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Décisions | Chambre civile

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C/22765/2018

ACJC/1221/2019 du 20.08.2019 sur JTPI/4017/2019 ( SDF ) , MODIFIE

Descripteurs : OBLIGATION D'ENTRETIEN;CONJOINT;AVANCE DE FRAIS;FRAIS JUDICIAIRES;DÉPENS
Normes : CC.163; CC.176.al1.ch1; CC.173.al1; CPC.105.al1; CPC.107.al1.letf
En fait
En droit
Par ces motifs

republique et

canton de geneve

POUVOIR JUDICIAIRE

C/22765/2018 ACJC/1221/2019

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre civile

du mARDI 20 AOUT 2019

 

Entre

Madame A______, domiciliée route ______, ______ (GE), appelante d'un jugement rendu par la 15ème Chambre du Tribunal de première instance de ce canton le 18 mars 2019, comparant par Me Laurence Krayenbühl, avocate, rue de Bourg 16-20, 1003 Lausanne, en l'étude de laquelle elle fait élection de domicile,

et

Monsieur B______, domicilié route ______, ______ (GE), intimé, comparant par Me Aude Longet-Cornuz, avocate, rue Verdaine 13, case postale 3231, 1211 Genève 3, en l'étude de laquelle il fait élection de domicile.

 


EN FAIT

A. a. Par jugement JTPI/4017/2019 rendu sur mesures protectrices de l'union conjugale le 18 mars 2019, notifié aux parties le 20 mars suivant, le Tribunal de première instance a autorisé les parties à vivre séparées (ch. 1 du dispositif), attribué à A______ la jouissance exclusive du domicile conjugal, ainsi que du mobilier le garnissant (ch. 2), donné acte à celle-ci de son engagement à prendre à sa charge les frais liés au domicile conjugal (intérêts hypothécaires, charges de copropriété et autres charges liées; ch. 3), attribué la jouissance exclusive du véhicule C______ et du scooter D______ à l'épouse (ch. 4), respectivement du véhicule E______ à l'époux (ch. 5), condamné B______ à verser à A______ une contribution à son entretien de 5'000 fr. par mois (ch. 6), prononcé la séparation de biens des parties (ch. 7), arrêté les frais judiciaires à 1'500 fr., répartis à raison de la moitié à la charge de chacun des époux, ceux-ci étant en conséquence condamnés à payer chacun 750 fr. à l'Etat de Genève, soit pour lui les Services financiers du Pouvoir judiciaire (ch. 8), sans allouer de dépens (ch. 9), condamné les parties à respecter et à exécuter les dispositions du jugement (ch. 10) et débouté celles-ci de toutes autres
conclusions (ch. 11).

b. Le Tribunal a rectifié son jugement en vertu de l'art. 334 CPC, en ce sens qu'il a précisé que les parties étaient copropriétaires du domicile conjugal - et non d'un appartement en Espagne, dont seul l'époux était propriétaire, ce point étant cependant contesté par l'épouse -, et notifié le jugement rectifié aux parties le
26 mars 2019.

B. a. Par acte expédié le 1er avril 2019 au greffe de la Cour de justice, A______ a appelé dudit jugement initial, dont elle a sollicité l'annulation des chiffres 6, 8, 9 et 11 du dispositif.

Elle a conclu à ce que son époux soit condamné à lui verser une contribution à son entretien de 7'000 fr. par mois dès leur séparation effective, un montant de
8'000 fr. à titre de dépens de première et seconde instances et une provision
ad litem de 12'000 fr.

Préalablement, elle a conclu à ce qu'il soit ordonné au Tribunal de "produire" la présente procédure, à ce qu'il soit renoncé à la tenue d'une audience et à ce qu'il soit statué sur la base des pièces de la procédure.

A l'appui de son appel, l'appelante a produit deux pièces nouvelles, à savoir un commandement de payer que son ancien conseil lui avait fait notifier le
9 mars 2019 et une estimation de sa charge fiscale.

b. B______ a conclu à la confirmation du jugement entrepris et à la condamnation de son épouse en tous les frais judiciaires et dépens d'appel.

Il a produit une pièce nouvelle, soit un échange de courriers électroniques avec la régie F______ en date du 14 février 2019.

c. Par réplique du 27 mai 2019, A______ a conclu à l'irrecevabilité de la pièce nouvelle produite par son époux, a réduit ses conclusions tendant au versement d'une contribution à son entretien à 6'250 fr. par mois et a, pour le surplus, persisté dans ses conclusions.

d. Par duplique du 11 juin 2019, B______ a persisté dans ses conclusions.

e. Les parties ont été informées par la Cour de ce que la cause était gardée à juger par courrier du 12 juin 2019.

C. Les faits suivants résultent du dossier soumis à la Cour :

a. A______, née le ______ 1964, et B______, né le
______ 1960, tous deux ressortissants suisses, se sont mariés le ______ 1998 à G______ (GE), sans conclure de contrat de mariage.

De cette union sont issues deux enfants, soit H______ et I______, toutes deux nées le ______ 1998 et majeures.

b. Par acte expédié le 9 octobre 2018 au Tribunal de première instance, A______ a requis le prononcé de mesures protectrices de l'union conjugale, assorties d'une requête de mesures superprovisionnelles, laquelle a été rejetée, faute d'urgence, par ordonnance du même jour.

Sur le fond, elle a, s'agissant des conclusions encore litigieuses en appel, conclu au versement d'une contribution à son entretien de 8'000 fr. dès la séparation effective des parties et au versement d'une provision ad litem de 12'000 fr., avec suite de frais judiciaires et dépens.

Elle a, notamment, allégué que, depuis plusieurs années, le couple traversait une crise importante et que son époux refusait de quitter le domicile conjugal.

c. Lors de l'audience tenue le 18 décembre 2018 par le Tribunal, A______ a persisté dans ses conclusions. Elle a, notamment, allégué suivre une formation pour devenir professeur de yoga et donner, dans ce cadre, des cours de yoga qui lui procuraient des revenus de l'ordre de 1'600 fr. par trimestre.

B______ a, pour sa part, déclaré adhérer au principe de la vie séparée, mais souhaiter conserver la jouissance du domicile conjugal.

d. Le Tribunal a tenu trois autres audiences les 8, 15 et 29 janvier 2019.

e. Lors de la dernière audience tenue le 5 mars 2019 par le Tribunal, B______ a déclaré qu'il avait trouvé un appartement dont le bail débutait au
1er mars 2019 et qu'il allait prochainement déménager.

S'agissant des conclusions litigieuses, A______ a conclu à ce que son époux soit condamné à lui verser une contribution à son entretien de 7'000 fr. par mois dès la séparation effective des parties, ainsi qu'une provision ad litem de 12'000 fr., à ce que les frais judiciaires soient partagés selon le sort de la cause et à ce que des dépens lui soient alloués.

B______ a offert de verser une contribution d'entretien de 4'000 fr. et s'est opposé au versement d'une provision ad litem. Il a, enfin, conclu à la condamnation de son épouse aux frais judiciaires et sollicité l'allocation de dépens.

La cause a été gardée à juger à l'issue de cette audience.

f. Aux termes du jugement entrepris, le premier juge, pour fixer la contribution à l'entretien de l'épouse, a retenu que cette dernière faisait face à un déficit mensuel de 3'621 fr. 55 (533 fr. 35 de revenus pour 4'154 fr. 90 de charges) et que l'époux bénéficiait d'un solde disponible de 6'093 fr. 70 par mois (13'603 fr. 30 de revenus pour 7'509 fr. 60 de charges). Sur cette base, il a attribué la moitié du solde disponible des époux à A______ et fixé la contribution à son entretien au montant arrondi de 5'000 fr. par mois (3'621 fr. 55 + [(6'093 fr. 70 -
3'621 fr. 55) / 2] = 4'857 fr. 65).

Le Tribunal a, par ailleurs, considéré que, la procédure arrivant à son terme, il n'y avait pas lieu de statuer sur l'octroi d'une provision ad litem, la question des coûts supportés par l'épouse pour la défense de ses intérêts en première instance relevant à ce stade du règlement des frais au sens des art. 95 ss CPC. Statuant sur ce point, il a réparti par moitié les frais et dépens en vertu de l'art. 107 al. 1 let. c CPC sans motiver sa décision.

g. La situation personnelle et financière des parties est la suivante :

g.a Les époux sont propriétaires du domicile conjugal. B______ allègue également être seul propriétaire d'un appartement en Espagne - ce que conteste A______ -, appartement qu'il a récemment vendu.

g.b B______est ____- indépendant. Il a déclaré un bénéfice net de 178'923 fr. en 2016 (14'910 fr. 25 par mois) et de 147'556 fr. en 2017 (12'296 fr. 35 par mois).

Le premier juge a arrêté ses charges mensuelles à 7'509 fr. 60 - non contestées par l'intéressé -, comprenant le loyer (3'040 fr. pour l'appartement qu'il loue depuis mars 2019 et 300 fr. pour deux places de parc liées à cet appartement), la prime d'assurance-maladie LAMal (482 fr. 90) et LCA (147 fr. 25), les frais pour un véhicule (104 fr. 70 de prime d'assurance et 83 fr. 35 d'impôts), la prime d'assurance RC-ménage (94 fr. 80), les frais de téléphonie (79 fr.), les cotisations du 3ème pilier (477 fr. 60), les impôts (1'500 fr.) et le montant de base selon les normes OP (1'200 fr.).

A______ allègue que, son époux ne disposant que d'un véhicule, il doit être tenu compte d'une seule place de parc et que les impôts de celui-ci doivent être réduits compte tenu du versement de la contribution d'entretien.

g.c A______ n'a pas exercé d'activité lucrative pendant plusieurs années.

Elle est titulaire d'un diplôme d'enseignante de yoga et d'un diplôme de yoga délivrés respectivement en 2013 et 2014.

Elle a entamé une nouvelle formation en vue d'obtenir un certificat pour enseigner le yoga, d'une durée de trois ans et devant prendre fin en juin 2020. Elle a allégué que, dans le cadre de cette formation, elle devait dispenser des cours, qui lui procuraient des revenus trimestriels de l'ordre de 1'600 fr. pour huit élèves.

Son époux allègue que cette formation n'est pas nécessaire, puisque
A______ est déjà titulaire de deux diplômes lui permettant d'enseigner le yoga que les cours qu'elle dispense ne sont pas liés à ses études et qu'elle a, en tout état, cessé cette formation à la fin de l'année 2018. Dans sa réplique, cette dernière n'a pas contesté avoir mis un terme à ses études - se contentant de solliciter la prise en compte de ses frais de formation -, ni produit de justificatifs de paiements desdits frais pour l'année 2019.

Elle allègue, en appel, donner des cours durant trois trimestres, soit de janvier à juin et d'octobre à décembre, de sorte que ses revenus s'élèvent à 400 fr. par mois ([1'600 fr. x 3 trimestres] / 12 mois).

Selon B______, la quantité des cours dispensés par son épouse n'a cessé d'augmenter et serait beaucoup plus élevée que durant la vie commune, de sorte qu'il conviendrait de retenir des revenus au moins égaux à ceux allégués lors de l'audience du 18 décembre 2019, à savoir un montant de 1'600 fr. par trimestre (533 fr. par mois).

A______ n'a fourni aucune pièce justificative relative à ses revenus. Il ressort de son relevé de compte personnel auprès de J______ des crédits en provenance de particuliers tiers d'un montant total de 14'783 fr. pour l'année 2018.

Le Tribunal a fixé ses charges mensuelles à 4'154 fr. 90 - non contestées -, comprenant les frais relatifs au domicile conjugal (1'100 fr. d'intérêts hypothécaires et 944 fr. 45 de charges d'entretien), la prime d'assurance-maladie LAMal (482 fr. 90) et LCA (144 fr. 15), la prime d'assurance RC-ménage
(94 fr. 80), les frais pour un véhicule (71 fr. 75 de prime d'assurance et
22 fr. 55 d'impôts), la prime d'assurance pour un scooter (15 fr. 30), les frais de téléphonie (79 fr.) et le montant de base selon les normes OP (1'200 fr.). Le premier juge n'a pas comptabilisé d'impôts (estimés à 1'000 fr. par l'épouse), seules les charges effectives devant être retenues, ni les frais de formation de yoga, ceux-ci n'apparaissant pas dans la liste des dépenses et ne faisant pas partie du minimum vital LP élargi.

A______ estime qu'il convient de tenir compte, en sus, de ses frais de formation de yoga, des impôts qu'elle devra acquitter et des frais pour une femme de ménage, le couple employant une aide-ménagère jusqu'au 31 janvier 2019, date pour laquelle son époux a unilatéralement décidé de la licencier. Elle n'allègue aucun chiffre (taux d'activité et salaire-horaire) relatif à ce dernier poste.

g.d Il ressort des pièces produites que les parties ont dû s'acquitter de
20'320 fr. 25 d'impôts ICC et IFD pour l'année 2016 (soit environ 1'700 fr. par mois) et que leurs acomptes provisionnels ICC et IFD se sont élevés à environ 1'700 fr. pour l'année 2018.

D. A______ a requis l'assistance juridique par requête déposée le
20 août 2018, laquelle a été rejetée par décision du 31 août 2018, aux motifs qu'elle était propriétaire du domicile conjugal et d'un appartement en Espagne avec son époux et que les revenus de l'époux apparaissaient suffisants pour prendre en charge les honoraires d'avocat, ainsi que les éventuels frais judiciaires de l'épouse, celle-ci devant solliciter une provision ad litem.

EN DROIT

1. 1.1 L'appel est recevable contre les jugements de mesures protectrices de l'union conjugale, qui doivent être considérés comme des décisions provisionnelles au sens de l'art. 308 al. 1 let. b CPC, dans les causes dont la valeur litigieuse au dernier état des conclusions devant l'autorité inférieure est supérieure à 10'000 fr. (art. 308 al. 2 CPC).

Le litige portant sur le montant de l'entretien en faveur de l'épouse, il est de nature pécuniaire (ATF 133 III 393 consid. 2; arrêts du Tribunal fédéral 5A_42/2013 du 27 juin 2013 consid. 1.1; 5A_906/2012 du 18 avril 2013 consid. 1; 5A_236/2011 du 18 octobre 2011 consid. 1; 5A_511/2010 du 4 février 2011 consid. 1.1).

Les jugements de mesures protectrices étant régis par la procédure sommaire selon l'art. 271 CPC, le délai d'introduction de l'appel est de dix jours (art. 314
al. 1 CPC).

L'appel ayant été formé en temps utile et selon la forme prescrite par la loi
(art. 130 al. 1 et 311 al. 1 CPC), dans une cause de nature pécuniaire portant sur le montant des contributions d'entretien en jeux, qui, capitalisées selon l'art. 92
al. 2 CPC, sont largement supérieures à 10'000 fr., il est recevable.

1.2La Cour revoit la cause en fait et en droit avec un plein pouvoir d'examen (art. 310 CPC).

La présente cause est soumise aux maximes de disposition (art. 58 al. 1 CPC;
ATF 128 III 411 consid. 3.2.2; arrêt du Tribunal fédéral 5A_693/2007 du
18 février 2008 consid. 6) et inquisitoire dite sociale ou limitée (art. 272 CPC; ATF 129 III 417 précité; arrêt du Tribunal fédéral 5A_245/2019 du 1er juillet 2019 consid. 3.2.1).

1.3 Les parties ont produit de nouvelles pièces en appel.

Selon l'art. 317 al. 1 CPC, les faits et les moyens de preuves nouveaux ne sont pris en considération en appel que s'ils sont invoqués ou produits sans retard (let. a) et s'ils ne pouvaient pas être invoqués ou produits devant la première instance bien que la partie qui s'en prévaut ait fait preuve de diligence (let. b).

En l'espèce, le commandement de payer notifié à l'appelante après que la cause a été gardée à juger par le Tribunal est recevable. Tel n'est, en revanche, pas le cas de l'estimation de la charge fiscale de l'appelante et de la correspondance produite par l'intimé, lesquels auraient pu être produits devant le premier juge.

2. Les mesures protectrices de l'union conjugale sont ordonnées à la suite d'une procédure sommaire, avec administration restreinte des moyens de preuve et limitation du degré de la preuve à la simple vraisemblance. Il suffit donc que les faits soient rendus plausibles (arrêt du Tribunal fédéral 5A_508/2011 du
21 novembre 2011 consid. 1.3; ATF 127 III 474 consid. 2b/bb). Il incombe à chaque époux de communiquer tous les renseignements relatifs à sa situation personnelle et économique, accompagnés des justificatifs utiles, permettant ensuite d'arrêter la contribution en faveur de la famille (Bräm/Hasenböhler, Commentaire zurichois, n° 8-10 ad art. 180 CC).

La cognition du juge est limitée à la simple vraisemblance des faits et à un examen sommaire du droit, l'exigence de célérité étant privilégiée par rapport à celle de sécurité (Hohl, Procédure civile, Tome II, 2010, n. 1901; Haldy, La nouvelle procédure civile suisse, 2009, p. 71). Tous les moyens de preuve sont en principe admissibles (art. 254 al. 2 let. c CPC), étant précisé que ceux dont l'administration ne peut intervenir immédiatement ne doivent être ordonnés que dans des circonstances exceptionnelles (arrêt du Tribunal fédéral 5A_905/2011 du 28 mars 2012 consid. 2.5).

3. L'appelante conteste la contribution à son entretien fixée par le premier juge. Elle fait valoir que la situation financière des parties a été mal évaluée et sollicite le versement d'une contribution de 6'250 fr. par mois.

3.1 Le principeet le montant de la contribution d'entretien due selon l'art. 176
al. 1 ch. 1 CC se déterminent en fonction des facultés économiques et des besoins respectifs des époux. Même lorsqu'on ne peut plus sérieusement compter sur une reprise de la vie commune, l'art. 163 CC demeure la cause de l'obligation d'entretien réciproque des époux (ATF 138 III 97 consid. 2.2; ATF 137 III 385 consid. 3.1; 130 III 537 consid. 3.2, in SJ 2004 I 529). Tant que dure le mariage, les époux doivent ainsi contribuer, chacun selon leurs facultés, aux frais supplémentaires engendrés par l'existence parallèle de deux ménages. Si la situation financière des époux le permet encore, le standard de vie antérieur, choisi d'un commun accord, doit être maintenu pour les deux parties. Quand il n'est pas possible de conserver ce niveau de vie, les époux ont droit à un train de vie semblable (ATF 119 II 314 consid. 4b/aa; arrêts du Tribunal fédéral 5A_173/2013 du 4 juillet 2013 consid. 4.2; 5A_236/2011 du 18 octobre 2011 consid. 4.2.3).

La loi n'impose pas au juge de méthode de calcul particulière pour fixer la quotité de la contribution. La détermination de celle-ci relève du pouvoir d'appréciation du juge, qui applique les règles du droit et de l'équité (art. 4 CC). Pour déterminer une telle contribution d'entretien, l'une des méthodes considérées comme conformes au droit fédéral est celle dite du minimum vital avec répartition de l'excédent (ATF 126 III 8, in SJ 2000 I 95; arrêt du Tribunal fédéral 5C.100/2002 du 11 juillet 2002 consid. 3.1).

Si les moyens des époux sont insuffisants pour couvrir leurs minima vitaux du droit des poursuites, la charge fiscale ne doit pas être prise en considération
(ATF 140 III 337 consid. 4.2.3 et les réf. cit.; arrêt du Tribunal fédéral 5A_589/2017 du 30 novembre 2017 consid. 4.3.1).

Seules les charges effectives, dont le débirentier ou le crédirentier s'acquitte réellement, doivent être prises en compte (ATF 140 III 337 consid. 4.2.3, 121 III 20 consid. 3a; arrêts du Tribunal fédéral 5A_65/2013 du 4 septembre 2013
consid. 3.2.1 et 5A_860/2011 du 11 juin 2012 consid. 2.1).

Le minimum vital du débirentier doit dans tous les cas être préservé (ATF 135 III 66, in JT 2010 I 167; 127 III 68 consid. 2, in SJ 2001 I 280; arrêt du Tribunal fédéral 5A_662/2013 du 24 juin 2014 consid. 3.2.1).

3.2 Les contributions pécuniaires fixées par le juge dans le cadre des mesures protectrices de l'union conjugale peuvent être réclamées pour l'avenir et pour l'année qui précède l'introduction de la requête (art. 173 al. 3 CC, applicable dans le cadre de l'organisation de la vie séparée selon l'art. 176 CC; ATF 115 II 201 consid. 4.1; arrêt du Tribunal fédéral 5A_251/2016 du 15 août 2016 consid. 2.1.3 et les réf. cit.).

L'effet rétroactif ne se justifie que si l'entretien dû n'a pas été assumé en nature ou en espèces ou dès qu'il a cessé de l'être (arrêts du Tribunal fédéral 5A_371/2015 du 29 septembre 2015 consid. 3.1 et 5A_591/2011 du 7 décembre 2011
consid. 5.2).

3.3 Les parties ne s'opposent pas à l'application de la méthode dite du minimum vital avec répartition de l'excédent.

L'intimé ayant vraisemblablement quitté le domicile conjugal dans le courant du mois de mars, mais à une date indéterminée, le dies a quo de la contribution à l'entretien de l'épouse sera fixé au 1er avril 2019.

3.3.1 L'intimé réalise un salaire moyen - non contesté - d'environ 13'600 fr. par mois (14'910 fr. 25 par mois en 2016 et 12'296 fr. 35 par mois en 2017).

S'agissant de ses charges, il ne peut être tenu compte d'un montant de 1'500 fr. à titre d'impôts compte tenu de la diminution nécessairement induite par le versement de la contribution d'entretien en faveur de l'appelante. Seront, en revanche, comptabilisées les deux places de parc, dans la mesure où elles sont liées à l'appartement qu'il loue et qu'il n'est pas rendu vraisemblable qu'il puisse aisément louer une des deux places situées dans la campagne genevoise.

Ses charges élargies s'élèvent à environ 6'010 fr. par mois, hors impôts (cf. supra EN FAIT let. g.b; 7'509 fr. 60 - 1'500 fr.).

L'intimé dispose ainsi d'un solde de 7'590 fr. par mois, hors impôts.

3.3.2 L'appelante est titulaire de deux diplômes d'enseignante de yoga délivrés en 2013 et 2014. Elle dispense des cours de yoga depuis une date indéterminée, mais à tout le moins depuis 2018. Elle n'a pas expliqué pour quelles raisons la nouvelle formation qu'elle a entreprise serait nécessaire ni rendu vraisemblable que les cours qu'elle donne seraient liés à cette formation. De plus, alors que son époux affirme qu'elle a cessé sa formation à la fin de l'année 2018, elle n'a fourni aucun justificatif qui confirmerait qu'elle poursuit actuellement celle-ci.

Par conséquent, il ne sera pas tenu compte des frais de cette formation dans ses charges.

S'agissant de ses revenus, un montant d'au moins 533 fr. 35 par mois sera retenu ([1'600 fr. x 4 trimestres] /12 mois), au regard des sommes créditées sur son compte personnel et du fait que l'intimé admet un tel montant.

Enfin, il se justifie, par souci d'égalité entre les époux, de tenir compte d'une charge d'impôts. Ne seront, en revanche, pas comptabilisés les frais pour une femme de ménage, ce poste n'ayant pas été étayé.

Les charges élargies de l'appelante s'élèvent ainsi à 4'154 fr. 90, hors impôts
(cf. supra EN FAIT let. g.c).

Celle-ci doit, dès lors, faire face à un déficit mensuel de l'ordre de 3'622 fr., hors impôts (533 fr. 35 - 4'154 fr. 90).

3.3.3 Au vu de ce qui précède, en particulier de la situation financière des parties, l'appelante peut prétendre à la couverture de son déficit (3'622 fr.) et à la moitié de l'excédent du couple ([7'590 fr. - 3'622 fr.] / 2 = 1'984 fr.), soit à une contribution d'entretien arrondie à 5'600 fr., ledit excédent permettant à chacune des parties de s'acquitter de ses impôts.

Par conséquent, le chiffre 6 du dispositif du jugement entrepris sera annulé et l'intimé condamné en ce sens.

4. L'appelante reproche au premier juge de ne pas lui avoir octroyé la provision
ad litem de 12'000 fr. qu'elle a sollicitée en première instance. Elle soutient le versement d'une telle provision "garde son sens" en appel, dans la mesure où elle lui permettra d'être représentée dans le cadre des prochaines discussions transactionnelles sur les effets du divorce, puis de la procédure en divorce à venir, l'intimé disposant de liquidités suffisantes résultant de la vente du bien immobilier en Espagne.

4.1 L'obligation d'une partie de faire à l'autre l'avance des frais du procès pour lui permettre de sauvegarder ses intérêts découle du devoir général d'entretien et d'assistance des conjoints (art. 163 CC; ATF 117 II 127 consid. 6).

La provision ad litem a pour but de permettre à chaque conjoint de défendre correctement ses propres intérêts dans une procédure judiciaire, même de nature matrimoniale. Il s'agit d'une simple avance. Lorsque la procédure est arrivée à son terme, il ne se justifie plus de statuer sur l'octroi d'une telle avance mais uniquement, dans l'hypothèse où une provision ad litem aurait été octroyée au cours de la procédure, de trancher la question de son éventuelle restitution dans le cadre de la répartition des frais judiciaires et des dépens (ATF 66 II 70 consid. 3; arrêt du Tribunal fédéral 5A_777/2014 du 4 mars 2015 consid. 6; ACJC/687/2019 du 3 mai 2019 consid. 7.1; ACJC/1429/2017 du 10 novembre 2017 consid. 5.1).

4.2 En l'espèce, contrairement à ce que soutient l'appelante, la provision ad litem réclamée dans le cadre de la présente procédure de mesures protectrices de l'union conjugale ne peut viser que cette procédure, et non les éventuelles procédures de divorce et de mesures provisionnelles à venir, lors desquelles il lui appartiendra, cas échéant, de solliciter le versement de nouvelles provisions ad litem.

Dès lors, c'est à raison que le premier juge n'a pas ordonné le versement d'une provision ad litem, au motif que la procédure arrivait à son terme et que la question des frais et dépens devait être réglée conformément aux art. 95ss CPC.

Partant, l'appel sera rejeté sur cette question.

5. L'appelante fait grief au premier juge de ne pas lui avoir alloué de dépens de première instance. Elle sollicite le versement de 8'000 fr. à titre de dépens de première et seconde instances. Elle n'a pas pris de conclusions sur les frais judiciaires de la procédure.

L'intimé a, pour sa part, conclu à ce que son épouse soit condamnée en tous les frais judiciaires et dépens d'appel.

5.1 Si l'instance d'appel statue à nouveau, elle se prononce sur les frais de la première instance (art. 318 al. 3 CPC).

5.2 Les frais judiciaires sont mis à la charge de la partie succombante (art. 95 et 106 1ère phrase CPC). La Cour peut s'écarter des règles générales et répartir les frais selon sa libre appréciation, notamment lorsque le litige relève du droit de la famille (art. 107 al. 1 let. c CPC) ou des circonstances particulières rendent la répartition en fonction du sort de la cause inéquitable (art. 107 al. 1 let. f CPC).

La loi accorde au tribunal une marge de manoeuvre pour recourir à des considérations d'équité. A titre d'exemple de telles circonstances particulières sont mentionnées dans un rapport de forces financières très inégal entre les parties ou le comportement de la partie qui obtient gain de cause, qui soit a donné lieu à l'introduction de l'action, soit a occasionné des frais de procédure supplémentaires injustifiés. Le tribunal dispose d'un pouvoir d'appréciation non seulement quant à la manière dont les frais seront répartis, mais aussi et en particulier quant au fait même de déroger aux principes généraux de répartition résultant de l'art. 106 CPC (arrêt du Tribunal fédéral 4A_535/2015 du 1 juin 2016 consid. 6.4.1 et
les réf. cit.).

5.3 Les frais judiciaires sont fixés et répartis d'office (art. 105 al. 1 CPC).

Les conclusions des parties à cet égard doivent être considérées comme de simples suggestions qui, comme telles, ne sont pas visées par la maxime de disposition (arrêt du Tribunal fédéral 4A_692/2015 du 1er mars 2017
consid. 8.2, non publié aux ATF 143 III 206).

5.4 Les frais judiciaires de première instance et d'appel sont fixés à 3'300 fr., comprenant 1'500 fr. pour la première instance - montant qui n'a pas été remis en cause en appel et a été arrêté conformément aux règles légales (art. 95, 96,
104 al. 1, 106, 107 al. 1 let. c CPC; art. 5 et 30 RTFMC) - et 1'800 fr. pour la seconde instance (art. 31 et 35 RTFMC).

L'appelante dépend actuellement financièrement de son époux. Par ailleurs, la contribution d'entretien n'a pas pour but de servir à assumer les frais du procès en divorce (arrêt du Tribunal fédéral 5A_372/2015 du 29 septembre 2015
consid. 4.1). L'intimé n'allègue pas que son épouse disposerait d'une quelconque fortune, alors qu'il bénéficie actuellement de liquidités résultant de la vente d'un bien immobilier en Espagne.

Pour des motifs d'équité liés à la nature du litige et au rapport inégal des forces financières entre les parties, lesdits frais judiciaires seront intégralement mis à la charge de l'intimé (art. 107 al. 1 let. c et f CPC).

Aucune avance de frais n'ayant été effectuée, l'intimé sera, par conséquent, condamné à verser aux Services financiers du Pouvoir judiciaire un montant de 3'300 fr. à titre de frais judiciaires de première et seconde instances.

Pour les mêmes motifs, l'intimé sera en outre condamné aux dépens de première instance et d'appel de l'appelante, lesquels sont arrêtés à 5'000 fr., débours et
TVA inclus (art. 107 al. 1 let. c et f CPC; art. 20, 25 et 26 al. 1 LaCC; art. 25
al. 1 LTVA; art. 84, 85, 88 et 90 RTFMC), soit 3'500 fr. pour la première instance et 1'500 fr. pour la seconde instance, compte tenu de l'activité déployée par le conseil de cette dernière, ayant consisté en la rédaction d'une requête de treize pages, la présence à cinq audiences tenues par le Tribunal, ainsi que la rédaction d'un mémoire d'appel de dix pages et d'une réplique de quatre pages.

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre civile :

A la forme :

Déclare recevable l'appel interjeté le 1er avril 2019 par A______ contre les chiffres 6, 8, 9 et 11 du dispositif du jugement JTPI/4017/2019 rendu le 18 mars 2019 par le Tribunal de première instance dans la cause C/22765/2018-15.

Au fond :

Annule les chiffres 6, 8 et 9 du dispositif du jugement entrepris, et statuant à nouveau sur ces points :

Condamne B______ à verser à A______, par mois et d'avance, une contribution à son entretien de 5'600 fr. dès le 1er avril 2019, sous déduction des éventuels montants d'ores et déjà versés à ce titre.

Confirme le jugement entrepris pour le surplus.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Sur les frais :

Arrête les frais judiciaires de première instance et d'appel à 3'300 fr. et les met à la charge de B______.

Condamne B______ à verser aux Services financiers du Pouvoir judiciaire la somme de 3'300 fr. à titre de frais judiciaires de première instance et d'appel.

Condamne B______ à verser à A______ la somme de 5'000 fr. à titre de dépens de première instance et d'appel.

Siégeant :

Monsieur Ivo BUETTI, président; Madame Sylvie DROIN, Madame Nathalie RAPP, juges; Madame Camille LESTEVEN, greffière.

 

Le président :

Ivo BUETTI

 

La greffière :

Camille LESTEVEN

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF;
RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile, les moyens étant limités selon l'art. 98 LTF.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF supérieure ou égale à 30'000 fr.