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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2693/2021

ATA/984/2021 du 24.09.2021 ( FPUBL ) , REFUSE

RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2693/2021-FPUBL ATA/984/2021

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Décision du 24 septembre 2021

sur mesures provisionnelles

 

dans la cause

 

Monsieur A______
représenté par Me Steve Alder, avocat

contre

VILLE DE GENÈVE



Vu le recours interjeté le 18 août 2021 par Monsieur A______ auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre la décision du Conseil administratif (ci-après : le Conseil administratif) de la Ville de Genève (ci-après : la ville) du 23 juin 2021 prononçant la résiliation immédiate de son engagement ; que M. A______ concluait à l’annulation de la décision et à ce qu’il soit ordonné à la ville de le réintégrer dans l’emploi qu’il occupait, avec effet au 26 mai 2021 ; que, sur mesures provisionnelles, interdiction devait être faite à la ville de repourvoir son poste jusqu’à droit jugé ; qu’il avait été engagé au B______ (ci-après : B______) le 1er octobre 2004 et y travaillait en qualité « ______ » ; qu’il avait admis avoir insulté un visiteur du B______ et perdu son calme le 13 mai 2021 ; que le recourant traversait une situation familiale compliquée en raison de deux tentatives de suicide de sa fille et qu’il souffrait, le 13 mai 2021, de complications importantes à la suite de l'administration, la veille, de la première dose du vaccin contre le Covid-19 ; que ces deux éléments pouvaient expliquer, sans toutefois justifier, sa réaction vive du 13 mai 2021 ; qu’il s’agissait toutefois d’un acte isolé qui n'autorisait pas l’ultima ratio que représentait son licenciement immédiat rétroactif ; que son licenciement n’avait pas été précédé d’une enquête administrative ; que les faits n’avaient pas été établis à satisfaction, aucun témoin n'ayant été entendu ; que les faits qui lui étaient reprochés étaient survenus le 13 mai 2021 et la décision contestée plus d’un mois et demi après ; que ce délai n'était pas compatible avec un licenciement avec effet immédiat ; que le statut du personnel de la ville (ci-après : le SPVG) avait été violé, la condition des justes motifs n’étant pas remplie ; que même un licenciement pour motif fondé aurait été disproportionné ; que son intérêt privé à conserver son emploi était important, étant âgé de 56 ans ; que les mesures provisionnelles sollicitées visaient uniquement à lui assurer qu’en cas de victoire sur le fond, la ville le réintégrerait dans son poste ; qu'en effet, selon le SPVG, la réintégration était obligatoire et ne dépendant pas du bon vouloir de l’autorité intimée ;

que la ville a conclu au rejet de la requête en mesures provisionnelles ; que, selon l’art. 106 SPVG et la jurisprudence de la chambre administrative, lorsque la réintégration d'un collaborateur était ordonnée, elle devait s'effectuer au sein de la fonction publique de la ville « dans sa fonction ou tout autre poste jugé équivalent » ; que, dans cette hypothèse, la ville devait être en mesure de pouvoir fournir un poste équivalent, mais n’avait pas l’obligation de replacer le recourant dans son poste ; que, de surcroît, celui-ci n’occupait pas un poste au caractère particulier et unique qui rendrait impossible une réintégration ; qu’il ne démontrait pas qu’en l’absence de cette mesure provisionnelle, ses intérêts seraient sévèrement compromis et que cela lui causerait un dommage irréparable ;

que, dans sa réplique sur mesures provisionnelles, le recourant a persisté dans ses conclusions ; qu’actif depuis plus de vingt dans le domaine de la surveillance des ______, on ne pouvait exiger de lui, alors qu’il approchait de l’âge de la retraite, de réintégrer une nouvelle fonction ; que son poste ______ au sein d’un ______ revêtait certaines particularités peu usuelles au sein de l’administration municipale ; que la ville ne faisait valoir aucun intérêt à repourvoir rapidement le poste et qu’aucun intérêt public ne s’opposait au prononcé de la mesure provisionnelle sollicitée ;

que les parties ont été informées que la cause était gardée à juger sur mesures provisionnelles ;

 

Considérant, en droit, qu’interjeté en temps utile et devant la juridiction compétente, le recours est, prima facie, recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10) ;

que les décisions sur mesures provisionnelles sont prises par la présidente ou le vice-président de la chambre administrative ou, en cas d'empêchement de ceux-ci, par un autre juge (art. 21 al. 2 LPA et art. 9 al. 1 du règlement interne de la chambre administrative du 26 mai 2020) ;

qu'aux termes de l'art. 66 LPA, sauf disposition légale contraire, le recours a effet suspensif à moins que l'autorité qui a pris la décision attaquée n'ait ordonné l'exécution nonobstant recours (al. 1) ; que toutefois, lorsque aucun intérêt public ou privé prépondérant ne s'y oppose, la juridiction de recours peut, sur la demande de la partie dont les intérêts sont gravement menacés, retirer ou restituer l'effet suspensif (al. 3) ;

que, par ailleurs, l'art. 21 al 1 LPA permet le prononcé de mesures provisionnelles ;

que, selon la jurisprudence, des mesures provisionnelles – au nombre desquelles compte la restitution de l'effet suspensif – ne sont légitimes que si elles s'avèrent indispensables au maintien d'un état de fait ou à la sauvegarde d'intérêts compromis (ATF 119 V 503 consid. 3 ; ATA/898/2019 du 14 mai 2019 ; ATA/503/2018 du 23 mai 2018) ; qu'elles ne sauraient, en principe, anticiper le jugement définitif (Isabelle HÄNER, Vorsorgliche Massnahmen in Verwaltungsverfahren und Verwaltungsprozess in RDS 1997 II 253-420, spéc. 265) ;

que, par ailleurs, l'octroi de mesures provisionnelles présuppose l'urgence, à savoir que le refus de les ordonner crée pour l'intéressé la menace d'un dommage difficile à réparer (ATF 130 II 149 consid. 2.2 ; 127 II 132 consid. 3 = RDAF 2002 I 405) ;

que la chambre de céans dispose dans l'octroi de mesures provisionnelles d'un large pouvoir d'appréciation (ibid.) ;

qu’elles ne sauraient, en principe tout au moins, anticiper le jugement définitif ni équivaloir à une condamnation provisoire sur le fond, pas plus qu'aboutir abusivement à rendre d'emblée illusoire la portée du procès au fond (arrêts précités) ; qu’ainsi, dans la plupart des cas, les mesures provisionnelles consistent en un minus, soit une mesure moins importante ou incisive que celle demandée au fond, ou en un aliud, soit une mesure différente de celle demandée au fond (Isabelle HÄNER, op. cit., p. 265) ;

qu'à teneur de l'art. 30 SPVG, quelle que soit la nature et la durée de l'engagement, l'employeur et les membres du personnel peuvent en tout temps mettre fin immédiatement aux rapports de service pour justes motifs lorsque les règles de la bonne foi ne permettent plus d'exiger de la partie qui donne le congé leur continuation (al. 1) ; que la résiliation par l'employeur (licenciement) fait l'objet d'une décision motivée du Conseil administratif (al. 2) ;

que lorsque le licenciement a été précédé d'une suspension, il peut, si les conditions de l'art. 30 sont remplies, être prononcé avec effet à la date de la suspension (art. 99
al. 4 SPVG) ;

que l'art. 106 SPVG qui traite des conséquences d’un licenciement sans juste motif prévoit qu'en dérogation avec l’art. 105, en l'absence de juste motif, la chambre administrative annule le licenciement et ordonne la réintégration de la personne intéressée ;

qu’il y a donc lieu de peser l'intérêt du recourant à pouvoir retrouver son emploi, dans l'hypothèse où la chambre de céans devait ordonner sa réintégration, respectivement l'intérêt de la ville au bon fonctionnement de son administration justifiant l'éloignement du collaborateur, et éventuellement à pouvoir engager un nouveau collaborateur remplaçant, sans que cette mesure ne cause des problèmes d'ordre budgétaire, administratif ou matériel (Cléa BOUCHAT, L'effet suspensif en procédure administrative, 2015, n° 1147) ;

que la décision litigieuse précise, à propos des événements du 13 mai 2021, que le recourant a eu une altercation avec un visiteur du B______ au cours de laquelle il s’est emporté et l’a notamment traité de « connard fini », selon les déclarations du recourant et lui a dit, selon le visiteur « va te faire foutre et tire-toi ! » ; qu’elle précise que le recourant avait été sanctionné « par le passé, par un avertissement et un blâme, en raison de comportements inappropriés à l’égard de collègues » ;

que le recourant ne conteste pas avoir été grossier le 13 mai 2021 avec un visiteur du B______ ; qu’il ne conteste pas non plus les antécédents ;

que, selon un procès-verbal établi à la suite de l'audition de l'intéressé, du « ______ » et de l'administratrice, le recourant était « monté en escalade » à trois reprises, au C______, dans le hall d'entrée puis à l'extérieur du ______ avec le visiteur, habitué des lieux, qui avait porté plainte ; que le recourant avait déclaré être conscient de la mauvaise image qu'il avait donnée de lui et du ______; qu'il portait de surcroît un uniforme ______ du B______ ;

que le recourant remet en cause la tardiveté d’un licenciement avec effet immédiat, laquelle semble, de prime abord, justifiée par le délai qui lui a été octroyé et prolongé à sa demande pour faire valoir ses propres observations ; que cette façon de faire respecte prima facie le droit d’être entendu du recourant ; que les chances de succès sur cette question n’apparaissent pas, à première vue pas évidentes ;

que, de surcroît, les mesures provisionnelles tendent à imposer à la ville de ne pas repourvoir un poste dans l'hypothèse où le recourant obtiendrait gain de cause ;

que les chances de succès sont incertaines et la durée de la procédure inconnue ;

que, dans ces conditions, l'intérêt de la ville à pouvoir s'organiser pour assurer l'accueil et la sécurité du B______ doit primer ;

qu'une réintégration n'impose pas qu'elle se fasse dans le poste précédemment occupé mais peut se faire, de jurisprudence constante, « dans un emploi similaire » ;

que, compte tenu du type de poste occupé par le recourant, il ne semble pas, prima facie, qu'aucun autre poste ne puisse répondre à cette définition s’il devait obtenir gain de cause ;

que, partant, la requête en mesures provisionnelles sera rejetée, sans qu'il soit nécessaire d'évaluer plus avant les chances de succès du recours.

qu’il sera statué sur les frais de la présente décision avec le fond.

LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

rejette la requête en mesures provisionnelles ;

réserve le sort des frais de la procédure jusqu'à droit jugé au fond ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral ;

- par la voie du recours en matière de droit public, s'il porte sur les rapports de travail entre les parties et que la valeur litigieuse n'est pas inférieure à CHF 15'000.- ;

- par la voie du recours en matière de droit public, si la valeur litigieuse est inférieure à CHF 15'000.- et que la contestation porte sur une question juridique de principe ;

- par la voie du recours constitutionnel subsidiaire, aux conditions posées par les

art. 113 ss LTF, si la valeur litigieuse est inférieure à CHF 15'000.- ;

le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, Schweizerhofquai 6, 6004 Lucerne, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique la présente décision à Me Steve Alder, avocat du recourant, ainsi qu'à la Ville de Genève.

 

 

 

Le vice-président :

 

 

 

C. Mascotto

 

 

 

 

Copie conforme de cette décision a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

la greffière :