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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/978/2022

ATA/625/2023 du 13.06.2023 sur JTAPI/1153/2022 ( PE ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/978/2022-PE ATA/625/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 13 juin 2023

1ère section

 

dans la cause

 

A______ recourant
représenté par Me Pierre OCHSNER, avocat

contre

OFFICE CANTONAL DE LA POPULATION ET DES MIGRATIONS intimé

_________



Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 1er novembre 2022 (JTAPI/1153/2022)


EN FAIT

A. a. A______, né le ______ 1978, est ressortissant du Kosovo.

b. Il est marié et père de deux enfants, nés respectivement en 2002 et 2009, sa famille étant restée au Kosovo.

B. Les 28 juin, 27 juillet et 17 décembre 2018 ainsi que les 2 avril et 18 décembre 2019, 15 février et 7 juin 2021, ainsi que le 3 janvier 2022, il a sollicité la délivrance de visas de retour afin de se rendre au Kosovo pour des raisons familiales.

B. a.  

C. a. Le 28 avril 2020, A______ a été dénoncé au Ministère public du canton de Genève (ci-après : MP) par l'OCPM pour des soupçons portant sur de faux documents, les charges sociales figurant sur les certificats de salaire n'apparaissant pas sur son extrait de compte individuel AVS.

b. Entendu par la police le 26 mai 2020, A______ a déclaré être arrivé à Genève en 2004. Il était retourné au Kosovo en avril 2012 durant quelques mois avant de revenir en Suisse et avait travaillé pour divers employeurs depuis son retour à Genève.

Il avait payé un compatriote, B______, pour qu'il effectue les démarches dans le cadre de sa demande de régularisation. Comme il n'avait pas été déclaré auprès de l'AVS, A______ avait demandé à B______ d'établir les documents manquants afin de les faire ensuite signer par son employeur.

Par ordonnance pénale du 17 juin 2020, le MP a condamné A______ à une peine pécuniaire de 120 jours-amende d'un montant de CHF 50.-, avec sursis et délai d'épreuve de trois ans, pour faux dans les certificats (concernant des certificats de salaire pour les années 2009 et 2012) ainsi que pour séjour illégal et exercice d'une activité lucrative sans autorisation.

D. a. Le 19 juin 2018, A______ a déposé une demande de régularisation de ses conditions de séjour sous l'angle de l'opération « Papyrus » auprès de l'office cantonal de la population et des migrations (ci-après: OCPM).

Il a déclaré exercer une activité lucrative à Genève depuis 2004 et a notamment transmis des fiches et des certificats de salaire, une attestation de connaissance de la langue française niveau A2, sa feuille personnelle de joueur de football, des attestations de transfert d'argent à destination du Kosovo entre octobre 2013 et mars 2018 ainsi qu'un extrait de compte individuel AVS indiquant le versement de cotisations en 2010, 2011, 2013 et 2014.

b. Par courrier du 13 décembre 2021, l'OCPM lui a fait part de son intention de refuser sa demande de régularisation de ses conditions de séjour et de prononcer son renvoi de Suisse, lui impartissant un délai de 30 jours pour faire valoir ses observations, ce qu'il a fait par courriel du 14 février 2022.

c. Par décision du 25 février 2022, l'OCPM a refusé sa demande d'autorisation de séjour et a prononcé son renvoi de Suisse.

A______ ne remplissait ni les critères de l'opération « Papyrus » ni les conditions de reconnaissance d'un cas individuel d'une extrême gravité.

Il avait tenté de tromper l'autorité en faisant usage de faux documents afin d'obtenir une autorisation de séjour et avait été condamné pénalement pour ce fait. Cette condamnation pénale démontrait l'absence d'un comportement irréprochable attendu de tout étranger souhaitant obtenir la régularisation de ses conditions de séjour.

Il n'avait également pas démontré qu'une réintégration dans son pays d'origine aurait de graves conséquences sur sa situation personnelle indépendamment des circonstances générales affectant l'ensemble de la population restée sur place. Il avait vécu au Kosovo toute son enfance ainsi que son adolescence, et son épouse ainsi que ses deux enfants y vivaient.

Il n'avait ni invoqué ni démontré l'existence d'obstacles au retour dans son pays d'origine. Le dossier ne faisait pas apparaitre que l'exécution du renvoi ne serait pas possible, pas licite ou ne pourrait pas être raisonnablement exigée.

d. Par acte du 28 mars 2022, A______ a formé recours contre la décision précitée auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après: le TAPI).

Toutes les conditions de l'opération Papyrus étaient remplies. Sa condamnation pénale ne concernait que son séjour irrégulier. En vue d’obtenir des documents nécessaires à l'appui de sa demande de régularisation, il avait été dupé par un tiers qui se prétendait avocat et qui était connu des services de police pour des faits similaires. Compte tenu de ces éléments, la décision querellée était disproportionnée.

Il produisait un extrait de compte individuel AVS couvrant partiellement l’année 2010 (octobre à décembre), l’entier de l’année 2011, partiellement l’année 2013 (août à décembre), partiellement l’année 2014 (janvier à juillet, ainsi qu’août), l’entier des années 2017 et 2018, partiellement l’année 2019 (janvier à août et novembre-décembre) et partiellement l’année 2020 (mai à décembre), ainsi qu’une carte de base d'abonnement TPG valable du 4 février 2011 au 3 mars 2016.

e. Le 30 mai 2022, l'OCPM a conclu au rejet du recours.

Les conditions de l'opération Papyrus, notamment celle relative aux dix années de séjour continu en Suisse, n'étaient pas remplies au moment du dépôt de la demande de A______. Ce dernier n'avait pas non plus hésité à produire de faux documents en vue d'obtenir un permis de séjour. Il ne pouvait ainsi prétendre à aucune autorisation de séjour.

f. Le 15 juin 2022, le recourant a, à l’appui de sa réplique, produit une attestation de son opérateur téléphonique selon laquelle il détenait le même numéro de téléphone depuis 2007.

g. Par jugement du 1er novembre 2022, le TAPI a rejeté le recours.

A______ avait admis, lors de son audition à la police, avoir produit de faux documents et ne pouvait donc se prévaloir de sa bonne foi. Il avait fait l’objet d’une condamnation pénale notamment pour faux dans les certificats, puisque l’infraction avait été commise pour faire croire à l’OCPM qu’il remplissait les conditions requises, ce qui démontrait son manque d’intégration, et il ne remplissait pas non plus une des conditions cumulatives à l’obtention d’une autorisation dans le cadre de l’opération Papyrus, du fait de cette condamnation pénale.

Il ne pouvait pas démontrer un séjour continu en Suisse depuis 2004 puisqu’il avait admis devant la police le 26 mai 2020 être reparti au Kosovo pendant plusieurs mois en 2012 et que son retour en Suisse n’était démontré qu’à partir de 2013. Même à retenir qu’il était arrivé en Suisse en 2004, ce qu’il ne démontrait pas, son retour au Kosovo en 2012 avait mis fin à ce séjour et ce n’était qu’à partir de 2013 qu’un séjour pouvait être comptabilisé, soit un peu plus de cinq ans au moment du dépôt de la demande le 19 juin 2018, une durée insuffisante.

Il ne remplissait pas non plus les conditions d’obtention d’une autorisation pour cas de rigueur, la durée de son séjour ne répondant pas aux critères légaux et jurisprudentiels, le séjour étant au demeurant seulement toléré. Son intégration socio-professionnelle n’était ni remarquable ni exceptionnelle, puisqu’il n’avait pas acquis des connaissances ou qualifications si spécifiques qu’il ne pourrait les utiliser dans sa patrie, ni n’avait fait preuve d’une ascension professionnelle remarquable. Sa condamnation pénale démontrait son manque d’intégration. Il avait gardé des liens avec son pays de provenance, au regard des visas demandés, où vivaient son épouse et ses enfants. Jeune et en bonne santé, arrivé en Suisse d’abord à 26 ans, puis à 35 ans pour la seconde fois, il avait passé son enfance, son adolescence et le début de sa vie d’adulte dans son pays d’origine, dont il maitrisait la langue et les us et coutumes et où il pourrait faire valoir les compétences linguistiques et professionnelles acquises en Suisse. Rien n’indiquait non plus qu’il devrait faire face à des difficultés plus lourdes que celles rencontrées par d’autres compatriotes contraints de rentrer dans leur pays d’origine.

Aucun motif ne permettait de retenir qu’un renvoi ne serait pas possible, licite ou ne pouvait être raisonnablement exigé.

E. a.  Par acte du 2 décembre 2022, A______ a interjeté recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre le jugement précité concluant, préalablement, à son audition. Principalement, le jugement attaqué devait être annulé, de même que la décision de l'OCPM du 25 février 2022, et la cause devait être renvoyée à ce dernier pour délivrance d'une autorisation de séjour.

Il a fait valoir un établissement inexact des faits, les conditions de l’octroi d’une autorisation selon l’opération Papyrus étant réalisées, à teneur des pièces qu’il avait produites, et sa condamnation pénale ayant précisément trait à sa demande de régularisation et au fait qu’il avait été dupé par un tiers. Sa condamnation devait être considérée en respect du principe de proportionnalité, ce d’autant que l’auteur de la dupe était connu des forces de l’ordre et avait mis à mal bon nombre de personnes. Il avait cotisé pour l’AVS dès 2010, s’était constitué une prévoyance LPP (depuis novembre 2019 selon la pièce produite), parlait parfaitement le français, n’avait jamais eu recours à l’aide sociale, ni connu de poursuites et son casier judiciaire était vierge.

Son renvoi n’était pas exigible, car il était ancré en Suisse après 20 ans de séjour, qu’il s’était fait aux us et coutumes et que les difficultés liées à un retour au pays étaient augmentées par son séjour important en Suisse.

b. L’OCPM a conclu au rejet du recours.

c. Dans sa réplique, le recourant a maintenu avoir été dupé par le soi-disant avocat qui avait déposé sa demande de régularisation. Il détenait pour le surplus le même numéro de téléphone mobile depuis 2007, ce qui démontrait également son séjour.

d. Sur ce, la cause a été gardée à juger.

e. Le contenu des pièces sera repris en tant que de besoin dans la partie en droit du présent arrêt.

EN DROIT

1. Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2.             Le recourant sollicite préalablement son audition.

2.1 Tel qu'il est garanti par l'art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), le droit d'être entendu comprend notamment le droit pour l'intéressé d'offrir des preuves pertinentes et d'obtenir qu'il y soit donné suite (ATF 132 II 485 consid. 3.2 ; 127 I 54 consid. 2b). Ce droit ne s'étend qu'aux éléments pertinents pour l'issue du litige et n'empêche pas le juge de renoncer à l'administration de certaines preuves et de procéder à une appréciation anticipée de ces dernières, s'il acquiert la certitude que celles-ci ne l'amèneront pas à modifier son opinion ou si le fait à établir résulte déjà des constatations ressortant du dossier (ATF 138 III 374 consid. 4.3.2 ; 131 I 153 consid. 3). Le droit d'être entendu ne comprend pas le droit à une audition orale (ATF 140 I 285 consid. 6.3.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 2D_51/2018 du 17 janvier 2019 consid. 4.1 ; ATA/1173/2020 du 24 novembre 2020 consid. 3a).

2.2 En l'espèce, le recourant a eu l'occasion d'exposer ses arguments et de produire des pièces, tant devant l'OCPM, le TAPI que la chambre de céans. Il n’indique pas en quoi son audition serait à même d’apporter d’éclairage supplémentaire à ses allégations, telles que figurant déjà à la procédure.

Il ne sera donc pas donné suite à sa demande de comparution personnelle.

3.              

3.1 Le 1er janvier 2019 est entrée en vigueur une modification de la loi fédérale sur les étrangers et l'intégration du 16 décembre 2005 (LEI - RS 142.20) et de l’ordonnance relative à l'admission, au séjour et à l'exercice d'une activité lucrative du 24 octobre 2007 (OASA - RS 142.201). Conformément à l'art. 126 LEI, les demandes déposées avant cette date sont régies par l'ancien droit, ce qui est le cas en l'espèce puisque la demande d'autorisation de séjour a été formée en juin 2018.

3.2 L'art. 30 al. 1 let. b LEI permet de déroger aux conditions d'admission en Suisse, telles que prévues aux art. 18 à 29 LEI, notamment aux fins de tenir compte des cas individuels d'une extrême gravité ou d'intérêts publics majeurs.

L’art. 31 al. 1 OASA, dans sa teneur au moment des faits, prévoit que pour apprécier l'existence d'un cas individuel d'extrême gravité, il convient de tenir compte notamment de l'intégration du requérant (let. a), du respect de l'ordre juridique suisse (let. b), de sa situation familiale, particulièrement de la période de scolarisation et de la durée de la scolarité des enfants (let. c), de sa situation financière ainsi que de sa volonté de prendre part à la vie économique et d'acquérir une formation (let. d), de la durée de sa présence en Suisse (let. e), de son état de santé (let. f) ainsi que des possibilités de réintégration dans l'État de provenance (let. g). Les critères énumérés par cette disposition, qui doivent impérativement être respectés, ne sont toutefois pas exhaustifs, d'autres éléments pouvant également entrer en considération, comme les circonstances concrètes ayant amené un étranger à séjourner illégalement en Suisse (directives LEI, état au 1er janvier 2021, ch. 5.6.12).

3.3 Les dispositions dérogatoires des art. 30 LEI et 31 OASA présentent un caractère exceptionnel et les conditions pour la reconnaissance d'une telle situation doivent être appréciées de manière restrictive (ATF 128 II 200 consid. 4). Elles ne confèrent pas de droit à l'obtention d'une autorisation de séjour (ATF 138 II 393 consid. 3.1 ; 137 II 345 consid. 3.2.1). L'autorité doit néanmoins procéder à l'examen de l'ensemble des circonstances du cas d'espèce pour déterminer l'existence d'un cas de rigueur (ATF 128 II 200 consid. 4 ; 124 II 110 consid. 2 ; ATA/38/2019 du 15 janvier 2019 consid. 4c).

Parmi les éléments déterminants pour la reconnaissance d'un cas d'extrême gravité, il convient en particulier de citer la très longue durée du séjour en Suisse, une intégration sociale particulièrement poussée, une réussite professionnelle remarquable, la personne étrangère possédant des connaissances professionnelles si spécifiques qu'elle ne pourrait les mettre en œuvre dans son pays d'origine, une maladie grave ne pouvant être traitée qu'en Suisse, la situation des enfants, notamment une bonne intégration scolaire aboutissant après plusieurs années à une fin d'études couronnée de succès. Constituent en revanche des facteurs allant dans un sens opposé le fait que la personne concernée n'arrive pas à subsister de manière indépendante et doive recourir aux prestations de l'aide sociale ou des liens conservés avec le pays d'origine, par exemple sur le plan familial, susceptibles de faciliter sa réintégration (arrêt du Tribunal fédéral 2A.543/2001 du 25 avril 2002 consid. 5.2 ; arrêts du Tribunal administratif fédéral [ci-après : TAF] C-5414/2013 du 30 juin 2015 consid. 5.1.4 ; C-6379/2012 et C-6377/2012 du 17 novembre 2014 consid. 4.3).

3.4 L'opération « Papyrus » développée par le canton de Genève a visé à régulariser la situation des personnes non ressortissantes UE/AELE bien intégrées et répondant à différents critères, à savoir, selon le livret intitulé « Régulariser mon statut de séjour dans le cadre de Papyrus » disponible sous https://www.ge.ch/regulariser-mon-statut-sejour-cadre-papyrus/criteres-respecter), avoir un emploi ; être indépendant financièrement ; ne pas avoir de dettes ; avoir séjourné à Genève de manière continue sans papiers pendant cinq ans minimum (pour les familles avec enfants scolarisés) ou dix ans minimum pour les autres catégories, à savoir les couples sans enfants et les célibataires ; faire preuve d'une intégration réussie ; absence de condamnation pénale (autre que séjour illégal).

L'opération « Papyrus » n'emporte aucune dérogation aux dispositions légales applicables à la reconnaissance de raisons personnelles majeures justifiant la poursuite du séjour en Suisse (art. 30 al. 1 let. b LEI), pas plus qu'à celles relatives à la reconnaissance d'un cas individuel d'extrême gravité (art. 31 al. 1 OASA), dont les critères peuvent entrer en ligne de compte pour l'examen desdites raisons personnelles majeures (ATA/254/2023 du 14 mars 2023 consid. 2.1.4).

La question est ainsi de savoir si, en cas de retour dans le pays d'origine, les conditions de sa réintégration sociale, au regard de la situation personnelle, professionnelle et familiale de l'intéressé, seraient gravement compromises (arrêts du Tribunal fédéral 2C_621/2015 du 11 décembre 2015 consid. 5.2.1 ; 2C_369/2010 du 4 novembre 2010 consid. 4.1).

3.5 Bien que la durée du séjour en Suisse constitue un critère important lors de l'examen d'un cas d'extrême gravité, elle doit néanmoins être examinée à la lumière de l'ensemble des circonstances du cas particulier et être relativisée lorsque l'étranger a séjourné en Suisse de manière illégale, sous peine de récompenser l'obstination à violer la loi (ATF 130 II 39 consid. 3 ; arrêt du Tribunal fédéral 2D_13/2016 du 11 mars 2016 consid. 3.2 ; ATA/432/2023 du 25 avril 2023 consid. 3.6).

3.6 En l'espèce, le recourant soutient qu'il réaliserait les conditions de l'opération « Papyrus ». Sur la base de ses propres explications, le TAPI a, à juste titre, retenu qu'il ne remplissait pas la condition de dix ans de séjour continu en Suisse au jour du dépôt de sa demande de régularisation. Il prétend s’être installé en Suisse en 2004, mais son séjour n’est pas démontré de manière continue, ne serait-ce que parce qu’il est retourné au Kosovo plusieurs mois entre 2012 et 2013, étant au demeurant relevé que son relevé de compte AVS couvre certes l’entier des années 2017 et 2018 mais que partiellement les années 2010, 2013 et 2014 et pas du tout les années 2011, 2012, 2015 et 2016. Le fait qu’il soit titulaire du même numéro de téléphone mobile depuis mars 2007 n’est pas probant, puisqu’on ignore tout de l’éventuelle utilisation effective de ce numéro par le recourant. Les transferts d’argent au Kosovo ne permettent pas non plus d’établir un séjour continu. Le recourant ne séjournait donc pas en Suisse de façon continue depuis dix ans au moment du dépôt de sa demande de régularisation le 19 juin 2018. Pour ce motif déjà, il ne pouvait pas être mis au bénéfice de l’opération « Papyrus », n'en remplissant pas l'un des critères cumulatifs.

Par ailleurs, sa condamnation pour faux dans les certificats ne relève pas d’une infraction à la LEI.

Le recourant ne peut ainsi se prévaloir de l’application de l’opération Papyrus.

Il ne remplit pas non plus les critères d’un cas d’extrême gravité, dont d’ailleurs l’opération Papyrus n’était qu’une illustration. En effet, comme vu plus haut, la durée de son séjour en Suisse depuis 2013, doit être fortement relativisée du fait qu’elle s’est intégralement déroulée dans l’illégalité, ou au bénéfice d'une tolérance des autorités depuis le dépôt de la demande.

Par ailleurs, la condamnation du recourant du 17 juin 2020 n’est pas anodine, puisqu’elle a directement trait à l’un des critères permettant de retenir une intégration sociale réussie, à savoir le respect de l’ordre public. Or, le recourant, en produisant plusieurs faux relevés de travail et une attestation antidatée, a cherché à induire en erreur les autorités en vue d’obtenir un titre de séjour, le fait qu’il se targue d’être la dupe d’un auteur connu des services de police est sans pertinence. Ce comportement dénote un mépris certain pour les institutions du pays.

Si le recourant est, certes, indépendant financièrement, n’a pas recouru à l’aide sociale et n’a pas de dettes, de tels éléments ne suffisent pas pour retenir l’existence d’une intégration socio-professionnelle particulièrement réussie. Même s'il possède un niveau A2 en français, il ne prouve ni ne soutient qu’il aurait tissé des liens amicaux ou affectifs particulièrement forts à Genève. Il ne peut dès lors être retenu qu'il aurait fait preuve d'une intégration socioéconomique exceptionnelle en comparaison avec d'autres étrangers qui travaillent en Suisse depuis plusieurs années (arrêts du TAF F-6480/2016 du 15 octobre 2018 consid. 8.2 ; C-5235/2013 du 10 décembre 2015 consid. 8.2).

Par ailleurs, il ne rend pas vraisemblable qu’il se serait investi dans la vie associative ou culturelle à Genève. Sa fiche de joueur de football ne mentionne que des participations sporadiques jusqu’à 2013.

Enfin, il ne peut se prévaloir d’une ascension professionnelle remarquable au sens de la jurisprudence, ce qu’il ne soutient d’ailleurs pas. En outre, les connaissances professionnelles acquises en Suisse ne sont pas spécifiques au pays, au point qu’il ne pourrait les utiliser au Kosovo.

Né au Kosovo, le recourant y a passé toute son enfance, son adolescence et le début de sa vie d’adulte jusqu’à l’âge de 26 ans, âge auquel il dit être arrivé en Suisse. Il connaît les us et coutumes de son pays, la mentalité et en parle la langue. Il y a sa famille, dont son épouse et ses enfants et a demandé à plusieurs reprises des visas de retour au Kosovo pour raisons familiales, ce qui démontre non seulement la continuité des liens familiaux, mais également son absence d’intégration en Suisse. Ainsi, malgré la durée de son séjour en Suisse, son pays ne peut lui être devenu étranger.

Âgé de 45 ans et en bonne santé, il pourra faire valoir en cas de retour l’expérience et les compétences acquises en Suisse pour sa réintégration, notamment professionnelle et sociale, et ne devrait ainsi pas rencontrer d’importants problèmes de réintégration professionnelle, plus importants que les difficultés connues par l'ensemble de la population au Kosovo. Sa situation ne permet en tout cas pas de retenir que sa réintégration serait gravement compromise au sens de la jurisprudence.

Le recourant ne présente donc pas une situation de détresse personnelle au sens de des art. 30 al. 1 let. b LEI et 31 al. 1 OASA, ce quand bien même un retour dans son pays d'origine est susceptible d’engendrer pour lui certaines difficultés de réadaptation. Il ne se justifie en conséquence pas de déroger aux conditions d'admission en Suisse en sa faveur, au vu de la jurisprudence très stricte en la matière. Enfin, il sera rappelé que l’autorité intimée bénéficie d’un large pouvoir d’appréciation que la chambre de céans ne revoit qu’en cas d’abus ou d’excès, ce qui n’est pas le cas en l’espèce.

Au vu de ce qui précède, l’OCPM n’a pas violé la loi ni commis un abus de son pouvoir d’appréciation en refusant de préaviser favorablement auprès du SEM la demande d’autorisation de séjour présentée par le recourant.

4.             Il convient encore d’examiner le bien-fondé du renvoi du recourant.

4.1 Selon l'art. 64 al. 1 let. c LEI, l'autorité compétente rend une décision de renvoi ordinaire à l'encontre d'un étranger auquel l'autorisation de séjour est refusée ou dont l'autorisation n'est pas prolongée. Elle ne dispose à ce titre d'aucun pouvoir d'appréciation, le renvoi constituant la conséquence du rejet d'une demande d'autorisation. La décision de renvoi est assortie d'un délai de départ raisonnable (art. 64d al. 1 LEI).

Le renvoi d'un étranger en application de l’art. 64 al. 1 LEI ne peut être ordonné que si l'exécution de celui-ci est possible, licite ou peut être raisonnablement exigée (art. 83 al. 1 LEI). L'exécution n'est pas possible lorsque l'intéressé ne peut quitter la Suisse pour son État d'origine, son État de provenance ou un État tiers ni être renvoyé dans un de ces États (art. 83 al. 2 LEI).

4.2 En l’occurrence, dès lors qu'il a, à juste titre, refusé l’octroi d’une autorisation de séjour au recourant, l’intimé devait prononcer son renvoi.

Pour le surplus, le recourant n'allègue pas que le retour dans son pays d’origine serait impossible, illicite ou inexigible au regard de l’art. 83 LEI, et le dossier ne laisse pas apparaître d’éléments qui tendraient à démontrer le contraire. La présence de sa famille au Kosovo, ses retours réguliers au pays et son absence démontrée d’intégration socio-professionnelle particulièrement réussie infirment un ancrage tel en Suisse qu’il s’opposerait à un renvoi.

Dans ces circonstances, la décision de l'autorité intimée est conforme au droit et le recours contre le jugement du TAPI, entièrement mal fondé, sera rejeté.

5.             Vu l’issue du litige, un émolument de CHF 400.- sera mis à la charge du recourant qui succombe (art. 87 al. 1 LPA), et il ne sera pas alloué d'indemnité de procédure (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *


PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 2 décembre 2022 par A______ contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 1er novembre 2022 ;

au fond :

le rejette ;

met un émolument de CHF 400.- à la charge de A______ ;

dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

dit que les éventuelles voies de recours contre le présent arrêt, les délais et conditions de recevabilité qui leur sont applicables, figurent dans la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), dont un extrait est reproduit ci-après. Le mémoire de recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Pierre OCHSNER, avocat du recourant, à l’office cantonal de la population et des migrations, au Tribunal administratif de première instance ainsi qu'au secrétariat d'État aux migrations.

Siégeant : Valérie LAUBER, Présidente, Claudio MASCOTTO, Fabienne MICHON RIEBEN, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

S. HÜSLER ENZ

 

 

la présidente siégeant :

 

 

V. LAUBER

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :

 

 

 

 


 

Extraits de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110)
consultable sur le site: http://www.admin.ch/ch/f/rs/c173_110.html

Recours en matière de droit public
(art. 82 et ss LTF)

Recours constitutionnel subsidiaire
(art. 113 et ss LTF)

Art. 82 Principe

Le Tribunal fédéral connaît des recours :

a. contre les décisions rendues dans des causes de droit public ;

Art. 83 Exceptions

Le recours est irrecevable contre :

c. les décisions en matière de droit des étrangers qui concernent :

1. l’entrée en Suisse,

2. une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit,

3. l’admission provisoire,

4. l’expulsion fondée sur l’art. 121, al. 2, de la Constitution ou le renvoi,

5. les dérogations aux conditions d’admission,

6. la prolongation d’une autorisation frontalière, le déplacement de la résidence dans un autre canton, le changement d’emploi du titulaire d’une autorisation frontalière et la délivrance de documents de voyage aux étrangers sans pièces de légitimation ;

d. les décisions en matière d’asile qui ont été rendues :

1. par le Tribunal administratif fédéral,

2. par une autorité cantonale précédente et dont l’objet porte sur une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit ;

Art. 89 Qualité pour recourir

1 A qualité pour former un recours en matière de droit public quiconque :

a. a pris part à la procédure devant l’autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire ;

b. est particulièrement atteint par la décision ou l’acte normatif attaqué, et

c. a un intérêt digne de protection à son annulation ou à sa modification.

Art. 95 Droit suisse

Le recours peut être formé pour violation :

a. du droit fédéral ;

b. du droit international ;

c. de droits constitutionnels cantonaux ;

d. de dispositions cantonales sur le droit de vote des citoyens ainsi que sur les élections et votations populaires ;

e. du droit intercantonal.

Art. 100 Recours contre une décision

1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l’expédition complète.

______________________________________________

Art. 113 Principe

Le Tribunal fédéral connaît des recours constitutionnels contre les décisions des autorités cantonales de dernière instance qui ne peuvent faire l’objet d’aucun recours selon les art. 72 à 89.

Art. 115 Qualité pour recourir

A qualité pour former un recours constitutionnel quiconque :

a. a pris part à la procédure devant l’autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire et

b. a un intérêt juridique à l’annulation ou à la modification de la décision attaquée.

Art. 116 Motifs de recours

Le recours constitutionnel peut être formé pour violation des droits constitutionnels.

Art. 100 Recours contre une décision

1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l’expédition complète.

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Recours ordinaire simultané (art. 119 LTF)

1 Si une partie forme contre une décision un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire.

2 Le Tribunal fédéral statue sur les deux recours dans la même procédure.

3 Il examine les griefs invoqués selon les dispositions applicables au type de recours concerné.