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Décisions | Chambre civile

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C/26008/2018

ACJC/689/2024 du 28.05.2024 sur JTPI/9220/2023 ( OO ) , CONFIRME

En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/26008/2018 ACJC/689/2024

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre civile

DU MARDI 28 MAI 2024

 

Entre

Monsieur A______, domicilié ______ [GE], appelant d'un jugement rendu par la 20ème Chambre du Tribunal de première instance de ce canton le 18 août 2023, représenté par Me Lucien FENIELLO, avocat, Budin & Associés, rue De-Candolle 17, case postale 166, 1211 Genève 12,

et

C______ SA, sise ______ [GE], intimée, représentée par Me B______, avocat.

 

 


EN FAIT

A. Par jugement JTPI/9220/2023 rendu le 18 août 2023, notifié aux parties le 21 août 2023, le Tribunal de première instance (ci-après : le Tribunal) a condamné A______ à payer à C______ SA 23'000 fr., avec intérêts à 3% dès le 25 décembre 2015 (chiffre 1 du dispositif), 23'000 fr. avec intérêts à 3% dès le 26 décembre 2016 (ch. 2), 23'000 fr. avec intérêts à 3% dès le 30 décembre 2017 (ch. 3), 23'000 fr. avec intérêts à 3% dès le 9 novembre 2018 (ch. 4), arrêté les frais judiciaires à 5'200 fr., compensés avec les avances versées par C______ SA et mis à la charge de A______, condamné celui-ci à verser à C______ SA 5'200 fr., invité les Services financiers du Pouvoir judiciaire à restituer à C______ SA le solde de l'avance de frais en 400 fr. (ch. 5), condamné A______ à payer 10'000 fr. TTC à C______ SA à titre de dépens (ch. 6) et débouté les parties de toutes autres conclusions (ch. 7).

B. a. Par acte déposé au greffe de la Cour de justice (ci-après, la Cour) le 20 septembre 2023, A______ a formé appel de ce jugement dont il a sollicité l'annulation. Cela fait, il a conclu à ce que la Cour déboute C______ SA de toutes ses conclusions, sous suite de frais.

b. C______ SA a conclu au déboutement de A______ et à la confirmation du jugement entrepris, sous suite de dépens.

c. Les parties ont répliqué, respectivement dupliqué, et persisté dans leurs conclusions.

d. Par avis du 22 février 2024, la Cour a informé les parties de ce que la cause était gardée à juger.

C. Les faits pertinents suivants résultent du dossier :

a. C______ SA, connue jusqu'en 2009 sous la raison sociale D______ SA, est une société suisse active notamment dans le domaine du conseil en matière de constitution, contrôle et gestion des trust, fondations et sociétés dans différentes juridictions ainsi que la prestation de services et de conseils juridiques, comptables et administratifs y relatifs; la prestation des services connexes tels que conseils patrimoniaux, fiscaux, juridiques, économiques et immobiliers; la détention de tous avoirs et leur optimisation; et, en général, tous services liés à l'activité fiduciaire et de conseil international au sens large.

b. En 1999, A______ a acheté un appartement à E______ (France) par l'intermédiaire de la société civile immobilière SCI F______.

Il a consulté C______ SA pour mettre en place une structure permettant la détention de la société immobilière à des fins d'optimisation fiscale.

c. Le 6 novembre 1999, C______ SA, alors D______ SA, a établi un "client information form" qui mentionne, notamment, "case name : G______ LTD" et "client's name :M A______". Selon ce document, des honoraires ont été convenus à hauteur de 100'000 francs français par an pour toute la structure décrite à l'attendu d. ci-dessous. Ce document n'est pas signé.

Ultérieurement, le 27 juillet 2011, A______ a signé les conditions générales de C______ SA, soit un formulaire contenant une description de l'activité de la société, des modalités de facturation de ses frais, honoraires et dépens, ainsi que des modalités de résiliation du mandat.

d. L'activité de C______ SA a consisté à mettre en place et à coordonner une structure de sociétés, soit G______ LTD (ci-après : G______), société des Iles Vierges britanniques, H______ LTD (ci-après : H______), société de droit anglais, et un fonds de pension néo-zélandais, visant à la détention de l'appartement susmentionné au bénéfice de A______. C______ SA était en outre chargée d'effectuer des virements bancaires (soit, notamment, un virement de 105'000 euros en décembre 2010).

e. De 1999 à 2009, les factures de C______ SA ont été acquittées, annuellement, d'abord en francs français, puis en euros.

Il a ensuite été convenu que le montant de 23'000 fr. (correspondant à
100'000 francs français ou 17'000 euros) serait facturé.

f. Le 30 novembre 2010, C______ SA a ainsi facturé à G______ un montant total de 23'000 fr., correspondant à des frais fixes convenus pour l'activité 2009 de
17'020 fr., une avance administrateurs 2010 de 3'000 fr., une avance actionnaires fiduciaires de 1'000 fr., une avance pour domicile de 1'000 fr., un agent résident et des frais d'agent de 500 fr. et la taxe gouvernementale pour 2010 de 480 fr.

Cette facture a été payée.

Des montants identiques ont été facturés les 7 novembre 2011, 6 janvier 2012,
20 novembre 2012, 10 octobre 2013 et 15 octobre 2014.

Toutes ces factures ont été honorées.

g. Le 16 mars 2015, A______ a mandaté Me I______, avocat à Genève, pour "prendre connaissance du dossier D______ SA auprès de C______ en vue de la restructuration du montage contrôlant la propriété à E______".

Le surlendemain, une réunion a eu lieu entre cet avocat et son collaborateur,
Me J______, ainsi qu'avec deux représentants de C______ SA, ce afin de décider comment procéder à la liquidation de la structure dont A______ était le bénéficiaire.

C______ SA a notamment dû fournir, à la demande des deux avocats, les états financiers des sociétés concernées.

h. Le 29 décembre 2015, H______ et K______, alors administratrice de C______ SA, ont cédé à la société suisse L______ SA, dont A______ était alors administrateur, et à celui-ci en son nom propre la totalité des parts de la SCI F______.

i. Les 26 octobre 2015, 27 octobre 2016, 31 octobre 2017 et 23 octobre 2018, C______ SA a facturé à G______ un montant de 23'000 fr. par an pour ses honoraires forfaitaires annuels.

Aucune de ces factures n'a été payée.

j. En février 2017, C______ SA a envoyé deux brefs courriers de rappel portant tant sur ses honoraires en souffrance, que sur les documents manquants pour une liquidation de la structure.

k. En 2018, C______ SA a communiqué à quelques reprises avec les autorités fiscales françaises pour faire progresser la liquidation de la structure, qui n'avait pas encore abouti.

l. Par courrier recommandé du 30 octobre 2018, C______ SA a mis en demeure A______ de lui verser ses honoraires forfaitaires relatifs à 2015, 2016, 2017 et 2018, plus intérêts moratoires.

Aucun paiement n'est intervenu.

m. Par acte du 12 novembre 2018, introduit après l'échec de la tentative de conciliation le 4 juin 2019, C______ SA a conclu, sous suite de frais et dépens, à ce que le Tribunal condamne A______ à lui verser les sommes de 23'000 fr. avec intérêts aux taux de base de [la banque] M______ majoré de 3% dès le 25 décembre 2015, 23'000 fr. avec intérêts aux taux de base de M______ majoré de 3% dès le 26 décembre 2016, 23'000 fr. avec intérêts aux taux de base de M______ majoré de 3% dès le 30 décembre 2017 et 23'000 fr. avec intérêts aux taux de base de M______ majoré de 3% dès le 9 novembre 2018.

C______ SA a notamment exposé que les honoraires forfaitaires convenus originellement à 100'000 francs français étaient censés couvrir "les frais d'administration de la structure dans sa globalité, les frais de domiciliation ainsi que les honoraires d'administrateurs et les honoraires pour les représentants des actionnaires […] (mais hors frais exceptionnels tels que liquidation, cession, taxes éventuelles, etc.)". Le démantèlement de la structure avait pris du temps en raison de "lourdes formalités fiscales" et du "manque de collaboration" des avocats de A______. Les frais d'administration de la structure restaient les mêmes que précédemment, même si dans les faits elle ne détenait plus le bien immobilier.

n. Dans ses écritures responsives du 15 octobre 2019, A______ a conclu au déboutement de C______ SA.

o. Le 17 octobre 2019, le Tribunal a limité les débats à la question de la légitimation passive de A______.

Il a, par jugement du 28 juillet 2021, confirmé par arrêt de la Cour du 5 avril 2022 dit que A______ disposait de la légitimation passive dans la procédure et a réservé la décision quant au sort des frais judiciaires et des dépens.

p. Le Tribunal a donné, une nouvelle fois, l'occasion aux parties de s'exprimer.

A______ a persisté dans ses conclusions en rejet de la demande affirmant qu'aucun service n'avait été rendu par C______ SA après mars 2015 : la structure était inutile et injustifiée.

C______ SA a répliqué et exposé que sa rémunération forfaitaire comprenait les frais de domiciliation, les frais d'administrateurs et les frais d'actionnariat de la structure qui était complexe. Elle a détaillé des démarches effectuées au moment de la création de ladite structure, ainsi que lors de la cession des parts appartenant à la SCI F______. S'agissant ensuite de la liquidation de la structure, il aurait fallu entreprendre des démarches administratives qui requérait la collaboration de A______. Or, C______ SA ignorait si ces démarches avaient été entreprises par celui-ci.

A______ a dupliqué et persisté dans ses conclusions.

q. Le 29 mars 2023, le Tribunal a procédé à l'audition de N______, "trust officer" chez O______ SA, précédemment employée de C______ SA de 2013 à 2023, en qualité de témoin.

Elle a exposé que son rôle avait consisté à vérifier que les entités étaient conformes à la réglementation et que leurs interactions entre elles l'étaient également. La liquidation n'avait jamais pu avoir lieu, car le fisc français avait des questions concernant la cession des parts de la société immobilière intervenue en 2015 et les avocats de A______ n'avaient jamais répondu. La liquidation aurait pu intervenir en 2017 si les réponses aux questions avaient été données. Elle ignorait le coût réel du maintien en place de toutes les entités existantes.

r. Lors de l'audience du 24 mai 2023, les parties ont plaidé et persisté dans leurs conclusions respectives.

A l'issue de l'audience, le Tribunal a gardé la cause à juger.

EN DROIT

1. 1.1 L'appel est recevable contre les décisions finales de première instance lorsque, dans les affaires patrimoniales, la valeur litigieuse au dernier état des conclusions est de 10'000 fr. au moins (art. 308 al. 1 let. a et al. 2 CPC).

La valeur litigieuse étant supérieure à 10'000 fr., la voie de l'appel est ouverte.

1.2 Déposé dans le délai de 30 jours (art. 142 al. 1, 143 al. 1 et 311 al. 1 CPC) et selon la forme prescrite par la loi (art. 130, 131 et 311 CPC), l'appel est recevable.

1.3 La Cour revoit la cause en fait et en droit avec un plein pouvoir d'examen (art. 310 CPC). La maxime des débats (art. 55 al. 1 CPC) et le principe de disposition (art. 58 al. 1 CPC) sont applicables à la présente procédure.

2. L'appelant conteste devoir un quelconque montant à titre d'honoraires à l'intimée.

2.1
2.1.1
A teneur de l'art. 394 al. 1 CO, le mandat est un contrat par lequel le mandataire s'oblige, dans les termes de la convention, à gérer l'affaire dont il s'est chargé ou à rendre les services qu'il a promis (art. 394 al. 1 CO).

L'art. 396 al. 1 CO prévoit en outre que l'étendue du mandat est déterminée, si la convention ne l'a pas expressément fixée, par la nature de l'affaire à laquelle il se rapporte.

Une rémunération est due au mandataire si la convention ou l'usage lui en assure une (art. 394 al. 3 CO). Lorsque les services sont fournis à titre professionnel, le mandat est onéreux en vertu de l'usage (ATF 139 III 259 consid. 2.1).

Les honoraires dus à un mandataire sont fixés en première ligne d'après la convention des parties (ATF 101 II 109 consid. 2). Il est loisible aux parties de fixer les honoraires selon un forfait convenu à l'avance (arrêt du Tribunal fédéral 4A_287/2015 du 22 juillet 2015 consid. 2).

2.1.2 Examinant les conséquences, sur le droit à la rémunération du mandataire, de l'exécution défectueuse ou de l'inexécution totale du mandat, le Tribunal fédéral a posé les principes suivants : en cas d'exécution défectueuse du mandat, le mandataire a droit à des honoraires pour l'activité qu'il a exercée en conformité avec le contrat ; dans le cas où l'exécution défectueuse du mandat est assimilable à une totale inexécution, se révélant inutile ou inutilisable, le mandataire peut perdre son droit à la rémunération (ATF 124 III 423 consid. 4a). A cette occasion, il a rappelé le principe généralement admis en jurisprudence selon lequel la rémunération due au mandataire représente une contre-prestation pour les services qu'il rend au mandant, plus précisément pour l'activité diligente qu'il exerce dans l'affaire dont il est chargé, de sorte que le mandataire qui ne rend pas les services promis, c'est-à-dire qui demeure inactif ou n'agit pas avec le soin requis, ne peut prétendre à l'entier des honoraires convenus ou à la même rémunération qui serait équitablement due à un mandataire diligent (ATF 124 III 423 consid. 3b).

Ainsi, en cas d'inexécution totale, soit lorsque le mandataire demeure inactif ou que ses prestations se révèlent inutiles ou inutilisables (vollständig unbrauchbar), celui-ci perd son droit à la rémunération (ATF 124 III 423 consid. 4a; arrêt du Tribunal fédéral 4A_444/2019 du 21 avril 2020 consid. 3.2.1).

En revanche, même en cas d'exécution défectueuse, le droit du mandataire à des honoraires subsiste, mais le montant des honoraires convenus (Honorarforderung) peut être réduit pour rétablir l'équilibre des prestations contractuelles. En effet, la rémunération due au mandataire représente une contre-prestation pour l'activité diligente qu'il exerce dans l'affaire dont il est chargé et s'il n'agit pas avec le soin requis, il ne peut prétendre, au titre de l'art. 394 al. 3 CO et de la convention des parties, à l'entier des honoraires convenus, c'est-à-dire à la rémunération qui serait équitablement due à un mandataire diligent (ATF 124 III 423 consid. 3b, rappelant un principe généralement admis dans la jurisprudence antérieure).

2.1.3 Même lorsque les honoraires ont été fixés de manière forfaitaire, le mandataire ne peut prétendre à des honoraires que s'il a exécuté correctement sa prestation, ce qu'il lui incombe de démontrer (art. 8 CC; arrêts du Tribunal fédéral 4A_287/2015 du 22 juillet 2015 consid. 2.1; 4A_444/2019 du 21 avril 2020 consid. 3.2.2).

Cela étant, la situation se présente différemment lorsque le comportement du mandant autorise à conclure qu'il considère la prestation comme suffisante. Il serait alors contradictoire de lui permettre de soutenir ensuite que la prestation est incomplète et de forcer le mandataire à prouver qu'il s'est exécuté. Il s'ensuit qu'une acceptation sans réserve de la prestation conduit à un renversement du fardeau de la preuve : le mandant doit alors prouver que le mandataire ne s'est pas correctement exécuté. Une acceptation survient notamment lorsque le comportement du mandant laisse entendre qu'il accepte pour l'essentiel la prestation; il en va notamment ainsi lorsque le mandant reste muet pendant longtemps (bei längerem Schweigen; Fellmann, Berner Kommentar - Der einfache Auftrag, 1992, n. 489 et suivantes ad art. 394 CO ; Walter, Berner Kommentar - Schweizerisches Zivilgesetzbuch, Einleitung und Personenrecht, 2012, n. 590; ATF 128 III 271 consid. 2a/aa ; arrêt du Tribunal fédéral 4A_484/2009 du 31 août 2010 consid. 3.2; arrêt de la Cour de justice du 19 janvier 2007 publié in RSJ 105/2009 p. 38, p. 40).

La règle de l'art. 8 CC s'applique en principe également lorsque la preuve porte sur des faits négatifs, c'est-à-dire que celui qui les allègue doit les prouver. Cette exigence est toutefois tempérée par les règles de la bonne foi qui obligent le défendeur à coopérer à la procédure probatoire, notamment en offrant la preuve du contraire. L'obligation, faite à la partie adverse, de collaborer à l'administration de la preuve, même si elle découle du principe général de la bonne foi (art. 2 CC), est de nature procédurale et est donc exorbitante de l'art. 8 CC, car elle ne touche pas au fardeau de la preuve et n'implique nullement un renversement de celui-ci. C'est dans le cadre de l'appréciation des preuves que le juge se prononcera sur le résultat de la collaboration de la partie adverse ou qu'il tirera les conséquences d'un refus de collaborer à l'administration de la preuve (ATF 119 II 305 consid. 1.b/aa; arrêt du Tribunal fédéral 4A_550/2018 du 29 mai 2019 consid. 4.2).

2.2 En l'espèce, dans le jugement entrepris, le Tribunal a constaté que C______ SA avait facturé à A______ les montants de 100'000 francs français, puis 23'000 fr., qui avaient été acquittés jusqu'en 2015. Dès lors, ces paiements reflétaient la volonté des parties sur le principe et le montant de la rémunération. Pour 2015, C______ SA avait déployé une activité en lien avec la cession des parts de la SCI. Par la suite, le mandat n'avait pas été résilié, malgré l'envoi de factures et de rappels; C______ SA continuait ainsi à gérer G______ et H______. Les prestations étaient nécessaires, car ces structures n'avaient pas été liquidées. L'activité de C______ SA en faveur de A______ avait donc perduré : il n'existait aucune raison de s'éloigner du montant des honoraires convenus antérieurement.

L'appelant fait grief au Tribunal d'avoir retenu que l'intimé avait effectué une activité après fin 2015, alors qu'elle n'avait ni détaillé ses activités, ni apporté de preuve de celles-ci. A ce sujet, les déclarations de N______ devaient être appréciées avec réserve, eu égard à sa position d'organe au sein de l'intimée avant son départ en février 2023. Dès la fin de 2015, la nature du mandat avait changé, puisque seule la liquidation de la structure devait être effectuée. Tout au plus, un montant très faible d'honoraires se justifiait pour le maintien de la structure.

L'intimée rétorque que la facturation de 23'000 fr. par an devait couvrir les frais d'administration de la structure, les frais de domiciliation et les honoraires des administrateurs et des représentants des actionnaires. Les coûts de constitution de la structure n'avaient pas été l'objet d'un poste spécifique, mais "lissés" dans le montant forfaitaire annuellement facturé. Il était donc contradictoire d'avoir payé ces coûts jusqu'en 2015, ce alors que la constitution était déjà terminée depuis longtemps, pour soutenir désormais que seule l'activité de constitution méritait une rémunération. La procédure de liquidation, entamée en 2015, avait été clairement communiquée à l'appelant, qui n'avait ni formulé d'opposition, ni envisagé de résilier le mandat : le retard pris dans la liquidation lui était imputable.

2.3
2.3.1
Il n'est pas contesté que les parties sont liées par un contrat de mandat depuis 1999, lequel prévoit le paiement d'honoraires forfaitaires équivalents à 23'000 fr. par an, ni que les prestations convenues visent la mise en place, puis la continuation, d'une structure constituée de plusieurs sociétés sises dans des Etats différents en vue de détenir un appartement en France au bénéfice d'une personne physique. Enfin, il n'est pas remis en cause que les factures de l'intimée ont été honorées jusqu'en 2014.

2.3.2 Pour la période de 1999 à 2014, l'appelant ne conteste pas que les honoraires étaient dus pour les prestations de l'intimée et que celles-ci ont été exécutées à sa satisfaction. L'appelant ne saurait ainsi être suivi lorsqu'il prétend qu'il était prêt à payer des honoraires uniquement pour l'activité de constitution de la structure : celle-ci n'est intervenue qu'une fois en 1999. Le fait qu'il ait ensuite continué à payer ces honoraires forfaitaires pendant quinze ans, sans critiquer ni remettre en cause l'activité fournie par l'intimée conduit à retenir, comme le soutient celle-ci, que la facturation forfaitaire convenue tendait à "lisser" la rémunération sur la durée pour l'activité plus importante de la constitution de la structure, puis l'activité de maintien de cette structure par la suite.

Certes, à la fin décembre 2015, les parts sociales de la société immobilière ont été cédées à la société suisse L______ SA et les parties ont envisagé de liquider la structure. Pourtant, dès janvier 2016, et jusqu'à l'introduction de la procédure judiciaire, l'appelant a rompu tout contact avec l'intimée et n'a jamais contesté l'activité fournie par l'intimée pour la période de 2016 à 2018, ni le prix exigé pour celle-ci. Il ne l'a en outre pas instruite de liquider la structure, ni n'a exprimé son intention de mettre fin au contrat de mandat, alors qu'il ne pouvait pas ignorer que le maintien d'une telle structure était coûteux, puisqu'il avait réglé les frais liés pendant quinze ans antérieurement.

Cela a des conséquences sur la répartition du fardeau de la preuve : il ne peut être exigé du mandataire de devoir prouver son activité dans un tel cas de figure. Ainsi, il incombait à l'appelant, contrairement à ce qu'il affirme, de prouver que les prestations de l'intimée étaient insatisfaisantes.

2.3.3 Cela étant posé, les prétentions de l'intimée doivent être examinées plus en détail. Contrairement aux écritures des parties et au jugement du Tribunal, il convient d'emblée de relever que le montant global de 23'000 fr. rassemblait en réalité plusieurs postes forfaitaires. Sur le total, 5'980 fr. relèvent grosso modo d'avances pour administrateurs et actionnaires fiduciaires, de frais de domiciliation et de taxes, qui restent dus tant que les structures n'ont pas été liquidées et que l'appelant n'a, du reste, pas contestés, puisque celui-ci a seulement remis en cause l'aspect relatif à l'activité de l'intimée. Il s'ensuit que le jugement sera confirmé en ce qu'il porte sur la somme de 5'980 fr. pour chacune des années litigieuses.

L'appelant ne conteste plus devoir payer les honoraires relatifs à l'année 2015, comme cela ressort expressément de ses développements d'appel. La décision entreprise sera donc confirmée sur ce point encore.

Quant à l'activité fournie par l'intimée de 2016 à 2018, facturée quelque 17'000 fr. par année, elle appelle les remarques suivantes. Comme il a été évoqué brièvement ci-dessus, l'intimée était chargée de constituer, puis d'entretenir une structure de sociétés. Il n'est pas contesté qu'elle a fait l'un et l'autre, ce jusqu'à 2018 au moins. Certes, comme le relève l'appelant, il pourrait être objecté que l'activité de l'intimée était limitée. Comme elle le décrit elle-même dans ses écritures, il s'agissait d'une activité administrative et répétitive. Il n'en demeure pas moins que les parties avaient convenu d'une rémunération forfaitaire pour cette activité, payée pendant de nombreuses années, sans que l'appelant n'ait rien à reprocher à sa mandataire.

Mise à part son affirmation que l'activité était inexistante, l'appelant ne formule pas de critiques concrètes à l'égard de la qualité des services rendus par l'intimée. Au contraire, il reconnaît lui-même que des honoraires étaient en principe dus pour le maintien de la structure, même s'il fait valoir que ceux-ci devaient être très bas, et ne remet pas en cause que le but attendu a été atteint. Il ne peut en tout cas pas prétendre avoir cru que, de par la cession des parts sociales de la société immobilière, l'ensemble des sociétés, complexe, disparaîtrait immédiatement et n'entraînerait plus aucun coût. Au contraire, assisté de deux avocats, il ne pouvait ignorer que la liquidation ne serait pas immédiate, mais prendrait du temps.

L'appelant ne saurait par ailleurs être suivi lorsqu'il soutient que le témoignage de N______ n'a aucune force probante, puisque cette personne n'était plus ni organe, ni employée de l'intimée au moment de son audition.

Le fait que la structure soit devenue inutile pour l'appelant ne permet pas non plus de considérer que ce dernier soit libéré de ses obligations contractuelles, ni ne le dispensait mettre fin au mandat ou de se manifester d'aucune manière lors de la réception des différentes notes d'honoraires.

Ainsi, l'appelant qui a allégué l'inexistence des services rendus par l'intimée ne peut être suivi, dans la mesure où il admet lui-même que le maintien de la structure de sociétés a été assuré. Il s'ensuit que le fait négatif qu'il alléguait, soit l'inexistence des services rendus, n'appelait pas une collaboration particulière de l'intimée, puisque son activité ressort suffisamment des faits admis par l'appelant et des autres éléments du dossier.

Par conséquent, les services rendus par l'intimée correspondent à ceux qui avaient été promis au moment de la conclusion du contrat de mandat et méritent la rémunération promise.

2.3.4 L'appel sera donc rejeté et le jugement entrepris confirmé.

3. 3.1 L'appelant, qui succombe, sera condamné aux frais judiciaires d'appel. Ceux-ci seront arrêtés à 4'500 fr. (art. 17 et 35 RTFMC et 106 al. 1 CPC). Ces frais seront compensés avec l'avance de frais de même montant que le précité a versée, qui demeure acquise à l'Etat de Genève (art. 111 al. 1 CPC).

3.2 L'appelant sera en outre condamné à verser à sa partie adverse 5'000 fr. au titre de dépens d'appel, débours et TVA inclus (art. 85 et 90 RTFMC; art. 25 et 26 LaCC).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre civile :

A la forme :

Déclare recevable l'appel interjeté par A______ le 20 septembre 2023 contre le jugement JTPI/9220/2023 rendu le 18 août 2023 par le Tribunal de première instance dans la cause C/26008/2018.

Au fond :

Confirme le jugement entrepris.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Sur les frais :

Arrête les frais judiciaires d'appel à 4'500 fr., les met à la charge de A______ et les compense avec l'avance de même montant qu'il a versée et qui demeure acquise à l'Etat de Genève.

Condamne A______ à payer 5'000 fr. à C______ SA à titre de dépens d'appel.

Siégeant :

Monsieur Laurent RIEBEN, président; Madame Fabienne GEISINGER-MARIETHOZ, Madame Ursula ZEHETBAUER GHAVAMI, juges; Madame Sophie MARTINEZ, greffière.

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF supérieure ou égale à 30'000 fr.