Aller au contenu principal

Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

1 resultats
A/39/2013

ATA/287/2014 du 29.04.2014 sur JTAPI/230/2013 ( LCR ) , ADMIS

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/39/2013-LCR ATA/287/2013

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 29 avril 2014

2ème section

 

dans la cause

 

Monsieur A______
représenté par Me Juliette Gerber, avocate

contre

OFFICE CANTONAL DES VÉHICULES

 


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 25 février 2013 (JTAPI/230/2013)


EN FAIT

1) Le 19 septembre 2012, Monsieur A______ circulait au volant de sa voiture sur la route de Jussy en direction de la route de Monniaz, à Genève. La vitesse autorisée sur ce tronçon était de 60 km/h. La route était plate et sèche, les conditions météorologiques bonnes et la visibilité normale.

2) A 20h01, à la hauteur du chemin des Grands-Bois, dans un virage, M. A______, roulant à une vitesse inadaptée, a perdu la maîtrise de son véhicule dans un virage, percuté un panneau de signalisation et terminé sa course dans un champ de maïs, à 6 m de la chaussée, ce qui a causé des dégâts matériels.

3) Arrivée sur les lieux, la police a constaté deux traces de ripage d’une longueur de 12,70 m. Le véhicule était équipé de pneus neufs. Un test d’éthylomètre a été effectué sur le conducteur, dont le résultat s’est révélé négatif. M. A______ a par ailleurs immédiatement reconnu avoir manipulé son autoradio avant la perte de maîtrise du véhicule.

4) Un rapport de police du 18 octobre 2012 contenant les informations susmentionnées a été transmis le 24 octobre 2012 à l’office cantonal des véhicules (ci-après : l’OCV).

5) Par pli du 24 octobre 2012, l’OCV a invité M. A______ à formuler des observations par écrit dans un délai de quinze jours.

6) Par courrier du 12 novembre 2012, M. A______ a indiqué avoir changé les pneus de son véhicule le 19 septembre 2012 dans l’après-midi. Alors qu’il circulait sur la route de Jussy, sa voiture a glissé sur la droite dans un virage, percuté un panneau de signalisation et terminé sa course dans un champ. Il fréquentait régulièrement cette route et connaissait la dangerosité de ces virages. Il a reconnu avoir manipulé son autoradio et ne pas avoir prêté suffisamment attention à la route à ce moment-là. Enfin, sa vitesse n’excédait pas celle autorisée mais n’était pas adaptée au fait que son véhicule était équipé de pneus neufs encore recouverts de paraffine. Il précisait enfin avoir un besoin professionnel de son véhicule.

7) Par décision du 19 novembre 2012, l’OCV, en se fondant sur l’art. 16c de la loi fédérale sur la circulation routière du 19 décembre 1958 (LCR - RS 741.01), a interdit à M. A______ de faire usage de son permis de conduire étranger sur le territoire suisse pour une durée de trois mois pour faute grave. L’autorité précisait avoir pris note des observations de M. A______ et que ce dernier ne justifiait pas d’un besoin professionnel de conduire des véhicules au sens défini par la jurisprudence.

8) Par pli du 19 novembre 2012, l’OCV fixait le début de l’interdiction au 21 janvier 2013, date incluse.

9) Par courrier du 28 novembre 2012, M. A______ a demandé le report du retrait de permis de conduire au 21 juin 2013 en raison de son besoin dudit permis dans le cadre de sa formation professionnelle au sein du garage B______ à Versoix, étant précisé que sa formation prendrait fin dans le courant du mois de juin 2013.

10) Par pli du 3 décembre 2012, l’OCV a accepté le report du délai d’exécution au 21 juin 2013.

11) Le 8 janvier 2013, M. A______ a, sous la plume de son conseil, formé un recours auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI), par lequel il concluait principalement à l’annulation de la décision du 19 novembre 2012 de l’OCV et au prononcé d’un retrait de permis de conduire d’un mois conformément à l’art. 16b LCR. Bien que ne contestant pas la perte de la maîtrise de son véhicule, M. A______ critiquait la qualification de la faute en se référant à la jurisprudence du Tribunal fédéral. Ainsi, au vu de celle-ci, le recourant estimait que sa faute devait être considérée comme moyennement grave seulement. Il précisait enfin avoir un besoin professionnel de son permis de conduire.

12) Par pli du 14 janvier 2013, l’OCV a persisté dans les termes de sa décision au motif que le recourant n’avait pas contesté la vitesse inadaptée aux circonstances ni la perte de la maîtrise du véhicule. Ainsi, la sécurité du trafic avait été concrètement mise en danger et la faute devait être considérée comme grave.

13) Par jugement du 25 février 2013, le TAPI a confirmé la décision de l’OCV, considérant sur la base de la jurisprudence du Tribunal fédéral que la faute du conducteur était grave et la mise en danger d’autrui sérieuse.

14) Le 12 avril 2013, M. A______ a, sous la plume de son conseil, interjeté un recours contre le jugement précité auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative), par lequel il concluait principalement à l’annulation du jugement du TAPI au motif que sa faute devait être considérée comme moyennement grave.

15) Le 18 avril 2013, le TAPI a transmis son dossier et a informé le juge délégué ne pas avoir d’observations complémentaires à formuler.

16) Le 23 avril 2013, l’OCV a indiqué persister dans les termes de sa décision du 19 novembre 2012.

17) Sur ce, la cause a été gardée à juger.

EN DROIT

1.             Les délais commencent à courir le lendemain de leur communication ou de l’événement qui les déclenche (art. 17 al. 1 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10). Les délais en jours fixés par la loi ne courent pas du 7e jour avant Pâques au 7e jour après Pâques inclusivement (art. 17A al. 1 let. a LPA).

2.             En l’espèce, le jugement du 25 février 2013 du TAPI a été notifié au recourant le 26 février 2013. Commençant à courir le 27 février 2013, le délai est venu à échéance le 12 avril 2013, étant précisé que le délai était suspendu du
25 mars 2013 au 8 avril 2013 inclus, en raison des féries de Pâques.

3.             Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 17A al. 1. let. a et 62 al. 1 let. a LPA).

4.             La question litigieuse porte sur la qualification de la faute du recourant, ce qui a une incidence sur la durée du retrait du permis de conduire.

5.             Selon l’art. 61 LPA, le recours peut être formé pour violation du droit y compris l’excès ou l’abus d’appréciation (al. 1 let. a) ainsi que pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (al. 1 let. b). Les juridictions administratives n’ont toutefois pas compétence pour apprécier l’opportunité de la décision attaquée, sauf exception prévue par la loi, non réalisée en l’espèce (al. 2).

6.             L’art. 31 al. 1 LCR prévoit que le conducteur doit rester constamment maître de son véhicule de façon à pouvoir se conformer aux devoirs de la prudence. L’art. 3 al. 1 de l’ordonnance sur les règles de la circulation routière du 13 novembre 1962 (OCR - RS 741.11) précise que le conducteur doit vouer toute son attention à la route et à la circulation.

7.             La vitesse doit toujours être adaptée aux circonstances, notamment aux particularités du véhicule et du chargement, ainsi qu’aux conditions de la route, de la circulation et de la visibilité (art. 32 al. 1 LCR). On ne peut rouler à la vitesse maximum autorisée par la limitation générale que si les conditions de la route, du trafic et de la visibilité sont bonnes (ATF 121 IV 286 consid. 4b p. 291 ; Arrêt du Tribunal fédéral 1C_525/2012 du 24 octobre 2013 consid. 2.2).

8.             La LCR distingue les infractions légères, moyennement graves et graves (art. 16a à 16c LCR). Selon l’art. 16a al. 1 let. a LCR, commet une infraction légère la personne qui, en violant les règles de la circulation, met légèrement en danger la sécurité d’autrui et à laquelle seule une faute bénigne peut être imputée. En cas d’infraction particulièrement légère, il est renoncé à toute mesure administrative (art. 16a al. 3 LCR). Dans les autres cas, il ne peut être renoncé au retrait du permis du conducteur fautif au profit d’un avertissement seulement si, au cours des deux dernières années, le permis ne lui a pas été retiré et qu’aucune autre mesure administrative n’a été prononcée (art. 16a al. 2 et 3 LCR). Commet une infraction moyennement grave selon l’art. 16b al. 1 let. a LCR la personne qui, en violant les règles de la circulation, crée un danger pour la sécurité d’autrui ou en prend le risque. Dans cette hypothèse, le permis est retiré pour un mois au minimum (art. 16b al. 2 let. a LCR). Commet une infraction grave selon l’art. 16c al. 1 let. a LCR la personne qui, en violant gravement les règles de la circulation, met sérieusement en danger la sécurité d’autrui ou en prend le risque. Conformément à l’art. 16c al. 2 let. a LCR, le permis de conduire est retiré pour trois mois au minimum après une infraction grave (ATF 135 II 138 consid. 2.2.2. ; ATF 136 II 447 consid. 3.2 in JdT 2010 I 524 ; Arrêt du Tribunal fédéral 1C_425/2012 du 17 décembre 2012 consid. 4.1).

9.             Le législateur conçoit l’art. 16b al. 1 let. a LCR comme l’élément dit de regroupement. Cette disposition n’est ainsi pas applicable aux infractions qui tombent sous le coup des art. 16a al. 1 let. a et 16c al. 1 let. a LCR. Dès lors, l’infraction est toujours considérée comme moyennement grave lorsque tous les éléments constitutifs qui permettent de la privilégier comme légère ou au contraire comme grave ne sont pas réunis. Tel est par exemple le cas lorsque la faute est grave et la mise en danger bénigne ou, inversement, si la faute est légère et la mise en danger grave (ATF 135 II 138 précité ; ATF 136 II 447 précité ; Arrêt du Tribunal fédéral 1C_425/2012 précité).

10.         Ainsi, l’application de l’art. 16c LCR est subordonnée à la double gravité de la faute commise et de la mise en danger objective (FF 1999 4134 ; Arrêt du Tribunal fédéral 1C_525/2012 précité consid. 2.1).

11.         Selon l’ancien art. 16 al. 3 let. a LCR, le cas était grave et le permis devait être retiré si le conducteur avait compromis gravement (in schwerer Weise) la sécurité de la route. Cela supposait une violation grossière d’une règle essentielle de la circulation créant un danger concret ou un danger abstrait accru (Arrêt du Tribunal fédéral 6A.70/2005 du 13 mars 2006 consid. 3.1). Les définitions des cas graves et moyennement graves au sens des art. 16c et 16b LCR dans leur teneur actuelle correspondent à celles de l’ancien droit (Arrêt du Tribunal fédéral 6A.70/2005 précité consid. 3.2).

12.         Selon la jurisprudence du Tribunal fédéral, la perte de maîtrise du véhicule ne constitue pas toujours une infraction grave au sens de l’art. 16c al. 1 let. a LCR. C’est bien selon les circonstances du cas d’espèce – en particulier selon le degré de mise en danger de la sécurité d’autrui et selon la faute du conducteur – qu’il y a lieu de qualifier la gravité de l’infraction (Arrêt du Tribunal fédéral 1C_235/2007 du 29 novembre 2007 consid. 2.2 in JdT 2007 I 525).

13.         Comme l’a relevé le Tribunal fédéral dans sa jurisprudence (Arrêt du Tribunal fédéral 1C_425/2012 précité consid. 4.2), la distinction entre une infraction moyennement grave et une infraction grave est difficile à établir. Cela signifie que la détermination de la gravité de l’infraction doit se faire de cas en cas et ne relève pas de l’opportunité. Déterminer la disposition applicable – l’art. 16b LCR ou 16c LCR – est une question de droit que le tribunal cantonal, à l’instar du Tribunal fédéral (art. 106 LTF), devrait revoir librement.

14.         La faute a été qualifiée de moyennement grave par le Tribunal fédéral dans le cas d’une perte de maîtrise à 70 km/h, sur un tronçon courbe limité à 80km/h d’un route cantonale mouillée, suivie du franchissement d’une double ligne de sécurité et d’une collision contre un mur (Arrêt du Tribunal fédéral 6A.9/2004 du 23 avril 2004 consid. 4) ainsi que dans celui d’une perte de maîtrise avec vitesse inadaptée de 80 km/h sur un tronçon autoroutier mouillé, suivi du heurt d’une paroi de sécurité (Arrêt du Tribunal fédéral 6A.67/2005 du 24 février 2006 consid. 2.2).

15.         Enfin, le Tribunal fédéral a qualifié la faute de grave dans le cas d’une perte de maîtrise d’un conducteur ayant conduit à 120 km/h sur l’autoroute par forte pluie, et ayant subi de ce fait un aquaplanage puis étant parti en embardée (ATF 120 Ib 312).

16.         En l’occurence, l’OCV ainsi que le TAPI ont considéré comme graves tant la faute du recourant que la mise en danger.

17.         Le recourant reconnaît avoir roulé à une vitesse inadaptée et avoir perdu la maîtrise de son véhicule. Il ne conteste pas non plus, à juste titre, que la mise en danger du trafic ait été sérieuse. En effet, le véhicule du recourant a percuté un panneau de signalisation avant de sortir de la chaussée et s’arrêter à 6 m de celle-ci, dans un champ de maïs.

18.         Le recourant conteste en revanche l’appréciation du TAPI quant à la faute, en ce sens qu’il estime que son comportement ne constitue pas une faute grave au sens de l’art. 16c LCR, mais seulement une faute moyennement grave au sens de l’art. 16b LCR.

19.         Il cite comme point de comparaison la faute, qualifiée de grave, d’un automobiliste récidiviste qui avait détourné son attention de la route pour ramasser une bouteille d’eau qui avait glissé entre le siège passager et la portière, perdu la maîtrise de son véhicule, empiété sur la bande herbeuse de la route et heurté une balise. A cet égard, le Tribunal fédéral avait précisé qu’en se baissant pour prendre la bouteille, l’automobiliste avait détourné son attention du trafic et perdu de vue la route pendant un moment, ce qui impliquait un risque évident pour la sécurité du trafic (Arrêt du Tribunal fédéral 1C_188/2012 du 6 septembre 2010 in JdT 2010 I 538). Le recourant considère que sa faute n’est en rien comparable à celle de cet automobiliste.

20.         La chambre administrative constate que le recourant n’a pas adapté sa vitesse aux conditions de la route, laquelle était sinueuse, ainsi qu’à l’état de son véhicule, les pneus étant encore recouverts de paraffine en raison de leur nouveauté. Il sied de plus de relever que le recourant était en formation au sein d’un garage et était parfaitement conscient du fait que la paraffine réduisait la bonne adhésion d’une voiture sur une route, même si celle-ci était sèche. Il a d’ailleurs mentionné ce point dès sa première déclaration aux gendarmes, le jour de l’accident.

21.         Le recourant a en outre expliqué ne pas avoir conduit sous l’influence de l’alcool ou de stupéfiants au moment de l’accident. La chambre administrative relève qu’il ne s’agit nullement d’un élément à décharge, étant rappelé qu’il est interdit de conduire en telle circonstance.

22.         Le recourant a encore déclaré avoir manipulé son autoradio peu de temps avant la perte de maîtrise de son véhicule, sans néanmoins avoir quitté des yeux la route. L’influence qu’a eue la manipulation de l’autoradio dans la perte de maîtrise du véhicule n’est pas clairement établie par les éléments du dossier. Toutefois, le recourant a immédiatement relevé ce fait, conscient que cette circonstance ait pu jouer un rôle dans la perte de maîtrise du véhicule et que son attention à ce moment-là était moindre. La chambre administrative considère dès lors que le recourant avait pris conscience de sa responsabilité dans la perte de maîtrise du véhicule. Elle rappelle encore que circuler habituellement sur une même route, et ainsi avoir l’impression de la connaître, n’est pas une raison qui justifierait la diminution du degré de l’attention portée au trafic.

23.         La chambre administrative considère en substance que la perte de maîtrise du véhicule est due principalement à la vitesse inadaptée du recourant par rapport aux conditions de la route (virage) et à l’état du véhicule (présence de paraffine sur les pneus). Bien que ce comportement constitue sans conteste une faute, aucun élément du dossier ne permet de retenir que le recourant ait fait preuve d’une grande imprudence au sens de la jurisprudence citée. Il n’est notamment pas établi que la vitesse de ce dernier était supérieure à celle autorisée, soit 60 km/h, ni qu’il ait accéléré dans le virage.

24.         Il paraît ainsi excessif de considérer que toutes les circonstances pour retenir une infraction grave sont présentes et que le comportement du recourant constitue une faute grave au sens de l’art. 16c LCR. Une faute moyennement grave au sens de l’art. 16b LCR, soit l’élément dit de regroupement, doit dès lors être retenue en l’espèce.

25.         S’agissant de la sanction, l’art. 16b al. 2 let. a LCR prévoit qu’après une infraction moyennement grave, le permis de conduire est retiré pour une durée d’un mois minimum.

26.         Le retrait du permis de conduire aux fins d’admonestation constitue une mesure préventive et éducative prise dans l’intérêt de la circulation routière. Cette sanction a pour but d’inciter l’auteur de l’infraction à respecter dorénavant les règles de la circulation, autrement dit d’éviter qu’il ne mette à nouveau en danger les autres usagers de la route en récidivant (Benoît CARRON, Théorie et pratique du retrait de permis in Journées du droit de la circulation routière 2012, p. 58 et référence citée). En d’autres termes, le retrait d’admonestation a pour but d’amener le conducteur qui a fautivement violé les règles de la circulation routière à faire preuve de plus de prudence et de responsabilité et, par-là, de le dissuader de commettre d’autres infractions aux règles de la circulation routière (ATF 131 II 248 consid. 4 in JdT 2005 I 460).

27.         Les circonstances du cas d’espèce doivent être prises en considération pour fixer la durée du retrait du permis de conduire, notamment l’atteinte à la sécurité routière, la gravité de la faute, les antécédents en tant que conducteur ainsi que la nécessité professionnelle de conduire un véhicule automobile. La durée minimale du retrait ne peut toutefois pas être réduite (art. 16 al. 3 LCR). Ces éléments doivent faire l'objet d'une appréciation d'ensemble, de manière à atteindre autant que possible l'effet éducatif et préventif auquel tend la mesure (Arrêt du Tribunal fédéral 1C 430/2011 du 7 mars 2012 consid. 4.1).

28.         La jurisprudence fédérale (Arrêt du Tribunal fédéral 1C_204/2008 du 25 novembre 2008 consid. 3.3.1) précise que lorsqu'il s'agit d'apprécier le besoin professionnel de conduire un véhicule automobile, il convient de respecter le principe de la proportionnalité. Le retrait du permis de conduire est ressenti plus durement par le conducteur qui en a besoin pour des raisons professionnelles, de sorte qu'un retrait plus court suffit, en règle générale, à l'admonester de manière efficace et à le dissuader de commettre de nouvelles infractions. Un tel conducteur peut donc être privé de son permis moins longtemps que celui qui se limite à un usage commun, même si les fautes commises sont identiques. La réduction s'opère ainsi proportionnellement au degré de sensibilité à la sanction. Il n'existe pas, d'un côté, des conducteurs qui n'ont aucunement besoin de leur permis et, de l'autre, des conducteurs qui en ont un besoin impératif, tels que les chauffeurs professionnels; la gradation est au contraire continue (ATF 128 II 285 consid. 2.4 p. 290; 123 II 572 consid. 2c p. 574).

29.         Enfin, s’agissant de la question de savoir si la durée légale minimale du retrait de permis peut être réduite en fonction des circonstances, il ressort des débats parlementaires que les Chambres fédérales n'entendaient pas, en particulier, qu'il puisse être dérogé aux durées minimales de retrait prévues en faveur de certaines catégories de chauffeurs particulièrement touchées par ce genre de mesure.

Sous l'ancien droit, le Tribunal fédéral avait admis un retrait d'une durée inférieure au minimum légal en cas de circonstances particulières. Le Conseil fédéral a proposé aux Chambres fédérales d'exclure cette possibilité ouverte par la jurisprudence (Message du 31 mars 1999, FF 1999 IV 4131). Les Chambres fédérales ont suivi la proposition du Conseil fédéral, renonçant ainsi à toute dérogation en faveur des chauffeurs professionnels (BO CE 2001, 562). La volonté du législateur de ne pas permettre au juge de prononcer un retrait de permis d'une durée inférieure à la durée minimale prévue par la loi est donc manifeste. Au demeurant, elle ressort clairement de l'art. 16 al. 3 LCR, où il est précisé que la nécessité professionnelle de conduire un véhicule doit être prise en considération pour fixer la durée du retrait, mais que la durée minimale du retrait ne peut pas être réduite (Arrêt du Tribunal fédéral 6A.70/2005 précité consid. 2.3).

30.         En l’espèce, l’instance précédente a prononcé un retrait du permis de conduire pour la durée légale minimale pour une infraction grave. La chambre administrative n’entend pas s’écarter de ce principe, mais appliqué à l’infraction retenue qualifiée de moyennement grave, notamment en raison du fait que le recourant est sans antécédent judiciaire en matière de circulation routière. Le permis de conduire du recourant sera donc retiré pour une durée d’un mois.

31.         Quant à la question de la nécessité professionnelle invoquée par le recourant, ce dernier avait sollicité le report du retrait de permis au mois de juin 2012, date à laquelle il devait terminer sa formation au sein du garage du Lac à Versoix, report qui avait été accepté par l’OCV. Le recourant n’avait donc aucune nécessité professionnelle de son permis de conduire, sa formation étant achevée au moment de l’exécution de la mesure. Il sera encore relevé que le recourant n’indique pas avoir un besoin professionnel actuel de son permis de conduire, étant rappelé que sa formation a pris fin il y a environ deux ans.

32.         Quoi qu’il en soit, une nécessité professionnelle du permis de conduire n’est pas prise en considération lorsque le retrait est prononcé pour la durée légale mininale, comme en l’espèce, celle-ci ne pouvant pour aucun motif être réduite conformément à l’art. 16 al. 3 LCR.

33.         Au vu de ce qui précède, le recours sera admis et la décision querellée annulée ; un retrait de permis d’une durée d’un mois sera prononcé (art. 16b al. 2 let. a LCR).

34.         Vu l’issue du litige, il ne sera pas perçu d’émolument ni alloué d’indemnité de procédure, le recourant n’ayant pas conclu à une telle indemnité (art. 87 LPA).

 

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 12 avril 2013 par Monsieur A______ contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 25 février 2013 ;

au fond :

l’admet ;

annule la décision de l’office cantonal des véhicule du 19 novembre 2012 ;

prononce un retrait du permis de conduire pour une durée d’un mois à l’encontre de Monsieur A______ ;

dit qu’il n’est pas perçu d’émolument, ni alloué d’indemnité de procédure ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent la notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Me Juliette Gerber, avocate du recourant, à l'office cantonal des véhicules, au Tribunal administratif de première instance, ainsi qu’à l’office fédéral des routes, pour information.

Siégeants : M. Verniory, président, Mme Junod, juge, M. Schifferli, juge suppléant.

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

F. Scheffre

 

le président siégeant :

 

 

J.-M. Verniory

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :