Décisions | Assistance juridique
DAAJ/24/2024 du 19.03.2024 sur AJC/5865/2023 ( AJC ) , REJETE
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE | ||
POUVOIR JUDICIAIRE AC/3499/2020 DAAJ/24/24 COUR DE JUSTICE Assistance judiciaire DÉCISION DU MARDI 19 MARS 2024 |
Statuant sur le recours déposé par :
Madame A______, domiciliée ______ [GE],
représentée par Me B______, avocate,
contre la décision du 22 novembre 2023 de la vice-présidence du Tribunal civil.
A. a. C______ (ci-après : l'époux), né le ______ 1960, originaire de Genève, et A______ (ci-après : la recourante), née [A______] le ______ 1970, de nationalité brésilienne, se sont mariés le ______ 1996 à D______ [GE], sans conclure de contrat de mariage.
Deux enfants, aujourd'hui majeurs, sont issus de cette union.
Les époux A______/C______ se sont séparés en janvier 2005 et C______ a formé une action en divorce le 17 octobre 2020 par devant le Tribunal de première instance (ci-après : le Tribunal).
La recourante, au bénéfice de l'assistance judiciaire en première instance, avait notamment conclu à ce que son époux soit condamné à lui verser une indemnité équitable au sens de l'art. 124e CC, d'un montant de 169'539 fr. 82, correspondant à la moitié des avoirs de prévoyance accumulés et retirés par celui-ci.
b. Par jugement JTPI/12220/2023 du 20 octobre 2023, le Tribunal a dit qu'il n'y avait pas lieu de procéder au partage des avoirs de prévoyance professionnelle acquis pendant la durée du mariage par la recourante, ni d'accorder d'indemnité équitable à l'une ou l'autre des parties (ch. 4 du dispositif).
b.a. Selon ce jugement, l'époux, ingénieur en informatique indépendant, avait retiré le 11 août 2000 la somme de 82'499 fr. 90 de ses avoirs de prévoyance professionnelle (139'250 fr. 90 – 56'751 fr. accumulés avant le mariage), en accord avec la recourante et en raison de son départ au Brésil.
L'époux avait ensuite retiré la somme de 199'873 fr. 75, le 11 décembre 2019, avec l'accord de la recourante, au motif d'un départ au Brésil, lequel ne s'est pas concrétisé en raison de la crise sanitaire du COVID.
Le 20 décembre 2019, l'époux a signé une "reconnaissance de dette", contresignée par la recourante et leur fille, dans laquelle il a indiqué reconnaître devoir à la recourante la somme de 100'000 fr., laquelle avait été affectée au paiement des études de médecine de leur fille. Il a notamment écrit dans ledit document : "Le montant représente la moitié de mon 2ème pilier sous laquelle [la recourante] revendique le droit. Montant qui va directement sur le compte de notre fille […]. Je m'engage expressément à lui rembourser cette somme en une seule fois". Selon la recourante, son époux ne lui a jamais versé cette somme.
b.b. La recourante avait retiré, le 10 février 2003, une somme de 1'081 fr. 85 provenant de ses avoirs de prévoyance professionnelle accumulés durant le mariage, en raison de son départ de Suisse.
Le solde de ses avoirs, accumulés jusqu'à l'introduction de la procédure de divorce, s'élevait à 19'244 fr. 83.
Il convient de préciser que la recourante, après une période de chômage, avait retrouvé une activité lucrative (salaire mensuel net de 3'455 fr. dès le 1er avril 2021), puis avait été licenciée à fin octobre 2023. Par ailleurs, son époux avait été libéré, sur mesures provisionnelles et dans le jugement en cause, de son obligation de lui verser une contribution d'entretien.
b.c. Au plan juridique, le Tribunal a notamment cité l'art. 124b al. 2 CC, selon lequel le juge attribue moins de la moitié de la prestation de sortie au conjoint créancier ou n’en attribue aucune pour de justes motifs. C’est le cas en particulier lorsque le partage par moitié s’avère inéquitable en raison : 1. de la liquidation du régime matrimonial ou de la situation économique des époux après le divorce; 2. des besoins de prévoyance de chacun des époux, compte tenu notamment de leur différence d’âge.
Ensuite, le Tribunal a écarté l'octroi d'une indemnité équitable à la recourante pour les raisons suivantes :
- L'avoir LPP accumulé durant le mariage, de 82'499 fr. 90, perçu il y a 23 ans avec l'accord de la recourante, avait été utilisé parce que les comptes bancaires du recourant présentaient un solde quasiment nul;
- L'avoir LPP accumulé durant le mariage, de 199'873 fr. 75, retiré avec l'accord de la recourante, s'était réduit à un solde 108'000 fr. en 2022 parce que 100'000 fr. (sic) avaient été affectés au financement des études de leur fille, en accord avec celle-ci et ses parents.
L'époux avait dû vivre sur son capital retraite, en l'absence de revenus, jusqu'à fin 2020-début 2021;
- Enfin, l'époux, âgé de 63 ans, était débiteur de plusieurs dizaines de milliers de francs envers l'administration fiscale (actes de défaut de biens de 67'642 fr. 20 relatifs aux années 1996, 1998 à 2000 et 22'165 fr. 50 pour 2018), ainsi que d'une dette d'environ 24'000 fr. envers la recourante dans le cadre de la liquidation du régime matrimonial.
Il convient de préciser que ce montant de 24'000 fr. (précisément 24'198 fr. 65) concerne la créance de la recourante en paiement d'arriérés de contributions à son entretien. Le Tribunal a refusé d'inscrire cette créance à l'actif du compte d'acquêts de la recourante, car cela aurait consacré une "situation d'abus de droit", en ce sens que l'époux aurait "participé à sa propre dette".
Quant à l'avoir de prévoyance de la recourante, le Tribunal a renoncé à le partager, parce que l'époux avait retiré ses avoirs et qu'elle n'obtenait pas d'indemnité équitable.
B. Par courrier du 20 novembre 2023, la recourante, par l'intermédiaire de son conseil, a communiqué le jugement sus indiqué à l'Assistance juridique et a sollicité l'extension de l'assistance juridique afin de former appel contre ce jugement, "au motif essentiel que le Juge a[vait] refusé de lui attribuer la moitié de la prévoyance professionnelle de son époux".
C. a. Par décision du 22 novembre 2023, notifiée le lendemain, la vice-présidence du Tribunal civil a rejeté la requête d'extension d'assistance juridique précitée.
Selon cette décision, la recourante, représentée par son conseil, s'était limitée à indiquer que le premier juge avait erré en refusant de lui attribuer la moitié de la prévoyance professionnelle de son époux, sans détailler ni motiver ce grief, de sorte qu'il apparaissait "impossible" de se prononcer sur les chances de succès de l'appel envisagé, rappelant à la recourante qu'il lui incombait de tenter de démontrer que sa thèse l'emportait sur celle de la décision attaquée.
En outre, l'Autorité de première instance n'avait pas le devoir d'interpeler la recourante afin qu'elle complète sa demande d'assistance juridique lacunaire parce qu'elle procédait par l'intermédiaire d'une avocate, astreinte à une obligation accrue de motivation et de collaboration et rompue de longue date aux exigences des requêtes d'assistance juridique. Il lui appartenait ainsi de démontrer que les conditions nécessaires à l'octroi de l'assistance judiciaire étaient réunies, soit, notamment, que l'appel qu'elle entendait interjeter n'était pas dénué de chances de succès.
b. Recours est formé contre cette décision par acte expédié le 4 décembre 2023 à la Présidence de la Cour de justice.
Préalablement, la recourante conclut à son audition. Principalement, elle sollicite l'annulation de la décision du 22 novembre 2023 et l'octroi de l'assistance juridique pour former appel contre le jugement du 20 octobre 2023, avec effet à cette dernière date, avec suite de frais judiciaires et dépens.
La recourante produit une pièce nouvelle (n° 5) qui comprend sa demande de reconsidération du 24 novembre 2023 de la décision en cause, accompagnée de son appel du 23 novembre 2023, de l'arrêt du Tribunal fédéral 5A_679/2019 du 5 juillet 2021 et du procès-verbal du 31 août 2023 dans la cause C/20871/2020 – 17.
c. La vice-présidence du Tribunal civil a renoncé à formuler des observations.
1. 1.1 La décision entreprise est sujette à recours auprès de la présidence de la Cour de justice en tant qu'elle refuse l'assistance juridique (art. 121 CPC et art. 21 al. 3 LaCC), compétence expressément déléguée à la vice-présidente soussignée sur la base des art. 29 al. 5 LOJ et 10 al. 1 du Règlement de la Cour de justice (RSG E 2 05.47). Le recours, écrit et motivé, est introduit auprès de l'instance de recours (art. 321 al. 1 CPC) dans un délai de dix jours (art. 321 al. 2 CPC et 11 RAJ).
1.2 En l'espèce, le recours est recevable pour avoir été interjeté dans le délai utile et en la forme écrite prescrite par la loi.
1.3 Lorsque la Cour est saisie d'un recours (art. 121 CPC), son pouvoir d'examen est limité à la violation du droit et à la constatation manifestement inexacte des faits (art. 320 CPC, applicable par renvoi de l'art. 8 al. 3 RAJ). Il appartient en particulier au recourant de motiver en droit son recours et de démontrer l'arbitraire des faits retenus par l'instance inférieure (Hohl, Procédure civile, tome II, 2ème éd., n. 2513-2515).
2. Aux termes de l'art. 326 al. 1 CPC, les conclusions, les allégations de faits et les preuves nouvelles sont irrecevables dans le cadre d'un recours.
En l'espèce, la demande de reconsidération de la recourante, du 24 novembre 2023, ainsi que son appel du 23 novembre 2023, sont postérieurs à la décision entreprise, de sorte qu'ils ne sont pas recevables, ainsi que les allégués qui s'y rapportent.
3. Il ne sera pas donné suite à la conclusion préalable de la recourante tendant à son audition par la Cour, puisqu'elle a déjà eu l'occasion d'exprimer sa position dans son acte de recours, qu'il n'existe pas un droit à être entendu oralement (ATF 125 I 209 consid. 9b; 122 II 464 consid. 4c) et qu'enfin elle n'expose pas en quoi son audition pourrait être utile à la solution du litige.
4. La recourante reproche à l'Autorité de première instance une violation de son droit d'être entendue. A son sens, celle-ci ne pouvait pas s'abstenir de procéder à un examen sommaire des chances de succès de l'appel, parce que la loi et la jurisprudence prévoient un partage des prestations de sorties acquises durant le mariage, respectivement une indemnité équitable en cas de paiement en espèce de ladite prestation de sortie durant le mariage.
A tout le moins, cette Autorité aurait dû l'interpeler en cas de doutes ou d'incertitudes relatives à l'octroi de l'extension de l'assistance juridique.
4.1 Eu égard à sa nature formelle, la violation du droit d'être entendu dénoncée par le recourant doit être examinée en premier lieu (arrêt du Tribunal fédéral 5A_662/2022 du 17 novembre 2022 consid. 3.3.1 et les références citées).
Compris comme l'un des aspects de la notion générale de procès équitable au sens de l'art. 29 Cst., le droit d'être entendu (art. 29 al. 2 Cst.) garantit notamment au justiciable le droit de s'expliquer avant qu'une décision ne soit prise à son détriment, d'avoir accès au dossier, de prendre connaissance de toute argumentation présentée au tribunal et de se déterminer à son propos, dans la mesure où il l'estime nécessaire, que celle-ci contienne ou non de nouveaux éléments de fait ou de droit, et qu'elle soit ou non concrètement susceptible d'influer sur le jugement à rendre (ATF 142 II 218 consid. 2.3; 141 I 60 consid. 3.3; 139 II 489 consid. 3.3; arrêts du Tribunal fédéral 5A_79/2023 du 24 août 2023 consid. 3.3.1; 5A_662/2022 du 17 novembre 2022 consid. 3.3.1).
4.2 En l'espèce, la recourante a exercé son droit d'être entendue par écrit, en adressant au greffe de l'Assistance juridique sa requête d'extension du 20 novembre 2023 et en lui communiquant sa volonté de former appel, au motif que le Tribunal avait refusé de lui attribuer la moitié de la prévoyance professionnelle de son ex-époux.
Dès lors, le grief de la violation de son droit d'être entendue est mal fondé.
Quant à une éventuelle obligation de l'Autorité de première instance d'interpeler la recourante avant de rejeter la requête, il sera précisé ci-dessous (consid. 5.2) qu'une telle démarche n'était pas nécessaire.
5. 5.1.1 En vertu de l'art. 117 CPC - qui concrétise les principes que le Tribunal fédéral a dégagés de l'art. 29 al. 3 Cst. (ATF 144 III 531 consid. 4.1; 142 III 131 consid. 4.1; 138 III 217 consid. 2.2.3) -, une personne a droit à l'assistance judiciaire si elle ne dispose pas de ressources suffisantes (let. a) et si sa cause ne paraît pas dépourvue de toute chance de succès (let. b). Il s'agit de conditions cumulatives. L'art. 6 par. 1 CEDH n'accorde pas de droit plus étendu à l'assistance judiciaire dans un procès civil que n'en octroie la Constitution fédérale, en particulier l'art. 29 al. 3 Cst. (arrêts du Tribunal fédéral 5A_261/2023 du 28 septembre 2023 consid. 3.1; 5A_106/2021 du 17 mai 2021 consid. 6.1).
Un procès est dépourvu de chances de succès lorsque les perspectives de le gagner sont notablement plus faibles que les risques de le perdre et ne peuvent donc être considérées comme sérieuses, de sorte qu'un plaideur raisonnable et aisé renoncerait à s'y engager en raison des frais qu'il serait exposé à devoir supporter (arrêts du Tribunal fédéral 5A_261/2023 du 28 septembre 2023 consid. 3.1; 5A_405/2023 du 17 août 2023 consid. 3.2.2). De même, le fait d'obtenir un jugement condamnatoire contre une personne, sans espoir d'obtenir le recouvrement de la créance de ce débiteur, n'est pas une démarche judiciaire raisonnable (DAAJ/122/2023 du 15 novembre 2023 consid. 2.2). Aussi, l'examen des chances de succès porte également sur l'évaluation des perspectives de recouvrement de la créance (DAAJ/83/2022 du 26 septembre 2022 consid. 3.2).
Un procès n'est, en revanche, pas dépourvu de chances de succès lorsque celles-ci et les risques d'échec s'équilibrent à peu près ou que les premières n'apparaissent que légèrement inférieures aux seconds (arrêts du Tribunal fédéral 5A_261/2023 du 28 septembre 2023 consid. 3.1; 5A_405/2023 du 17 août 2023 consid. 3.2.2).
L'absence de chances de succès peut résulter des faits ou du droit. L'assistance judiciaire sera ainsi refusée s'il apparaît d'emblée que les faits pertinents allégués sont invraisemblables ou ne pourront pas être prouvés. Il en sera de même si, en droit, la démarche du requérant se révèle d'emblée irrecevable ou juridiquement infondée. L'autorité chargée de statuer sur l'assistance judiciaire ne doit évidemment pas se substituer au juge du fond; tout au plus doit-elle examiner s'il y a des chances que le juge adopte la position soutenue par le demandeur, chances qui doivent être plus ou moins équivalentes aux risques qu'il parvienne à la conclusion contraire (arrêt du Tribunal fédéral 5A_261/2023 du 28 septembre 2023 consid. 3.1 et les références citées).
S'agissant plus particulièrement de l'examen des chances de succès d'un recours [ou d'un appel], le juge peut prendre en considération la décision de première instance en comparant celle-ci avec les griefs soulevés. De la sorte, l'examen sommaire des chances de succès auquel il doit procéder est simplifié. Cet examen ne doit toutefois pas conduire à ce que le contrôle d'une décision contestée soit rendu quasiment impossible. Ce n'est que lorsque le requérant n'oppose aucun argument substantiel à la décision de première instance que le recours [ou l'appel] peut être considéré comme dénué de chances de succès, en particulier si l'autorité de recours [ou d'appel] n'a qu'une cognition limitée ou que le recourant [ou l'appelant] doit motiver ses griefs en respectant le principe d'allégation (arrêts du Tribunal fédéral 5A_261/2023 du 28 septembre 2023 consid. 3.1; 5D_171/2020 du 28 octobre 2020 consid. 3.1; 5A_118/2020 du 27 mai 2020 consid. 6.1.2; 5A_27/2020 du 11 mai 2020 consid. 4.2).
Le critère des chances de succès doit être examiné au moment du dépôt de la requête d'assistance judiciaire, selon la crédibilité des allégations, sur la base d'un examen sommaire et de l'état du dossier (ATF 142 III 138 consid. 5.1; 139 III 475 consid. 2.2; 138 III 217 consid. 2.2.4; arrêts du Tribunal fédéral 5A_261/2023 du 28 septembre 2023 consid. 3.1; 5A_405/2023 du 17 août 2023 consid. 3.2.2; 4D_22/2020 du 29 juin 2020 consid. 4.2.3; 4D_67/2017 du 22 novembre 2017 consid. 3.2.3).
5.1.2 Applicable à la procédure portant sur l'octroi ou le refus de l'assistance judiciaire, la maxime inquisitoire est limitée par le devoir de collaborer des parties. Ce devoir de collaborer ressort en particulier de l'art. 119 al. 2 CPC qui prévoit que le requérant doit justifier de sa situation de fortune et de ses revenus et exposer l'affaire et les moyens de preuve qu'il entend invoquer (arrêt du Tribunal fédéral 5A_836/2023 du 10 janvier 2024 consid. 3.2.2). A Genève, le devoir de collaborer des parties ressort de l'art. 7 RAJ, qui dispose que la personne requérante doit fournir les renseignements et pièces nécessaires à l'appréciation des mérites de sa cause et de sa situation personnelle (al. 1). Si la personne requérante ne respecte pas ces obligations ou ne fournit pas dans les délais impartis les renseignements ou pièces qui lui sont réclamés, sa requête sera déclarée infondée (al. 3).
L'autorité saisie de la requête d'assistance judiciaire n'a pas à faire de recherches approfondies pour établir les faits ni à instruire d'office tous les moyens de preuve produits. Elle ne doit instruire la cause de manière approfondie que sur les points où des incertitudes et des imprécisions demeurent, peu importe à cet égard que celles-ci aient été mises en évidence par les parties ou qu'elle les ait elle-même constatées (arrêt du Tribunal fédéral 5A_836/2023 du 10 janvier 2024 consid. 3.2.2 et les références citées).
Le juge doit inviter la partie non assistée d'un mandataire professionnel dont la requête d'assistance judiciaire est lacunaire à compléter les informations fournies et les pièces produites afin de pouvoir vérifier si les conditions de l'art. 117 CPC sont remplies. Ce devoir d'interpellation du tribunal, déduit des art. 56 et 97 CPC, vaut avant tout pour les personnes non assistées et juridiquement inexpérimentées. Il est en effet admis que le juge n'a pas, de par son devoir d'interpellation, à compenser le manque de collaboration qu'on peut raisonnablement attendre des parties pour l'établissement des faits, ni à pallier les erreurs procédurales commises par celles-ci. Or, le plaideur assisté d'un avocat ou lui-même expérimenté voit son obligation de collaborer accrue dans la mesure où il a connaissance des conditions nécessaires à l'octroi de l'assistance judiciaire et des obligations de motivation qui lui incombent pour démontrer que celles-ci sont remplies. Le juge n'a de ce fait pas l'obligation de lui octroyer un délai supplémentaire pour compléter sa requête d'assistance judiciaire lacunaire ou imprécise. Le fait de ne pas accorder un délai supplémentaire à la partie assistée pour compléter sa demande n'est pas constitutif de formalisme excessif. Lorsque le requérant assisté ne satisfait pas suffisamment à ses incombances, la requête peut être rejetée pour défaut de motivation ou de preuve du besoin (arrêt du Tribunal fédéral 5A_836/2023 du 10 janvier 2024 consid. 3.2.2 et les références citées).
Ces principes sont applicables lorsque l'assistance judiciaire est requise pour la procédure en seconde instance (art. 119 al. 5 CPC; arrêt du Tribunal fédéral 5A_836/2023 du 10 janvier 2024 consid. 3.2.2 et les références citées).
5.1.3 Conformément à l'art. 123 al. 1 CC, les prestations de sortie acquises, y compris les avoirs de libre passage et les versements anticipés pour la propriété du logement, sont partagés par moitié.
Selon l'art. 124e al. 1 CC, si l'exécution du partage au moyen de la prévoyance professionnelle s'avère impossible, le conjoint débiteur est redevable au conjoint créancier d'une indemnité équitable sous la forme d'une prestation en capital ou d'une rente.
Le paiement en espèces de la prestation de sortie (art. 5 al. 1 LFLP) pendant le mariage entraîne l'impossibilité de partager la prestation de sortie au sens de l'art. 124e al. 1 CC, de sorte que le conjoint débiteur est redevable envers le conjoint créancier d'une indemnité équitable (arrêt du Tribunal fédéral 5A_679/2019 du 5 juillet 2021 consid. 5.3 et les références citées).
L'indemnité équitable est déterminée selon le droit et l'équité, après évaluation de toutes les circonstances du cas d'espèce. Le juge jouit d'un large pouvoir d'appréciation (art. 4 CC; arrêt du Tribunal fédéral 5A_679/2019 du 5 juillet 2021 consid. 5.3 et les références citées).
Si, pour fixer l'indemnité équitable, le juge doit partir, dans la mesure où cela est possible en l'espèce, de l'option de base du législateur à l'art. 123 al. 1 CC, à savoir du principe que les avoirs de prévoyance doivent être partagés par moitié entre les époux, il doit cependant éviter tout schématisme en partageant systématiquement par moitié le montant ainsi établi : la disposition de l'art. 124e CC, parce qu'elle contient l'expression "équitable", l'invite à la souplesse. Par conséquent, après avoir établi approximativement un partage par moitié, le juge peut adapter ce montant par une appréciation globale du cas concret (arrêt du Tribunal fédéral 5A_679/2019, 5A_681/2019 du 5 juillet 2021 consid. 5.3 et les références citées). Dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, le juge peut notamment s'inspirer des principes posés aux art. 124a et 124b al. 2 et 3 CC pour refuser totalement ou partiellement l'octroi d'une indemnité équitable ou attribuer au conjoint créancier une part plus importante que la moitié des éléments accumulés durant le mariage (arrêt du Tribunal fédéral 5A_679/2019, 5A_681/2019 du 5 juillet 2021 consid. 5.3 et les références citées).
L'art. 124b al. 2 CC permet au juge d'attribuer moins de la moitié de la prestation de sortie au conjoint créancier ou n'en attribuer aucune pour de justes motifs. C'est le cas en particulier lorsque le partage par moitié s'avère inéquitable en raison de la liquidation du régime matrimonial (ch. 1) ou de la situation économique des époux après le divorce ou des besoins de prévoyance de chacun des époux, compte tenu notamment de leur différence d'âge (ch. 2). Cette disposition doit être appliquée de manière restrictive afin d'éviter que le principe du partage par moitié des avoirs de prévoyance soit vidé de son contenu (arrêt du Tribunal fédéral 5A_469/2023 du 13 décembre 2023 consid. 5.1 et les références citées).
Toute inégalité consécutive au partage par moitié ou persistant après le partage par moitié ne constitue pas forcément un juste motif au sens de l'art. 124b al. 2 CC. Les proportions du partage ne doivent toutefois pas être inéquitables. L'iniquité se mesure à l'aune des besoins de prévoyance professionnelle de l'un et de l'autre conjoint. Le partage est donc inéquitable lorsque l'un des époux subit des désavantages flagrants par rapport à l'autre conjoint (arrêt du Tribunal fédéral 5A_469/2023 du 13 décembre 2023 consid. 5.1 et les références citées).
5.2 En l'espèce, l'examen des chances de succès de l'appel envisagé ne nécessitait ni apport de pièces complémentaires de la part de la recourante, ni production de preuves supplémentaires, car il s'agissait d'examiner, prima facie et sommairement, si le Tribunal avait correctement appliqué la loi, en particulier l'art. 124b al. 2 CC, et usé de son pouvoir d'appréciation à bon escient. A cette fin, point n'était besoin d'interpeler la recourante afin qu'elle expose ses griefs.
En effet, il ressort d'une simple lecture du jugement du 20 octobre 2023 que la recourante a été déboutée de sa prétention en paiement d'une indemnité équitable, par dérogation au principe de l'octroi d'une indemnité équitable, lorsque le partage des prestations de sorties accumulées durant le mariage n'est plus possible, à la suite du versement en espèces de celles-ci durant le mariage.
A l'appui de son refus, le Tribunal a considéré, à propos du premier retrait, que l'époux avait dépensé l'entier de l'avoir perçu et qu'il, s'agissant du second versement, ne disposait plus que d'un solde de 108'000 fr. en décembre 2022, qu'il avait dû vivre sur son capital retraite jusqu'à fin 2020-début 2021, qu'il était âgé de 63 ans et endetté envers l'Administration fiscale de plusieurs dizaines de milliers de francs, ainsi qu'envers la recourante d'environ 24'000 fr. Or, à propos de ce dernier montant, le Tribunal - qui avait exclu d'inscrire cette créance dans les acquêts de la recourante afin d'éviter une "situation abusive", à savoir octroyer une créance de participation à l'époux consécutive à la violation de son obligation d'entretien - a, néanmoins et de manière contradictoire, retenu cette dette de l'époux parmi les motifs justifiant le refus d'une indemnité équitable à la recourante.
De plus, le Tribunal n'a pas examiné le besoin de prévoyance de la recourante, ni sa situation professionnelle précaire et encore moins la reconnaissance de dette souscrite par l'époux le 20 décembre 2019, dans laquelle il avait, a priori, reconnu lui devoir une somme de 100'000 fr., au titre du partage de ses avoirs de prévoyance accumulés durant le mariage.
Il s'ensuit que l'examen des chances de succès de l'appel envisagé était possible et aisé, nonobstant l'absence de griefs exposés avec précision par le conseil de la recourante, de sorte que l'Autorité de première instance aurait pu et dû examiner d'office les perspectives de la recourante d'obtenir gain de cause en seconde instance.
Cela étant, même en admettant que l'appel de la recourante n'est pas dépourvu de chances de succès, le recouvrement de sa créance en paiement d'une indemnité équitable se heurterait à l'endettement important de l'ex-époux, compte tenu des actes de défaut de biens qui lui ont déjà été délivrés, à hauteur de 67'000 fr., augmentés de 22'000 fr. d'impôts impayés. En raison de cette situation, une personne raisonnable et aisée renoncerait à former appel du jugement entrepris en l'absence de perspective concrète de percevoir le paiement de son indemnité équitable.
Ainsi, la décision entreprise refusant l'extension de l'assistance juridique à la recourante sera confirmée, par substitution de motifs.
6. Sauf exceptions non réalisées en l'espèce, il n'est pas perçu de frais judiciaires pour la procédure d'assistance juridique (art. 119 al. 6 CPC). Il n'y a pas lieu à l'octroi de dépens.
* * * * *
PAR CES MOTIFS,
LA VICE-PRÉSIDENTE DE LA COUR :
A la forme :
Déclare recevable le recours formé par A______ contre la décision rendue le 22 novembre 2023 par la vice-présidence du Tribunal civil dans la cause AC/3499/2020.
Au fond :
Rejette le recours.
Déboute A______ de toutes autres conclusions.
Dit qu'il n'est pas perçu de frais judiciaires pour le recours.
Notifie une copie de la présente décision à A______ en l'Étude de Me B______ (art. 137 CPC).
Siégeant :
Madame Verena PEDRAZZINI RIZZI, vice-présidente; Madame Maïté VALENTE, greffière.
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Indication des voies de recours :
Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), la présente décision peut être portée dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.
Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.
Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF supérieure ou égale à
30'000 fr.