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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2138/2022

ATA/534/2023 du 23.05.2023 sur JTAPI/106/2023 ( PE ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2138/2022-PE ATA/534/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 23 mai 2023

2ème section

 

dans la cause

 

A______ recourant
représenté par Me Pierre OCHSNER, avocat

contre

OFFICE CANTONAL DE LA POPULATION ET DES MIGRATIONS intimé

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 26 janvier 2023 (JTAPI/106/2023)


EN FAIT

A. a. A______, né le ______ 1986, est ressortissant du Kosovo. Ses parents ainsi que ses deux sœurs vivent au Kosovo.

b. Il a sollicité des visas de retour d’une durée de trente jours, le 10 juillet 2019 et le 31 octobre 2021, notamment pour passer les fêtes de fin d’année avec sa famille.

c. Le 5 octobre 2010, il a été arrêté par la police genevoise, à qui il a expliqué qu’il se trouvait à Genève depuis le 16 août 2010. Il était arrivé en Suisse pour la première fois en 2009, afin d’y trouver un emploi. Contrôlé par la police, il s’était légitimé sous le nom de « B______ ». Il était ensuite retourné au Kosovo. Entre 2009 et 2010, il était revenu à deux reprises en Suisse. Il avait été contrôlé à chaque fois par la police et avait regagné son pays. Il ignorait qu’il faisait l’objet, sous son alias, d’une interdiction d’entrée en Suisse (ci-après : IES), valable du 17 avril 2009 au 16 avril 2012, laquelle lui avait été notifiée le 1er février 2010.

d. Par ordonnance pénale du 11 avril 2016, le Ministère public genevois l’a condamné pour séjour illégal entre le 19 octobre 2012, jour suivant sa dernière condamnation, et le 25 mars 2016, date de son interpellation, faits qu’il avait reconnus.

Il ressort de cette ordonnance que l’intéressé avait été condamné le 31 mars 2010 par les Juges d’instruction de Fribourg pour séjour illégal, et le 18 octobre 2012 par le Ministère public de l’arrondissement de La Côte, pour séjour illégal et activité lucrative sans autorisation.

e. Par décision du 25 mai 2016, le secrétariat d'État aux migrations (ci-après : SEM) a prononcé à l’encontre de A______ une IES valable du 25 juin 2016 au 24 juin 2019.

f. Le 28 juin 2016, il a été renvoyé au Kosovo.

B. a. Le 15 novembre 2018, A______ a saisi l’office cantonal de la population et des migrations (ci-après : OCPM) d’une demande d’autorisation de séjour dans le cadre de l’« opération Papyrus », indiquant qu’il était arrivé à Genève en 2008, y avait travaillé dans le domaine du bâtiment et n’avait jamais quitté le pays depuis.

Il a joint divers justificatifs, notamment une attestation de travail établie le 19 décembre 2009 par C______ pour la période du 15 janvier au 18 décembre 2009, ainsi qu’un bulletin de salaire de mars 2009, un contrat de vente de voiture signé à Perly en 2008, un document établi le 12 septembre 2017 par les transports publics genevois (ci-après : TPG) attestant de l’achat d’abonnements du 17 août au 16 septembre 2010, puis régulièrement, du 7 décembre 2010 jusqu’en mars 2016, puis à nouveau de septembre 2016 à mai 2017 et des bulletins de salaire pour les mois de mai à juillet 2018 établis par l’entreprise D______.

b. a. Le 7 mai 2021, l’OCPM a dénoncé l’administré au Ministère public en raison de soupçons portant sur les décomptes/certificats de salaires établis par l’entreprise C______ qui apparaissaient dans de nombreux « dossiers Papyrus ».

b.b. Par ordonnance pénale du 28 mai 2021, le Ministère public a déclaré A______ coupable d'entrée illégale, de séjour illégal, d'exercice d'une activité lucrative sans autorisation, de faux dans les titres, de tentative de comportement frauduleux à l'égard des autorités et d'infraction à la loi fédérale sur l'assurance-maladie du 18 mars 1994 (LAMal - RS 832.10).

b.c Par jugement du 27 mai 2022, le Tribunal de police a acquitté A______ de faux dans les titres, l’a déclaré coupable d'entrée illégale, de séjour illégal, d'exercice d'une activité lucrative sans autorisation (septembre 2016 au 19 juin 2019), de tentative de comportement frauduleux à l'égard des autorités et d'infraction à l'art. 92 al. 1 let. a LAMal.

c. Par courrier du 11 mars 2022, l’OCPM a fait part à A______ de son intention de refuser de préaviser favorablement son dossier auprès du SEM en vue de l’octroi d’une autorisation de séjour et de prononcer son renvoi de Suisse.

Il avait fait l’objet d'un renvoi le 28 juin 2016 et avait reconnu, lors de son audition du 12 mai 2021 par la police, avoir transmis de faux documents avec sa demande de régularisation, de sorte qu’il ne remplissait ni les critères de l'« opération Papyrus » ni les conditions du cas de rigueur. Il avait reconnu que des pièces fournies tendant à démontrer son séjour en Suisse étaient fausses et qu’il avait ainsi tenté d'induire l’OCPM en erreur. Il ne pouvait donc pas se prévaloir d’un comportement irréprochable. Le fait de ne pas se conformer à des injonctions claires de quitter le territoire et de ne plus y pénétrer dénotait un irrespect manifeste de l'ordre juridique suisse.

De plus, il n’avait pas démontré une très longue durée de séjour en Suisse ni aucun élément permettant de déroger à cette exigence. Son renvoi de Suisse le 28 juin 2016 avait mis un terme à son séjour. Il ne pouvait se prévaloir, depuis son retour, que de cinq années de séjour sans ininterrompu.

Enfin, il n’avait pas démontré que sa réintégration dans son pays d'origine aurait de graves conséquences sur sa situation personnelle. Il avait vécu toute son enfance et son adolescence dans sa patrie. Il avait terminé ses études au Kosovo et y avait aussi travaillé. Il y était également retourné à plusieurs reprises pour rendre visite à ses parents et ses sœurs.

d. A______ a relevé qu’il vivait en Suisse depuis douze ans. Il n’avait pas de dette et n’émargeait pas à l’assistance publique. Il rendait parfois visite à ses parents au Kosovo mais n’y avait plus d’attaches ni de logement. Le fait qu’il soit revenu à plusieurs reprises en Suisse démontrait son attachement à Genève et les fautes qu’il avait commises étaient dues à son désir d’y vivre.

e. Par décision du 27 mai 2022, l’OCPM a refusé de préaviser favorablement le dossier de A______ auprès du SEM et a prononcé son renvoi, lui impartissant un délai au 27 juillet 2022 pour quitter la Suisse.

Il a repris les arguments développés dans sa lettre d’intention, ajoutant qu’il ne ressortait pas du dossier que l’exécution du renvoi ne serait pas possible, pas licite ou qu’elle ne pourrait être raisonnablement exigée.

C. a. A______ a recouru contre cette décision au Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI), concluant à l’octroi d’un titre de séjour. Il a préalablement sollicité l’audition de son frère et d’un ami.

Il avait séjourné en Suisse d’avril 2008 au 28 juin 2016, date de son renvoi au Kosovo. Il était revenu en Suisse au mois de septembre 2016. Les documents produits avec sa demande d’autorisation de séjour étaient certes des « faux », mais il se trouvait effectivement en Suisse durant ces années. Il avait produit ces documents pour prouver des faits véridiques. Il pouvait se prévaloir d’une intégration particulièrement réussie. Malgré l'épidémie de COVID-19 durant l'année 2020, il avait pu subvenir à ses besoins sans solliciter la moindre aide et poursuivre son intégration socio-culturelle en Suisse. Il ne figurait pas au casier judiciaire et ne faisait l’objet d’aucune poursuite. Il avait fait de la Suisse sa nouvelle patrie. Il avait un cercle d’amis très développé et avait « fait ses preuves dans la langue de Molière ».

Dans la mesure où, « à quelques semaines près », toutes les conditions légales de l’autorisation de séjour requise étaient réunies, le refus de l’autorisation de séjour et son renvoi violaient le principe de la proportionnalité, aucun intérêt public ne l’emportant sur son intérêt privé à demeurer en Suisse.

b. L’OCPM a conclu au rejet du recours.

L’intéressé était revenu illégalement en Suisse en septembre 2016 et avait fait fi des décisions prises à son encontre. Il avait produit des faux documents pour induire l’OCPM en erreur. Ces éléments constituaient de surcroît un motif de révocation. Son intégration ne sortait pas de l'ordinaire. Il ne devrait pas rencontrer de difficultés insurmontables pour se réintégrer dans son pays d'origine, où il avait vécu jusqu’à l’âge de 22 ans et où il était retourné pour des motifs familiaux.

c. A______ ne s’est pas manifesté dans le délai de réplique.

d. Par jugement du 26 janvier 2023, le TAPI a rejeté le recours. Les conditions d’un cas de rigueur n’étaient pas réunies.

D. a. Par acte expédié le 1er mars 2023, A______ a recouru auprès de la chambre administrative de la Cour de justice contre ce jugement, dont il a demandé l’annulation. Il a conclu, préalablement, à pouvoir compléter son recours en vue de fournir des documents, à l’apport du dossier de l’OCPM et du TAPI ainsi qu’à l’audition de son frère et de E______. Principalement, il a conclu à l’octroi d’un titre de séjour.

Il a repris les arguments déjà exposés, soulignant sa parfaite intégration, son indépendance financière et l’absence de dettes. Les documents produits étaient des « faux », mais se rapportaient à des vrais faits. Il avait d’ailleurs été acquitté de ces faits par le Tribunal de police. Aucun intérêt public ne justifiait son renvoi.

b. L’OCPM a conclu au rejet du recours.

c. Dans sa réplique, le recourant a exposé que l’audition de son frère et du témoin devait établir sa présence en Suisse en 2008. Comme beaucoup de concitoyens, il avait été dupé par un faussaire. Hormis la brève interruption de séjour en 2016 et les infractions liées à son statut, il remplissait les conditions de l’« opération Papyrus ».

d. Sur ce, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger, y compris sur la question des mesures d’instruction sollicitées.

EN DROIT

1.             Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2.             Le recourant sollicite l’apport du dossier du TAPI et de l’OCPM, demande à pouvoir compléter son recours en fournissant des pièces et requiert l’audition de son frère et de E______ afin de démontrer sa présence en Suisse en 2008.

2.1 Tel qu'il est garanti par l'art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), le droit d'être entendu comprend notamment le droit pour l'intéressé d'offrir des preuves pertinentes et d'obtenir qu'il y soit donné suite (ATF 132 II 485 consid. 3.2 ; 127 I 54 consid. 2b). Ce droit n'empêche pas la juge de renoncer à l'administration de certaines preuves et de procéder à une appréciation anticipée de ces dernières, si elle acquiert la certitude que celles-ci ne l'amèneront pas à modifier son opinion ou si le fait à établir résulte déjà des constatations ressortant du dossier (ATF 138 III 374 consid. 4.3.2 ; 131 I 153 consid. 3). En outre, il n'implique pas le droit à l’audition de témoins (ATF 140 I 285 consid. 6.3.1).

2.2 En l’espèce, il n’y a pas lieu de procéder à l’audition du frère du recourant et du témoin, dès lors que, même si ceux-ci venaient confirmer la présence en Suisse du recourant en 2008, ce fait ne serait pas de nature à modifier l’issue du litige, comme cela sera exposé ci-après (consid. 3.10).

Par ailleurs, le chef de conclusions visant la transmission à la chambre de céans du dossier de l’OCPM et du TAPI est sans portée, la chambre administrative ayant procédé à l’apport du dossier d’office.

Enfin, le recourant a eu l’opportunité de répliquer et, ainsi, de produire encore à cette occasion des pièces, ce dont il s’est abstenu. Il n’y a donc pas lieu de lui octroyer un délai supplémentaire pour produire des pièces. Il ne l’a d’ailleurs plus requis dans sa dernière écriture.

3.             Le recourant soutient qu’il remplit les conditions permettant l’octroi d’une autorisation de séjour pour cas d’extrême gravité, tels que prévues par l’« opération Papyrus ».

3.1 Le 1er janvier 2019 est entrée en vigueur une modification de la LEI et de l’OASA. Conformément à l'art. 126 al. 1 LEI, les demandes déposées, comme en l’espèce, avant le 1er janvier 2019 sont régies par l’ancien droit.

3.2 L'art. 30 al. 1 let. b LEI permet de déroger aux conditions d'admission en Suisse, telles que prévues aux art. 18 à 29 LEI, notamment aux fins de tenir compte des cas individuels d'une extrême gravité ou d'intérêts publics majeurs.

3.3 L'art. 31 al. 1 OASA, dans sa teneur au moment des faits, prévoit que pour apprécier l'existence d'un cas individuel d'extrême gravité, il convient de tenir compte notamment de l'intégration du requérant (let. a), du respect de l'ordre juridique suisse (let. b), de sa situation familiale, particulièrement de la période de scolarisation et de la durée de la scolarité des enfants (let. c), de sa situation financière ainsi que de sa volonté de prendre part à la vie économique et d'acquérir une formation (let. d), de la durée de sa présence en Suisse (let. e), de son état de santé (let. f) ainsi que des possibilités de réintégration dans l'État de provenance (let. g). Les critères énumérés par cette disposition, qui doivent impérativement être respectés, ne sont toutefois pas exhaustifs, d'autres éléments pouvant également entrer en considération, comme les circonstances concrètes ayant amené un étranger à séjourner illégalement en Suisse (directives LEI, état au 1er janvier 2021, ch. 5.6.12).

3.4 Les dispositions dérogatoires des art. 30 LEI et 31 OASA présentent un caractère exceptionnel, et les conditions pour la reconnaissance d'une telle situation doivent être appréciées de manière restrictive (ATF 128 II 200 consid. 4). Elles ne confèrent pas de droit à l'obtention d'une autorisation de séjour (ATF 138 II 393 consid. 3.1 ; 137 II 345 consid. 3.2.1). L'autorité doit néanmoins procéder à l'examen de l'ensemble des circonstances du cas d'espèce pour déterminer l'existence d'un cas de rigueur (ATF 128 II 200 consid. 4 ; 124 II 110 consid. 2 ; ATA/38/2019 du 15 janvier 2019 consid. 4c ; directives LEI, ch. 5.6).

3.5 La reconnaissance de l'existence d'un cas d'extrême gravité implique que l'étranger concerné se trouve dans une situation de détresse personnelle. Parmi les éléments déterminants pour la reconnaissance d'un cas d'extrême gravité, il convient en particulier de citer la très longue durée du séjour en Suisse, une intégration sociale particulièrement poussée, une réussite professionnelle remarquable, la personne étrangère possédant des connaissances professionnelles si spécifiques qu'elle ne pourrait les mettre en œuvre dans son pays d'origine ou une maladie grave ne pouvant être traitée qu'en Suisse (arrêt du Tribunal fédéral 2A.543/2001 du 25 avril 2002 consid. 5.2).

3.6 La question est ainsi de savoir si, en cas de retour dans le pays d'origine, les conditions de sa réintégration sociale, au regard de la situation personnelle, professionnelle et familiale de l'intéressé, seraient gravement compromises (arrêts du Tribunal fédéral 2C_621/2015 du 11 décembre 2015 consid. 5.2.1 ; 2C_369/2010 du 4 novembre 2010 consid. 4.1).

3.7 L'« opération Papyrus » développée par le canton de Genève a visé à régulariser la situation des personnes non ressortissantes UE/AELE bien intégrées et répondant à différents critères, à savoir, selon le livret intitulé « Régulariser mon statut de séjour dans le cadre de Papyrus » disponible sous https://www.ge.ch/regulariser-mon-statut-sejour-cadre-papyrus/criteres-respecter), avoir un emploi ; être indépendant financièrement ; ne pas avoir de dettes ; avoir séjourné à Genève de manière continue sans papiers pendant cinq ans minimum (pour les familles avec enfants scolarisés) ou dix ans minimum pour les autres catégories, à savoir les couples sans enfants et les célibataires ; faire preuve d'une intégration réussie ; absence de condamnation pénale (autre que séjour illégal).

L'« opération Papyrus » n'emporte aucune dérogation aux dispositions légales applicables à la reconnaissance de raisons personnelles majeures justifiant la poursuite du séjour en Suisse (art. 30 al. 1 let. b LEI), pas plus qu'à celles relatives à la reconnaissance d'un cas individuel d'extrême gravité (art. 31 al. 1 OASA), dont les critères peuvent entrer en ligne de compte pour l'examen desdites raisons personnelles majeures (ATA/584/2017 du 23 mai 2017 consid. 4c).

3.8 Bien que la durée du séjour en Suisse constitue un critère important lors de l'examen d'un cas d'extrême gravité, elle doit néanmoins être examinée à la lumière de l'ensemble des circonstances du cas particulier et être relativisée lorsque l'étranger a séjourné en Suisse de manière illégale, sous peine de récompenser l'obstination à violer la loi (ATF 130 II 39 consid. 3 ; arrêt du Tribunal fédéral 2D_13/2016 du 11 mars 2016 consid. 3.2).

3.9 Dans le cadre de l'exercice de leur pouvoir d'appréciation, les autorités compétentes doivent tenir compte des intérêts publics, de la situation personnelle de l'étranger ainsi que de son degré d'intégration (art. 96 al. 1 LEI). L'autorité compétente dispose d'un très large pouvoir d'appréciation dans le cadre de l'examen des conditions de l'art. 31 al. 1 OASA.

3.10 En l’espèce, le recourant soutient séjourner en Suisse depuis 2008. Or, comme l’a constaté le TAPI à juste titre, le séjour du recourant a été interrompu en juin2016 lorsqu’il a été renvoyé au Kosovo. Contrairement à ce que l’intéressé fait valoir, le fait qu’il soit revenu en Suisse quelques semaines après son renvoi ne permet nullement de ne pas tenir compte de l’exécution du renvoi intervenue en juin 2016, constitutive d’une interruption de séjour. En outre, la durée du séjour du recourant doit être relativisée au regard du fait qu’elle a été effectuée dans l’illégalité et en contravention avec plusieurs IES prononcées à son égard.

Par ailleurs, quand bien même il conviendrait de tenir compte d’une durée de séjour en Suisse depuis 2008, le recourant ne remplirait pas les conditions permettant de retenir l’existence d’un cas de rigueur. En effet, celui-ci ne peut se prévaloir d’une intégration sociale remarquable. Certes, il est financièrement indépendant, ne fait pas l'objet de poursuites et maîtrise la langue française au niveau A2. Il soutient s’être constitué un cercle d’amis, mais n’allègue, cependant, pas qu’il aurait noué à Genève des liens affectifs ou amicaux d’une intensité telle qu’il ne pourrait les poursuivre par le biais de moyens de télécommunication modernes une fois de retour au Kosovo. En outre, il est revenu en Suisse malgré l’IES prononcée à son encontre, valable du 25 juin 2016 au 24 juin 2019, et la décision de renvoi, ne respectant ainsi pas les décisions rendues à son encontre. Il ne peut donc se targuer d’une intégration sociale marquée.

Il n’est pas contesté qu’il a œuvré à Genève en tant que peintre et plâtrier. Cette activité ne présente toutefois pas non plus un degré de réussite tel qu’il ne pourrait être exigé de sa part de la poursuivre dans son pays d’origine. Au contraire, il apparaît que le recourant pourra, en cas de retour dans son pays, mettre à profit l’expérience professionnelle et les connaissances de la langue française acquises durant son séjour en Suisse. En outre, il ressort du dossier qu’il s’est régulièrement rendu dans son pays d’origine avec lequel il a conservé des attaches. Àgé de 36 ans, le recourant est encore relativement jeune et en bonne santé. Ayant selon ses indications vécu au Kosovo jusqu’en 2008, il y a passé son enfance, son adolescence et le début de sa vie d’adulte. Il connaît donc les us et coutumes de son pays et en parle la langue. Ainsi, quand bien même après plusieurs années passées à l’étranger, il traversera à son retour dans son pays une nécessaire phase de réadaptation, sa réintégration socio-professionnelle ne parait pas gravement compromise.

Contrairement à ce que fait valoir le recourant, le non-respect des décisions de renvoi et de l’IES et la tentative d’induire en erreur l’OCPM ne constituent pas des « faits négligeables », dont il conviendrait de faire abstraction dans la pesée des intérêts en présence. Ces éléments dénotent non seulement l’absence d’intégration sociale, mais aussi le mépris que le recourant porte à l’ordre public suisse. Dans ces circonstances, l’intérêt public s’oppose également à l’intérêt privé du recourant à demeurer en Suisse.

Au vu de l’ensemble de ces éléments, l’OCPM n’a pas violé le droit ni abusé de son pouvoir d’appréciation en retenant que le recourant ne remplissait pas les conditions restrictives permettant l’octroi d’une autorisation de séjour pour cas de rigueur.

Il est encore observé que l’« opération Papyrus » se contentait de concrétiser les critères légaux fixés par la loi pour les cas de rigueur et que, comme cela vient d’être retenu, le recourant ne remplit pas les conditions des art. 30 al. 1 let. b LEI et 31 al. 1 OASA. Il ne saurait donc, pour ce motif non plus, se prévaloir de cette opération.

4.             Il convient encore d’examiner si le renvoi prononcé par l’OCPM est fondé.

4.1 Selon l'art. 64 al. 1 let. c LEI, l'autorité compétente rend une décision de renvoi ordinaire à l'encontre d'un étranger auquel l'autorisation de séjour est refusée ou dont l'autorisation n'est pas prolongée. Elle ne dispose à ce titre d'aucun pouvoir d'appréciation, le renvoi constituant la conséquence du rejet d'une demande d'autorisation. Le renvoi d'une personne étrangère ne peut être ordonné que si l'exécution de celui-ci est possible, licite ou peut être raisonnablement exigée (art. 83 al. 1 LEI).

4.2 En l'espèce, dès lors qu'il a, à juste titre, refusé l’octroi d’une autorisation de séjour au recourant, l'intimé devait prononcer son renvoi. Les arguments que le recourant soulève quant à ses difficultés de réintégration ont déjà été examinés supra (consid. 3.10) et le recourant n’invoque aucun élément permettant de retenir que son renvoi ne serait pas possible, licite ou ne pourrait raisonnablement être exigé ; de tels éléments ne ressortent pas non plus du dossier.

Mal fondé, le recours sera rejeté.

5.             Vu l'issue du recours, un émolument de CHF 400.- sera mis à la charge du recourant et aucune indemnité ne lui sera allouée (art. 87 LPA).

 

* * * * *

 

 

 

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 1er mars 2023 par A______ contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 26 janvier 2023 ;

au fond :

le rejette ;

met un émolument de CHF 400.- à la charge de A______ ;

dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

dit que les éventuelles voies de recours contre le présent arrêt, les délais et conditions de recevabilité qui leur sont applicables, figurent dans la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), dont un extrait est reproduit ci-après. Le mémoire de recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Pierre OCHSNER, avocat du recourant, à l'office cantonal de la population et des migrations, au Tribunal administratif de première instance ainsi qu'au secrétariat d'État aux migrations.

Siégeant : Claudio MASCOTTO, président, Florence KRAUSKOPF, Eleanor McGREGOR, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

S. HÜSLER ENZ

 

 

le président siégeant :

 

 

C. MASCOTTO

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

Genève, le 

 

la greffière :


 

Extraits de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110)
consultable sur le site: http://www.admin.ch/ch/f/rs/c173_110.html

Recours en matière de droit public
(art. 82 et ss LTF)

Recours constitutionnel subsidiaire
(art. 113 et ss LTF)

Art. 82 Principe

Le Tribunal fédéral connaît des recours :

a. contre les décisions rendues dans des causes de droit public ;

Art. 83 Exceptions

Le recours est irrecevable contre :

c. les décisions en matière de droit des étrangers qui concernent :

1. l’entrée en Suisse,

2. une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit,

3. l’admission provisoire,

4. l’expulsion fondée sur l’art. 121, al. 2, de la Constitution ou le renvoi,

5. les dérogations aux conditions d’admission,

6. la prolongation d’une autorisation frontalière, le déplacement de la résidence dans un autre canton, le changement d’emploi du titulaire d’une autorisation frontalière et la délivrance de documents de voyage aux étrangers sans pièces de légitimation ;

d. les décisions en matière d’asile qui ont été rendues :

1. par le Tribunal administratif fédéral,

2. par une autorité cantonale précédente et dont l’objet porte sur une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit ;

Art. 89 Qualité pour recourir

1 A qualité pour former un recours en matière de droit public quiconque :

a. a pris part à la procédure devant l’autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire ;

b. est particulièrement atteint par la décision ou l’acte normatif attaqué, et

c. a un intérêt digne de protection à son annulation ou à sa modification.

Art. 95 Droit suisse

Le recours peut être formé pour violation :

a. du droit fédéral ;

b. du droit international ;

c. de droits constitutionnels cantonaux ;

d. de dispositions cantonales sur le droit de vote des citoyens ainsi que sur les élections et votations populaires ;

e. du droit intercantonal.

Art. 100 Recours contre une décision

1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l’expédition complète.

______________________________________________

Art. 113 Principe

Le Tribunal fédéral connaît des recours constitutionnels contre les décisions des autorités cantonales de dernière instance qui ne peuvent faire l’objet d’aucun recours selon les art. 72 à 89.

Art. 115 Qualité pour recourir

A qualité pour former un recours constitutionnel quiconque :

a. a pris part à la procédure devant l’autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire et

b. a un intérêt juridique à l’annulation ou à la modification de la décision attaquée.

Art. 116 Motifs de recours

Le recours constitutionnel peut être formé pour violation des droits constitutionnels.

Art. 100 Recours contre une décision

1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l’expédition complète.

___________________________________________

 

Recours ordinaire simultané (art. 119 LTF)

1 Si une partie forme contre une décision un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire.

2 Le Tribunal fédéral statue sur les deux recours dans la même procédure.

3 Il examine les griefs invoqués selon les dispositions applicables au type de recours concerné.