doit néanmoins être examinée à la lumière de l'ensemble des circonstances du cas particulier et être relativisée lorsque l'étranger a séjourné en Suisse de manière illégale, sous peine de récompenser l'obstination à violer la loi (ATF 130 II 39 consid. 3 ; arrêt du Tribunal fédéral 2D_13/2016 du 11 mars 2016 consid. 3.2).

3.6 Dans le cadre de l'exercice de leur pouvoir d'appréciation, les autorités compétentes doivent tenir compte des intérêts publics, de la situation personnelle de l'étranger ainsi que de son degré d'intégration (art. 96 al. 1 LEI). L'autorité compétente dispose d'un très large pouvoir d'appréciation dans le cadre de l'examen des conditions de l'art. 31 al. 1 OASA.

3.7 L'« opération Papyrus » développée par le canton de Genève a visé à régulariser la situation des personnes non ressortissantes UE/AELE bien intégrées et répondant à différents critères, à savoir, selon le livret intitulé « Régulariser mon statut de séjour dans le cadre de Papyrus » disponible sous https://www.ge.ch/regulariser-mon-statut-sejour-cadre-papyrus/criteres-respecter), avoir un emploi ; être indépendant financièrement ; ne pas avoir de dettes ; avoir séjourné à Genève de manière continue sans papiers pendant cinq ans minimum (pour les familles avec enfants scolarisés) ou dix ans minimum pour les autres catégories, à savoir les couples sans enfants et les célibataires ; faire preuve d'une intégration réussie ; absence de condamnation pénale (autre que séjour illégal).

L'« opération Papyrus » n'emporte aucune dérogation aux dispositions légales applicables à la reconnaissance de raisons personnelles majeures justifiant la poursuite du séjour en Suisse (art. 30 al. 1 let. b LEI), pas plus qu'à celles relatives à la reconnaissance d'un cas individuel d'extrême gravité (art. 31 al. 1 OASA), dont les critères peuvent entrer en ligne de compte pour l'examen desdites raisons personnelles majeures (ATA/584/2017 du 23 mai 2017 consid. 4c).

3.8 En l’espèce, le recourant reproche à l’OCPM et au TAPI d’avoir incorrectement établi les faits. Il séjournait en Suisse depuis 2007 et était parfaitement intégré.

Il ne saurait être suivi. Il n’a pas établi à satisfaction de droit son séjour continu en Suisse entre 2008 et 2011. Il admet d’ailleurs lui-même ne pas disposer de plus de pièces que celles qu’il a fournies. Il s’ensuit que son séjour en Suisse ne peut être pris en compte pour cette période, de sorte que lorsqu’il a déposé sa demande le 20 octobre 2017, il ne totalisait de loin pas les dix années de séjour ininterrompu requises par l’« opération Papyrus ». Sous l’angle du cas individuel d’extrême gravité, le même séjour ne saurait être considéré comme long.

Tant sous l’angle de l’« opération Papyrus » que du cas individuel d’extrême gravité, les comportements pénalement relevants reprochés au recourant empêchent à eux seuls d’admettre qu’il est bien intégré en Suisse. En effet, tenter d’induire l’OCPM en erreur pour obtenir une autorisation de séjour en produisant des attestations falsifiées ou forgées de toutes pièces dénote un mépris certain de l’ordre juridique, et ne saurait être considéré comme un écart de peu d’importance ainsi que le soutient le recourant. Le fait qu’il n’a pas encore été jugé est indifférent puisqu’il a reconnu devant la police avoir produit de fausses attestations, ce qu’il ne conteste pas devant la chambre de céans.

Pour le surplus, le recourant, qui travaille en qualité de coiffeur, ne peut se voir reconnaître une intégration professionnelle exceptionnelle. Il n’a en particulier pas acquis de connaissances professionnelles si spécifiques qu’il ne pourrait les exploiter en cas de retour au B______. Il ne fait pas valoir d’attaches fortes avec Genève au-delà de la présence de sa femme et de leurs enfants et ne soutient pas qu’il serait engagé dans la vie sportive, associative ou culturelle, de sorte que son intégration sociale n’apparaît pas non plus remarquable. Le fait de travailler, d’être autonome financièrement, de maîtriser la langue française au degré requis, de n’avoir ni dettes ni poursuites et de présenter un casier judiciaire vierge eut être attendu de tout candidat à la régularisation de ses conditions de séjour.

Le recourant est encore jeune et en bonne santé. Il a, quoi qu’il en dise, certainement gardé avec le B______ des attaches, puisqu’il y est retourné à plusieurs reprises ces dernières années. Il maîtrise la langue et les coutumes de son pays d’origine, il pourra y faire valoir l’expérience acquise en Suisse et compter sur des membres de sa famille ou des proches, de sorte que sa réintégration, si elle ne sera sans doute pas dépourvue de toute difficulté, ne sera en tout cas pas plus difficile que celle de ses compatriotes placés dans une situation semblable.

3.9 Le recourant fait valoir le bien de ses enfants, soit les conséquences de son renvoi sur leur situation.

Il perd de vue que la situation de son épouse et de ses enfants ne fait pas l’objet de la présente procédure et ne saurait être prise en compte pour l’issue du litige, compte tenu notamment que ceux-ci ne disposent pas de titres de séjour dont il pourrait se prévaloir.

C’est ainsi conformément à la loi que l’OCPM a refusé de délivrer au recourant une autorisation de séjour.

4.             Il convient encore d’examiner si le renvoi prononcé par l’OCPM est fondé.

4.1 Selon l'art. 64 al. 1 let. c LEI, l'autorité compétente rend une décision de renvoi ordinaire à l'encontre d'un étranger auquel l'autorisation de séjour est refusée ou dont l'autorisation n'est pas prolongée. Elle ne dispose à ce titre d'aucun pouvoir d'appréciation, le renvoi constituant la conséquence du rejet d'une demande d'autorisation. Le renvoi d'une personne étrangère ne peut être ordonné que si l'exécution de celui-ci est possible, licite ou peut être raisonnablement exigée (art. 83 al. 1 LEI).

4.2 En l'espèce, dès lors qu'il a, à juste titre, refusé l’octroi d’une autorisation de séjour au recourant, l'intimé devait prononcer son renvoi.

Le recourant soutient que son renvoi serait inexigible, mais il n’invoque que son intégration en Suisse et les difficultés d’un retour. Or, il a été vu que ces arguments ne sont pas pertinents. Le recourant ne fait valoir pour le surplus aucun élément permettant de retenir que son renvoi ne serait pas possible, licite ou ne pourrait raisonnablement être exigé.

Entièrement mal fondé, le recours sera rejeté.

5.             Vu l'issue du recours, un émolument de CHF 400.- sera mis à la charge du recourant et aucune indemnité ne lui sera allouée (art. 87 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 10 juillet 2023 par A______ contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 6 juin 2023 ;

au fond :

le rejette ;

met un émolument de CHF 400.- à la charge d’A______ ;

dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

dit que les éventuelles voies de recours contre le présent arrêt, les délais et conditions de recevabilité qui leur sont applicables, figurent dans la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), dont un extrait est reproduit ci-après. Le mémoire de recours doit être adressé au Tribunal fédéral suisse, av. du Tribunal fédéral 29, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Pierre OCHSNER, avocat du recourant, à l'office cantonal de la population et des migrations, au Tribunal administratif de première instance ainsi qu'au secrétariat d'État aux migrations.

Siégeant : Claudio MASCOTTO, président, Florence KRAUSKOPF, Jean-Marc VERNIORY, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

M. MICHEL

 

 

le président siégeant :

 

 

C. MASCOTTO

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :

 

 

 

 


 

Extraits de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110)
consultable sur le site: http://www.admin.ch/ch/f/rs/c173_110.html

Recours en matière de droit public
(art. 82 et ss LTF)

Recours constitutionnel subsidiaire
(art. 113 et ss LTF)

Art. 82 Principe

Le Tribunal fédéral connaît des recours :

a. contre les décisions rendues dans des causes de droit public ;

Art. 83 Exceptions

Le recours est irrecevable contre :

c. les décisions en matière de droit des étrangers qui concernent :

1. l’entrée en Suisse,

2. une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit,

3. l’admission provisoire,

4. l’expulsion fondée sur l’art. 121, al. 2, de la Constitution ou le renvoi,

5. les dérogations aux conditions d’admission,

6. la prolongation d’une autorisation frontalière, le déplacement de la résidence dans un autre canton, le changement d’emploi du titulaire d’une autorisation frontalière et la délivrance de documents de voyage aux étrangers sans pièces de légitimation ;

d. les décisions en matière d’asile qui ont été rendues :

1. par le Tribunal administratif fédéral,

2. par une autorité cantonale précédente et dont l’objet porte sur une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit ;

Art. 89 Qualité pour recourir

1 A qualité pour former un recours en matière de droit public quiconque :

a. a pris part à la procédure devant l’autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire ;

b. est particulièrement atteint par la décision ou l’acte normatif attaqué, et

c. a un intérêt digne de protection à son annulation ou à sa modification.

Art. 95 Droit suisse

Le recours peut être formé pour violation :

a. du droit fédéral ;

b. du droit international ;

c. de droits constitutionnels cantonaux ;

d. de dispositions cantonales sur le droit de vote des citoyens ainsi que sur les élections et votations populaires ;

e. du droit intercantonal.

Art. 100 Recours contre une décision

1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l’expédition complète.

______________________________________________

Art. 113 Principe

Le Tribunal fédéral connaît des recours constitutionnels contre les décisions des autorités cantonales de dernière instance qui ne peuvent faire l’objet d’aucun recours selon les art. 72 à 89.

Art. 115 Qualité pour recourir

A qualité pour former un recours constitutionnel quiconque :

a. a pris part à la procédure devant l’autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire et

b. a un intérêt juridique à l’annulation ou à la modification de la décision attaquée.

Art. 116 Motifs de recours

Le recours constitutionnel peut être formé pour violation des droits constitutionnels.

Art. 100 Recours contre une décision

1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l’expédition complète.

___________________________________________

 

Recours ordinaire simultané (art. 119 LTF)

1 Si une partie forme contre une décision un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire.

2 Le Tribunal fédéral statue sur les deux recours dans la même procédure.

3 Il examine les griefs invoqués selon les dispositions applicables au type de recours concerné.