Décisions | Chambre civile
ACJC/1457/2024 du 19.11.2024 sur JTPI/14946/2023 ( OO ) , CONFIRME
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE | ||
POUVOIR JUDICIAIRE C/21459/2021 ACJC/1457/2024 ARRÊT DE LA COUR DE JUSTICE Chambre civile DU MARDI 19 NOVEMBRE 2024 |
Entre
A______ SA, sise ______ [VD], appelante d'un jugement rendu par la 12ème Chambre du Tribunal de première instance de ce canton le 18 décembre 2023, représentée par
Me Fabien HOHENAUER, avocat, Etude HDC, avenue Auguste Tissot 2bis, case postale 851, 1001 Lausanne,
et
B______ SA, sise ______ [GE], intimée, représentée par Me Christophe MISTELI, avocat, rue du Simplon 13, case postale 1075, 1800 Vevey.
A. Par jugement JTPI/14946/2023 du 18 décembre 2023, reçu par les parties le 21 décembre 2023, le Tribunal de première instance a débouté A______ SA des fins de sa demande dirigée contre B______ SA, arrêté les frais judiciaires à 3'500 fr., compensés avec l'avance de frais effectuée par A______ SA et mis à la charge de celle-ci, ordonné la restitution de 1'500 fr. à A______ SA (chiffre 1 du dispositif), condamné celle-ci à payer à B______ SA 4'000 fr. TTC à titre de dépens (ch. 2) et débouté les parties de toutes autres conclusions (ch. 3).
B. a. Par acte expédié le 1er février 2024 à la Cour de justice, A______ SA forme appel contre le jugement précité, dont elle requiert l'annulation. Elle conclut, principalement, avec suite de frais des deux instances, à la condamnation de B______ SA à lui verser 72'671 fr. avec intérêts à 5% dès le 4 février 2021 et, subsidiairement, au renvoi de la cause au Tribunal pour nouvelle décision dans le sens des considérants.
b. Dans sa réponse du 30 avril 2024, B______ SA conclut, avec suite de frais, à la confirmation du jugement attaqué.
c. Les parties ont répliqué, respectivement dupliqué, en persistant dans leurs conclusions.
d. Elles ont été informées le 26 septembre 2024 de ce que la cause était gardée à juger.
C. Les faits pertinents suivants résultent du dossier soumis à la Cour :
a. A______ SA, sise à C______ (VD), a pour but l'organisation de voyages et la favorisation des échanges culturels.
b. Les relations entre A______ SA et ses clients (les voyageurs) sont régies par des "Conditions générales de contrat et de voyage", lesquelles comprennent les dispositions suivantes (édition de novembre 2017) :
"6. Conditions particulières pour les voyages dans les régions ou pays à risques; cas de force majeure
6.4 Cas de force majeure
Si, entre la conclusion du contrat de voyage et le départ, ou durant le voyage, intervient un cas de force majeure, donc soudain, inattendu et imprévisible (guerre, guerre civile, révolution, troubles politiques, ethniques et sociaux, instabilité politique, haute criminalité, acte terroriste, enlèvement, accident de masse, catastrophe naturelle, situation sanitaire, épidémie) qui rend impossible la réalisation du voyage prévu, nous vous rembourserons uniquement les frais qui ne nous sont pas imputés et nous retiendrons en plus de toutes façons un montant de 20% du prix de l’arrangement pour nos propres frais".
"8. Responsabilité de A______ SA
8.2 Limitations et exclusions de responsabilités
8.2.2 Exclusions de responsabilité
Conformément à l’art. 5 ci-devant, A______ SA n’assume aucune responsabilité envers vous lorsque l’inexécution ou l’exécution imparfaite du contrat est imputable aux causes suivantes :
a) des négligences de votre part avant ou pendant le voyage;
b) des négligences imprévisibles ou irréparables imputables à un tiers étranger à la fourniture des prestations prévues dans le contrat;
c) en cas de force majeure ou d’un événement que A______ SA, le bureau de réservation ou le prestataire de services ne pouvaient pas prévoir ni empêcher malgré toute la diligence requise.
Dans ce cas, A______ SA est dispensé de toute obligation de verser des dommages-intérêts".
L'art. 9 fournit au voyageur des informations sur la possibilité de souscrire un contrat d'assurance couvrant les frais d'annulation ou les frais de rapatriement en cas d'accident ou de maladie.
c. B______ SA, sise à D______ [GE], est une filiale de [l'association] E______. Elle a pour but l'exploitation d'assurances de toute nature, à l'exclusion d'assurances-vie. En collaboration avec E______, elle propose la protection voyages "livret F______".
Les conditions générales du livret F______ (édition avril 2019), prévoient, sous la rubrique "Evènements assurés pour l'annulation d'un voyage" (art. 2.4), que les titulaires du livret peuvent obtenir le remboursement des frais d'annulation contractuellement dus, en cas d'annulation d'un voyage en raison d'émeutes, attentats terroristes, épidémies, mises en quarantaine ou catastrophes naturelles au cours de l'itinéraire de voyage et sur le lieu de destination de voyage, si un risque concret existe pour la vie du bénéficiaire (art. 2.4.7 let. b, en relation avec l'art. 2.5.1).
Les prestations ne sont accordées que si le préjudice subi n'est pas à supporter par un tiers, notamment un tour opérateur ou une agence de voyages ("clause de subsidiarité"; art. 1.13).
Aucune prestation n'est accordée si un voyage est annulé par l'organisateur, le tour opérateur ou l'agence de voyages, entre autres (art. 2.6.3).
d. Après échec de la conciliation et délivrance d'une autorisation de procéder, A______ SA a porté devant le Tribunal une action dirigée contre B______ SA tendant au paiement de 72'671 fr. avec intérêts à 5% dès le 4 février 2021.
Elle a allégué qu'en 2020 elle avait organisé sept voyages pour diverses associations ou collectivités. Aucun de ces voyages n'avait pu avoir lieu en raison de la pandémie de COVID-19 et des mesures prises par les autorités pour endiguer la propagation du virus. L'annulation de ces voyages étant exclusivement imputable à un cas de force majeure survenu après la réservation, il appartenait à l'assurance conclue par les voyageurs d'intervenir. Toutefois, sur les 69 personnes ayant opté pour le livret F______, seules 20 avaient été remboursées par B______ SA. L'assurance avait refusé d'indemniser les 49 autres et expliqué que les quelques remboursements opérés avaient été le fruit d'une erreur car, en réalité, il incombait à l'organisateur de restituer à ses clients les montants qu'ils avaient déboursés. A______ SA soutenait pour sa part qu'elle n'était que l'organisateur "technique" des voyages concernés et que leur annulation n'était ni de son fait ni du fait des clients, de sorte que les arguments avancés par B______ SA tombaient à faux.
A______ SA a allégué que 39 clients qui n'avaient pas été remboursés par l'assurance lui avaient cédé leurs créances. Elle a produit un "lot de cessions de créance", soit 39 documents rédigés en français ou en allemand. Le texte type en français est le suivant:
"ACCORD CONCERNANT LE REMBOURSEMENT DES FRAIS SUITE A LA NON REALISATION DU VOYAGE PREVU EN 2020.
1. A______ SA s'engage à verser définitivement à [client] le montant de [xxx] tel que demandé à l'assurance B______/F______ en couverture des frais de non réalisation du voyage prévu et organisé par A______ SA.
2. En contrepartie, le(s) soussigné(s) cède(nt) leur créance contre l'assurance B______/F______ à A______ SA à concurrence du montant versé et donne(nt) son/leur accord pour que A______ SA poursuive ses démarches en mon/notre nom auprès de mon/notre assurance dans le but d'un règlement définitif de ce litige. Les frais de procédure y relatifs seront assumés par A______ SA.
Je m'engage/nous nous engageons à reverser intégralement et dès réception tout montant reçu à ce sujet de mon/notre assurance sur le compte de A______ SA [coordonnées]".
Il est admis que les voyages dont le remboursement est sollicité n'ont pas pu avoir lieu en raison de la pandémie de COVID-19.
e. B______ SA a conclu, sous suite de frais, au rejet de la demande.
Ella a fait valoir que A______ SA n'avait ni établi que les sinistres avaient été annoncés sans délai à l'assurance, ni que les documents nécessaires à cet effet avaient été fournis. Son adverse partie ne s'était en outre pas limitée à agir comme "organisatrice technique" des voyages et avait par ailleurs procédé elle-même au remboursement de certains de ses clients, lesquels n'avaient dès lors subi aucun dommage. Quoi qu'il en soit, la preuve d'un préjudice n'avait pas été établie. On ignorait également la date à laquelle les voyages concernés avaient été annulés.
Dans la mesure où c'était A______ SA qui avait annulé les voyages, toute couverture d'assurance était exclue en vertu de l'art. 2.6.3 de ses conditions générales. Aucune prestation ne devait par ailleurs être versée dans la mesure où la loi fédérale sur les voyages à forfait du 18 juin 1993 (ci-après : LVF; RS 944.3) était applicable et obligeait l'organisateur à rembourser intégralement à ses clients les sommes déboursées. Il était vrai que B______ SA avait remboursé certains voyageurs. Ces remboursements étaient toutefois intervenus à la suite d'une erreur commise par l'un de ses gestionnaires qui n'avait pas réalisé que la LVF était applicable et que le remboursement des montants déjà versés par les clients incombait à l'organisateur, ce qui excluait toute intervention de l'assurance.
f. A______ SA a répliqué en relevant que les voyages dont il était question n'avaient pas été annulés puisqu'une annulation supposait une décision de sa part. Ils n'avaient simplement pas pu avoir lieu en raison de la pandémie de COVID-19, impossibilité qui ne lui était pas imputable, ce dont pouvaient témoigner ses clients, dont l'audition était sollicitée. B______ SA avait par ailleurs été immédiatement informée de la situation. Les documents qu'elle avait sollicités avaient également été fournis.
Elle a allégué qu'elle avait "avancé à ses clients l'argent qu'ils n'avaient pas pu obtenir de la part de [B______ SA] à titre de remboursement" (allégué 128), en offrant comme moyens de preuve son interrogatoire et l'audition de huit témoins. Elle a déposé une liste de témoins avec mention des allégués visés, dont notamment l'allégué 128 de la réplique.
g. B______ SA a dupliqué, en faisant valoir que l'existence d'une annulation, son motif, la date à laquelle elle était intervenue et l'éventuel préjudice en résultant n'avaient pas été établis. Les factures adressées aux clients, la preuve des paiements réalisés par ces derniers, ainsi que les justificatifs et conditions des remboursements n'avaient pas non plus été fournis. Les cessions de créance étaient ainsi toutes conditionnées à des versements préalables par A______ SA dont on ignorait s'ils étaient intervenus.
Ces cessions étaient quoi qu'il en soit nulles puisqu'elles avaient pour objet une somme d'argent que l'organisateur devait, de par la loi, rembourser dans son intégralité au voyageur, lequel n'était dès lors pas en droit de se retourner vers son assurance.
B______ SA a admis l'allégué 128 de sa partie adverse.
h. Lors de l'audience de débats d'instruction du Tribunal du 9 juin 2023, A______ SA a admis qu'elle était soumise à la LVF. Dans la mesure où elle n'avait pas annulé les voyages mais s'était retrouvée dans l'impossibilité de fournir les prestations promises, il ne lui appartenait toutefois pas de rembourser ses clients. Si elle l'avait malgré tout fait, c'était uniquement pour des motifs commerciaux.
B______ SA a admis que les clients visés par son adverse partie et dont celle-ci sollicitait l'audition comme témoins, avaient acquis le livret F______.
A______ SA a déclaré que les témoins figurant sur sa liste étaient des clients en mesure d'attester du montant de la créance qu'ils avaient fait valoir auprès de B______ SA, dossier à l'appui, et qui avaient essuyé un refus.
A l'issue de l'audience, et d'entente entre les parties, la procédure a été limitée à la question du fondement juridique (légal et contractuel) des prétentions de A______ SA à l'encontre de B______ SA.
i. Dans leurs plaidoiries écrites des 31 août et 4 septembre 2023, ainsi que dans leurs réplique et duplique des 14 et 15 septembre 2023, A______ SA respectivement B______ SA ont persisté dans leurs conclusions.
Le Tribunal a gardé la cause à juger à compter du 3 octobre 2023.
j. Le premier juge a considéré que, pour déterminer si les cessions de créance produites étaient valables et si A______ SA disposait par conséquent de la légitimation active, il fallait examiner si les clients étaient titulaires d'un droit subjectif à l'égard de B______ SA.
Le rapport juridique liant A______ SA à ses clients était un contrat de voyage à forfait soumis aux conditions générales de A______ SA et à la LVF.
Dans ce contexte, les clients revêtaient la qualité de voyageurs. A______ SA, nonobstant le fait que, selon elle, elle n'avait été que l'organisateur "technique" des voyages, revêtait la qualité d'organisateur au sens de la LVF. Cela ressortait également du texte des cessions de créance produites, lesquelles faisaient chacune référence à "un voyage prévu et organisé" par A______ SA.
Dans la mesure où les voyages avaient été annulés avant le départ, pour un motif non imputable aux voyageurs - soit la pandémie de COVID-19 et les mesures prises pour lutter contre la propagation du virus - et où il n'était, à l'évidence, pas possible d'offrir à ces derniers une quelconque solution de remplacement, A______ SA était tenue de leur rembourser, dans les plus brefs délais, toutes les sommes qu’ils avaient versées. Peu importait à cet égard que, dans ses conditions générales, A______ SA se réserve le droit, en cas de force majeure rendant impossible la réalisation du voyage, de ne rembourser que les frais qui ne lui étaient pas imputés et de retenir, en sus, un montant de 20% du prix de l'arrangement pour ses propres frais. Cette clause n'était en effet pas valable, puisque l'obligation de remboursement instaurée par la LVF était de nature impérative. S'agissant de l'argument de A______ SA consistant à dire que les voyages n'avaient pas été annulés mais simplement pas pu être exécutés, il était sans portée, puisqu'il était établi que ce n'étaient pas les voyageurs qui avaient annulé les voyages. L'art. 10 al. 3 LVF ouvrait le droit au remboursement intégral dès que le motif à l'origine de l'annulation n'était pas imputable au voyageur.
Au vu de ce qui précède, les voyageurs étaient titulaires d'une créance (légale) à l'encontre de A______ SA et non pas de B______ SA.
S'agissant du rapport juridique liant B______ SA aux voyageurs ayant acquis le livret F______, il était incontesté qu'il s'agissait d'un contrat d'assurance, soumis aux conditions générales produites, ainsi qu'à la LCA dans sa version antérieure au 1er janvier 2022.
Selon l'art. 33 aLCA, l'assureur pouvait exclure certains événements d'une manière précise et non équivoque de la couverture d'assurance. C'était précisément ce qui avait été fait dans les conditions générales du livret F______, qui prévoyaient qu'aucune prestation n'était accordée si le préjudice subi était à supporter par un tiers, notamment un tour opérateur ou une agence de voyages, ou si le voyage était annulé par l'organisateur, le tour opérateur ou l'agence de voyages. Dans la mesure où le voyage avait été annulé par A______ SA, laquelle revêtait la qualité d'agence de voyages, et que c'était à elle qu'il incombait - en vertu d'une obligation légale impérative - de rembourser intégralement à ses clients les sommes déboursées pour les voyages qui n'avaient finalement pas pu avoir lieu, l'exclusion prévue dans les conditions générales s'appliquait.
L'assurance n'avait ainsi pas à intervenir et les voyageurs qui avaient acquis le livret F______ ne disposaient, dans ce contexte, d'aucune créance (légale ou contractuelle) envers elle.
Dès lors, les clients concernés n'étaient titulaires d'aucun droit subjectif envers B______ SA susceptible d'être cédé à A______ SA.
Les cessions de créance - portant sur des créances inexistantes - n'étaient par conséquent pas valables et A______ SA ne disposait pas de la légitimation, de sorte que sa demande devait être rejetée.
Le premier juge a enfin exposé la motivation alternative suivante :
A______ SA aurait quoi qu'il en soit dû être déboutée au motif que les cessions de créance étaient libellées de façon conditionnelle et soumettaient la cession au paiement par A______ SA d'une somme d'argent équivalant au 20% de l'arrangement. Or A______ SA, à qui incombait la charge de la preuve, n'avait pas démontré que les voyageurs avaient bel et bien reçu les montants en échange desquels ils avaient accepté de céder leur droit subjectif - dont ils pensaient à tort être titulaires - et, partant, qu'elle était fondée à agir en justice.
1. 1.1 L'appel est recevable contre les décisions finales et incidentes de première instance, dans les causes non patrimoniales ou dont la valeur litigieuse, au dernier état des conclusions devant l'autorité inférieure, est supérieure à 10'000 fr. (art. 308 al. 1 let. a et al. 2 CPC).
En l'espèce, la valeur litigieuse minimale étant largement atteinte, la voie de l'appel est ouverte.
1.2 L'appel, écrit et motivé, est introduit auprès de l'instance d'appel dans les 30 jours à compter de la notification de la décision motivée ou de la notification postérieure de la motivation (art. 311 al. 1 CPC).
En l'espèce, l'appel du 1er février 2024 a été interjeté dans le délai précité (cf. également art. 143 al. 1 et 145 al. 1 let. c CPC), de sorte qu'il est recevable de ce point de vue.
2. L'intimée soutient que l'appel devrait être "rejeté", au motif que l'appelante ne critique pas la motivation alternative du Tribunal. Celui-ci avait considéré que les cessions de créance dont se prévalait cette dernière étaient conditionnelles; l'appelante devait ainsi de toute façon être déboutée, car elle n'avait pas établi que les voyageurs concernés avaient reçu les montants en échange desquels ils avaient accepté de céder leurs créances.
Selon l'appelante, la question de la validité éventuelle des cessions de créance en lien avec le paiement par elle-même de certains montants ne serait pas pertinente, dans la mesure où la procédure avait été limitée à la question du fondement juridique (légal et contractuel) de ses prétentions envers l'intimée.
2.1 Il est de jurisprudence que si une décision comporte une double motivation (i.e. deux motivations indépendantes, alternatives ou subsidiaires), il incombe au recourant, sous peine d'irrecevabilité, de démontrer que chacune d'elles est contraire au droit (en application de l'art. 42 LTF, cf. ATF 138 III 728 consid. 3.4; 136 III 534 consid. 2). Cette jurisprudence trouve également application sous l'empire du CPC (cf. art. 311 CPC; arrêts du Tribunal fédéral 4D_9/2021 du 19 août 2021 consid. 3.3.1; 4A_614/2018 du 8 octobre 2019 consid. 3.2; 4A_90/2017 du 12 mai 2017; 4A_525/2014 du 5 mai 2014 consid. 3). On ne peut parler de double motivation que si chacun de ses pans suffit à sceller le sort de la cause (arrêts du Tribunal fédéral 4D_9/2021 précité loc. cit.; 4A_614/2018 précité loc. cit.). Il n'y a en revanche pas de double motivation lorsque la première motivation scelle le sort du litige, mais que la seconde, qui se fonde sur un critère erroné, est en soi impropre à sceller le sort de la cause; le fait que l'appelant n'a contesté que la première motivation ne fait dès lors pas obstacle à la recevabilité de l'appel (arrêts du Tribunal fédéral 5A_524/2023 du 14 décembre 2023 consid. 3.3.1; 4A_614/2018 précité consid. 3.3).
2.2 En l'espèce, l'état de faits du jugement attaqué ne contient aucune constatation relative à la motivation alternative du Tribunal. Il résulte du dossier que l'intimée admet expressément que l'appelante a avancé à ses clients l'argent qu'ils n'avaient pas pu obtenir de la part de l'assureur. La motivation alternative du Tribunal part donc d'une prémisse non constatée, qui se révèle erronée, de sorte qu'elle ne saurait sceller le sort du litige.
Dans la mesure où il n'est ni contesté ni contestable que les griefs de l'appelante à l'encontre de la motivation principale du jugement attaqué sont suffisamment motivés, l'appel est recevable.
3. La Cour revoit la cause avec un plein pouvoir d'examen (art. 310 CPC), dans la limite des griefs qui sont formulés devant elle (ATF 142 III 413 consid. 2.2.4).
Elle contrôle librement l'appréciation des preuves effectuée par le juge de première instance et vérifie si celui-ci pouvait admettre les faits qu'il a retenus (ATF 138 III 374 consid. 4.3.1; arrêt du Tribunal fédéral 4A_153/2014 du 28 août 2014 consid. 2.2.3). Elle applique la maxime des débats et le principe de disposition (art. 55 al. 1 et art. 58 al. 1 CPC).
4. L'appelante fait grief au Tribunal d'avoir violé son droit d'être entendue en omettant d'exposer les raisons pour lesquelles les art. 12 ss LVF ne seraient pas applicables au cas d'espèce.
4.1 Le droit d'être entendu consacré à l'art. 29 al. 2 Cst. implique pour l'autorité l'obligation de motiver sa décision. Selon la jurisprudence, il suffit que le juge mentionne, au moins brièvement, les motifs qui l'ont guidé et sur lesquels il a fondé sa décision, de manière à ce que l'intéressé puisse se rendre compte de la portée de celle-ci et l'attaquer en connaissance de cause. Le juge n'a pas l'obligation d'exposer et de discuter tous les faits, moyens de preuve et griefs invoqués par les parties, mais peut au contraire se limiter à l'examen des questions décisives pour l'issue du litige (ATF 143 III 65 consid. 5.2; 134 I 83 consid. 4.1; arrêt du Tribunal fédéral 4A_400/2019 du 17 mars 2020 consid. 5.7.3, non publié in ATF 146 III 265). La motivation peut pour le reste être implicite et résulter des différents considérants de la décision. Dès lors que l'on peut discerner les motifs qui ont guidé la décision de l'autorité, le droit à une décision motivée est respecté même si la motivation présentée est erronée (ATF 141 V 557 consid. 3.2.1; arrêts du Tribunal fédéral 4A_61/2023 du 25 juin 2024 consid. 3.1; 4A_266/2020 du 23 septembre 2020 consid. 4.1; 2C_879/2015 du 29 février 2016 consid. 4.1).
Si l'autorité de recours a une cognition complète, il est en principe admissible, sous l'angle du droit constitutionnel, de guérir les défauts de motivation du jugement de première instance (ATF 135 I 279 consid. 2.6.1, in JdT 2010 I 255; 137 I 195 consid. 2.3.2, in SJ 2011 I 345; arrêt du Tribunal fédéral 5A_638/2016 du 2 décembre 2016 consid. 3.5.2).
4.2 En l'espèce, le Tribunal a fait application de l'art. 11 al. 1 en relation avec l'art. 10 al. 3 let. c LVF et a considéré, implicitement, que l'appelante ne pouvait pas se prévaloir de l'exception de l'art. 15 al. 1 let. c LVF. Cette motivation est suffisante et a permis à l'appelante de développer toutes ses critiques contre le jugement attaqué. En tout hypothèse, la Cour, qui dispose d'un pouvoir de cognition complet en fait et en droit, pourrait guérir le défaut de motivation.
5. Il n'est pas contesté que l'appelante et les clients qui lui ont cédé leurs créances ont été liés par un contrat de voyage à forfait, soumis à la LVF. Il est admis par ailleurs que les relations entre ces mêmes clients, titulaires d'un livret F______, et l'intimée sont soumis à la loi fédérale du 2 avril 1908 sur le contrat d’assurance (LCA).
L'appelante reproche au premier juge d'avoir considéré qu'elle avait annulé les voyages litigieux, alors que ceux-ci n'avaient pas pu "être exécutés en raison de la pandémie de COVID-19 et des mesures prises par les différentes autorités étatiques". A son avis, le Tribunal aurait dû appliquer les art. 14 et 15 LVF et admettre qu'elle était légitimée à se prévaloir de l'exception de l'art 15 al. 1 let. c LVF. Dans la mesure où elle n'avait aucune obligation de remboursement envers ses clients (art. 1.13 des conditions générales du livret F______) et où elle n'avait pas annulé les voyages litigieux (art. 2.6.3 des mêmes conditions générales), ladite obligation incombait à l'intimée (art. 2.4.7 desdites conditions générales). Les clients concernés disposaient donc d'une créance à l'encontre de l'intimée et les créances avaient été valablement cédées, de sorte qu'elle-même disposait de la légitimation active.
5.1 La légitimation active ou la légitimation passive relève du fondement matériel de l'action; elle appartient au sujet (actif ou passif) du droit invoqué en justice (ATF 142 III 782 consid. 3.1.3.2; 130 III 417 consid. 3.1 et 3.4; 126 III 59 consid. 1a; 125 III 82 consid. 1a). Le défaut de légitimation active ou passive entraîne le rejet de la demande (ATF 142 III 782 consid. 3.1.3). Il incombe au demandeur de prouver les faits desquels il tire sa légitimation active (ATF
123 III 60 consid. 3a).
Aux termes de l'art. 164 al. 1 CO, la cession de créance - soit d'un droit subjectif du titulaire (le créancier) à une prestation du débiteur (ATF 131 III 217 consid. 3) - est un contrat (cf. art. 165 CO) par lequel le titulaire d'une créance (le cédant) transfère son droit à une autre personne (le cessionnaire). La cession opère la substitution du titulaire d'une créance par un nouveau titulaire (arrêt du Tribunal fédéral 4A_102/2023 du 17 octobre 2023 consid. 3.1.1). Le cessionnaire devient le (nouveau) créancier de la créance cédée. C'est lui, et lui seul, qui peut la faire valoir. Le cédant n'a plus aucun droit à l'encontre du débiteur dans les rapports externes. Il ne peut plus réclamer la prestation, ni la recevoir (TERCIER/ PICHONNAZ, Le droit des obligations, 7ème éd. 2024, n. 1821 et 1836).
Le cessionnaire qui entend réclamer l'exécution de la créance cédée au débiteur cédé supporte le fardeau de la preuve pour l'existence de la créance et la validité de la cession (PROBST, Commentaire romand, Code des obligations I, 3ème éd. 2021, n. 24 ad art 169 CO).
5.2 Selon l'art. 33 LCA, sauf disposition contraire de cette loi, l’entreprise d’assurance répond de tous les événements qui présentent le caractère du risque contre les conséquences duquel l’assurance a été conclue, à moins que le contrat n’exclue certains événements d’une manière précise, non équivoque.
5.3 Le contrat de voyage à forfait ("Pauschalreisevertrag") est régi par la LVF, entrée en vigueur le 1er juillet 1994.
La LVF est issue de la Directive 90/314/CEE du Conseil du 13 juin 1990 concernant les voyages, vacances et circuits à forfait (JO L 158/59 du 23 juin 1990); celle-ci est désormais remplacée par une Directive (UE) 2015/2302 du 25 novembre 2015 relative aux voyages à forfait et aux prestations de voyage liées (JO L 326/1 du 11 décembre 2015) (ATF 145 III 409 consid. 5.2).
La LVF est issue d'un processus inhabituel dépourvu de consultations préalables, marqué par la hâte et l'absence de discussions sur les particularités du contrat de voyage à forfait. A l'instar de la Directive 90/314/CEE dont elle est inspirée, elle tend à assurer une meilleure protection du consommateur (ATF 145 III 409 consid. 5.3 et 5.4).
5.3.1 Sous la section 6 intitulée "Modification essentielle du contrat", l'art. 10 LVF ("Droits du consommateur") prévoit ce qui suit: Le consommateur peut accepter une modification essentielle du contrat ou résilier le contrat sans indemnité (al. 1) Il informe l’organisateur ou le détaillant de la résiliation du contrat dans les plus brefs délais (al. 2). Lorsque le consommateur résilie le contrat, il a droit: a. à un autre voyage à forfait de qualité équivalente ou supérieure si l’organisateur ou le détaillant peut lui en proposer un; b. à un autre voyage à forfait de qualité inférieure ainsi qu’au remboursement de la différence de prix ou c. au remboursement dans les plus brefs délais de toutes les sommes qu’il a versées (al. 3). La prétention en dommages-intérêts pour inexécution du contrat est réservée (al. 4).
Sous la section 7, intitulée "Annulation du voyage à forfait", l'art. 11 LVF prévoit ce qui suit : Lorsque l’organisateur annule le voyage à forfait avant la date du départ pour un motif non imputable au consommateur, celui-ci peut faire valoir les droits prévus à l’article 10 (al. 1). Le consommateur ne peut toutefois faire valoir aucune prétention en dommages-intérêts pour inexécution du contrat : a. lorsque l’annulation résulte du fait que le nombre de personnes inscrites pour le voyage à forfait est inférieur au nombre minimum requis et que le consommateur est informé de l’annulation, par écrit, dans les délais indiqués dans le contrat ou b. lorsque l’annulation est imputable à un cas de force majeure. La surréservation n’est pas un cas de force majeure (al. 2).
Sous la section 8, intitulée "Inexécution et exécution imparfaite du contrat", la LVF comprend les art. 12 à 16.
Les art. 12 et 13 LVF règlent les effets juridiques de la non-conformité du voyage sous l'angle de l'équilibre entre les prestations dues (garantie pour défauts du voyage), alors que les art. 14-16 LVF traitent de la responsabilité de l'organisateur sous l'angle de son obligation de réparer le dommage subi par le consommateur (STAUDER, in Commentaire romand, Code des obligations I, 2003, n. 1-2 ad art 12 LVF).
L'art. 14 LVF ("Responsabilité; principe") a la teneur suivante : L’organisateur ou le détaillant partie au contrat est responsable envers le consommateur de la bonne exécution du contrat, indépendamment du fait que les prestations dues soient à fournir par lui-même ou par d’autres prestataires de services (al. 1). L’organisateur et le détaillant peuvent recourir contre les autres prestataires de services (al. 2). Sont réservées les limitations à la réparation des dommages résultant de l’inexécution ou de l’exécution imparfaite du contrat prévues dans des conventions internationales (al. 3).
L'art. 15 LVF ("Exceptions") est rédigé comme suit : L’organisateur et le détaillant ne sont pas responsables envers le consommateur lorsque l’inexécution ou l’exécution imparfaite du contrat est imputable : a. à des manquements du consommateur; b. à des manquements imprévisibles ou insurmontables imputables à un tiers étranger à la fourniture des prestations prévues dans le contrat; c. à un cas de force majeure ou à un événement que l’organisateur, le détaillant ou le prestataire, malgré toute la diligence requise, ne pouvaient pas prévoir ou contre lesquels ils ne pouvaient rien (al 1). Dans les cas indiqués au 1er alinéa, lettres b et c, l’organisateur ou le détaillant partie au contrat sont tenus de faire diligence pour venir en aide au consommateur en difficulté (al. 2).
L'art. 19 LVF dispose qu'il ne peut être dérogé aux dispositions de la loi au détriment du consommateur que dans les cas expressément prévus.
5.3.2 Le voyagiste est responsable de la bonne exécution du contrat (art. 14 LVF). Comme pour toute responsabilité en droit suisse, les conditions en sont la violation d'une obligation contractuelle, l'existence d'un dommage, un lien de causalité adéquate et naturelle entre cette violation d'une obligation et ce dommage. La loi fédérale déroge par contre en partie à la quatrième condition d'une responsabilité contractuelle en droit suisse, soit la condition de la faute. La violation de l'obligation contractuelle peut consister soit en une inexécution totale ou partielle, soit en une violation positive du contrat. Dans une telle hypothèse, le droit du voyageur à des dommages-intérêts est réservé par l'art. 10 al. 3 LVF auquel renvoie l'art. 11 al. 1 LVF. Il n'y a pas violation d'une obligation contractuelle lorsque le contrat était conditionnel et que cette condition ne s'est pas réalisée, soit notamment lorsque le nombre minimum de participants requis n'est pas atteint (art. 11 al. 2 let a LVF). La responsabilité de voyagiste en cas de force majeure est exclue tant en amont (art. 11 al. 2 let. b LVF) qu'en aval (art. 15 al. 1 let. c LVF) (MARCHAND, De l'helvético-compatibilité de la loi fédérale du 18 juin 1993 sur les voyages à forfait, in PJA, 1994, 721ss, p. 734, n 51-52).
L'art. 10 al. 3 let. c LVF confirme la logique selon laquelle le prix de toute prestation non fournie doit être restitué (non sous forme de dommage soumis aux exceptions de l'art. 15 LVF). Le remboursement du prix n'est pas l'objet des exceptions de l'art. 15 LVF (MARCHAND, op. cit., pp. 729-730, n. 30 et note 74). En d'autres termes, le droit à la restitution du prix n'est pas soumis aux objections (preuves libératoires) de l'art. 15 al. 1 let. b et c LVF (STAUDER, op. cit., n 12 ad art. 13 LVF).
5.4 Par force majeure, on entend un événement imprévisible et exceptionnel, qui survient avec une violence inéluctable (ATF 102 Ib 257 consid. 5).
5.5 Selon l'art. 62 LP, en cas d’épidémie, de calamité publique ou de guerre, le Conseil fédéral ou, avec son assentiment, le gouvernement cantonal peut ordonner la suspension des poursuites sur une portion du territoire ou au profit de certaines catégories de personnes.
Lors de sa séance du 20 mai 2020, le Conseil fédéral a ordonné, à la demande du Parlement, une suspension des poursuites d’une durée limitée en faveur du secteur du voyage. Les agences de voyages ne pourraient pas être mises en poursuite pour les sommes à rembourser suite aux annulations de voyages, et ce jusqu’au 30 septembre 2020. En adoptant cette mesure spécifique, le Conseil fédéral a tenu compte des défis particuliers, notamment d’ordre légal, que devaient relever les agences de voyages. Du fait de la crise liée au coronavirus, de nombreux voyages ne pouvaient pas avoir lieu. Conformément aux dispositions de la LVF, les voyagistes étaient tenus en pareil cas de rembourser à leurs clients la totalité des sommes que ces derniers avaient déjà versées. Durant les mois suivants, ils devraient donc faire face à un grand nombre de créances découlant de la non-réalisation des prestations (Communiqué du Conseil fédéral du 20 mai 2020, www.admin.ch/gov/fr/accueil/documentation).
Le Conseil fédéral a donc adopté l'Ordonnance instaurant une suspension des poursuites au sens de l’art. 62 de la loi sur la poursuite pour dettes et la faillite en faveur du secteur du voyage, entrée en vigueur le 21 mai 2020. L'art. 1 de cette ordonnance prévoyait que la suspension des poursuites prévue par l’art. 62 LP s’appliquait aux créances découlant de la non-réalisation d’une prestation en matière de voyage que les clients avaient contre un organisateur ou un détaillant de voyages au sens de l’art. 2 LVF.
5.6.
5.6.1 En l'espèce, dans son acte d'appel, l'appelante expose qu'elle était prête à maintenir chacun des voyages organisés et que ses clients l'avaient constamment encouragée à « tenir bon » car « la situation serait rapidement terminée ». En définitive et compte tenu des circonstances, elle n'avait pas eu d'autre choix que de se conformer aux restrictions imposées par les pays concernés. Pour chaque voyage, elle avait attendu le dernier moment avant d'informer ses clients que pour des raisons qui ne lui étaient pas imputables et qui n'étaient pas non plus imputables à ses partenaires - puisque dictées par des gouvernements étrangers - les voyages ne pourraient tout simplement pas se faire (appel, p. 10, ch. 54).
Il est donc expressément admis que l'on se trouve dans l'hypothèse où l'organisateur a informé les consommateurs de l'annulation des voyages avant la date de départ. L'objection de l'appelante, qui fait valoir qu'elle n'aurait pas annulé les voyages puisqu'elle n'aurait pris aucune "décision" d'annulation, ne résiste ainsi pas à l'examen. En toute hypothèse, l'art. 6.4 des conditions générales de contrat et de voyage de l'appelante (qui peuvent déroger aux disposition de la LVF en faveur du consommateur; cf. art. 19 LVF a contrario) n'évoque pas une annulation du voyage par l'organisateur, mais la survenance d'un cas de force majeure rendant impossible la réalisation du voyage prévu, survenance qui suffit à fonder l'obligation d'un remboursement des frais par l'appelante.
Cela étant, il est incontesté et incontestable que les annulations sont intervenues pour un motif imputable à un cas de force majeure et non pas aux consommateurs. L'appelante avait donc l'obligation légale de rembourser dans les plus brefs délais aux voyageurs toutes les sommes qu'ils avaient versées (art. 11 al. 1 en relation avec l'art. 10 al. 3 let. c LVF). Les consommateurs ne pouvaient en revanche faire valoir aucune prétention en dommages-intérêts pour inexécution du contrat (art. 11 al. 2 let. b LVF), de sorte que l'exception de l'art. 15 al. 1 let. c LVF n'entrait pas en ligne de compte. Cette exception est reprise dans les conditions générales de contrat et de voyage de l'appelante à l'art. 8.2.2, qui règle la responsabilité de l'appelante, et non pas à l'art. 6.4, qui vise le cas de force majeure. L'art. 8.2.2 dispose que, dans ce cas, l'appelante est dispensée de toute obligation de verser des dommages-intérêts, mais non pas de celle de rembourser les sommes déjà versées par le voyageur. Il s'agit du système prévu par la LVF.
Enfin, le fait que la LVF impose aux voyagistes de rembourser la totalité des sommes déjà versées par les clients dont le voyage a été annulé en raison de la pandémie de COVID-19 est confirmé par la Communication du 20 mai 2020 du Conseil fédéral, qui a pris à cette époque des mesures pour protéger les organisateurs de voyages du risque de graves difficultés financières.
5.6.2 Les conditions générales du livret F______ proposé par l'intimée prévoient que celle-ci n'accorde les prestations convenues que si le préjudice subi n'est pas à supporter par un tiers, notamment un tour opérateur ou une agence de voyages ("clause de subsidiarité"; art. 1.13). Il n'est pas contesté que cette exclusion, précise et non équivoque, est conforme à l'art 33 LCA. Dans la mesure où l'obligation de rembourser aux voyageurs toutes les sommes versées incombait à l'appelante, les clients de celle-ci visés dans la présente procédure n'avaient pas de créances à faire valoir contre l'intimée. L'existence des créances cédées n'étant pas établie, l'appelante ne dispose pas de la légitimation active, comme l'a à juste titre retenu le Tribunal.
5.6.3 Le jugement attaqué sera donc confirmé.
6. Les frais judiciaires d'appel seront arrêtés à 4'500 fr. (art. 19 al. 3 LaCC; art. 17 et 35 RTFMC) et mis à la charge de l'appelante, qui succombe (art. 105 al. 1, art. 106 al. 1 CPC). Ils seront compensés à due concurrence avec l'avance de frais fournie par celle-ci, qui demeure acquise à l'Etat de Genève (art. 111 al. 1 CPC).
L'appelante sera également condamnée à verser à l'intimée la somme de 4'000 fr. à titre de dépens d'appel (art. 96, 105 al. 2 et 111 al. 2 CPC; art. 23 LaCC; art. 85 et 90 RTFMC), débours et TVA compris (art. 25 et 26 al. 1 LaCC).
* * * * *
La Chambre civile :
A la forme :
Déclare recevable l'appel interjeté le 1er février 2024 par A______ SA contre le jugement JTPI/14946/2023 rendu le 18 décembre 2023 par le Tribunal de première instance dans la cause C/21459/2021-12.
Au fond :
Confirme le jugement attaqué.
Déboute les parties de toutes autres conclusions.
Sur les frais :
Arrête les frais judiciaires d'appel à 4'500 fr., les met à la charge de A______ SA et les compense avec l'avance fournie par celle-ci, laquelle demeure acquise à l'Etat de Genève.
Condamne A______ SA à verser à B______ SA 4'000 fr. à titre de dépens d'appel.
Siégeant :
Monsieur Ivo BUETTI, président; Madame Sylvie DROIN, Monsieur
Jean REYMOND, juges; Madame Sophie MARTINEZ, greffière.
Indication des voies de recours :
Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.
Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.
Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF supérieure ou égale à 30'000 fr.