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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3701/2022

ATA/978/2023 du 11.09.2023 ( EXPLOI )

RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3701/2022-EXPLOI ATA/978/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Décision du 11 septembre 2023

 

dans la cause

 

A______ recourante
représentée par Me Sarah HALPÉRIN GOLDSTEIN
et Me Lionel HALPÉRIN, avocats

contre

OFFICE CANTONAL DE L'EMPLOI intimé
représenté par Me Stéphanie FULD, avocat



Vu, EN FAIT, le recours interjeté le 9 novembre 2022 devant la chambre administrative de la Cour de justice par A______ contre la décision de l’office cantonal de l'emploi (ci‑après : OCE) du 4 novembre 2022 l’assujettissant à la loi fédérale sur le service de l’emploi et la location de services du 6 octobre 1989 (LSE - RS 823.11) dans le cadre de son activité de mise à disposition de livreurs sur la plateforme dite « B______ » et lui interdisant toute activité jusqu’à l’obtention de l’autorisation de pratiquer la location de services ; que A______ a conclu, principalement, à l’annulation de cette décision et au constat qu’elle n’était pas assujettie à la LSE ;

que A______, créée le 20 août 2020, a pour but statutaire, notamment, des prestations de conseil et services logistiques et la location de services ; qu’elle précise que son activité principale consiste en la livraison de repas ; qu’elle expose avoir conclu un contrat de licence avec C______. afin d’utiliser l’application « B______ » pour la mise en relation avec les consommateurs et restaurateurs, la gestion des commandes et livraisons ainsi que les transactions financières ; qu’elle reverse ainsi une commission à C______. ; qu’elle engage seule les employés, certains étant nommés « team leaders » ou « operations manager », discute de leur souhaits (emploi à plein temps, temps partiel, emploi principal ou secondaire), établit leur planning, vérifie la qualité du travail, fait le suivi des absences, des annulations et refus de commandes ; qu’en cas de plainte relative à un livreur, A______ le convoque, peut lui proposer une formation ou encore prononcer un avertissement ; qu’elle gère les promotions et fins de rapports de travail ; que ni C______. ni les restaurateurs n’ont de pouvoir d’instruction sur ses employés ;

qu’elle ne met pas des employés à disposition de C______. ; que ses employés dont entièrement soumis à ses instructions et qu’il n’y a aucun contact entre ses employés et la société précitée ; que, d’ailleurs, l’OCE divergeait du Secrétariat d’État à l’économie (ci-après : SECO) sur la question de savoir si la recourante était soumise à la LSE ;

que l’OCE a conclu au rejet du recours, maintenant et développant sa motivation ;

que, dans le cadre de l’instruction de la cause, plusieurs témoins ont été entendus, dont D______, general manager auprès de B______, entendu le 17 avril 2023 ; que celui-ci a déclaré qu’il travaillait pour E______ depuis novembre 2016, dans le marketing d'abord relatif au transport de personnes et depuis juillet 2018 dans celui relatif à la livraison de repas ; qu’il avait participé à la négociation commerciale avec A______, soit au contrat qui la liait à B______ ; qu’ils proposaient des contrats de licence standards aux différents gestionnaires de flotte ; que les points sur lesquels les discussions avaient porté avec A______ concernaient le délai de résiliation et des questions d'assurances ; que l'utilisation de l'application de la géolocalisation des coursiers faisait partie des instruments de base mis à disposition par la licence octroyée à A______ ; que B______ avait plusieurs prestataires de services ; qu’ils se basaient sur les résultats des trois ou quatre dernières semaines pour estimer le nombre de commandes ; que A______ décidait ensuite du nombre de coursiers qu'elle souhaitait avoir à disposition pendant une période donnée ; que l'attribution au coursier se faisait à celui qui était le mieux placé (situation géographique, temps de préparation du restaurant) ; qu’il n'y avait pas de zone attribuée à un gestionnaire de flotte en particulier ; que s'il n'y avait pas assez de livreurs, la plateforme s'adaptait « en live » en regroupant les commandes et restreignant le périmètre de livraison ; que B______ n'intervenait pas directement auprès de ses prestataires ; que lorsqu’ils voyaient que le niveau des commandes baissait sur leur plateforme, ils entreprenaient des actions de marketing, mais ne demandaient pas à leur partenaire d'en faire de même ; que lorsqu’ils s’étaient trompés dans leurs prévisions, ils en informaient leur partenaire afin qu'il puisse de son côté prendre les dispositions qu'il estimait nécessaires ;

que le témoin a encore déclaré qu’ils considéraient leur plateforme comme une place de marché ; que le niveau d'efficience était fonction du nombre de commandes livrées en pourcentage du nombre de commandes effectuées et du temps de livraison ; qu’idéalement lorsque tous les intervenants étaient satisfaits, ils parlaient d'un cercle vertueux ; que les intérêts de chacun étaient alors alignés, ce par quoi il entendait que tout le monde y trouvait son compte, à savoir : les restaurants, les sociétés de livraisons partenaires, le client et les exploitants de la plateforme ; qu’il ne connaissait pas la situation des coursiers et ignorait ainsi s'ils participaient aux bénéfices ;

que si un coursier était engagé par A______, il installait l'application de la plateforme avec l'aide de A______ ; que seule lui était demandé une pièces d'identité et une photo de profil ; que cette démarche avait été demandée à B______ par A______ afin qu'elle puisse identifier en temps réel ses coursiers ; que ceux-ci étaient identifiés par les restaurateurs et les clients par les numéro de commande ; que pour A______, il y avait le prénom et l'initiale du nom de famille qui s'affichait ; que le coursier n'avait pas à fournir d'autres informations, qu’à sa connaissance, celui-ci n'avait pas à accepter de conditions générales ni à adhérer à la charte de la communauté F______ ;

que l’exigence de disposer d’un permis de travail était posée par A______ à ses employés ; qu’il ne s'agissait pas des conditions posées par la plateforme B______ ; qu’en cas de plainte d'un restaurateur ou d’un client sur la plateforme, elle était transmise à A______ ; qu’en cas de plaintes répétées ou en nombre élevé, cela pouvait se répercuter sur les relations commerciales de B______ avec A______ ; qu’ils n'intervenaient pas auprès des livreurs, cette question devant être traitée par A______, qui décidait de prendre une action ou non ;

que jusqu'en juillet 2022, ils avaient travaillé avec un contrat-type, qui avait été modifié pour mieux coller à la réalité de leurs opérations, qui n'avaient cependant alors pas changé ; que leur contrat actuel reflétait mieux la manière dont ils collaboraient, alors qu’auparavant, il était plus stéréotypé ; qu’ils avaient également été pris par l'urgence en août 2020, dès lors que le Tribunal fédéral n'avait pas prononcé l'effet suspensif au recours pendant devant lui concernant la plateforme B______ ;

que contrairement à Zurich, ils n'avaient pas de coursiers indépendants à Genève ; qu’ils ne refusaient pas les coursiers présentés par les gestionnaires de flotte lorsque ceux-ci avaient donné lieu à des plaintes par le passé ; que, derechef, c'était A______ qui portait la responsabilité des personnes qu'elle employait ; qu’ils n'intervenaient ni dans l'octroi de primes aux livreurs ni dans leur licenciement, n'organisaient aucune formation à l'attention des livreurs et n'avaient pas de contacts directs avec eux ; qu’ils ne fournissaient pas de matériel, notamment pas de sacs de livraison ni ne surveillaient les livreurs ; que ceux-ci choisissaient leur GPS ; qu’ils n'intervenaient pas non plus en cas de refus de commandes ; qu’ils n'avaient pas connaissance des plannings individuels des livreurs ni ne faisaient de suivi des accidents ; qu’ils pouvaient voir qu'une commande n'avait pas été livrée, mais en ignoraient les causes ; que l'incident de la non-livraison était signalé à A______, qui souvent le savait avant eux ; que si la livraison n'était pas effectuée, A______ n'était pas payée ; qu’ils ne connaissaient pas non plus a posteriori les horaires de travail des différents livreurs ; qu’F______ n'intervenait pas sur l'application développée par A______ ;

que lors des négociations relatives au contrat avec A______ en août 2020, le témoin avait contribué sur le plan du marketing ; que les délais de résiliation avaient un impact important sur le plan commercial ; que la décision était finalement prise par C______ à Amsterdam ; que les frais de livraison définis par F______ étaient payés par le restaurateur à A______ ; que la productivité d'un livreur en particulier ne présentait pas beaucoup d'intérêt pour F______ ; qu’ils s’intéressaient à la performance au niveau global de la société ; que le nombre de livraisons par heure était calculé par la société pour définir son seuil de rentabilité ;

que la plateforme fournissait l'adresse du restaurateur et du client ; que le coursier était libre de choisir son itinéraire et pouvait même se déconnecter pendant le trajet ; que l'heure de la prise en charge de la commande était également indiquée par la plateforme, qu’elle dépendait de l'heure de la commande et de l'indication du temps de préparation fourni par le restaurateur ; que l’estimation du temps de trajet était faite par l'application en fonction du GPS choisi par le coursier ; que cette estimation globale du temps était transmise au client ; que le livreur choisissait sur la plateforme F______ le GPS qu'il souhaitait utiliser, y compris celui de B______, ce qui permettait l'estimation du temps de trajet ; que le témoin n’était pas sûr de ce qui se passait si un livreur se déconnectait ; qu’il était probable qu'un problème était ensuite signalé ; qu’en revanche, celui-ci pouvait, tout en restant connecté, utiliser un autre GPS ;

que les parties ont ensuite produit différentes écritures, portant sur des réquisitions de preuves et commentant des pièces, notamment ; qu’en particulier, les parties s’opposent sur l’opportunité d’entendre en qualité de témoin G______, ancien administrateur de la société, contre qui la recourante avait déposé plainte en raison de vols de documents lui appartenant et du fait qu’il avait cherché à empêcher le versement des salaires afin de conduire la société à la faillite ;

que, par courrier du 21 juin 2023, l’OCE a informé la chambre administrative qu’il semblerait que les propos tenus par le témoin précité « entraient en contradiction manifeste avec certains documents confidentiels se trouvant en possession du département de l’économie et de l’emploi (DEE) » ; la conseillère d’État en charge du DEE avait ainsi, le 30 mai 2023, dénoncé le témoin, dont les déclarations pourraient être constitutives de faux témoignage ; que l’OCE demandait la production desdits documents confidentiels, qui pourraient être de nature à influencer l’appréciation à apporter sur ce témoignage ;

que, par courrier du 23 juin 2023, la recourante s’est dite stupéfaite par le comportement déloyal adopté par l’État ; que les documents dont la production était sollicitée avaient été volés par G______, qui avait essayé de la pousser à la faillite en empêchant le paiement des salaires ; que cet employé avait adressé des documents à la presse, en précisant qu’il les avait également remis aux autorités ; qu’à la suite de cette divulgation dans la presse le 14 octobre 2022, la recourante avait demandé à l’OCE la confirmation que ces documents volés seraient immédiatement restitués ou détruits, compte tenu de leur caractère illicite ;

qu’il ressort du courrier de l’OCE du 25 octobre 2022 qu’il « rassurait » A______ que sa décision « sera[it] prise indépendamment » de l’article de presse paru le 14 octobre 2022 ou « de documents non transmis officiellement par [A______] ; que le 27 octobre 2022, l’OCE a encore précisé que les documents transmis par un ex-employé l’avaient été au DEE et non à l’OCE ;

que la recourante a relevé que l’OCE tentait désormais, par le biais d’une dénonciation de sa cheffe de département, non réélue, au dernier jour de sa fonction, à obtenir des documents dont il avait assuré qu’il ne les utiliserait pas ; qu’ainsi, la demande de produire les documents confidentiels devait être rejetée ;

que lors de l’audience d’enquêtes, qui s’est tenue le 28 juin 2023 devant la chambre administrative, l’avocate de l’OCE a indiqué qu’elle n’était pas en possession de la dénonciation, qui à sa connaissance avait été rédigée par des avocats mandatés par l’ancienne conseillère d’État ; que l’avocat de la recourante s’est fermement opposé à l’apport de la dénonciation et des pièces y relatives ; que la démarche visant à obtenir la production de pièces, dont l’OCE avait affirmé ne pas se servir relevait de l’abus de droit ; que les deux représentants de l’OCE ont confirmé ne pas avoir connaissance des pièces en question, seules celles figurant au dossier ayant été utilisées ;

que dans un courrier du 7 juillet 2023, la recourante a réitéré son opposition à la production des pièces précitées ; que la séparation invoquée entre la cheffe du DEE et l’OCE était artificielle, étant précisé que des échanges entre les parties avaient eu lieu, notamment avec la directrice du service juridique et le directeur général du DEE, de sorte que, vu leur fonction, ils avaient communiqué avec la conseillère d’État, et qu’à l’évidence, le procès‑verbal d’audition de D______ avait été transmis à celle-ci ; que compte tenu du souhait de l’avocate de l’OCE, lors de l’audition de ce témoin, à ce que la chambre administrative l’exhorte à nouveau à dire la vérité, il était vraisemblable que celle-ci disposait alors des documents obtenus illicitement ; que, de toute manière, même s’il fallait admettre que la conseillère d’État avait choisi de ne pas transmettre ces documents à l’OCE, il n’en demeurait pas moins que le DEE était en possession de ceux-ci au moment où la décision avait été rendue, mais avait fait le choix de ne pas les verser à la procédure, en en connaissant le caractère problématique, dès lors qu’ils avaient été volés et violaient le secret professionnel de l’avocat ;

que la recourante a, en outre, exposé qu’en cas d’apport de la dénonciation, elle subirait un préjudice irréparable, même si par la suite la chambre administrative devait décider d’écarter ces pièces de la procédure, dès lors que le contenu de documents illicites et non exploitables serait porté à la connaissance de celle-ci ; qu’elle rappelait qu’elle avait déposé plainte pénale contre son ancien employé pour vol des documents litigieux ; qu’il appartenait au Ministère public d’établir si un faux témoignage avait été commis ; qu’ainsi, si la chambre administrative comptait ordonner l’apport de la dénonciation pénale et ses annexes, il convenait de suspendre la procédure jusqu’à droit jugé au pénal sur cette question ; que, par ailleurs, si l’apport litigieux était ordonné, l’OCE devait produire l’ensemble des échanges intervenus entre la conseillère d’État et tout employé de l’OCE entre le 1er octobre 2022 et le 28 juin 2023, de manière à pouvoir vérifier la bonne foi de cet office, respectivement du DEE ;

que, par courrier du 9 août 2023, l’OCE a relevé que le refus d’ordonner l’apport de la dénonciation et de ses pièces reviendrait à courir le risque d’un faux témoignage ; que si la chambre administrative ne donnait pas suite à l’apport requis, « son impartialité et son autorité » se verraient « décrédibilisées » ; que si des pièces devaient être couvertes par le secret professionnel de l’avocat, l’OCE faisait confiance à la chambre administrative de les écarter immédiatement ; que l’OCE s’opposait à l’apport de l’ensemble des échanges entre la cheffe du DEE et les employés de l’OCE, ceux-ci n’étant pas pertinents pour juger de la soumission à la LSE de la recourante ;

que, sur ce, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger sur la question de l’incident de l’apport de la dénonciation pénale ;

Considérant, EN DROIT, que, selon l’art. 20 al. 2 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA ‑ E 5 10), l’autorité, dans le cadre de l’établissement des faits, peut ordonner l’apport de documents ;

que se rend coupable de faux témoignage selon l'art. 307 al. 1 CP, celui qui en qualité de témoin aura fait en justice une déposition fausse sur les faits de la cause ; que le comportement punissable suppose que la déclaration du témoin soit fausse, c'est-à-dire objectivement non conforme à la vérité ; que la fausseté de la déclaration n'est pas déterminée selon la conviction subjective de l'auteur, mais selon l'état de fait objectif, auquel le témoignage doit correspondre ; qu’en outre, la déclaration incriminée doit concerner les faits de la cause, soit l'élucidation ou la constatation de l'état de fait qui constitue l'objet de la procédure (arrêt du Tribunal fédéral 6B_700/2008 du 2 décembre 2008 consid. 3.1) ;

que l'infraction réprime une mise en danger abstraite du bien juridiquement protégé ; qu’il n'est pas nécessaire pour que l'infraction soit consommée que le juge ait été concrètement influencé (Bernard CORBOZ, Les infractions en droit suisse, vol. II, 3e éd., Berne 2010, n. 4 ad art. 307) ; que sur le plan subjectif, l'auteur doit avoir agi intentionnellement, le dol éventuel étant suffisant (arrêts du Tribunal fédéral 6B_249/2017 du 17 janvier 2018 consid. 1.1 ; 1C_614/2015 du 5 février 2016 consid. 3.3 ; 6S.425/2004 du 28 janvier 2005 consid. 2.5) ;

que, valant pour l'ensemble de l'activité étatique, le principe de la bonne foi commande aux autorités comme aux particuliers de s'abstenir, dans les relations de droit public, de tout comportement contradictoire ou abusif (ATF 137 II 182 consid. 3.6.2 ; 136 I 254 consid. 5.2) ; qu’il découle de ce principe que le justiciable et les autorités judiciaires doivent se comporter réciproquement de manière loyale (ATF 131 II 627 consid. 6.1 ; 129 I 161 consid. 4 ; 129 II 361 consid. 7.1) ;

qu’en l’occurrence, au regard des allégations de la recourante, qui sont corroborées par les courriers de l’OCE des 25 et 27 octobre 2022, il est rendu vraisemblable qu’un de ses anciens employés, à savoir G______, a remis des documents jugés confidentiels de la société au DEE ;

que l’OCE a donné des garanties, dans les courriers précités, que ces pièces ne faisaient pas partie de son dossier et ne seraient pas utilisées pour la prise de décision concernant la recourante ; que les représentants de l’OCE ont confirmé lors de l’audience du 28 juin 2023 qu’ils n’avaient pas eu en leur possession d’autres pièces que celles figurant au dossier et accessibles à la recourante ;

que l’OCE n’a allégué aucun élément permettant de douter de la véracité des déclarations du témoin D______, se contentant de soutenir que l’ancienne cheffe du DEE avait dénoncé ce témoin auprès du Ministère public pour faux témoignage ;

qu’ainsi et en l’état du dossier, il apparaît vraisemblable que la dénonciation repose sur les documents remis au DEE par l’ancien employé de la recourante ;

que la question se pose donc de savoir si, en sollicitant l’apport de la dénonciation et de ses annexes, l’autorité administrative – peu importe qu’il s’agisse du DEE, de l’OCE ou encore de la cheffe de département, ceux-là et celle-ci agissant ès qualité pour le compte de l’État – pourrait se heurter à l’interdiction d’agir de manière déloyale dans les rapports avec les administrés ;

qu’au vu des garanties données par l’OCE de ne pas utiliser ces documents, la demande visant à ordonner l’apport de ceux-ci, constituerait un comportement contradictoire, contraire au principe de la bonne foi ;

qu’en outre, l’autorité intimée ne fournit aucun élément ni le moindre indice – hormis l’allégation de la dénonciation formée par l’ancienne cheffe du DEE – rendant vraisemblable ou laissant soupçonner qu’un faux témoignage aurait été commis ; qu’elle ne précise pas non plus sur quels points pertinents pour l’issue du litige, le témoin aurait donné des indications qu’il devait savoir fausses ;

que dans ces circonstances, l’apport de la dénonciation et des documents l’accompagnant ne saurait, en l’état, être ordonné ;

qu’en revanche, la chambre de céans interpellera le Ministère public afin de savoir s’il a été saisi de la dénonciation alléguée et, si tel est le cas, quelle suite il y a donnée ;

qu’en fonction des éléments ainsi obtenus, la chambre de céans se réserve la possibilité de procéder à d’autres actes d’instruction en lien avec l’allégation – grave – de faux témoignage ;

que la question des frais liés à la présente décision sera réglée dans l’arrêt au fond.

LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

rejette la requête d’apport de la dénonciation au Ministère public faite le 30 mai 2023 par H______ pour faux témoignage de D______;

réserve le sort des frais du présent incident avec l’arrêt à rendre au fond ;

réserve la suite de la procédure ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), la présente décision peut être portée dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral suisse, av. du Tribunal fédéral 29, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. La présente décision et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être jointes à l’envoi ;

communique la présente décision à Me Sarah HALPÉRIN GOLDSTEIN et Me Lionel HALPÉRIN, avocats de la recourante, ainsi qu'à Me Stéphanie FULD, avocate de l'office cantonal de l'emploi.

Siégeant : Claudio MASCOTTO, président, Florence KRAUSKOPF, Jean-Marc VERNIORY, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière :

 

 

Nathalie DESCHASMPS

 

le président siégeant :

 

 

C. MASCOTTO

 

 

Copie conforme de cette décision a été communiquée aux parties.

Genève, le 

 

 

la greffière :