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Décisions | Chambre civile

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C/15586/2023

ACJC/605/2024 du 14.05.2024 sur JTPI/13794/2023 ( SDF ) , CONFIRME

En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/15586/2023 ACJC/605/2024

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre civile

DU MARDI 14 MAI 2024

 

Entre

Madame A______, domiciliée ______ (VD), appelante d'un jugement rendu par la 5ème Chambre du Tribunal de première instance de ce canton le 24 novembre 2023, représentée par Me Cléo BUCHHEIM, avocate, LEGAL INSIGHTS Sàrl, rue
de Bourg 16-18, case postale 5668, 1003 Lausanne,

et

Madame B______, domiciliée ______ (GE), intimée, représentée par
Me Corinne NERFIN, avocate, BORY & ASSOCIES AVOCATS, cour Saint-Pierre 7, 1204 Genève.

 


EN FAIT

A.           Par jugement JTPI/13794/2023 du 24 novembre 2023, reçu le 28 novembre 2023 par A______, le Tribunal de première instance (ci-après: le Tribunal), statuant par voie de procédure sommaire, a ordonné à tout débiteur et/ou employeur de A______, notamment [la banque] C______, F______, de verser mensuellement à B______, sur son compte C______ (IBAN 1______) toutes sommes supérieures à son minimum vital - fixé à 7'126 fr. - à concurrence de 3'500 fr. par mois, soit le montant des pensions alimentaires courantes dues dès le 10 juillet 2023 pour son entretien, prélevées notamment sur son salaire, ainsi que sur toute commission, 13ème salaire et/ou autre gratification (chiffre 1 du dispositif), dit que cette injonction était valable à l'encontre de tout futur employeur, caisse de pension, caisse de chômage, assurance perte de gain (ch. 2), dit que l'obligation précitée subsisterait aussi longtemps que A______ serait débitrice d'entretien de sa fille B______ (ch. 3), ordonné la notification du dispositif du jugement à l'employeur actuel de A______, soit C______, F______ (ch. 4), arrêté les frais judiciaires à 500 fr., les a compensés avec l'avance de 500 fr. effectuée par B______ et les a mis à la charge de A______, condamné en conséquence cette dernière à rembourser la somme de 500 fr. à B______ (ch. 5) ainsi qu'à lui verser la somme de 500 fr. TTC à titre de dépens (ch. 6) et débouté les parties de toutes autres conclusions (ch. 7).

B.            a. Par acte expédié le 8 décembre 2023 au greffe de la Cour de justice, A______ appelle de ce jugement, dont elle sollicite la modification des chiffres 1 à 7 du dispositif. Elle conclut au rejet des conclusions prises par B______ dans sa requête d'avis au débiteur du 10 juillet 2023, à ce que l'ordre donné sous chiffre 1 du dispositif du jugement entrepris soit annulé – subsidiairement révoqué – avec effet immédiat et à ce que le dispositif de l'arrêt soit notifié à son employeur actuel, soit C______, F______, avec suite de frais et dépens.

Elle a préalablement sollicité la restitution de l'effet suspensif, requête qui a été rejetée par arrêt ACJC/58/2024 rendu le 17 janvier 2024 par la Cour.

Elle a produit une pièce nouvelle, soit un procès-verbal d'audience du 22 novembre 2023.

b. Dans sa réponse du 15 janvier 2024, B______ a conclu à la confirmation du jugement, avec suite de frais et dépens.

Elle a produit une pièce nouvelle, soit un procès-verbal d'audience du 9 janvier 2024.

c. Par avis du 6 février 2024, les parties ont été informées de ce que la cause était gardée à juger.

d. Le 23 avril 2024, A______, par le biais de son conseil, a envoyé un courrier à la Cour accompagné d'une pièce nouvelle.

C.           Les faits pertinents suivants résultent du dossier soumis à la Cour:

a. A______ et D______ se sont mariés en 2002 en Italie.

Deux enfants sont issus de cette union: B______, née le ______ 2004, et E______, né le ______ 2008.

b. Les époux se sont séparés en juin 2015.

c. Par arrêt du 6 mars 2020, rendu sur mesures protectrices de l'union conjugale, la Cour a notamment condamné A______ à verser à D______, par mois et d'avance, allocations familiales non comprises, à titre de contribution à l'entretien des enfants, 3'500 fr. en faveur de B______ et 1'700 fr. en faveur de E______.

Pour fixer ces montants, la Cour a retenu que A______ disposait de revenus mensuels de 13'000 fr. par mois versés par C______, frais forfaitaires de représentation et bonus compris, et que ses charges s'élevaient à 7'648 fr. par mois, comprenant le montant de base OP (1'200 fr.), le loyer (3'100 fr.), les frais de chauffage (250 fr.), la prime d'assurance RC ménage (40 fr.), ses primes d'assurance-maladie obligatoire (460 fr. 15) et complémentaire (210 fr.), ses frais médicaux non couverts (113 fr.), ses frais de téléphonie et d'Internet (222 fr.), la redevance TV (30 fr.), sa prime d'assurance protection juridique (37 fr. 50), ses frais d'essence (200 fr.) et de parking (85 fr.) ainsi que ses impôts (1'700 fr.). Elle disposait dès lors d'un solde disponible de 5'352 fr. par mois. Les besoins mensuels des enfants se montaient à 4'935 fr. pour B______ et à 4'760 fr. pour E______.

Cet arrêt a été confirmé par arrêt du Tribunal fédéral 5A_415/2020 du 18 mars 2021.

d. Dans le cadre de la procédure de divorce initiée en parallèle le 9 octobre 2019, A______ a conclu, sur mesures provisionnelles, à ce que les contributions d'entretien précitées soient réduites à 1'380 fr. par enfant.

e. Par ordonnance du 14 mars 2022, le Tribunal a débouté A______ de ses conclusions sur mesures provisionnelles.

Il a notamment retenu qu'elle n'avait démontré ni une baisse de ses revenus (salaire mensualisé de 13'150 fr. versé par [la banque] C______), ni une augmentation de ses charges (chiffrées à 7'726 fr. 70 par mois, comprenant 1'200 fr. de montant de base OP, 3'250 fr. de loyer, 13 fr. 60 d'ECA et de taxes déchets, 18 fr. 60 de prime d'assurance-ménage, 456 fr. de primes d'assurance-maladie, 208 fr. de frais médicaux non couverts, 112 fr. 35 de frais de téléphonie, 35 fr. 75 de redevance TV, 37 fr. de prime d'assurance protection juridique, 200 fr. d'essence, 85 fr. de parking, 89 fr. de prime d'assurance-véhicule, 80 fr. 25 d'impôts sur le véhicule, 129 fr. 50 de prime d'assurance-vie et 1'700 fr. d'impôts), ni une augmentation du salaire du père de B______ et E______.

Par arrêt ACJC/1204/2022 du 15 septembre 2022, la Cour a confirmé cette ordonnance et précisé que la somme de 3'500 fr. à verser par A______ à titre de contribution à l'entretien de B______, selon arrêt de la Cour du 6 mars 2020, le serait désormais en mains de B______, compte tenu de son accession à la majorité. La Cour a en particulier retenu, s'agissant de la contribution d'entretien en faveur de B______ postérieure à sa majorité, que la mère ne démontrait pas que les conditions auxquelles elles étaient subordonnées n'étaient plus réunies et en particulier que l'absence de relation mère-fille était imputable à B______.

Cet arrêt n'a fait l'objet d'aucun recours.

f. Le 6 mars 2023, A______ a, de nouveau, sollicité, sur mesures provisionnelles, la diminution à 1'380 fr. puis la suppression, dès sa majorité, de la contribution d'entretien en faveur de sa fille B______.

g. Par ordonnance du 21 juin 2023, le Tribunal a une nouvelle fois débouté A______ de ses conclusions.

Relevant que la requête frisait la témérité, il a considéré que A______ ne soulevait aucun élément nouveau s'agissant de sa situation financière et que l'ensemble des éléments allégués avaient d'ores et déjà fait l’objet de l'arrêt de la Cour du 15 septembre 2022.

Cette ordonnance n'a pas fait l'objet d'un appel.

h. Entre février 2023 et juin 2023, A______ a versé 1'600 fr. par mois à B______ à titre de contribution à son entretien. Depuis juillet 2023, elle lui verse 2'000 fr. par mois à ce titre.

D.           a. Le 10 juillet 2023, B______ a formé une requête d'avis aux débiteurs contre sa mère, A______, pour les pensions courantes dès le dépôt de la requête, en se fondant sur l'arrêt rendu par la Cour le 6 mars 2020.

Au vu des sommes versées par sa mère, elle a chiffré l'arriéré des contributions à cette date à 11'000 fr. [(3'500 fr. - 1'600 fr.) x 5 mois + 3'500 fr. - 2'000 fr.].

b. Dans sa réponse du 13 octobre 2023, A______ a conclu au rejet de la requête.

En substance, elle a contesté les calculs effectués par le Tribunal et la Cour dans leurs décisions précédentes et, notamment, le fait que ses frais forfaitaires et son bonus aient été inclus dans ses revenus. Comme dans sa requête de mesures provisionnelles du 6 mars 2023, elle a chiffré ses charges actuelles à 12'108 fr. et fait valoir qu'une partie de son salaire, soit son bonus, faisait l'objet d'une saisie. Elle a notamment reproché à sa fille de poursuivre sa formation à l'étranger dans une université privée.

E.            Dans le jugement querellé, le Tribunal a retenu que A______ avait été condamnée à verser 3'500 fr. en mains de sa fille B______ à titre de contribution à son entretien par arrêt de la Cour du 6 mars 2020, confirmé par ordonnance du 14 mars 2022, arrêt du 15 septembre 2022 et ordonnance du 21 juin 2023, décisions qui étaient toutes exécutoires. Il ne pouvait pas revoir ces décisions mais devait exclusivement statuer sur la question de l'avis aux débiteurs.

L'ampleur de l'arriéré de contributions permettait d'admettre que A______ se trouvait en défaut de paiement caractérisé. Sa situation financière avait été réexaminée il y avait moins de six mois et A______ reconnaissait elle-même que B______ était en formation, puisqu'elle lui faisait grief d'étudier à l'étranger.

Elle ne produisait aucun document nouveau démontrant que les charges devant être comptabilisées dans le cadre de la présente procédure seraient supérieures à celles retenues par la Cour le 15 septembre 2022, respectivement par le Tribunal le 21 juin 2023. Selon les normes d'insaisissabilité de l'Office des poursuites, ses charges étaient composées du montant de base OP (1'200 fr.), de ses frais de logement (3'250 fr.), de ses primes d'assurance-maladie (456 fr.), de ses frais de santé non couverts (208 fr.), de ses frais de repas pris à l'extérieur (242 fr.) et de ses frais de transport public (70 fr.), A______ ne justifiant pas du caractère indispensable de l'usage d'un véhicule privé pour son activité professionnelle. A cela s'ajoutait le montant qu'elle devait verser à titre de contribution à l'entretien de E______ (1'700 fr.), bien qu'elle ne justifiait pas le paiement de celle-ci. Son minimum vital était ainsi fixé à 7'126 fr. par mois.

L'avis au débiteur primait la saisie sur salaire, de sorte que A______ aurait la possibilité de s'adresser à l'Office des poursuites pour que le montant de la saisie soit adapté, une fois l'avis aux débiteurs pris en considération.

Il était ainsi fait droit à la requête avec effet au 10 juillet 2023.

EN DROIT

1.             1.1.1 La décision d'avis aux débiteurs des art. 132 al. 1 CC, 177 CC ou 291 CC constitue une mesure d'exécution privilégiée sui generis, qui se trouve en lien étroit avec le droit civil (ATF 130 III 489 consid. 1.2). Elle est de nature pécuniaire puisqu'elle a pour objet des intérêts financiers. Par ailleurs, le jugement portant sur un avis aux débiteurs est en principe une décision finale au sens de l'art. 308 al. 1 let. a CPC (ATF 137 III 193 consid. 1; 134 III 667 consid. 1.1; arrêt du Tribunal fédéral 5A_474/2015 du 29 septembre 2015 consid. 1.1).

Cette décision n'émanant toutefois pas du tribunal de l'exécution, mais du juge civil, la voie de l'appel est ouverte (art. 308 al. 1 let. b et 309 al. 1 CPC a contrario).

1.1.2 En l'espèce, l'acte a été interjeté auprès de l'autorité compétente (art. 120 al. 1 let. a LOJ), dans le délai utile de dix jours (art. 302 al. 1 let. c et 314 al. 1 CPC), selon la forme prescrite par la loi (art. 130, 131 et 311 al. 1 CPC) et dans une affaire patrimoniale dont la valeur litigieuse, compte tenu des conclusions prises à ce titre devant l'autorité inférieure, capitalisées selon l'art. 92 al. 2 CPC, est supérieure à 10'000 fr. (art. 308 al. 2 CPC). Les conditions de recevabilité de l'appel sont ainsi réunies.

Il en va de même de la réponse à l'appel (art. 312 et 314 al. 1 CPC). En revanche, les écritures de l'appelante du 23 avril 2024, déposées après que la cause ait été gardée à juger par la Cour, ne sont pas recevables (ATF 142 III 413 consid. 2.2.3-2.2.6; arrêt du Tribunal fédéral 5A_478/2016 du 10 mars 2017 consid. 4.2.2).

1.2 La Cour revoit la cause avec un plein pouvoir d'examen, tant en fait qu'en droit (art. 310 CPC), dans la limite des griefs motivés qui sont formulés (ATF 142 III 413 consid. 2.2.4).

La mesure d'avis aux débiteurs prévue à l'art. 291 CC étant soumise à la procédure sommaire (art. 302 al. 1 let. c CPC), la cognition du juge est limitée à la simple vraisemblance des faits et à un examen sommaire du droit, avec administration restreinte des moyens de preuve (ATF 138 III 636 consid. 4.3.2; arrêts du Tribunal fédéral 5A_823/2014 du 3 février 2015 consid. 2.2 et 2.3; 5A_680/2014 du 21 novembre 2014 consid. 2.1 et 2.2), l'exigence de célérité étant privilégiée par rapport à celle de la sécurité (ACJC/1283/2022 du 30 septembre 2022 consid. 1.4; ACJC/950/2020 du 30 juin 2020 consid. 3; ACJC/1221/2019 du 20 août 2019 consid. 2).

1.3 La présente cause est soumise à la maxime des débats et de disposition (art. 55 al. 1 et 58 al. 1 CPC) en tant qu'elle porte sur la contribution d'entretien d'un enfant majeur (arrêt du Tribunal fédéral 5A_524/2017 du 9 octobre 2017 consid. 3.1 in fine et les références citées).

2.             Les parties produisent des pièces nouvelles en appel.

2.1 Selon l'art. 317 al. 1 CPC, les faits et les moyens de preuve nouveaux ne sont pris en considération en appel que s'ils sont invoqués ou produits sans retard (let. a) et s'ils ne pouvaient pas être invoqués ou produits devant la première instance bien que la partie qui s'en prévaut ait fait preuve de la diligence requise (let. b).

En revanche, à partir du début des délibérations, les parties ne peuvent plus introduire de nova, même si les conditions de l'art. 317 al. 1 CPC sont réunies. La phase des délibérations débute dès la clôture des débats, s'il y en a eu, respectivement dès que l'autorité d'appel a communiqué aux parties que la cause a été gardée à juger (ATF 143 III 272 consid. 2.3.2; arrêts du Tribunal fédéral 5A_451/2020 du 31 mars 2021 consid. 3.1.1; 5A_456/2016 du 28 octobre 2016 consid. 4.1.2).

2.2 En l'espèce, les procès-verbaux des 22 novembre 2023 et 9 janvier 2024 sont postérieurs à la mise en délibération en première instance et ont été produits sans retard à l'appui de l'appel, respectivement de la réponse à l'appel, de sorte qu'ils sont recevables.

En revanche, la pièce nouvelle accompagnant l'écriture du 23 avril 2024 est irrecevable, dans la mesure où elle a été produite après que la Cour ait gardé la cause à juger.

3.             L'appelante reproche au Tribunal d'avoir établi ses revenus et charges de manière erronée, ce qui l'aurait conduit à violer le droit en faisant droit à la requête d'avis au débiteurs à hauteur de 3'500 fr. par mois. De plus, le jugement querellé violerait également le droit puisque la contribution d'entretien en faveur de l'intimée devrait être supprimée en application de l'art. 277 al. 2 CC et en raison du fait que celle de son fils mineur serait désormais prioritaire.

3.1 Selon l'art. 291 CC, lorsque les père et mère négligent de prendre soin de l'enfant, le juge peut prescrire à leurs débiteurs d'opérer tout ou partie de leurs paiements entre les mains du représentant légal de l'enfant.

Pour qu'un avis aux débiteurs puisse déployer ses effets, il faut que le débiteur d'aliments ne respecte pas ses obligations, que le créancier d'aliments soit au bénéfice d'un titre exécutoire, qu'il requière une telle mesure du juge compétent, que le débiteur d'aliments soit créancier d'un tiers et enfin que le minimum vital du débiteur, établi selon les normes du droit des poursuites, soit respecté (Nussbaumer-Laghzaoui, Commentaire Romand, Code Civil I, 2023, n. 4 à 6, 9 et 10 ad art. 291 CC et les références citées).

Bien qu'il prévoie la possibilité pour le juge de prescrire aux débiteurs des père et mère d'opérer tout ou partie de leurs paiements "entre les mains du représentant légal de l'enfant", l'art. 291 CC s'applique également aux contributions d'entretien en faveur de l'enfant majeur (ATF 142 III 195 consid. 5).

3.1.1 L'avis aux débiteurs est soumis à l'interdiction de porter atteinte au minimum vital du droit des poursuites (ATF 145 III 255 consid. 5.5.2, in JdT 2020 II 230). Seul ce dernier est applicable à l'avis aux débiteurs et non pas le minimum vital élargi du droit de la famille (Pellaton, CPra Matrimonial, 2016, n. 34 ad art. 177 CC). L'avis ne peut ainsi être prononcé que pour le montant disponible qui dépasse le minimum vital du droit des poursuites et non pas pour toute la contribution fixée, laquelle n'en reste pas moins due tant que le jugement qui la fixe n'est pas modifié (Nussbaumer-Laghzaoui, op. cit., n. 9 ad art. 291 CC). Il est de jurisprudence constante que les impôts ne constituent pas une dépense indispensable au sens de l'art. 93 LP et ne sont dès lors pas inclus dans le minimum vital du droit des poursuites (ATF 140 III 337 consid. 4.4.1; 126 III 89 consid. 3b; arrêt du Tribunal fédéral 5A_144/2021 du 28 mai 2021 consid. 7).

Il n'appartient pas au juge saisi d'une demande d'avis aux débiteurs de réexaminer le montant de la contribution d'entretien fixée, mais de déterminer si, en fonction des éléments de fait actuels, le débiteur est en mesure de s'en acquitter (arrêts de la Cour de justice ACJC/1210/2023 du 12 septembre 2023 consid. 3.1.2; ACJC/1459/2018 du 19 octobre 2018 consid. 3.2.2; ACJC/1253/2017 du 3 octobre 2017 consid. 5.5). Un réexamen de la contribution d'entretien relève d'une action en modification du jugement qui fixe la contribution (Nussbaumer-Laghzaoui, op. cit., n. 4 ad art. 291 CC).

3.1.2 Si la créance objet de l'avis est relativement saisissable (art. 93 al. 1 LP; comme en l'espèce le salaire), l'avis a généralement le pas sur une saisie de cette créance, même si le créancier saisissant est un créancier d'entretien. Si l'Office des poursuites n'a pas pris en compte les obligations d'entretien du débiteur lors du calcul du minimum vital, car elles n'étaient pas payées, ce dernier est recalculé en y ajoutant le montant objet de l'avis, ce qui réduit le montant saisi (art. 93 al. 3 LP; Nussbaumer-Laghzaoui, op. cit., n. 16 et 17 ad. art. 291 CC).

Pour fixer le montant saisissable, l'Office doit tenir compte des dépenses nécessaires à l'entretien du débiteur et de sa famille (ATF 134 III 323 consid. 2; arrêts du Tribunal fédéral 5A_912/2018 du 16 janvier 2019 consid. 3.1.1; 5A_919/2012 du 11 février 2013 consid. 4.3.1). L'écolage d'un enfant dans une école payante n'entre pas dans le calcul du minimum vital du parent dont le revenu est saisi, les frais de formation étant limités aux dépenses particulières, telles que transports publics ou fournitures scolaires. Le débiteur peut toutefois démontrer qu'il n'est pas possible, pour des motifs impérieux, que son enfant fréquente une école publique gratuite ou qu'il ne peut recevoir un enseignement correspondant à son âge et à ses aptitudes qu'en école privée (ATF 119 III 70 consid. 3b; arrêts du Tribunal fédéral 5A_163/2008 du 27 mai 2008 consid. 3.2; 7B_144/2006 du 27 septembre 2006 consid. 3.2.2).

Bien qu'elles ne soient en principe pas liées par la décision prise par le juge quant au montant des aliments dus par le débiteur à des membres de sa famille, les autorités de poursuites s'en tiennent généralement au chiffre fixé par le juge, sauf s'il apparaît que le créancier d'aliments n'a nullement besoin de toute la contribution mise à la charge du débiteur (ATF 130 III 45 consid. 2; arrêt du Tribunal fédéral 5A_43/2019 du 16 août 2019 consid. 4.6.1).

3.2.1 En l'espèce, l'appelante reproche en premier lieu au Tribunal d'avoir établi ses revenus et charges de manière erronée.

Elle fait valoir un revenu mensuel net de 11'400 fr. ou de 12'100 fr. en y incluant ses frais de représentation, correspondant à son revenu sans bonus, lequel a fait l'objet d'une saisie. Or, il n'y a pas lieu d'écarter son bonus au motif qu'il aurait été saisi. En effet et comme relevé à juste titre par le Tribunal, l'avis aux débiteurs prime la saisie sur salaire, de sorte que l'appelante aura la possibilité de s'adresser à l'Office des poursuites pour que le montant de la saisie soit adapté une fois l'avis aux débiteurs pris en considération, ce qu'elle ne remet d'ailleurs pas en cause. Il convient donc de prendre en compte son salaire plein, bonus compris, soit de l'ordre de 13'000 fr. nets par mois, étant relevé que la prise en compte d'un salaire de 11'400 fr. ne modifierait en tout état pas l'issue du litige.

L'appelante fait ensuite grief au premier juge d'avoir retenu que son minimum vital était de 7'126 fr. sans tenir compte de toutes ses charges pourtant justifiées par pièces, en particulier ses impôts en 3'000 fr. par mois. Son grief est infondé. En effet, les impôts ne doivent pas être pris en compte dans le calcul du minimum vital du droit des poursuites, seul applicable à l'avis aux débiteurs à l'exclusion du minimum vital élargi du droit de la famille. L'appelante n'expose pour le surplus pas quelle autre charge aurait dû être prise en compte dans son minimum vital du droit des poursuites, se contentant de faire valoir de manière toute générale un budget total de 12'108 fr. sans autre explication. Le minimum vital arrêté par le premier juge sera par conséquent confirmé, étant relevé qu'il comprend la contribution à l'entretien de E______ en 1'700 fr.

Au vu de ce qui précède, l'appelante dispose d'un solde mensuel de 5'874 fr. (13'000 fr. – 7'126 fr.), lequel lui permet aisément de couvrir la contribution d'entretien de l'intimée en 3'500 fr. en sus de celle de son fils mineur.

3.2.2 L'appelante fait valoir que la contribution d'entretien de l'intimée en 3'500 fr. devrait être prochainement supprimée, voire diminuée, avec effet rétroactif, dans le cadre de la procédure de divorce en cours, au motif que l'entretien de son fils mineur – dont les besoins mensuels ont été arrêtés à 4'760 fr. par arrêt de la Cour du 6 mars 2020 et ne sont pas couverts par la contribution d'entretien de 1'700 fr. – est désormais prioritaire sur celui de l'intimée, majeure, que son propre minimum vital élargi du droit de la famille devrait être respecté avant que ne soit fixée la contribution d'entretien de sa fille majeure et qu'elle n'a plus de contact avec celle-ci depuis 2016. Elle considère également que rien ne justifierait de prendre en compte les coûts de l'université privée de l'intimée alors que celle-ci pourrait faire ses études en Suisse à moindre coût, travailler à côté de ses études ou demander une bourse et que les conditions de l'art. 277 al. 2 CC ne seraient pas remplies.

Ce faisant, l'appelante invoque des griefs en vue de faire modifier la contribution d'entretien de l'intimée. Or, il n'appartient pas au juge saisi d'une demande d'avis aux débiteurs de réexaminer le montant de la contribution d'entretien fixée, ni d'anticiper sur une éventuelle modification ou suppression de celle-ci dans le cadre d'un jugement de divorce à venir. Il doit en effet uniquement déterminer si, en fonction des éléments de fait actuels, la débitrice est en mesure de s'acquitter de la contribution d'entretien fixée par un titre exécutoire, ce qui est le cas en l'espèce. L'appelante n'explique du reste pas en quoi les conditions de l'art. 277 al. 2 CC ne seraient pas remplies, manquant à son devoir de motivation sur ce point.

Enfin, le fait que les autorités de poursuite puissent, dans le cadre d'une procédure de saisie, s'écarter du minimum vital élargi fixé judiciairement, en particulier s'agissant de l'écolage privé d'un enfant, n'est d'aucune utilité à l'appelante ici, cette jurisprudence ne concernant pas l'avis aux débiteurs. Dans le cadre de cette procédure et comme rappelé ci-dessus, le juge saisi ne peut en effet pas revoir la contribution d'entretien dont l'exécution est requise, laquelle est due tant que le jugement qui la fixe n'est pas modifié.

3.2.3 Pour le surplus, il n'est pas contesté que les autres conditions de l'avis aux débiteurs sont réunies.

Le jugement entrepris sera par conséquent confirmé.

4.             Les frais judiciaires d'appel, comprenant les émoluments forfaitaires de la présente décision et de la décision sur effet suspensif, seront fixés à 1'000 fr. (art. 33 et 35 RTFMC), mis à la charge de l'appelante qui succombe (art. 106 al. 1 CPC), et compensés avec l'avance de frais de même montant versée par elle, laquelle reste acquise à l'Etat de Genève (art. 111 al. 1 CPC).

Pour le même motif, l'appelante sera en outre condamnée à verser à l'intimée des dépens d'appel, arrêtés à 1'000 fr., débours et TVA compris, compte tenu de l'activité déployée par le conseil de l'intimée, soit une réponse de huit pages (art. 84, 85, 88 et 90 RTFMC; art. 23 al. 1, 25 et 26 LaCC).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre civile :


A la forme :

Déclare recevable l'appel interjeté le 8 décembre 2023 par A______ contre le jugement JTPI/13794/2023 rendu le 24 novembre 2023 par le Tribunal de première instance dans la cause C/15586/2023.

Au fond :

Confirme ce jugement.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Sur les frais :

Arrête les frais judiciaires d'appel à 1'000 fr., les met à la charge de A______ et les compense entièrement avec l'avance de frais de 1'000 fr. versée par elle, laquelle reste acquise à l'Etat de Genève.

Condamne A______ à verser 1'000 fr. à B______ à titre de dépens d'appel.

Siégeant :

Madame Jocelyne DEVILLE-CHAVANNE, présidente; Madame
Verena PEDRAZZINI RIZZI, Madame Nathalie LANDRY-BARTHE, juges;
Madame Emilie FRANCOIS, greffière.

 

La présidente :

Jocelyne DEVILLE-CHAVANNE

 

La greffière :

Emilie FRANCOIS

 

 

 

 


 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF supérieure ou égale à 30'000 fr.