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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2820/2022

ATA/586/2023 du 06.06.2023 ( FPUBL ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2820/2022-FPUBL ATA/586/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 6 juin 2023

 

dans la cause

 

A______ recourant

contre

VILLE DE GENÈVE intimée



EN FAIT

A. a. A______, né le ______ 1970, a été engagé dès le 1er mars 2012 en qualité de collaborateur administratif au service B______ (ci-après : B______) de la Ville de Genève (ci-après : la ville).

b. Il a été affecté au poste de police municipale C______ et avait notamment pour missions principales l’accueil au guichet et le suivi des travaux administratifs liés à l’activité du poste de police.

c. Suite à une réorganisation au sein du département de l’environnement urbain et de la sécurité, devenu le département de la sécurité et des sports (ci-après : le département), et la création, dès le 1er janvier 2018, du service de la police municipale (ci-après : SPM), A______ a été transféré au sein de ce dernier. L’intéressé a signé le 17 juillet 2019 un nouveau cahier des charges relatif à sa fonction.

d. Depuis son engagement, A______ a fait l’objet de plusieurs entretiens d’évaluation. Les deux premières évaluations, réalisées durant la période d’essai, se sont avérées positives. Les trois suivantes, ayant eu lieu les 21 novembre 2016, 12 octobre 2018 et 13 octobre 2020, ont été globalement positives, sous réserve de certains points à améliorer, notamment en matière de communication. Il a notamment été relevé que l’intéressé pouvait rencontrer des difficultés avec certains usagers mécontents, qu’il devait mieux maîtriser son stress face à ceux-ci, ainsi que la gestion des conflits, soigner sa communication et mieux interagir avec certaines personnes âgées. Son attention a également été attirée sur le fait qu’il devait, dans le cadre de ses demandes, respecter davantage la voie hiérarchique, faire preuve de plus d’empathie avec la section logistique, ainsi que de plus de tolérance et de patience avec les délais de livraison des commandes. Il a par ailleurs été invité à développer ses connaissances des nouvelles compétences de la police municipale et a manifesté son souhait de voir sa carrière évoluer au sein de l’administration municipale.

e. Le 29 octobre 2018, A______ a formulé des observations complémentaires suite à son entretien d’évaluation du 12 octobre 2018, dont il a sollicité qu’elles soient adressées à la directrice des ressources humaines et classées dans son dossier.

B. a. Le 23 mars 2022, D______, cheffe du SPM et commandante (ci-après : la cheffe de service ou la commandante) a convoqué A______ à un entretien le 6 avril suivant, afin de l’entendre sur des faits qui, s’ils étaient avérés, constitueraient une violation des devoirs généraux des membres du personnel de la ville. Elle envisageait de prononcer à son encontre un avertissement.

Elle avait reçu différentes plaintes d’employés de la ville lui rapportant que l’intéressé aurait tenu, à plusieurs reprises, des propos désobligeants à l’égard de membres du personnel ainsi que de personnes externes, notamment dans le cadre de livraison de matériel et de travaux ayant eu lieu au poste C______. Elle constatait par ailleurs qu’il persistait à faire entorse à la règle en usage au sein du SPM demandant aux collaborateurs de respecter la voie hiérarchique pour leurs différentes demandes, sauf cas particulier.

b. Le 25 mars 2022, A______ a adressé à la cheffe de service un courriel, exposant qu’il avait vécu cinq semaines stressantes de chantier, lesquelles avaient influencé négativement son environnement professionnel et occasionné une forte surcharge de travail. Il avait dû travailler dans différents postes pour assurer des prestations au public, dont il était particulièrement soucieux, et avait essuyé de la part de certains collègues des critiques et remarques désagréables. Il estimait « inacceptable et mensonger de déclarer [qu’il] ne respect[ait] pas la voie hiérarchique ».

c. L’entretien du 6 avril 2022 a eu lieu en présence de A______, de la commandante, d’une gestionnaire RH du département et d’un représentant de la commission du personnel.

d. Le 14 avril 2022, D______, directeur adjoint du département, a convoqué A______ à un nouvel entretien le 5 mai suivant, en présence de la cheffe de service et d’une conseillère juridique du département, destiné à l’entendre tant sur son comportement lors de l’entretien du 6 avril 2022 que sur les faits reprochés dans le courrier du 23 mars 2022.

Il lui avait été rapporté que, peu après le début de l’entretien précité, l’intéressé y avait subitement mis un terme en quittant les lieux. Alors que la commandante avait commencé à lui exposer les faits reprochés avant de l’entendre à ce sujet, il l’avait interrompue, indiquant ne pas vouloir entendre cette « calomnie » et « diffamation ». Il avait exigé que les faits reprochés lui soient explicités par écrit afin de pouvoir y répondre également par ce biais. Il était parti sans laisser à la cheffe de service le temps de réagir, si ce n’était de prendre acte de son refus de s’exprimer.

Un tel comportement était inadmissible. Il n’appartenait pas à l’intéressé de définir la manière dont était diligentée la procédure disciplinaire, laquelle avait en l’occurrence lieu oralement conformément aux dispositions applicables. Il devait se conformer aux ordres et injonctions de sa hiérarchie. Il ne pouvait pas quitter l’entretien sans motif valable et sans autorisation et avait, en agissant de la sorte, gravement contrevenu à ses devoirs.

L’intéressé pouvait en tout temps prendre connaissance de son dossier administratif. En cas d’absence non excusée au second entretien, il serait considéré qu’il renonçait à faire valoir son droit d’être entendu.

e. Le 25 avril 2022, A______ a adressé à D______ un courrier, auquel était annexé un bordereau de 27 pièces comprenant pour l’essentiel des échanges de courriels intervenus entre 2017 et 2022 avec plusieurs collaborateurs de la ville. Décrivant un historique « édifiant », il a exposé son point de vue sur les diverses problématiques qui le préoccupaient, concernant notamment son environnement de travail, des questions de « santé publique », les désagréments que lui avaient causés les travaux ayant eu lieu au poste C______ ou encore le fait qu’il avait dû attendre deux ans une réponse écrite à son courriel du 29 octobre 2018 concernant les observations complémentaires qu’il avait formulées suite à son entretien d’évaluation du 12 octobre 2018 et dont il avait demandé qu’elles soient portées à son dossier, estimant qu’il était « inacceptable de maintenir des collaborateurs dans l’incertitude et sous pression pendant deux ans ».

Il avait quitté l’entretien du 6 avril 2022 lorsque la commandante avait commencé à lui faire part des griefs ayant conduit à l’ouverture d’une procédure à son encontre. Les reproches émanant de F______, architecte de la ville en charge des travaux précités, l’avaient fait immédiatement réagir. Refusant de « laisser dire cela », il avait indiqué attendre une lettre motivée pour se déterminer par écrit.

Il concluait en s’étonnant « après 10 ans de bons et loyaux services, est-ce ainsi que l’on remercie un collaborateur assidu ? Un avertissement. Vraiment ? ».

f. Le 26 avril 2022, A______ a confirmé au directeur adjoint lui avoir adressé le courrier précité et qu’il renonçait à faire valoir son droit d’être entendu oralement. Il demeurait « dans l’attente d’une lettre motivée depuis le 24 mars 2022 ».

g. Entre le 6 mai 2022 et le 8 août 2022, A______ a sollicité à plusieurs reprises le département et la direction des ressources humaines au sujet de la consultation de son dossier et des pièces qui y étaient versées.

h. Par décision du 1er juillet 2022, D______, devenu directeur ad intérim du département, a prononcé un avertissement à l’encontre de A______.

Ainsi qu’il en avait connaissance, il lui était reproché d’avoir tenu des propos désobligeants envers des membres du personnel de la ville et de personnes externes à l’administration, notamment dans le cadre de livraison de matériel et de travaux ayant eu lieu au poste C______. Plusieurs personnes s’étaient plaintes de la manière dont il s’était adressé à elles, par oral ou par écrit, ainsi que des propos qu’il avait tenus. F______ avait, par exemple, dans un courriel du 8 mars 2022 adressé à la cheffe de service, indiqué avoir rencontré des difficultés à collaborer avec lui, expliquant qu’il ne s’adressait à lui que pour se plaindre, sur un ton agressif, et avait tenu à son endroit des propos inadéquats auprès de personnes externes à l’administration. Il ne s’était en outre pas montré coopératif envers les entreprises effectuant les travaux, en formulant parfois des remarques inadéquates.

Il lui était également reproché de ne pas avoir respecté la voie hiérarchique à plusieurs reprises et malgré de vains rappels de son obligation, en adressant directement certaines demandes à la cheffe de service. Il ressortait en particulier de trois échanges de courriels qu’il avait interpellé la précitée sur des sujets propres à la gestion du poste C______ (problématiques d’un distributeur à savon défectueux, d’une commande de pharmacie et du déménagement d’un groupe d’agents au rez-de-chaussée).

Dans ses correspondances des 25 mars et 25 avril 2022, A______ avait contesté, de manière véhémente et critiquable, le grief concernant le
non-respect de la voie hiérarchique. Il avait apporté des explications sur la manière dont il avait vécu la période de travaux au poste C______, les démarches organisationnelles qu’il avait effectuées dans ce contexte, les conséquences de ces travaux sur sa charge de travail, la problématique d’un distributeur à savon défectueux durant la crise sanitaire, sa demande en lien avec l’entretien périodique d’octobre 2018, les démarches qu’il avait entreprises pour obtenir l’installation d’une porte interne dans son bureau, son message à la magistrate en charge du département au sujet des piscines qui n’avaient pas rouvert du fait de la pandémie, les démissions successives au sein de la commission du personnel du SPM, ainsi que les démarches qu’il avait effectuées concernant les sacs de compost qui n’étaient plus distribués par la ville.

Les problématiques relevées s’avéraient récurrentes et s’inscrivaient dans une problématique comportementale plus vaste. A______ avait de manière répétée adopté un comportement consistant à s’approprier des sujets ne relevant pas de sa compétence, à se considérer comme un porte-parole de différentes causes et à les défendre d’une manière parfois inappropriée et même irrespectueuse des règles applicables, de ses collègues et de ses supérieurs hiérarchiques. Certaines de ses interventions avaient posé plus de problèmes qu’elles n’en avaient résolu. Il avait, à plusieurs reprises, tenu des propos et usé de formulations et de procédés inadéquats. Il ressortait de certains de ses écrits qu’il pouvait faire preuve d’insistance, mettant ses interlocuteurs sous pression, employant des termes déplacés, voire menaçants, usant de sous-entendus irrespectueux ou encore de sarcasmes. Il lui était arrivé de dénigrer certains collaborateurs, d’avoir été irrespectueux à leur égard, par exemple en indiquant qu’il était « inacceptable et mensonger » que la cheffe de service lui reproche de ne pas respecter la voie hiérarchique, mettant en copie de son courriel comportant ces graves accusations trois collaboratrices, dont deux membres de la direction. Il avait par ailleurs tendance à mal interpréter les propos qui lui étaient adressés, à faire preuve de susceptibilité et de rigidité et à réagir ainsi de manière biaisée.

S’agissant du non-respect de la voie hiérarchique, s’il pouvait être louable que ses interventions soient motivées par son sens du service public et sa volonté de faire avancer les choses, sa manière de procéder était problématique. Indépendamment du but poursuivi, il devait en tout temps faire preuve de patience et respecter les règles ainsi que ses collègues et sa hiérarchie. Libre de penser ce qu’il voulait, il ne pouvait pas « s’exprimer sans filtre ».

L’intéressé avait ainsi commis de graves manquements à ses devoirs de service. De manière regrettable, il n’avait pas de recul sur son comportement, ni pris conscience de ses conséquences eu égard à son devoir d’entretenir des relations dignes et respectueuses avec ses collègues et sa hiérarchie, de faciliter la collaboration entre ces personnes, d’établir des contacts empreints de compréhension et de tact avec le public, de se conformer aux règlements et directives et aux instructions de ses supérieurs ainsi que d’en exécuter les ordres avec conscience et discernement, de justifier la considération et la confiance dont le personnel de la ville devait être l’objet, de respecter les intérêts de la ville et de s’abstenir de tout comportement pouvant lui porter préjudice.

L’avertissement infligé constituait une sanction clémente au regard de la gravité et de la fréquence des comportements reprochés, auxquels s’ajoutaient les deux refus d’ordre liés aux convocations et aux entretiens planifiés. Il lui était enjoint de respecter rigoureusement ses devoirs statutaires, étant précisé que tout autre manquement serait traité avec intransigeance et appellerait des mesures disciplinaires plus lourdes. La sanction prononcée ne constituait pas une appréciation de son travail.

C. a. Le 4 juillet 2022, A______ a recouru auprès du Conseil administratif de la ville contre l’avertissement du 1er juillet 2022.

Se référant à ses correspondances des 25 mars et 25 avril 2022, il demandait si « des sanctions [avaient] été prises » en lien avec son courriel du 29 octobre 2018 à la suite duquel il avait attendu deux ans pour obtenir une réponse écrite.

Il a notamment produit à l’appui de son recours un courriel adressé le 5 mai 2022 à la responsable RH du département pour l’informer qu’il avait, ce jour-là, salué F______, ainsi que des courriels dont il ressortait qu’il n’avait pas encore été donné suite à sa demande de consulter son dossier personnel. Il avait attendu trois mois pour recevoir une lettre motivée dans le cadre de la procédure disciplinaire.

b. Il a complété son recours les 7 et 19 juillet 2022.

Il avait enfin reçu copie du courriel adressé le 8 mars 2022 à la cheffe de service par F______. Les propos de ce dernier à son sujet « [relevaient] de la calomnie ». L’architecte avait manqué de bienveillance et ne s’était pas soucié de la santé des collaborateurs durant les travaux. Il avait effectivement dit aux électriciens présents au poste le jour de la réouverture, alors qu’une porte ne fonctionnait pas, que F______ « était très fort pour faire la morale » ; il n’y avait toutefois pas de public à ce moment-là.

Il avait dû remonter la voie hiérarchique jusqu’à la cheffe de service « pour raison de compétence » dans des situations où le chef de poste était absent ou lorsqu’il n’obtenait pas de réponse à ses demandes.

Le ton utilisé dans un paragraphe de la lettre d’avertissement était « infantilisant » et « totalement inapproprié ». Il avait « un grand sens des responsabilités et [ ] le même degré d’exigence envers [lui-même] qu’envers les autres ».

c. Par décision du 31 août 2022, le Conseil administratif a confirmé l’avertissement, rappelant qu’il s’agissait de la sanction la plus clémente.

Les explications apportées par l’intéressé, tant concernant son attitude à l’égard de F______ qu’au sujet du non-respect de la voie hiérarchique, ne justifiaient pas son comportement ni n’en atténuaient la gravité. Il avait adopté de manière récurrente et nonobstant des rappels à l’ordre des comportements inadéquats, irrespectueux, voire intolérables, en violation de ses devoirs de fonction.

A______ se positionnait en victime et reportait les reproches formulés à son encontre sur des tiers, soit la ville ou des membres du personnel. Les accusations de calomnie dirigées contre F______ étaient graves et ne pouvaient être tolérées, pas plus que les critiques concernant le ton employé par D______ dans le courrier d’avertissement. Au lieu de faire preuve d’introspection et de reconnaître ses erreurs, l’intéressé aggravait son cas en démontrant son incapacité à se soumettre à l’autorité, a fortiori en cas de désaccord. De manière regrettable, il n’avait toujours pas compris en quoi son comportement était inadéquat. Il était invité à saisir la portée de ses devoirs de service, étant précisé qu’un comportement outrageusement procédurier et des propos accusateurs et virulents à l’égard de collègues ou de supérieurs hiérarchiques n’étaient pas compatibles avec ces devoirs, qu’il lui était enjoint de respecter rigoureusement à l’avenir.

D. a. Le 6 septembre 2022, A______ a recouru auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre la décision précitée, concluant à son annulation.

Persistant dans les termes de ses courriers des 25 mars et 25 avril 2022 ainsi que de son recours auprès du Conseil administratif, il se plaignait de n’avoir pas pu exercer son droit d’être entendu, faute d’avoir pu consulter son dossier personnel avant le 18 juillet 2022 et d’avoir reçu copie du courriel de F______ le lendemain.

La décision attaquée était arbitraire et violait le principe de la bonne foi, dans la mesure où il n’avait reçu une lettre motivée que le 2 juillet 2022, plus de trois mois après l’ouverture de la procédure, étant précisé que « la seule et unique pièce à l’appui de l’avertissement » n’y avait pas été jointe. Ses supérieurs hiérarchiques avaient mis en œuvre une stratégie occulte et incompatible avec le respect de la personnalité des collaborateurs et les règles de la bonne foi.

Le 6 novembre 2020, il avait indiqué à la gestionnaire RH du SPM avoir attendu deux ans, soit son évaluation suivante, pour obtenir une réponse écrite à son courriel du 29 octobre 2018. Il s’était retrouvé dans une situation extrêmement stressante durant deux ans, ce qui violait ses droits de la personnalité et était constitutif de harcèlement pouvant causer une atteinte à la santé.

En se fondant sur le courriel de F______ du 8 mars 2022 « complètement gratuit », la décision du 31 août 2022 reprenait « des allégations gravement attentatoires à [sa] personnalité, sans aucune justification ».

Son supérieur hiérarchique direct, soit le chef de poste, avait salué la qualité de son travail, le qualifiant de « précieux pour la bonne marche du poste ».

b. Le 20 octobre 2022, la ville a conclu au rejet du recours et à la confirmation de la décision du 31 août 2022.

L’avertissement prononcé découlait de trois comportements distincts du recourant, à savoir premièrement son attitude à l’égard de collègues et de personnes externes à l’administration, notamment en des propos désobligeants, deuxièmement le
non-respect de la voie hiérarchique en interpellant directement la commandante sur des sujets d’importance relative ne devant pas être traités à son niveau et, troisièmement, le comportement adopté lors de l’entretien du 6 avril 2022.

Il était attendu du recourant une attitude irréprochable à l’égard des personnes qu’il côtoyait dans l’exercice de ses fonctions, de sorte que les propos tenus à l’égard de F______, même à considérer qu’ils ne l’auraient pas été devant des employés de la ville ou des tiers, étaient inacceptables. La plainte du précité n’était pas isolée, d’autres événements ayant été relatés à la commandante. Il était par ailleurs clairement établi qu’il ne respectait pas la voie hiérarchique et qu’il faisait régulièrement preuve d’impatience lorsque ses demandes n’étaient pas prises en compte rapidement, saisissant ces opportunités pour se référer à sa cheffe de service pour des sujets secondaires et non urgents. Les évaluations du recourant relevaient également qu’il rencontrait des problèmes quant à sa manière de communiquer et au respect de la voie hiérarchique.

Le droit d’être entendu du recourant n’avait pas été violé. Il avait pu se déterminer à plusieurs reprises auprès de sa hiérarchie quant aux griefs qui lui étaient reprochés. Il n’avait demandé que le 9 mai 2022 à consulter son dossier, auquel il avait pu accéder le 18 juillet 2022. Une copie du courriel de F______ du 8 mars 2022 lui avait été remise, étant relevé que la majorité des autres pièces de son dossier étaient des échanges de courriels dont le recourant était l’auteur ou le destinataire.

L’intimée n’avait ni usé d’arbitraire ni violé le principe de la bonne foi en prononçant la décision attaquée. Elle n’avait jamais tenté de tromper ou d’induire en erreur le recourant en ne lui fournissant pas les informations ou pièces pertinentes. Ce dernier ne pouvait alléguer avoir attendu trois mois pour prendre connaissance des griefs à son encontre, dès lors qu’il avait quitté l’entretien du 6 avril 2022 refusant d’écouter la commandante et ne s’était pas rendu à l’entretien fixé avec D______.

Les griefs du recourant en lien avec son courriel du 29 octobre 2018 n’étaient pas liés à la présente procédure de recours contre un avertissement ; il ne s’agissait pas d’un litige en matière de protection de la personnalité ou de la santé. En tout état, le courriel précité n’impliquait pas de réponse, étant relevé que des réponses lui avaient toutefois été données tant oralement que par écrit.

c. A______ n’a pas répliqué dans le délai imparti à cet effet.

d. Sur quoi, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1.             Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2.             Le litige porte sur la confirmation par le Conseil administratif de l’avertissement prononcé le 1er juillet 2022 par le directeur ad interim du département en lien avec divers comportements du recourant.

3.             Le recourant se plaint d’une violation de son droit d’être entendu.

3.1 Tel qu’il est garanti par l’art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), le droit d’être entendu comprend notamment le droit pour l’intéressé d’offrir des preuves pertinentes, de prendre connaissance du dossier, d’obtenir qu’il soit donné suite à ses offres de preuves pertinentes, de participer à l’administration des preuves essentielles ou à tout le moins de s’exprimer sur son résultat, lorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre (ATF 142 III 48 consid. 4.1.1 ; 140 I 285 consid. 6.3.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 1B_539/2019 du 19 mars 2020 consid. 3.1 ; 2C_203/2019 du 4 juillet 2019 consid. 2.1 et les arrêts cités).

3.2 En l’espèce, dès l’ouverture de la procédure disciplinaire à son encontre le 23 mars 2022, le recourant s’est déterminé par écrit le 25 mars 2022 puis a été convoqué à un entretien par sa cheffe de service, auquel il s’est rendu mais qu’il a quitté avant son terme au motif qu’il ne souhaitait pas entendre les reproches formulés contre lui. Il a également eu l’occasion de se déterminer par écrit les 25 et 26 avril 2022 sur le courrier adressé le 14 avril 2022 par le directeur adjoint du département, indiquant renoncer à faire valoir oralement son droit d’être entendu et refusant de se rendre au second entretien auquel il était convoqué. Ce n’est qu’à partir du 9 mai 2022 que le recourant a demandé l’accès à son dossier, en particulier au courriel du 8 mars 2022 dans lequel un architecte de la ville se plaignait de son comportement auprès de la commandante. L’intimée a donné suite à cette requête le 18 juillet 2022, soit après la lettre d’avertissement du 1er juillet 2022. Cela n’a toutefois pas empêché le recourant, qui n’ignorait pas les faits qui lui étaient reprochés, de recourir contre cette décision auprès du Conseil administratif, puis de compléter son recours une fois son dossier consulté. Il a également eu l’occasion de faire valoir son point de vue en toute connaissance de cause dans le cadre de son recours devant la chambre de céans contre la décision de confirmation de l’avertissement prononcée le 31 août 2022.

Dans ces circonstances, il ne peut pas être retenu que le droit d’être entendu du recourant aurait été violé, de sorte que ce grief sera écarté.

4.             Le recourant conteste le principe d’une sanction disciplinaire, soit en l’occurrence un avertissement, qu’il estime arbitraire, contraire au principe de la bonne foi et attentatoire à sa santé et sa personnalité.

4.1 Selon l’art. 61 LPA, le recours peut être formé pour violation du droit, y compris l’excès ou l’abus du pouvoir d’appréciation (al. 1 let. a), ainsi que pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (al. 1 let. b). Les juridictions administratives n’ont toutefois pas compétence pour apprécier l’opportunité de la décision attaquée, sauf exception prévue par la loi (al. 2), non réalisée en l’espèce.

Il n’en résulte toutefois pas que l’autorité est libre d’agir comme bon lui semble (ATA/1300/2021 du 30 novembre 2021 consid. 6). Il y a abus du pouvoir d’appréciation lorsque l’autorité, tout en restant dans les limites du pouvoir d’appréciation qui est le sien, se fonde sur des considérations qui manquent de pertinence et sont étrangères au but visé par les dispositions légales applicables, ou viole des principes généraux de droit tels que l’interdiction de l’arbitraire et de l’inégalité de traitement, le principe de la bonne foi et le principe de la proportionnalité (ATF 137 V 71 consid. 5.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_37/2020 du 7 septembre 2020 consid. 5.1).

4.2 La décision litigieuse se fonde sur les art. 82, 83 let. a, 84 let. f et g et 93 al.1 et 2 du statut du personnel de la ville du 29 juin 2010 (LC 21 151 - ci-après : le statut) et 107 al. 1 du règlement d'application du statut du 14 octobre 2009 (REGAP - LC 21 152.0).

Le chapitre VI du statut énonce les devoirs du personnel. Parmi les devoirs généraux, les membres du personnel sont tenus au respect des intérêts de la ville et doivent s'abstenir de tout ce qui peut lui porter préjudice (art. 82 statut), doivent par leur attitude entretenir des relations dignes et respectueuses avec leurs collègues, leurs supérieures et supérieurs et leurs subordonnées et subordonnés et faciliter la collaboration entre ces personnes (art. 83 let. a statut), se conformer aux règlements et directives les concernant ainsi qu'aux instructions de leurs supérieurs et en exécuter les ordres avec conscience et discernement (art. 84 let. f et g statut).

Selon l'art. 93 al. 1 statut, les membres du personnel qui violent leurs devoirs de service intentionnellement ou par négligence peuvent se voir infliger un avertissement ou un blâme ou la suppression de l’augmentation annuelle de traitement pour l’année à venir.

L'art. 107 al. 1 REGAP prévoit que le chef ou la cheffe de service, le directeur ou la directrice du département, de même que le secrétaire général ou la secrétaire générale de la Ville de Genève sont compétents pour prononcer un avertissement concernant le personnel placé sous leur autorité.

4.3 Les sanctions disciplinaires sont régies par les principes généraux du droit pénal, de sorte qu’elles ne sauraient être prononcées en l’absence de faute du fonctionnaire (Ulrich HÄFELIN/Georg MÜLLER/Felix UHLMANN, Allgemeines Verwaltungsrecht, 7ème éd., 2016, n. 1515 ; Jacques DUBEY/ Jean-Baptiste ZUFFEREY, Droit administratif général, 2014, n. 2249). La notion de faute est admise de manière très large en droit disciplinaire et celle-ci peut être commise consciemment, par négligence ou par inconscience, la négligence n’ayant pas à être prévue dans une disposition expresse pour entraîner la punissabilité de l’auteur (ATA/508/2022 du 17 mai 2022 consid. 7 ; ATA/137/2020 du 11 février 2020). La faute disciplinaire peut même être commise par méconnaissance d'une règle. Cette méconnaissance doit cependant être fautive (Gabriel BOINAY, Le droit disciplinaire dans la fonction publique et dans les professions libérales, particulièrement en Suisse romande, in Revue jurassienne de jurisprudence, 1998, n. 55 p. 14).

Tout agissement, manquement ou omission, dès lors qu'il est incompatible avec le comportement que l'on est en droit d'attendre de celui qui occupe une fonction ou qui exerce une activité soumise au droit disciplinaire peut engendrer une sanction. La loi ne peut pas mentionner toutes les violations possibles des devoirs professionnels ou de fonction. Le législateur est contraint de recourir à des clauses générales susceptibles de saisir tous les agissements et les attitudes qui peuvent constituer des violations de ces devoirs (ATA/912/2022 du 13 septembre 2022 consid. 6e ; Gabriel BOINAY, op. cit., n. 50 p. 14). Dans la fonction publique, ces normes de comportement sont contenues non seulement dans les lois, mais encore dans les cahiers des charges, les règlements et circulaires internes, les ordres de service ou même les directives verbales. Bien que nécessairement imprécises, les prescriptions disciplinaires déterminantes doivent être suffisamment claires pour que chacun puisse régler sa conduite sur elles, et puisse être à même de prévoir, à un degré raisonnable dans les circonstances de la cause, les conséquences de nature à résulter d'un acte déterminé (ATA/571/2022 du 31 mai 2022 consid. 7b ; Gabriel BOINAY, op. cit., n. 51 p. 14).

4.4 En l’espèce, il est reproché au recourant d’avoir adopté un comportement inadéquat à l’égard de ses collègues et de personnes externes à l’administration, notamment en tenant des propos désobligeants dans le cadre de livraisons de matériel et de travaux de réfection du poste C______, ce qui a été rapporté à la commandante par le biais de diverses plaintes. Le recourant s’en est en particulier pris verbalement, au moins une fois, à l’architecte en charge desdits travaux, lequel a relevé que leur collaboration avait été difficile.

Le recourant, qui ne conteste pas avoir tenu de tels propos, tente de se justifier en alléguant que l’incident n’avait pas eu lieu en présence de public, que les dénonciations de l’architecte seraient « diffamatoires » ou « calomnieuses » ou encore qu’il aurait salué ce dernier lorsqu’il lui avait dit bonjour.

Cette argumentation ne change toutefois rien au fait que les propos ont été tenus, ce que le recourant admet. Il a ainsi contrevenu à son devoir d’entretenir avec ses collègues des relations dignes et respectueuses.

4.5 Il est par ailleurs reproché au recourant d’avoir, à plusieurs reprises et faisant fi des mises en garde qui lui ont été adressées à ce sujet, contrevenu à son obligation de respecter la voie hiérarchique en interpellant directement des cadres, le plus souvent la commandante, au sujet de problématiques d’importance faible et ne présentant pas un caractère urgent.

Le recourant ne conteste pas avoir recouru de manière inappropriée à la voie hiérarchique, indiquant toutefois avoir agi ainsi en l’absence de son supérieur hiérarchique direct. Il ne démontre cependant pas que tel aurait été systématiquement le cas. Il ressort au contraire du dossier, notamment des comptes rendus de ses évaluations et des échanges de courriels produits, que le recourant a tendance à recourir à cette pratique lorsque ses requêtes n’obtiennent pas de réponse rapide ou qui le satisfasse.

Il est par conséquent établi qu’il a violé à plusieurs reprises son devoir de se conformer aux règlements et directives, ainsi qu’aux instructions de ses supérieurs hiérarchiques.

4.6 Il est enfin reproché au recourant d’avoir adopté, lors de l’entretien du 6 avril 2022 en présence de la commandante, un comportement inadmissible en mettant prématurément un terme à la rencontre, refusant d’entendre certaines des critiques formulées à son encontre, les qualifiant de « calomnie » et « diffamation ».

Le recourant ne conteste pas ces faits. Or, en agissant de la sorte, même à admettre que certaines tensions peuvent avoir lieu durant un entretien de service, le recourant a, une fois encore, contrevenu à son obligation d’entretenir avec ses supérieurs hiérarchiques des relations dignes et respectueuses.

4.7 Il n’apparaît en conséquence pas, dans la mesure où le recourant a violé ses devoirs de service à plusieurs reprises, que la décision attaquée serait infondée, contraire au principe de la bonne foi ou entachée d’arbitraire.

Au surplus, il n’apparaît pas que les griefs du recourant en lien avec d’éventuelles atteintes à sa santé ou sa personnalité, notamment concernant son courriel du 29 octobre 2018 et la suite qui y a été donnée, auraient été préalablement soumis au groupe de confiance. Exorbitants à l’objet du présent litige, ils ne seront pas examinés.

Compte tenu de ce qui précède, l’intimée n’a pas violé le droit ni excédé son pouvoir d’appréciation en prononçant un avertissement, étant relevé qu’il s’agit de la sanction la plus clémente prévue par l’art. 93 al. 1 du statut et qu’elle respecte ainsi le principe de la proportionnalité.

Entièrement mal fondé, le recours sera rejeté.

5.             Vu l’issue du litige, un émolument de CHF 1’000.- sera mis à la charge du recourant, qui succombe (art. 87 al. 1 LPA). Aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

 

 

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 6 septembre 2022 par A______ contre la décision de la Ville de Genève du 31 août 2022 ;

 

au fond :

le rejette ;

met un émolument de CHF 1’000.- à la charge de A______ ;

dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

dit que conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral ;

- par la voie du recours en matière de droit public, s'il porte sur les rapports de travail entre les parties et que la valeur litigieuse n'est pas inférieure à CHF 15'000.- ;

- par la voie du recours en matière de droit public, si la valeur litigieuse est inférieure à CHF 15'000.- et que la contestation porte sur une question juridique de principe ;

- par la voie du recours constitutionnel subsidiaire, aux conditions posées par les art. 113 ss LTF, si la valeur litigieuse est inférieure à CHF 15'000.- ;

le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, Schweizerhofquai 6, 6004 Lucerne, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à A______ ainsi qu'à la Ville de Genève.

Siégeant : Claudio MASCOTTO, président, Jean-Marc VERNIORY, Francine PAYOT ZEN-RUFFINEN, Valérie LAUBER, Eleanor McGREGOR, juges.

 

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

F. SCHEFFRE

 

 

le président siégeant :

 

 

C. MASCOTTO

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :