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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3302/2023

ATA/1273/2023 du 28.11.2023 ( MARPU ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3302/2023-MARPU ATA/1273/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 28 novembre 2023

 

dans la cause

 

A______ recourante

contre

OFFICE CANTONAL DES BÂTIMENTS intimé



EN FAIT

A. a. Le 23 juin 2023, l’office cantonal des bâtiments (ci-après : l’OCBA) a publié sur SIMAP un appel d’offres en procédure ouverte portant sur le renouvellement complet de la mise en passe « Kaba Gemini » de l’établissement fermé de la Brenaz, soit environ 1'300 cylindres.

Les prestations à réaliser étaient décrites dans le cahier des charges.

Le délai pour la remise des offres était fixé au 15 septembre 2023.

b. Les offres devaient être déposées en un seul exemplaire sous la forme de deux enveloppes distinctes. La première devait comporter toutes les attestations requises dans l’annexe P2+, les annexes P4, P6, R15+ et la preuve que le soumissionnaire exerçait son activité depuis plus de trois ans. La deuxième enveloppe devait contenir l’offre et toutes les autres annexes.

Le dossier d’appel d’offres prévoyait notamment que les soumissionnaires devaient remettre l’annexe P2+ avec leur offre. La sous-traitance était autorisée à hauteur de maximum 30% de l’ensemble du marché. Tout sous-traitant devait respecter toutes les conditions de l’appel d’offres. Les attestations demandées à l’annexe P2+ devaient être remises avec l’offre pour les sous-traitants, ce que prévoyait l’annexe R15+.

L’annexe P2+ prévoyait que l’entreprise avait l’obligation de remettre les attestations et preuves requises dans le même délai que le dépôt de l’offre, y compris celles des sous-traitants si la sous-traitance était autorisée.

c. Selon le chiffre 3.6 du dossier d’appel d’offres, l’absence de production d’une attestation était un motif d’exclusion, ce qui valait pour l’attestation d’assurance‑accident (SUVA ou équivalent) et la preuve de paiement de la cotisation de l’assurance-accident pour les indépendants, y compris pour les sous‑traitants.

d. A______ a déposé une offre le 13 septembre 2023.

e. Par décision du 4 octobre 2023, l’OCBA a écarté son offre. Les attestations LAA (SUVA) de deux de ses sous-traitants, sur cinq, étaient manquantes.

B. a. A______ a formé recours contre cette décision par acte expédié le 12 octobre 2023 à la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative).

Elle remettait les attestations manquantes de B______ et C______ qu’elle remerciait la chambre administrative de transmettre à qui de droit « et de faire en sorte que [son] appel d’offres soit étudié ».

b. L’OCBA a conclu au rejet du recours.

La recourante avait reconnu ne pas avoir produit les attestations exigées. En vertu du principe de l’intangibilité des offres, elle n’était pas autorisée à compléter la sienne après l’échéance du délai. Les documents complémentaires transmis ne pouvaient pas être pris en considération.

c. A______ n’a pas répliqué dans le délai imparti à cet effet.

d. Les parties ont été informées, le 26 octobre 2023, que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1. Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 15 al. 1bis let. d de l’accord intercantonal sur les marchés publics du 25 novembre 1994 - AIMP - L 6 05 ; art. 3 al. 1 de la loi autorisant le Conseil d’État à adhérer à l’accord intercantonal sur les marchés publics du 12 juin 1997 - L-AIMP - L 6 05.0 ; art. 55 let. c et 56 al. 1 du règlement sur la passation des marchés publics du 17 décembre 2007 - RMP - L 6 05.01).

2.             2.1 L'acte de recours contient, sous peine d'irrecevabilité, la désignation de la décision attaquée et les conclusions du recourant (art. 65 al. 1 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10). Il contient également l'exposé des motifs ainsi que l'indication des moyens de preuve (art. 65 al. 2 1ère phr. LPA).

2.2 Compte tenu du caractère peu formaliste de cette disposition, il convient de ne pas se montrer trop strict sur la manière dont sont formulées les conclusions du recourant. Le fait que ces dernières ne ressortent pas expressément de l’acte de recours n’est pas en soi un motif d’irrecevabilité, pourvu que le tribunal et la partie adverse puissent comprendre avec certitude les fins du recourant (ATA/243/2023 du 14 mars 2023 consid. 1.1).

2.3 En l’espèce, bien que la recourante ne prenne aucune conclusion ni ne motive son recours, on comprend de son acte qu’elle n’est pas d’accord avec la décision l’écartant du marché public convoité.

La question de la recevabilité de son recours sous cet angle peut toutefois souffrir de demeurer indécise vu ce qui suit.

3.             3.1 L’offre est écartée d’office lorsque le soumissionnaire a rendu une offre tardive, incomplète ou non conforme aux exigences ou au cahier des charges ou ne répond pas ou plus aux conditions pour être admis à soumissionner (art. 42 al. 1 let. a et b RMP). Les offres écartées ne sont pas évaluées. L’autorité adjudicatrice rend alors une décision d’exclusion motivée (art. 42 al. 3 RMP).

3.2 Selon l’art. 32 al. 1 let. a RMP, ne sont prises en considération que les offres accompagnées, pour le soumissionnaire et ses sous-traitants, des attestations justifiant que la couverture du personnel en matière d'assurances sociales est assurée conformément à la législation en vigueur au siège du soumissionnaire et que ce dernier est à jour avec le paiement de ses cotisations.

3.3 Le droit des marchés publics est formaliste, ce que la chambre administrative a rappelé à plusieurs reprises (ATA/243/2020 du 3 mars 2020 consid. 4d ; ATA/970/2019 du 4 juin 2019 et les références citées), notamment lorsqu'elle a confirmé des décisions d'exclusion d'offres fondées sur la non-production des attestations requises dans l'appel d'offres au titre de condition de participation à la procédure de soumission (ATA/188/2021 du 23 février 2021 consid. 5 ; ATA/1208/2020 du 1er décembre 2020 consid. 5). L’autorité adjudicatrice doit procéder à l’examen de la recevabilité des offres et à leur évaluation dans le respect de ce formalisme, qui permet de protéger notamment le principe d’intangibilité des offres remises et le respect du principe d’égalité de traitement entre soumissionnaires garanti par l’art. 16 al. 2 RMP (ATA/1300/2018 précité consid. 3b ; ATA/1446/2017 du 31 octobre 2017 et les références citées). Le respect de ce formalisme est nécessaire pour concrétiser l'obligation d'assurer l'égalité de traitement entre soumissionnaires dans la phase d'examen de la recevabilité des offres et de leur évaluation. La conformité au droit de cette approche formaliste a été confirmée par le Tribunal fédéral (ATA/102/2010 du 16 février 2010, confirmé par l'arrêt du Tribunal fédéral 2C_197/2010 du 30 avril 2010 consid. 6.4).

Toutefois, l’interdiction du formalisme excessif, tirée de l’art. 29 Cst. interdit d’exclure une offre présentant une informalité de peu de gravité ou affectée d’un vice qui ne compromet pas sérieusement l'objectif visé par la prescription formelle violée (arrêt du Tribunal fédéral 2C_197/2010 du 30 avril 2010 consid. 6.1). Ainsi, des erreurs évidentes de calcul et d'écriture peuvent être rectifiées (art. 39 al. 2 RMP) et des explications peuvent être demandées aux soumissionnaires (art. 40 et 41 RMP). Le principe d'intangibilité des offres remises et le respect du principe d'égalité de traitement entre soumissionnaires impliquent de ne procéder à ce type de questionnement que de manière restrictive. À cet égard, l’autorité adjudicatrice dispose d’un certain pouvoir d’appréciation quant au degré de sévérité dont elle désire faire preuve dans le traitement des offres (ATA/384/2018 du 24 avril 2018 ; ATA/490/2017 du 2 mai 2017 et les références citées). L'interdiction du formalisme excessif ne l'oblige cependant pas à interpeller un soumissionnaire en présence d'une offre défaillante (arrêt du Tribunal fédéral 2C_197/2010 précité consid. 6.5).

3.4 Ces principes valent notamment pour la phase d’examen de la recevabilité des soumissions, lors de laquelle l’autorité adjudicatrice examine si les offres présentées remplissent les conditions formelles pour participer à la procédure d’évaluation et il est exclu d'autoriser un soumissionnaire à modifier la présentation de son offre, à y apporter des compléments ou à transmettre de nouveaux documents (ATA/1446/2017 précité ; ATA/490/2017 précité et les références citées).

4.             En l’espèce, la recourante ne remet pas en cause le fait que, conformément au RMP, elle devait produire avec son offre, ce qui figurait expressément notamment au chiffre 3.6 du dossier d’appel d’offres, une attestation d’assurance-accident (SUVA ou équivalent) et la preuve de paiement de la cotisation de l’assurance-accident pour les indépendants, y compris pour les sous-traitants, sous peine d’exclusion du marché public en question.

Elle reconnait ne pas avoir fourni à l’appui de l’offre déposée le 13 septembre 2023 les attestations LAA de deux des cinq sous-traitants appelés à intervenir dans le marché public en cause. Elle semble considérer que leur production devant la chambre de céans réparerait ce vice initial de son offre.

Il n’en est rien. Son attention a expressément été attirée sur l’obligation de produire ces attestations et sur les conséquences de leur absence, à savoir une exclusion. Le principe de l’intangibilité des offres commande, notamment en vue d’assurer l’égalité de traitement entre soumissionnaires, de confirmer la décision attaquée. Ce principe implique que les soumissionnaires ne sont pas autorisés à compléter leur offre après l’échéance du délai de leur dépôt, en l’espèce le 15 septembre 2023.

Mal fondé, le recours sera rejeté.

5.             Vu l'issue du litige, un émolument de CHF 500.- sera mis à la charge de la recourante (art. 87 al. 1 LPA) et aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

rejette, en tant qu’il est recevable, le recours interjeté le 12 octobre 2023 par A______ contre la décision de l’office cantonal des bâtiments du 4 octobre 2023 ;

met un émolument de CHF 500.- à la charge de A______ ;

 

dit qu'il n'est pas alloué d'indemnité de procédure ;

dit que conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral ;

- par la voie du recours en matière de droit public :

si la valeur estimée du mandat à attribuer n'est pas inférieure aux seuils déterminants de la loi fédérale du 16 décembre 1994 sur les marchés publics ou de l'accord du 21 juin 1999 entre la Confédération suisse et la Communauté européenne sur certains aspects relatifs aux marchés publics ;

s'il soulève une question juridique de principe ;

- par la voie du recours constitutionnel subsidiaire, aux conditions posées par les art. 113 ss LTF ;

le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à A______ ainsi qu'à l'office cantonal des bâtiments.

Siégeant : Francine PAYOT ZEN-RUFFINEN, présidente, Florence KRAUSKOPF, Valérie LAUBER, Claudio MASCOTTO, Françoise SAILLEN AGAD, juges.

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

F. SCHEFFRE

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. PAYOT ZEN-RUFFINEN

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :