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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2420/2023

ATA/859/2023 du 17.08.2023 ( FORMA ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2420/2023-FORMA ATA/859/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 17 août 2023

1ère section

 

dans la cause

 

A______, enfant mineur, agissant par son père, B______ recourant

contre

DÉPARTEMENT DE L'INSTRUCTION PUBLIQUE, DE LA FORMATION ET DE LA JEUNESSE intimé

 



EN FAIT

A. a. A______ (ci-après : l’élève), né le ______ 2007, a effectué sa scolarité à l’école primaire C______, puis au cycle d’orientation D______.

b. À l’issue de sa 11ème année, section langues vivantes et communication du cycle d’orientation précité, l’élève n’était pas promu.

c. En août 2022, il a débuté une formation de culture générale en année préparatoire au sein de l’école de culture générale (ci-après : ECG) E______.

d. Par courrier du 14 mars 2022, la direction de l’ECG a indiqué aux parents de l’élève qu’il n’était pas promu et que les objectifs pour être promu en 1ère année de l’ECG étaient « nettement insuffisants ». Une non-promotion en fin d’année aurait pour conséquence qu’il ne pourrait poursuivre sa formation de culture générale. L’élève devait fournir un sérieux effort pour compenser ses moyennes insuffisantes. Un travail régulier en classe comme à la maison était nécessaire pour assurer de meilleurs résultats. L’élève était invité à réfléchir à une éventuelle autre orientation comme solution de rechange. Sa maîtresse de groupe ou les psychologues conseillères d’orientation pouvaient l’aider dans cette démarche.

e. Au terme de l’année scolaire 2022-2023, l’élève n’était pas promu.

Selon son bulletin scolaire du 27 juin 2023, sa moyenne générale était de 4, cinq disciplines étaient insuffisantes (français : 2.7 ; mathématiques : 2.8 ; anglais : 3.6 ; arts et informatique : 3.9 et sport : 3.7) et le total français/anglais/mathématiques (ci-après : FR/AN/MA) était de 9.1. Il n’avait obtenu la moyenne à aucun des tests de fin d’année (2.5 en français, 2.0 en mathématiques et 2.5 en anglais). Il totalisait 54 heures d’absence excusées, quatre heures d’absence non excusées, douze arrivées tardives, 19 devoirs non faits et deux renvois pour comportement.

f. Le 27 juin 2023, la direction de l’ECG a reçu l’élève.

B. a. Par courrier du 20 juin 2023, l’élève, représenté par son père, a sollicité une promotion par dérogation auprès de la direction générale de l’enseignement secondaire II (ci-après : DGES II) du département de l’instruction publique, de la formation et de la jeunesse (ci-après : DIP).

b. Par décision du 5 juillet 2023, la DGES II a rejeté la demande.

L’élève avait indiqué que s’il avait le choix entre le centre de formation professionnelle (ci-après : CFP) Arts et la poursuite de la 1ère année à l’ECG, il choisirait sans hésiter le CFP Arts, ce qu’il avait confirmé par un courrier non daté.

Les résultats de l’élève étaient très éloignés des normes de promotion. Concernant sa progression, il présentait des lacunes importantes dans trois disciplines fondamentales, soit le français, les mathématiques et l’anglais. De plus, il n’y avait pas de progression significative entre le premier et le deuxième trimestre et sa moyenne avait chuté au troisième trimestre. Les arrivées tardives, devoirs non faits et renvois pour comportement étaient inacceptables. L’élève était invité à intégrer le module 3 de la formation obligatoire jusqu’à 18 ans, module dans lequel il était inscrit.

C. a. Par acte du 21 juillet 2023, l’élève, représenté par son père, a interjeté recours devant la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre cette décision, concluant à son annulation.

La gestion de sa situation était discriminatoire. Ses parents n’avaient pas les moyens de superviser ses devoirs et ils avaient demandé et pris conseil auprès des professeurs. Les conditions n’étaient toutefois pas réunies pour qu’il obtienne l’aide nécessaire. Ils avaient demandé un répétiteur mais n’avaient pas reçu de réponse dans les temps. Il n’avait jamais dit qu’il ne voulait pas aller à l’ECG. Il était d’ores et déjà inscrit auprès d’une structure de soutien scolaire et de révision durant l’été afin de remonter son niveau scolaire.

b. Par réponse du 4 août 2023, la DGES II a conclu au rejet du recours, reprenant la motivation de sa décision.

Les allégations quant à l’absence d’aide appropriée n’étaient nullement avérées. Le recourant aurait pu demander de l’aide directement à ses professeurs pendant les cours et s’investir dans la compréhension et la connaissance des disciplines enseignées à l’ECG pendant les heures d’enseignement. Or, les enseignants relevaient presque unanimement qu’il était passif en classe.

Il a produit le courrier manuscrit non daté de l’élève, dans lequel ce dernier indique vouloir « aller en école d’art (CFPA) ». Il était « intéressé par l’architecture, le dessin ».

c. Par réplique du 9 août 2023, le recourant a persisté dans ses conclusions.

d. Sur quoi la cause a été gardée à juger.

EN DROIT

1.             Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ ‑ E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 ‑ LPA ‑ E 5 10 ; art. 40 du règlement de l'enseignement secondaire II et tertiaire B du 29 juin 2016 [REST - C 1 10.31]).

2.             Le litige porte sur la conformité au droit de la décision de la DGES II de refuser d'admettre le recourant par dérogation en 1ère année de l’ECG.

2.1 La formation est obligatoire jusqu’à l’âge de la majorité au moins (art. 194 al. 1 de la Constitution de la République et canton de Genève du 14 octobre 2012 -
Cst-GE - A 2 00).

Le degré secondaire II est composé notamment des établissements scolaires du Collège de Genève, du collège pour adultes, de l’école de culture générale et de l’école de culture générale pour adultes (art. 84 al. 1 let. a de la loi sur l’instruction publique du 17 septembre 2015 - LIP - C 1 10).

Les conditions d’admission, de promotion et d’obtention des titres sont fixées par voie réglementaire (art. 85 al. 1 LIP).

2.2 L’art. 29 al. 1 REST prévoit que les conditions de promotion sont déterminées par les règlements de chaque filière.

L’art. 16 du règlement relatif à l’école de culture générale du 29 juin 2016
(RECG - C 1 10.70) mentionne qu’est admis en 1ère année l’élève de classe préparatoire à l'école de culture générale qui obtient la note annuelle de 4.0 au moins pour chacune des disciplines d’enseignement suivies (al. 1). Est admis par tolérance l’élève dont les résultats satisfont aux conditions suivantes : une moyenne générale égale ou supérieure à 4.0 (let. a) ; au maximum deux notes inférieures à 4.0 (let. b) ; la moyenne de français ou la moyenne de mathématiques égale ou supérieure à 4.0 (let. c) ; un total de 12,0 pour les trois disciplines suivantes : français, mathématiques et anglais (let. d ; al. 2).

Demeurent réservées les dispositions concernant la promotion par dérogation, définies à l'art. 30 REST (art. 16 al. 3 RECG).

2.3 Selon l’art. 30 REST, la direction d’un établissement, sur proposition de la conférence des maîtres de classes ou du groupe ou, dans des cas exceptionnels, de sa propre initiative, peut accorder la promotion à des élèves qui ne remplissent pas complètement les conditions de promotion et qui semblent présenter les aptitudes nécessaires pour suivre l’enseignement de l’année suivante avec succès.

Le règlement précise que l’orientation des élèves constitue une part importante de la mission de l’école ; dans cette optique, lors de l’analyse de l’octroi d’une promotion par dérogation ou d’un redoublement ou lors d’une réorientation, il doit être tenu compte des aptitudes de l’élève à mener à bien son projet de formation. Sont également prises en considération les circonstances ayant entraîné l’échec, les progrès accomplis, la fréquentation régulière des cours et le comportement de l’élève (art. 29 al. 2 et 3 REST).

2.4 La disposition sur la promotion par dérogation utilisant une formule potestative concernant la possibilité d’octroyer ou de refuser la promotion, une liberté d’appréciation est reconnue à l’autorité, que celle-ci doit exercer en effectuant une pesée des intérêts afin de respecter le principe de la proportionnalité. La décision doit tenir compte des circonstances pertinentes et ne pas être arbitraire (ATF 129 III 400 consid. 3.1 ; 128 II 97 consid. 4a). Dans ce cadre, l’autorité scolaire bénéfice d’un très large pouvoir d’appréciation (ATA/1304/2017 du 19 septembre 2017 ; ATA/854/2016 du 11 octobre 2016 ; ATA/776/2016 du 13 septembre 2016), dont la chambre de céans ne censure que l’abus ou l’excès. Ainsi, alors même que l’autorité resterait dans le cadre de ses pouvoirs, quelques principes juridiques les restreignent, dont la violation constitue un abus de ce pouvoir : elle doit exercer sa liberté conformément au droit. Elle doit respecter le but dans lequel un tel pouvoir lui a été conféré, procéder à un examen complet de toutes les circonstances pertinentes, user de critères transparents et objectifs, ne pas commettre d’inégalité de traitement et appliquer le principe de la proportionnalité (ATA/628/2013 du 24 septembre 2013 ; Pierre MOOR/Alexandre FLÜCKIGER/ Vincent MARTENET, Droit administratif, vol. 1, 3ème éd., 2012, p. 743 ss et les références citées).

2.5 Selon l’art. 31 al. 5 REST, l'année de classe préparatoire ne peut être redoublée.

2.6 En l’espèce, il est établi que le recourant n’a pas obtenu les notes lui permettant d’être promu, ni même d’être promu par tolérance, ce qu’il ne conteste au demeurant pas. Il convient donc d’examiner si les conditions d’une promotion par dérogation sont remplies, étant rappelé qu’en raison de son caractère potestatif, l’art. 30 REST laisse une grande marge d’appréciation à l’intimé.

S’agissant de la première condition, soit que l’élève ne remplisse pas complètement les conditions de promotion, sans qu’il en soit trop éloigné, force est de constater que le recourant est non promu en raison de trois causes d’échecs. En effet, si la moyenne générale de l’étudiant est de 4.0, ses notes sont insuffisantes dans cinq disciplines (français, mathématiques, anglais, arts et informatique et sport), ses moyennes de français et de mathématiques sont inférieures à 4.0 et le total FR/AN/MA est inférieur à 12 (9.1). Il ne remplit en conséquence pas la première condition de l’art. 30 REST, étant assez éloigné des conditions de promotion.

La deuxième condition prévue pour l’octroi d’une promotion par dérogation n’est pas davantage réalisée. Lors du premier trimestre, le recourant était non promu avec une moyenne générale de 4.2, trois disciplines insuffisantes (français, mathématiques et sport), une moyenne de français et une moyenne de mathématiques insuffisantes et un total FR/AN/MA inférieur à 12 (10.3). Au cours du deuxième trimestre, il était à nouveau non promu avec une moyenne générale de 4.2, quatre disciplines insuffisantes (français, mathématiques, informatique et sport), une moyenne de français et une moyenne de mathématiques insuffisantes et un total FR/AN/MA inférieur à 12 (10.2). Au terme du troisième trimestre, il était à nouveau non promu avec une moyenne générale de 3.9, quatre disciplines insuffisantes (français, mathématiques, dessin et informatique), une moyenne de français et une moyenne de mathématiques insuffisantes et un total FR/AN/MA inférieur à 12 (8.9). Concernant les tests de fin d’année, il n’a obtenu la moyenne à aucun des examens (2.5 en français, 2.0 en mathématiques et 2.5 en anglais).

Il appert ainsi que le recourant n’a jamais été promu au terme des trois trimestres de l’année et a baissé sa moyenne générale en fin d’année ainsi que le total FR/AN/MA. Il convient donc de retenir que ses résultats n’ont pas progressé favorablement durant l’année scolaire.

Devant la chambre de céans, le recourant reproche à l’autorité intimée d’avoir retenu qu’il souhaitait intégrer le CFP Arts. Il explique qu’il n’avait pas pu contredire son doyen qui lui avait demandé de dire qu’il ne souhaitait pas aller à l’ECG. Cet élément n’est toutefois pas pertinent pour l’issue du litige. En effet, dans la mesure où les conditions d’une dérogation ne sont pas réunies, il importe peu de savoir si le recourant aurait préféré une autre formation. L’intimé n’a du reste pas tenu compte de cet élément, ni de sa note manuscrite, dans son raisonnement.

Le recourant se plaint ensuite de n’avoir pas reçu l’aide appropriée afin d’améliorer ses résultats. Ses parents auraient demandé à obtenir un répétiteur mais ils n’avaient pas reçu de réponse suffisamment tôt pour lui permettre de relever ses notes.

Outre que ces allégations ne sont aucunement étayées, force est de constater que les difficultés du recourant remontent déjà au cycle d’orientation, puisqu’il n’avait pas été promu. Or le recourant n’indique pas avoir procédé à des démarches pour assurer de meilleurs résultats durant son année préparatoire. S’ajoute à cela qu’au terme du 2ème trimestre, le doyen avait fait mention d’objectifs à atteindre « nettement insuffisants », attirant l’attention de l’élève sur la question de la réorientation. Il devait s’investir davantage dans son travail scolaire, en classe et à la maison, s’il désirait obtenir de meilleurs résultats à la fin de l’année. Le recourant connaissait ainsi l’urgence de la situation et la nécessité de s’organiser rapidement afin d’éviter un échec en fin d’année. Enfin, et ainsi que le relève l’intimé, le recourant aurait pu demander de l’aide directement à ses professeurs pendant les cours et s’investir dans la compréhension des enseignements. Dans sa réplique, le recourant réfute cet argument, faisant valoir qu’aucun enseignant ne lui a proposé de l’aide. Il ne conteste toutefois pas n’avoir entrepris aucune démarche en ce sens. Les enseignants ont d’ailleurs presque unanimement relevé que l’intéressé était passif en classe, ce qu’il ne remet pas spécifiquement en cause. À noter que, durant sa classe préparatoire, le recourant a totalisé 58 heures d’absence, douze arrivées tardives, 19 devoirs non faits et deux renvois pour comportement, ce qui conforte l’idée d’un manque d’investissement de sa part.

Enfin, si le recourant indique que son père l’a inscrit auprès d’une structure de soutien scolaire et de révision durant l’été afin de remonter son niveau scolaire, un tel engagement, certes louable, ne suffit pas, compte tenu des considérations qui précèdent, à considérer que l’intimé a abusé de son pouvoir d’appréciation en refusant sa demande de dérogation.

Les considérants qui précèdent conduisent au rejet du recours.

3.             Vu l'issue du litige, un émolument de CHF 400.- sera mis à la charge du père du recourant (art. 87 al. 1 LPA) et aucune indemnité de procédure ne lui sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 21 juillet 2023 par A______ , agissant par son père B______, contre la décision de la direction générale de l’enseignement secondaire II du 5 juillet 2023 ;

au fond :

le rejette ;

met à la charge de B______ un émolument de CHF 400.- ;

dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral :

- par la voie du recours en matière de droit public ;

- par la voie du recours constitutionnel subsidiaire, aux conditions posées par les art. 113 ss LTF, s’il porte sur le résultat d’examens ou d’autres évaluations des capacités, en matière de scolarité obligatoire, de formation ultérieure ou d’exercice d’une profession ;

communique le présent arrêt à A______, agissant par son père B______, ainsi qu'au département de l'instruction publique, de la formation et de la jeunesse.

Siégeant : Francine PAYOT ZEN-RUFFINEN, présidente, Eleanor McGREGOR et Fabienne MICHON-RIEBEN, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière :

 

 

B. SPECKER

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. PAYOT ZEN-RUFFINEN

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :