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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/185/2023

ATA/1208/2023 du 07.11.2023 ( PROF ) , REJETE

Recours TF déposé le 06.12.2023, rendu le 11.01.2024, IRRECEVABLE, 2C_702/2023
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/185/2023-PROF ATA/1208/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 7 novembre 2023

1ère section

 

dans la cause

 

A______
et
B______
et
C______ recourants

contre

COMMISSION DU BARREAU
et
D______ intimés



EN FAIT

A. a.a. Par demande du 4 mars 2022, complétée le 22 mars 2022, D______, avocat, a sollicité de la commission du barreau (ci-après : la commission) la levée de son secret professionnel le liant à A______ ainsi qu’aux sociétés anonymes de droit suisse dont ce dernier était l’administrateur unique, à savoir E______ (ci-après : E______), radiée du registre du commerce (ci-après : RC) le 2 juin 2020 à la suite de sa faillite, B______ (ci-après : B______) et C______, dont la raison sociale était précédemment F______ SA (ci-après : F______).

Il avait représenté A______ et ses sociétés durant près de dix ans pour une vingtaine d’affaires. En 2016, à la suite de la faillite de E______, ses notes d’honoraires étaient restées impayées. Malgré un retour à meilleure fortune en 2021, A______ ne s’était pas acquitté de ses honoraires.

a.b. À l’appui de sa demande, il a produit :

- une procuration signée le 18 décembre 2020 par A______ lui donnant mandat de le représenter et de l’assister dans la procédure « 1______ » et une autre signée le 19 juin 2014 par A______ en qualité de représentant de F______ lui donnant mandat de la représenter et de l’assister dans la procédure « 2______ (PL) » ;

- un courrier du 1er mars 2022 adressé à A______ requérant le paiement de sa note d’honoraires du 30 avril 2015, d’un montant de CHF 27'318.45, pour son activité du 1er janvier au 31 décembre 2014, ainsi que la note d’honoraires du 30 avril 2015 y relative indiquant le paiement de provisions ;

- un courrier du 1er mars 2022 adressé à A______ requérant le paiement de sa note d’honoraires du 26 octobre 2015, d’un montant de CHF 23'495.‑, pour son activité du 1er juillet au 26 octobre 2015 dans les dossiers F______, E______ et B______, ainsi que la note d’honoraires du 26 octobre 2015 y relative indiquant le paiement de provisions ;

- un courrier du 1er mars 2022 adressé à A______ requérant le paiement de ses honoraires, d’un montant de CHF 72'850.-, pour son activité du 27 octobre 2015 au 1er mars 2022 dans le dossier « 3______ » ;

- un courriel du 2 mars 2022 sollicitant de A______ la levée de son secret professionnel pour le recouvrement de ses honoraires, d’un montant de CHF 156'050.45, à savoir le solde de la facture du 30 avril 2015 par CHF 27'318.45 et celui de la facture du 26 octobre 2015 par CHF 23'495.-, la facture pour la période du 27 octobre 2015 jusqu’à ce jour, soit CHF 72'850.-, ainsi que la facture de domiciliation en son étude de B______ entre décembre 2016 et février 2022, par CHF 32'387.-. Bien qu’il avait accepté de réduire la facture d’honoraires de CHF 72'850.- à un forfait de CHF 50'000.- pour autant que A______ lui verse ce montant immédiatement après l’accord intervenu en décembre 2021, il faisait désormais valoir l’entier de ses honoraires au taux horaire, étant donné que son mandant n’avait pas respecté ses engagements. En outre, puisque ce dernier avait reconnu, dans ses courriels des 8 et 27 novembre 2021, lui devoir un montant de CHF 87'500.-, il s’agissait d’une reconnaissance de dette.

b.a. Le 19 avril 2022, A______ s’est opposé à la demande de levée du secret professionnel d’D______.

E______ et B______ n’avaient jamais fait appel à ses services et l’accord intervenu fin novembre 2021 concernant F______ devait rester confidentiel. Le montant des honoraires réclamés n’était pas non plus justifié, puisqu’il s’était acquitté en 2014 de CHF 105'846.- et en 2015 de CHF 84'605.-, accordant également à l’avocat un prêt de CHF 32'000.- en juillet 2014, non remboursé depuis lors. Il en résultait qu’D______ lui devait CHF 20'306.- au titre d’avances sur honoraires.

b.b. A______ a notamment produit un courrier adressé le 14 mars 2022 à D______ aux termes duquel il contestait lui devoir les honoraires réclamés.

c. Le 28 avril 2022, D______ a persisté dans sa demande.

Les éléments invoqués par A______ étaient exorbitants à la procédure de levée du secret professionnel. Ladite procédure était dirigée non seulement contre son client, mais aussi contre les sociétés dont il était l’administrateur, dès lors que le recouvrement des créances à l’encontre de l’une de celles-ci le contraindrait à exposer des éléments de fait se rapportant aux autres. Il n’avait pas agi plus tôt pour recouvrer ses créances car A______ lui avait demandé, dès 2016, de renoncer à toute démarche dans ce sens jusqu’à son retour à meilleure fortune, ce qu’il avait accepté en raison de leurs liens d’amitié et du fait qu’il ne servait à rien d’agir contre un débiteur insolvable. Dès lors, entre 2015 et 2021, il n’avait adressé aucun rappel à son client ni n’avait engagé des poursuites à son encontre.

d. Par décision du 6 octobre 2022, le bureau de la commission a délié l’avocat de son secret professionnel à l’égard de A______, de E______, de B______ et de F______ en vue du recouvrement de ses honoraires.

Il ressortait du dossier que l’avocat avait déployé une activité durant plusieurs années dans divers dossiers pour le compte de A______ et de ses sociétés, la question de l’absence de mandat n’ayant pas à être tranchée dans la procédure, qui portait seulement sur la levée du secret professionnel de l’avocat en vue du recouvrement de ses honoraires. En outre, A______ ne faisait valoir aucun élément qui pouvait laisser craindre que dans le cadre de ces démarches l’avocat pouvait dévoiler des informations préjudiciables aux intérêts de F______. De plus, la question de la quotité des honoraires réclamés et leur exigibilité relevait du fond du litige et n’était pas pertinente dans le cadre de la présente procédure. L’intérêt privé de l’avocat au recouvrement de ses honoraires était ainsi prépondérant.

B. a. Par courrier du 4 novembre 2022, complété le 4 décembre 2022, A______ a sollicité que la cause soit soumise à la plénière de la commission.

E______ ayant été radiée du RC, l’avocat ne pouvait être délié de son secret professionnel pour une entreprise inexistante. En outre, B______ n’avait jamais confié de mandat à l’avocat. À cela s’ajoutait que la procuration signée le 18 décembre 2020 concernait un dossier dans lequel l’avocat n’était jamais intervenu. Il se référait pour le surplus à ses précédents arguments.

b. Par décision du 12 décembre 2022, la plénière de la commission a confirmé la décision de son bureau du 6 octobre 2022, dont elle faisait siennes les considérations, et délié l’avocat de son secret professionnel à l’égard de A______, de B______ et de F______ en vue du recouvrement de ses honoraires.

La question de l’existence d’un mandat n’avait pas à être tranchée dans la présente procédure, qui portait uniquement sur les éventuels motifs s’opposant à la levée du secret professionnel de l’avocat en vue du recouvrement de ses honoraires. A______ n’invoquait aucune raison valable susceptible de s’opposer à ce que des faits le concernant ou concernant ses sociétés soient révélés dans le cadre du recouvrement des honoraires de l’avocat.

C. a.a. Par courrier posté le 19 janvier 2023, A______ et les sociétés B______ et F______ ont recouru auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre cette décision, concluant préalablement à ce que la « suspension des effets juridiques de la décision du 12 décembre 2022 » soit ordonnée, principalement à son annulation et à ce que la levée du secret professionnel de l’avocat soit accordée au seul titre d’une procédure d’arbitrage.

L’avocat n’apportait aucune preuve d’une procuration en sa faveur signée par B______ ni d’un mandat qu’il lui aurait confié ou que B______ et F______ lui auraient donné. Il était également douteux que les honoraires réclamés par l’avocat concernant E______, qui n’avait plus d’existence juridique, soient dus, puisqu’il ne les avait pas fait valoir dans le cadre de la faillite de la société. L’avocat n’avait pas non plus apporté la preuve qu’il aurait rencontré des difficultés à recouvrer ses honoraires pour les années 2014 et 2015. Au contraire, il perdait de vue qu’un montant total de CHF 222'451.- lui avait été versé pour ces années, qui comprenait également un prêt qu’il lui avait consenti à hauteur de CHF 32'000.-. La levée du secret professionnel ne pouvait par conséquent être demandée que dans la procédure d’arbitrage, qui seule permettrait de clarifier les prétentions d’D______.

a.b. Ils ont notamment produit :

- un extrait d’un courriel d’D______ du 8 novembre 2021 qui rappelait à A______ que le solde de ses notes d’honoraires de 2014 et de 2015 était demeuré impayé et que l’avocat n’en avait pas réclamé le paiement en raison des difficultés financières de son mandant. Il lui proposait en outre de calculer un forfait d’honoraires pour les six dernières années, soit d’octobre 2015 à ce jour, durant lesquelles il avait continué à l’assister, pour un montant de CHF 50'000.- ;

- un extrait d’un courriel d’D______ du 7 février 2022 indiquant à A______ que, pour en finir avec cette affaire, il était disposé à ce qu’il lui verse d’ici le lendemain le montant de CHF 87'500.-. À défaut, il lui réclamerait la totalité de ses honoraires ainsi que des frais de domiciliation et de secrétariat de F______.

b.a. Le 3 février 2023, D______ a conclu préalablement à la fourniture de sûretés en garantie du paiement des dépens et principalement à la confirmation de la décision entreprise, « avec suite de frais et dépens », et à la condamnation de A______ à une amende disciplinaire.

Les faits exposés par les recourants donnaient une vision tronquée de la situation contractuelle et étaient exorbitants au litige, qui n’avait pas trait à la créance d’honoraires. La levée du secret professionnel avait été requise pour A______ et ses sociétés, dès lors qu’elles étaient toutes débitrices d’honoraires, comme l’attestaient les factures produites, étant précisé que B______ avait été domiciliée auprès de son étude.

En application du code de procédure civile du 19 décembre 2008 (CPC - RS 272), il requérait la fourniture de sûretés en garantie du paiement des honoraires, étant donné que A______ n’était pas domicilié en Suisse. De plus, vu le caractère dilatoire de la présente procédure, il requérait la condamnation de son ancien client à une amende disciplinaire selon l’art. 128 al. 3 CPC.

b.b. Il a produit :

- un courriel adressé le 8 novembre 2021 à A______ concernant la reprise de F______, pour laquelle il devait formuler une offre. Il lui rappelait que le montant de cette transaction devait inclure le paiement de ses honoraires, dès lors que les notes des 26 octobre 2014 et 30 avril 2015 demeuraient impayées. À compter d’octobre 2015, conscient des difficultés de son mandant à payer ses honoraires, il avait renoncé à lui faire adresser ses factures ou à en faire tenir le détail. Pour ces six dernières années, il lui proposait un montant forfaitaire de CHF 50'000.-, auquel s’ajoutaient les factures impayées précitées ;

- un courriel de A______ du 26 novembre 2021 aux termes duquel il lui indiquait qu’à réception du paiement concernant F______, il effectuerait un versement sur le compte de l’étude pour solder les honoraires.

c. Le 15 février 2023, la commission s’est référée à la décision entreprise, indiquant ne pas avoir d’observations complémentaires à formuler.

d. Le 16 mars 2023, A______ a persisté dans son recours, reprenant ses précédentes explications.

e. Sur quoi, la cause a été gardée à juger, ce dont les parties ont été informées.

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ ‑ E 2 05 ; art. 49 de la loi sur la profession d’avocat du 26 avril 2002 - LPAv - E 6 10 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 ‑ LPA ‑ E 5 10).

2) L’objet du litige porte sur le bien-fondé de la décision de la commission de lever le secret professionnel de l’avocat concernant A______ et les sociétés B______ et F______ en vue du recouvrement de ses créances d’honoraires, étant rappelé que E______, radiée du RC, n’est plus concernée par la présente procédure, de sorte que les griefs des recourants la concernant sont sans objet. Par ailleurs, contrairement aux conclusions des recourants, il n’y a pas lieu d’ordonner un « arbitrage » au sujet desdits honoraires, dès lors que cette question est exorbitante au présent litige, qui porte sur la seule levée du secret professionnel.

3) Le recourant conteste la levée du secret professionnel de l’avocat.

3.1 Selon l’art. 13 al. 1 de la loi fédérale sur la libre circulation des avocats du 23 juin 2000 (LLCA - RS 935.61), l’avocat est soumis au secret professionnel pour toutes les affaires qui lui sont confiées par ses clients dans l’exercice de sa profession, cette obligation n’étant pas limitée dans le temps et étant applicable à l’égard des tiers.

En droit genevois, l’art. 12 LPAv prévoit que l’avocat est soumis au secret professionnel pour toutes les affaires qui lui sont confiées par ses clients dans l’exercice de sa profession ou dont il a connaissance dans l’exercice de celle-ci, cette obligation n’étant pas limitée dans le temps et étant applicable à l’égard des tiers (al. 1). Sans en avoir l’obligation, l’avocat peut toutefois révéler un secret si l’intéressé y consent (al. 2). Il en est de même si l’avocat obtient l’autorisation écrite de la commission (al. 3). L’autorisation n’est délivrée que si la révélation est indispensable à la protection d’intérêts supérieurs publics ou privés (al. 4).

3.2 Pour agir en recouvrement d’honoraires impayés, l’avocat doit obtenir la levée de son secret professionnel (ATF 142 II 307 consid. 4.3.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_1045/2021 du 29 avril 2022 consid. 4.1). L’autorité de surveillance doit procéder à une pesée de l’ensemble des intérêts en présence pour déterminer si elle doit accorder la levée du secret. Au regard de l’importance du secret professionnel du double point de vue de l’institution et des droits individuels, la levée du secret ne peut être accordée qu’en présence d’un intérêt public ou privé nettement prépondérant (ATF 142 II 307 consid. 4.3.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_101/2019 du 18 février 2019 consid. 4.3).

Lors de la pesée des intérêts, il faut prendre en considération le fait qu’un avocat a ordinairement un intérêt digne de protection à la levée du secret en vue du recouvrement de ses honoraires. Cet intérêt s’oppose en principe à l’intérêt institutionnel au maintien de la confidentialité et à l’intérêt individuel du client à tenir secrets le mandat et les informations qui s’y rattachent (ATF 142 II 307 consid. 4.3.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_1045/2021 précité consid. 4.3). La justification de l’intérêt au secret ne doit pas être soumise à des exigences excessivement élevées, faute de quoi la protection du secret professionnel consacrée à l’art. 321 ch. 1 du Code pénal suisse du 21 décembre 1937 (CP - RS 311.0) serait compromise (ATF 142 II 307 consid. 4.3.3).

Dans la pesée des intérêts, il faut également prendre en compte le fait que l’avocat peut en principe se faire verser une provision par le client. Il incombe ainsi à l’avocat qui sollicite la levée du secret de démontrer pourquoi il ne lui était pas possible de faire couvrir les coûts par le versement d’une provision (ATF 142 II 307 consid. 4.3.3). La procédure de levée du secret professionnel ne préjuge en rien des procédures civiles ultérieures relatives au recouvrement des honoraires. Les questions juridiques de fond n’ont pas à être examinées dans une procédure de levée du secret professionnel de l’avocat, le client étant libre de soulever des objections dans le litige de droit civil au sujet des honoraires (arrêt du Tribunal fédéral 2C_1045/2021 précité consid. 4.2 ; ATA/151/2023 du 14 février 2023 consid. 4b).

3.3 En l’espèce, les recourants s’opposent à la levée du secret professionnel au motif qu’il n’existerait pas de mandat avec l’avocat ni de procuration en sa faveur. Il ressort toutefois du dossier que l’intimé a produit deux procurations signées par A______, l’une pour lui-même, l’autre en qualité de représentant de F______, lui donnant mandat de les assister et de les représenter dans le cadre de deux procédures. Par ailleurs, plusieurs notes d’honoraires concernant A______ et ses sociétés ont été produites, qui démontrent une activité menée par l’avocat en faveur des recourants, et des explications leur ont été fournies à ce sujet dans le courriel adressé par l’avocat intimé à A______ le 2 mars 2022, dont des activités de domiciliation de B______. Le recourant a du reste admis l’existence d’une activité en lien avec F______, précisant que l’accord qui était intervenu devait rester confidentiel. L’avocat intimé a dès lors apporté suffisamment d’éléments rendant vraisemblable l’existence d’un mandat, question de fond qui devra être traitée ultérieurement dans le cadre du recouvrement des honoraires. Par ailleurs, le fait que l’avocat ait ou non déployé une activité dans l’un ou l’autre des dossiers mentionnés n’apparaît pas non plus déterminant dans la procédure de levée du secret professionnel.

Les recourants n’établissent pas l’existence d’éléments rendant vraisemblable qu’ils disposeraient d’un intérêt concret au maintien du secret. Ils ne font en particulier valoir aucun élément qui pourrait laisser craindre que l’avocat pourrait, dans le cadre du recouvrement de ses honoraires, dévoiler des informations qui seraient de nature à porter préjudice à leurs intérêts, étant rappelé que la levée du secret ordonnée par la commission est circonscrite aux éléments strictement nécessaires à l’établissement des prétentions en paiement des honoraires de l’avocat concerné.

Par ailleurs, la jurisprudence reconnaît expressément l’intérêt digne de protection de l’avocat à la levée du secret en vue du recouvrement de ses honoraires, intérêt qui s’oppose en principe à l’intérêt institutionnel au maintien de la confidentialité et à l’intérêt individuel du client à tenir secrets le mandat et les informations qui s’y rattachent.

Il ressort en outre du dossier que l’avocat intimé a réclamé des provisions aux recourants, lesquels les ont acquittées avant de cesser leurs versements, comme l’indiquent les notes d’honoraires pour 2014 et 2015. L’avocat intimé a également expliqué les raisons pour lesquelles il n’avait pas effectué plus tôt des démarches en vue de recouvrer ses honoraires, préférant attendre que A______ revienne à meilleure fortune. Tel a été le cas en fin d’année 2021, comme l’indiquent les courriels de l’avocat du 8 novembre 2021 ainsi que celui de A______ du 26 novembre 2021, dans lequel il indique qu’à réception du paiement concernant F______, il effectuerait un versement sur le compte de l’étude pour solder les honoraires. Constatant qu’aucun versement ne lui était parvenu, l’avocat a, en février 2022, entamé des démarches en vue de recouvrer ses créances, demandant en vain à A______ qu’il s’acquitte de ses honoraires puis requérant de sa part, également en vain, la levée du secret professionnel.

Enfin, les objections que les recourants font valoir contre la quotité des honoraires réclamés se rapportent au bien-fondé de la créance de l’avocat. Or, comme évoqué ci-dessus, la chambre de céans n’est pas habilitée à s’exprimer à ce sujet, sa compétence étant limitée à la question de savoir si la commission était fondée à lever le secret professionnel de l’avocat intimé en vue du recouvrement de la créance qu’il allègue détenir à l’encontre de ses anciens clients.

La commission a ainsi dûment apprécié les intérêts des parties en cause à la levée du secret professionnel. Sa décision étant conforme au droit, le recours sera par conséquent rejeté, ce qui rend au surplus sans objet la conclusion des recourants visant à ce que la « suspension des effets juridiques de la décision du 12 décembre 2022 » soit ordonnée.

4) L’avocat intimé, se fondant sur l’art. 128 al. 3 CPC, conclut à la condamnation du recourant à une amende disciplinaire.

4.1 Selon l'art. 88 LPA, étant rappelé que le CPC ne trouve pas application dans le cas d’espèce, la juridiction administrative peut prononcer une amende à l’égard de celui dont le recours, l’action, la demande en interprétation ou en révision est jugée téméraire ou constitutive d’un emploi abusif des procédures prévues par la loi (al. 1). L’amende n’excède pas CHF 5'000.- (al. 2).

4.2 En l’espèce, outre le fait qu’il n’existe pas de motifs justifiant le prononcé d'une telle amende puisque les recourants ont exercé les moyens de droit prévus par la loi, les conclusions des parties portant sur l’art. 88 al. 1 LPA sont irrecevables, conformément à la jurisprudence constante de la chambre de céans (ATA/665/2023 du 20 juin 2023 consid. 10.2 et la référence citée).

5) Vu l’issue du litige, un émolument de CHF 500.- sera mis à la charge des recourants, qui succombent (art. 87 al. 1 LPA), et aucune indemnité ne leur sera allouée (art. 87 al. 2 LPA). Une indemnité de procédure de CHF 500.- sera allouée à l’avocat intimé, qui y a conclu, à la charge des recourants (art. 87 al. 2 LPA), sans qu’il soit requis de leur part la fourniture de sûretés, les sociétés recourantes ayant leur siège en Suisse et rien n’indiquant que A______ ne serait pas domicilié en Suisse.

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 19 janvier 2023 par A______, B______ et C______ contre la décision de la commission du barreau du 12 décembre 2022 ;

au fond :

le rejette ;

met un émolument de CHF 500.- à la charge solidaire de A______, B______ et C______ ;

alloue une indemnité de procédure de CHF 500.- à D______, à la charge solidaire de A______, B______ et C______ ;

dit qu’il n’est pas alloué d’autre indemnité ;

dit que conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à A______, B______ et C______, à D______ ainsi qu’à la commission du Barreau.

Siégeant : Francine PAYOT ZEN-RUFFINEN, présidente, Jean-Marc VERNIORY, Fabienne MICHON RIEBEN, juges.

 

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

S. HÜSLER ENZ

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. PAYOT ZEN-RUFFINEN

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :