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Décisions | Chambre civile

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C/28481/2019

ACJC/1642/2022 du 13.12.2022 sur JTPI/9332/2021 ( OO ) , CONFIRME

Descripteurs : PRÊT DE CONSOMMATION;INTERPRÉTATION(SENS GÉNÉRAL);NOVA;FARDEAU DE LA PREUVE
Normes : CO.312; CO.18; CC.8; CPC.222.al2; CPC.221.al1.letd; CPC.221.al1.lete; CPC.55
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/28481/2019 ACJC/1642/2022

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre civile

du MARDI 13 DECEMBRE 2022

 

Entre

A______ SA, sise ______ [GE], appelante d'un jugement rendu par la 13ème Chambre du Tribunal de première instance de ce canton le 8 juillet 2021, comparant par
Me Patrick SPINEDI, avocat, SPINEDI AVOCATS Sàrl, rue Saint-Léger 2,
1205 Genève, en l'Étude duquel elle fait élection de domicile,

et

Madame B______, domiciliée ______ (VD), intimée, comparant par
Me Frédéric SERRA, avocat, HOUSE ATTORNEYS SA, route de Frontenex 46, case postale 6111, 1211 Genève 6, en l'Étude duquel elle fait élection de domicile.

 

 

 

 


EN FAIT

A. Par jugement JTPI/9332/2021 du 8 juillet 2021, notifié aux parties le 12 juillet suivant, le Tribunal de première instance (ci-après : le Tribunal) a condamné A______ SA (ci-après : A______ SA ou la société) à payer à B______ un montant de 100'000 fr. avec intérêts à 5% dès le 12 août 2019 (ch. 1 du dispositif), arrêté les frais judiciaires à 6'240 fr., compensés à due concurrence avec l'avance fournie par B______ et mis à la charge de A______ SA, cette dernière étant condamnée à payer un montant de 6'240 fr. à B______ et l'Etat de Genève étant invité à restituer un montant de 100 fr. à B______, respectivement de 300 fr. à C______ (ch. 2), condamné A______ SA à payer à B______ un montant de 12'000 fr. à titre de dépens (ch. 3) et débouté les parties de toutes autres conclusions (ch. 4).

B. a. Par acte expédié le 10 septembre 2021 à la Cour de justice (ci-après : la Cour), A______ SA a appelé de ce jugement, concluant à son annulation et, cela fait, au déboutement de B______ de toutes ses conclusions, avec suite de dépens de première et seconde instances.

b. Dans sa réponse du 10 novembre 2021, B______ a conclu à la confirmation du jugement entrepris, avec suite de frais judiciaires et de dépens.

c. Par réplique et duplique des 13 et 22 décembre 2021, les parties ont persisté dans leurs explications et conclusions respectives.

d. Elles ont été informées par la Cour que la cause était gardée à juger par courriers du 23 décembre 2021.

C. Les faits pertinents suivants résultent de la procédure :

a. A______ SA, ayant son siège à Genève, est une société anonyme, active notamment dans le conseil aux entreprises et la gestion des ressources humaines.

La société a été fondée en 2002 par B______ et C______, lesquels détiennent chacun 45% du capital-actions, les 10% restants étant en mains de D______ et de E______ à raison de 5% chacun.

Entre le 22 janvier 2002 et le 30 juin 2018, B______ a été administratrice secrétaire de la société avec signature individuelle, ainsi qu'employée en qualité de directrice.

C______ en est l'administrateur président avec signature individuelle depuis le 17 novembre 2010; il est également employé de la société.

D'un commun accord entre les parties, la gestion administrative était effectuée par B______.

Le nombre de mandats et les revenus générés par C______ étaient supérieurs à ceux de B______ à tout le moins dès le début de l'exercice 2017.

b. Par courriel adressé le 31 mai 2017 à B______ - lequel faisait suite à de précédentes conversations -, C______ a relevé l'iniquité relative à la répartition du bénéfice de la société au vu de leurs chiffres d'affaires respectifs. Il souhaitait, pour le moins, que soit réglée la question du renflouement de la ligne de crédit de 100'000 fr. dont bénéficiait la société auprès de [la banque] F______, refusant que ce renflouement se fasse par les revenus tirés de sa propre activité. Il a ainsi demandé à son associée de trouver une solution pour la remettre à niveau.

c. Dès une période située entre la fin de l'année 2017 et le début de l'année 2018, A______ SA a rencontré des difficultés financières. La ligne de crédit a été entièrement utilisée et la société n'a plus disposé des liquidités nécessaires au paiement des salaires.

d. Par courriel du 17 janvier 2018, B______ a informé C______ qu'elle prévoyait d’"injecter" 50'000 fr. en janvier 2018 et le même montant en février 2018.

e. Le 22 janvier 2018, C______ lui a répondu qu'il "appréciait au plus haut point [son] engagement sur cette question".

f. B______ a procédé au versement de 100'000 fr. en faveur de A______ SA en trois tranches, à savoir 50'000 fr. le 5 février 2018, 40'000 fr. le 26 mars 2018 et 10'000 fr. le 28 mars 2018.

Le montant de 100'000 fr. a été comptabilisé comme prêt d'actionnaire en faveur de la société dans le bilan de A______ SA pour l'année 2018.

g. Le 28 mars 2018, soit le jour du versement d'un montant de 10'000 fr. précité, A______ SA, sous la plume de C______, a résilié le contrat de travail de B______ avec effet au 30 juin 2018, précisant que la société entendait compenser le versement du salaire de l'employée avec la dernière tranche de 50'000 fr. que celle-ci s’était engagée à rembourser.

h. Par courriel adressé le 29 mars 2018, B______ a rappelé à C______ que la totalité du montant de 100'000 fr. avait été versée "selon [leur] accord".

i. Au cours de l'assemblée générale extraordinaire de A______ SA du 14 mai 2018, le mandat d'administrateur de B______ a été révoqué à la majorité des voix.

j. Les salaires dus par A______ SA à B______ lui ont été versés.

k. A la suite de nombreux échanges entre A______ SA et B______, intervenus sous la plume de leurs conseils respectifs, la seconde a, par courrier du 1er juillet 2019, soutenu qu'elle avait consenti le prêt portant sur les 100'000 fr. versés à la société dans la mesure où son activité au sein de A______ SA, en qualité d'administratrice et d'employée, se poursuivrait. Elle dénonçait par conséquent au remboursement le prêt. Considérant par ailleurs que le contrat était a minima entaché de dol, elle déclarait l'invalider.

l. Le 4 juillet 2019, B______ a fait notifier à A______ SA un commandement de payer, poursuite n° 1______, pour les montants de 50'000 fr. avec intérêts à 5% dès le 5 février 2018, de 40'000 fr. avec intérêts à 5% dès le 26 mars 2018 et de 10'000 fr. avec intérêts de 5% dès le 28 mars 2018 pour cause d'"enrichissement illégitime (contrat invalidé pour dol)", auquel la société a fait opposition le même jour.

m. Par courrier du 25 septembre 2019, la fiduciaire de A______ SA a informé la société que le poste de 100'000 fr. figurant au passif du bilan 2018 comme créance d'un détenteur de participation ne pouvait être annulé dans la comptabilité de la société au vu des normes comptables et de révision – même si, selon les informations qui lui avaient été fournies, il existait un accord discuté entre actionnaires qui l'aurait remis en cause.

n. Après avoir déposé une requête de conciliation le 13 décembre 2019 et obtenu une autorisation de procéder le 4 mars 2020, B______ a, par acte introduit le 6 juillet 2020 au Tribunal, formé une demande en paiement à l'encontre de A______ SA et de C______, tendant à ce qu'ils soient condamnés à lui verser, conjointement et solidairement entre eux, les sommes de 50'000 fr. avec intérêts à 5% dès le 5 février 2018, de 40'000 fr. avec intérêts à 5% dès le 26 mars 2018 et de 10'000 fr. avec intérêts à 5% dès le 28 mars 2018, subsidiairement la somme de 100'000 fr. avec intérêts à 5% dès le 12 août 2019.

A l'appui de sa demande, elle a, en substance, fait valoir que le versement de 100'000 fr. était une avance qu'elle avait accepté d'octroyer afin de soutenir financièrement la société dans laquelle elle s'était investie depuis plus de quinze ans et d'assurer sa position au sein de celle-ci. Elle n'aurait jamais accepté de faire une telle avance si A______ SA et C______ lui avaient dit qu'elle ne lui serait pas remboursée et qu'elle-même ne ferait plus partie de la société. Elle n'avait aucune obligation de payer un quelconque montant à la société. Si la qualification de prêt ne devait pas être retenue, le montant versé devait en tout état lui être restitué pour cause d'enrichissement illégitime, le contrat ayant été invalidé pour dol.

o. Dans leur réponse du 9 novembre 2020, A______ SA et C______ ont conclu à l'irrecevabilité de la demande formée à l'encontre de C______ et au rejet de la demande sur le fond.

Ils ont exposé que le versement de 100'000 fr. ne correspondait pas à une avance effectuée par B______, mais au remboursement du montant de la ligne de crédit que celle-ci avait utilisée à ses propres fins. En effet, elle avait continué à se verser un salaire, alors que, selon eux, elle avait convenu avec C______, au début de l'année 2017, qu'elle y renonçait. C'était donc de manière volontaire et parce qu'elle reconnaissait avoir une dette envers la société que B______ avait remboursé la somme de 100'000 fr. Cela était confirmé par le courriel que cette dernière avait adressé à C______ le 29 mars 2018, dans lequel elle avait indiqué qu'elle avait effectué ce paiement "selon [leur] accord". Ce n'était qu'à la suite de son licenciement que B______ avait évoqué l'existence d'un prêt conclu entre elle-même et A______ SA.

p. Lors de l'audience tenue le 14 avril 2021 par le Tribunal, B______ a déclaré que ses rapports avec C______ s'étaient détériorés au début de l'année 2018 en raison des problèmes de liquidités de la société, C______ lui reprochant, notamment, de ne pas apporter assez d'affaires à la société. Elle travaillait à 80% pour la société et 15 à 20% de son temps était dédié aux tâches administratives. Elle a confirmé avoir accordé un prêt à la société parce que celle-ci se trouvait dans une situation financière difficile et parce que cela faisait longtemps qu'elle y était engagée. Elle connaissait C______ depuis leurs études et lui faisait confiance. A aucun moment, celui-ci ne lui avait indiqué que ce prêt ne lui serait pas remboursé, ni qu'elle serait licenciée, sans quoi elle n'aurait pas versé ce montant.

B______ a, par ailleurs, affirmé que, même si cela n'avait pas été évoqué, elle avait cru que le versement était conditionné au maintien des rapports de travail. Si la date du remboursement, les tranches et le taux d'intérêts n'avaient pas été abordés dans le détail, elle s'attendait à être remboursée avec des intérêts calculés au taux usuel. Elle a précisé que son licenciement était intervenu après le versement de la dernière tranche du prêt. Selon elle, les comptes pour l'année 2018 avaient été approuvés par une majorité lors d'une assemblée générale; pour sa part, elle les avait refusés.

C______ a déclaré que ses rapports avec B______ s'étaient détériorés au fil des ans, en particulier durant les trois ou quatre dernières années. Historiquement, les volumes de production de B______ n'avaient pas été suffisamment stables et elle avait fait perdre de l'argent à la société car, la plupart du temps, les chiffres d'affaires qu'elle générait ne permettaient pas de couvrir les frais qu'elle occasionnait, notamment son salaire. A la suite d’un rendez-vous à la fiduciaire, au cours duquel il s'était révélé que la société avait de nouveau essuyé des pertes, il avait expliqué à B______ que la situation ne pouvait plus durer, qu'il était inacceptable que le chiffre d'affaires qu'il générait serve à éponger ses dettes à elle et qu'il refusait désormais de consacrer 1 fr. de plus de sa production aux pertes qu'elle occasionnait. Il lui avait donc dit que, si elle ne générait pas un chiffre d'affaires permettant de lui verser un salaire, elle devrait renoncer à son salaire. Ensuite, chacun était reparti gérer ses activités et, à la fin de l'année, B______ lui avait indiqué qu'elle n’avait plus d'argent pour payer les salaires dès janvier 2018. Il en avait été surpris, car il avait des affaires en cours et la ligne de crédit pouvait être utilisée pour payer les salaires. B______ avait cependant continué à se verser un salaire, pensant qu'elle arriverait à générer un chiffre d'affaires suffisant, ce qui n'avait pas été le cas. L'argent avait donc été dépensé entre le mois d'avril, soit après la réunion à la fiduciaire, et la fin de l’année 2017.

S'agissant du montant de 100'000 fr., C______ a affirmé avoir demandé à B______ au minimum de rembourser la ligne de crédit car il refusait que la société fasse faillite parce qu'elle-même avait trop dépensé. Il n'avait jamais été question d'un prêt ou d'un remboursement conditionné au maintien des rapports de travail. B______ n'avait jamais demandé quand elle reverrait son argent, ni évoqué un terme ou un taux d'intérêts. Il n'avait pas été question d'un licenciement avant le 28 mars 2018; il n'en avait jamais vraiment eu l'intention, mais les choses s'étaient précipitées en raison d'un évènement, qui avait rendu la relation insoutenable. Selon lui, le licenciement était intervenu avant le versement de la tranche de 10'000 fr.

C______ a confirmé qu'il y avait eu une assemblée générale pour approuver les comptes de l'année 2018; il ne se rappelait pas si les comptes avaient alors été approuvés, mais il se souvenait que B______ avait émis une réserve.

B______ a déclaré qu'elle n'avait jamais accepté de renoncer à son salaire.

q. Lors de l'audience tenue le 17 mai 2021, le Tribunal a entendu plusieurs témoins, à savoir G______, employé de la fiduciaire en charge de la comptabilité de A______ SA, H______, ancienne employée de A______ SA de 2015 à 2017 ou 2018, et I______, ancien employé de A______ SA entre 2008 et 2014.

G______ a déclaré qu'il lui avait été demandé d'établir un compte analytique distinguant les chiffres d'affaires respectifs de C______ et B______ et qu'il avait constaté que le chiffre d'affaires de C______ était bien supérieur à celui de B______. H______ et I______ ont confirmé cette différence; ils ne savaient pas si les efforts déployés B______ étaient moins importants que ceux mis en œuvre par C______ et, si tel était le cas, si cette différence d'effort avait toujours existé ou si elle s'était creusée avec le temps.

r. Lors de l'audience de plaidoiries finales tenue le 7 juin 2021 par le Tribunal, les parties ont persisté dans leurs conclusions.

A cette occasion, C______ et A______ SA ont, pour la première fois, fait valoir, subsidiairement à leur première hypothèse selon laquelle le versement de 100'000 fr. était intervenu à titre de remboursement d'une dette de B______ envers A______ SA, que B______ avait agi en sa qualité d'actionnaire et que le versement de 100'000 fr. devait être qualifié de versement à fonds perdu.

La cause a été gardée à juger à l'issue de cette audience.

s. Aux termes du jugement entrepris, le premier juge a, notamment, considéré que B______ n'avait pu renoncer valablement à son droit au salaire en application des art. 322, 341, 361 et 362 CO et qu'elle n'était pas débitrice envers A______ SA d'un montant correspondant au remboursement des salaires qu'elle avait perçus en 2017 et 2018.

Il convenait donc de qualifier la nature juridique des versements effectués par la première en faveur de la société au début de l'année 2018. Savoir si les parties étaient convenues d'un contrat de prêt ou d'un versement à fonds perdu était une question d'interprétation de leurs manifestations de volonté. Selon le Tribunal, l'appréciation des indices concrets que constituaient les déclarations de volonté des parties et leurs comportements, ainsi que le contexte général au moment où B______ s'était engagée à verser le montant litigieux laissaient penser que les parties avaient eu l'intention commune de conclure un contrat de prêt. Il n'y avait pas lieu de s'attarder sur la question de savoir si la volonté subjective de A______ SA correspondait à l'engagement de B______ à un versement à fonds perdu en faveur de la société, dans la mesure où cet argument - avancé seulement lors des plaidoiries finales et uniquement subsidiairement à celui de la dette envers la société -, ne correspondait pas à la volonté subjective de cette dernière au moment de l'engagement de B______. En outre, si l'on devait considérer que la volonté subjective des parties n'était pas suffisamment établie, il s'agissait de retenir que, d’après les règles de la bonne foi, la précitée pouvait raisonnablement déduire des déclarations et du comportement de A______ SA, ainsi que du contexte général, que le montant versé lui serait remboursé à terme. En tout état, la remise des 100'000 fr. ne pouvait s'expliquer raisonnablement que par la conclusion d'un prêt, B______ n'étant débitrice d'aucune obligation en faveur de A______ SA.

S'agissant des prétentions à l'encontre de C______, le Tribunal a considéré que B______ n'avait pas établi que le premier avait commis une escroquerie au détriment de la seconde, engageant sa responsabilité délictuelle et l'obligation de réparer le dommage en découlant, ce qui n'est plus litigieux en appel.

EN DROIT

1. 1.1 L'appel est recevable contre les décisions finales de première instance, dans les causes dont la valeur litigieuse, au dernier état des conclusions devant l'autorité inférieure, est supérieure à 10'000 fr. (art. 308 al. 1 let. a et al. 2 CPC).

La valeur litigieuse étant, en l'espèce, supérieure à 10'000 fr., l'appel, motivé et formé par écrit dans un délai de trente jours à compter de la notification de la décision, est recevable (art. 130, 131, 145 al. 1 let. b et 311 al. 1 CPC).

1.2 La Cour revoit la cause avec un plein pouvoir d’examen (art. 310 CPC). En particulier, elle contrôle librement l'appréciation des preuves effectuée par le juge de première instance (art. 157 CPC en relation avec l'art. 310 let. b CPC). Elle applique en outre la maxime des débats et le principe de disposition (art. 55 al. 1 et 58 al. 1 CPC).

En vertu de la présomption de l'art. 150 al. 1 CPC, il est admissible dans le cadre de la maxime des débats de considérer comme non contestés les faits retenus dans la décision attaquée s'ils ne sont pas critiqués par l'appelant (Tappy, Les voies de droit du nouveau code de procédure civile, in JT 2010 III 126, p. 137; Reetz/Theiler, Kommentar zur Schweizerischen Zivilprozessordnung, 2013, n. 38 ad art. 311 ZPO).

2. L'appelante reproche au Tribunal une constatation inexacte des faits en tant qu'il n'a pas tenu compte d'un certain nombre d'éléments, qu'il énumère dans la partie en fait de son appel sous les lettres a à f, à savoir :

"a. Le 4 janvier 2002, Mme B______ a conclu avec A______ SA un contrat de travail comprenant une annexe intitulée « Descriptif de poste » (cf pièce 3 intimée). Selon cette annexe, l'une des principales activités de Mme B______ au sein de la société était de «Gérer les activités stratégiques, opérationnelles et administratives de la société»;

b. Le 31 mai 2017, M. C______ a adressé un message à Mme B______ pour lui faire part de sa frustration, en tant qu'associé, de voir que les revenus générés au sein de la société ne provenaient que de son activité. En particulier, il lui a écrit ceci (cf. pièce 17 appelante) :

«Je voudrais donc que pour le moins nous réglions la question du renflouement de notre ligne de crédit et je refuse de la prendre sur mon activité.»

c. Le 17 janvier 2018, Mme B______ a écrit à M. C______ ce qui suit (cf. pièce 4, intimée) :

«3) Financement ligne de crédit

Je prévois d'injecter CHF 50'000.- en janvier et le même montant encore une fois en février 2018. Je suis en train de m'organiser dans ce sens.»


 

d. Le 28 mars 2018, A______ SA a remis en mains propres à Mme B______ un courrier comprenant les propos suivants (cf. pièce 7, intimée) :

«Nous entendons compenser le versement de votre salaire avec la dernières tranche de CHF 50'000.- (renflouement de la ligne de crédit de CHF 100'000) pour laquelle vous vous êtes maintes fois engagée à procéder au remboursement. Le solde éventuel de votre salaire après compensation vous sera versé le cas échéant durant le dernier mois de vos relations contractuelles.»

e. Le 29 mars 2018, Mme B______ a adressé à M. C______ un mail faisant référence à leur accord de la façon suivante (cf. pièce 19, recourante) :

«Donc la totalité des CHF 100'000.- ont été versée (sic) selon notre accord. J'ai payé avec cet argent injecté les trois salaires avec valeur 29.03.2018 plus d'autres factures ouvertes concernant mars 2018. Je te demande donc de verser dans les jours prochains ta part du budget de CHF 35'000.-pour janvier et mars 2018 sur le compte de A______ [auprès de] F______.»

f. Le contrat de travail de Mme B______ a été résilié le 28 mars 2018, soit le jour même du versement de la dernière tranche des CHF 100'000.- par cette dernière et donc deux jours avant qu'elle confirme ce versement à M. C______ (cf. pièce 8 intimée)."

L'intimée conclut à l'irrecevabilité de ces éléments conformément à l'art. 317 al. 1 CPC au motif qu'il s'agirait de faits nouveaux.

2.1.1 Dans le cadre de la maxime des débats (art. 55 al. 1 CPC), il incombe aux parties, et non au juge, de rassembler les faits du procès, c'est-à-dire d'alléguer les faits pertinents (fardeau de l'allégation subjectif) et d'offrir les moyens de preuve propres à établir ceux-ci (fardeau de l'administration de la preuve; ATF 144 III 519 consid. 5.1).

En vertu des art. 221 al. 1 let. d et 222 al. 2 CPC, les faits pertinents doivent être allégués en principe dans la demande, respectivement dans la réponse, et ils doivent être suffisamment motivés (charge de la motivation) pour que la partie adverse puisse se déterminer sur eux et que le juge puisse savoir quels sont les faits admis, respectivement les faits contestés sur lesquels des moyens de preuve devront être administrés (art. 150 al. 1 CPC). En vertu des art. 221 al. 1 let. e et 222 al. 2 CPC, les moyens de preuve propres à établir les faits pertinents doivent également y être indiqués. Au regard de la maxime des débats, la personne de l'alléguant importe peu : il suffit que les faits fassent partie du cadre du procès pour que le juge puisse en tenir compte (arrêt du Tribunal fédéral 4A_164/2021 du 21 décembre 2021 consid. 3.1 et les réf. cit.).

Les exigences de forme des art. 221 al. 1 lit. d et e et 222 al. 2 CPC ont pour but de fixer le cadre du procès et de mettre clairement en évidence les faits qui sont reconnus ou au contraire contestés entre les parties; elles doivent aussi assurer une certaine limpidité de la procédure et, par-là, favoriser la solution rapide du litige. En règle générale, seuls les faits ainsi allégués, ensuite admis entre les parties ou, s'ils sont contestés, dûment prouvés, peuvent fonder le jugement (arrêt du Tribunal fédéral 4A_582/2016 du 6 juillet 2017 consid. 4.4).

La conséquence et la sanction de l'obligation fixée à l'art. 55 al. 1 CPC résident dans le fait que le tribunal ne pourra pas tenir compte dans son jugement des faits qui ne sont pas allégués et prouvés; il faut à tout le moins que ces faits entrent dans le cadre des allégations formulées (ATF 142 III 462 consid. 4, in SJ 2016 I 429).

2.1.2 A teneur de l'art. 317 al. 1 CPC, les faits et les moyens de preuve nouveaux ne sont pris en considération en appel que s'ils sont invoqués ou produits sans retard (let. a) et s'ils ne pouvaient pas être invoqués ou produits devant la première instance bien que la partie qui s'en prévaut ait fait preuve de diligence (let. b). Les deux conditions sont cumulatives (ATF 144 III 349 consid. 4.2.1; arrêt du Tribunal fédéral 5A_436/2020 du 5 février 2021 consid. 4.3).

2.2 In casu, il sera retenu ce qui suit s'agissant des éléments de fait énumérés dans la partie en fait de l'appel sous lettres a à f :

- let. a : le fait objet de cet allégué n'a pas été exposé par l'appelante en première instance et n'est, contrairement à ce qu'elle soutient, pas couvert par les déclarations de l'intimée lors de sa comparution du 14 avril 2021, de sorte que le Tribunal ne pouvait en tenir compte; cet allégué nouveau ne peut en outre être admis en appel puisqu'il aurait pu être introduit aux débats en première instance;

- let. b : l'appelante a dûment allégué en première instance que C______ avait adressé un courriel à l'intimée le 31 mai 2017 concernant la ligne de crédit qu'il refusait de renflouer grâce aux revenus de son activité, de sorte que l'état de fait a été complété en ce sens; en revanche, tel n'est pas le cas des autres éléments factuels contenus sous cette lettre, qui n'ont pas été allégués devant l'instance précédente alors qu'ils auraient pu l'être; ils ne seront par conséquent pas retenus aux débats faute d'avoir été allégués valablement en première ou en seconde instance;

- let. c, d et f : le Tribunal a tenu compte de ces divers éléments, hormis ceux ressortant des phrases "je suis en train de m'organiser dans ce sens", "le solde éventuel de votre salaire après compensation vous sera versé le cas échéant durant le dernier mois de vos relations contractuelles" et le fait que le licenciement de l'intimée serait intervenu "deux jours avant qu'elle confirme [le] versement [de 100'000 fr.] à M. C______"; or, ces derniers éléments factuels n'ont pas été formulés en première instance et le sont tardivement en appel; ils seront par conséquent écartés des débats;

- let. e : dans son résumé de la position de l'appelante contenue dans sa réponse à la demande, le premier juge a exposé que celle-ci avait allégué l'existence d'un courriel que l'intimée lui avait adressé le 29 mars 2018, dans lequel elle lui indiquait avoir effectué le versement litigieux "selon [leur] accord" (cf. supra EN FAIT let. C.o); pour plus de clarté, ce fait est intégré à l'état de faits; pour le surplus, le Tribunal n'avait pas à tenir compte des autres éléments, ceux-ci n'ayant pas été allégués; leur allégation devant la Cour ne peut être admise pour les motifs déjà évoqués ci-dessus.

3. L'appelante ne remet pas en cause le raisonnement du premier juge en tant qu'il considère qu'il ne pouvait être retenu que l'intimée était débitrice envers l'appelante du montant de salaires perçus pendant les exercices 2017 et 2018.

4. L'appelante s'en prend à la cause juridique des versements litigieux retenue par le Tribunal.

Elle fait grief au Tribunal d'avoir violé l'art. 8 CC en retenant qu'un contrat de prêt avait été conclu en se fondant sur la volonté subjective des parties. Elle soutient qu'au vu de la position de l'intimée au sein de la société, si un tel contrat avait été conclu, elle lui aurait fait revêtir la forme écrite. Or tel n'a pas été le cas, car les parties ne s'étaient pas mises d'accord sur les éléments essentiels d'un contrat de prêt (obligation de remboursement, versement d'intérêts et échéance du prêt) et n'en avaient même jamais discuté. La comptabilisation du montant de 100'000 fr. à titre de créance de l'intimée s'explique par le fait que le comptable avait été obligé de le comptabiliser de la sorte. Selon l'appelante, l'intimée a, en sa qualité d'actionnaire, renfloué volontairement la ligne de crédit à fonds perdu afin d'assurer la pérennité de la société. Cela est confirmé par le terme "injecter" - et non "prêter" - que l'intimée a utilisé dans son courriel du 17 janvier 2018. L'intimée n'a par ailleurs pas apporté la preuve de l'existence d'un contrat de prêt, dès lors que l'existence d'un engagement de remboursement du montant de 100'000 fr. ne ressortait ni des pièces ni des déclarations des témoins.

Un examen selon le principe de la confiance (volonté objective des parties) aboutirait à la même conclusion. A cet égard, l'appelante souligne qu'il était normal que l'intimée fasse, en sa qualité d'actionnaire, cet effort financier à fonds perdu, alors que, pendant de nombreuses années, la plupart des revenus - qui avaient servi à lui verser un salaire - avaient été générés par C______.

Pour sa part, l'intimée - qui estime que l'appelante abuse de son droit en se fondant sur une argumentation nouvelle et contradictoire développée uniquement en appel - considère que c'est à raison que le Tribunal a retenu l'existence d'un contrat de prêt en se fondant tant sur les déclarations de volonté des parties que sur le contexte général en procédant à une interprétation subjective.

4.1. Le prêt de consommation est un contrat par lequel le prêteur s'oblige à transférer la propriété d'une somme d'argent ou d'autres choses fongibles à l'emprunteur, à charge pour celui-ci de lui en rendre autant de même espèce et qualité (art. 312 CO).

La conclusion d'un tel contrat de prêt peut intervenir de manière expresse ou tacite, aucune forme spéciale n'étant exigée (Tercier/Bieri/Carron, Les contrats spéciaux, 2016, n. 2515, p. 338). Elle présuppose néanmoins l'existence de manifestations de volonté réciproques et concordantes entre les parties sur tous les points essentiels (art. 1 al. 1 CO; ATF 127 III 248 consid. 3d; arrêts du Tribunal fédéral 4A_69/2019 du 27 septembre 2019 consid. 3.1; 4A_152/2013 du 20 septembre 2013 consid. 2.3 et les références citées).

La conclusion d'un contrat est un fait qu'il incombe à celui qui s'en prévaut de prouver (art. 8 CC).

Celui qui agit en restitution d'un prêt doit apporter la preuve qu'un contrat de prêt de consommation a été conclu, ce qui suppose un accord sur une obligation de restitution à la charge de l'emprunteur. Dire si une telle obligation a été prévue suppose une appréciation des preuves. Celui qui se dit prêteur n'est au bénéfice d'aucune présomption légale; il doit donc apporter la preuve que l'obligation de remboursement a été convenue (ATF 83 II 209 consid. 2; arrêts du Tribunal fédéral 5A_626/2017 du 29 juin 2018 consid. 3.3.1; 4A_639/2015 du 28 juillet 2016 consid. 5.1; 4A_313/2015 du 13 novembre 2015 consid. 2; 4A_12/2013 du 27 juin 2013 consid. 2.1).

La restitution du prêt est soumise à deux conditions : premièrement, la remise des fonds à l'emprunteur et, deuxièmement, l'obligation de restitution stipulée à charge de celui-ci. L'obligation de restitution de l'emprunteur est un élément essentiel du contrat. Elle résulte non pas du paiement fait par le prêteur mais de la promesse de restitution qu'implique le contrat de prêt. La remise de l'argent par le prêteur n'est qu'une condition de l'obligation de restituer. Le juge doit déterminer, en appliquant les règles d'interprétation des contrats, si les parties sont convenues d'une obligation de restitution; pour ce faire, il se base sur toutes les circonstances concrètes du cas d'espèce, qu'il incombe au prêteur d'établir (ATF 144 III 93 consid. 5.1.1 et les réf. cit.).

Dans certaines circonstances exceptionnelles, le seul fait de recevoir une somme d'argent peut constituer un élément suffisant pour admettre l'existence d'une obligation de restituer et, partant, d'un contrat de prêt. Il doit toutefois en résulter clairement que la remise de la somme ne peut s'expliquer raisonnablement que par la conclusion d'un prêt (ibidem).

4.2. La question de savoir si les parties ont conclu un accord est soumise au principe de la priorité de la volonté subjective sur la volonté objective. Lorsque les parties se sont exprimées de manière concordante (échange de manifestations de volonté concordantes; übereinstimmende Willenserklärungen), qu'elles se sont effectivement comprises et, partant, ont voulu se lier, il y a accord de fait (tatsächlicher Konsens); si au contraire, alors qu'elles se sont comprises, elles ne sont pas parvenues à s'entendre, ce dont elles étaient d'emblée conscientes, il y a un désaccord patent (offener Dissens) et le contrat n'est pas conclu. Subsidiairement, si les parties se sont exprimées de manière concordante mais que l'une ou les deux n'ont pas compris la volonté interne de l'autre, ce dont elles n'étaient pas conscientes dès le début, il y a désaccord latent (versteckter Dissens) et le contrat est conclu dans le sens objectif que l'on peut donner à leurs déclarations de volonté selon le principe de la confiance; en pareil cas, l'accord est de droit (ou normatif) (ATF 144 III 93 consid. 5.2.1et les réf. cit.).

En procédure, le juge doit donc rechercher, dans un premier temps, la réelle et commune intention des parties (interprétation subjective), le cas échéant empiriquement, sur la base d'indices. Constituent des indices en ce sens non seulement la teneur des déclarations de volonté - écrites ou orales -, mais encore le contexte général, soit toutes les circonstances permettant de découvrir la volonté réelle des parties, qu'il s'agisse de déclarations antérieures à la conclusion du contrat ou de faits postérieurs à celle-ci, en particulier le comportement ultérieur des parties établissant quelles étaient à l'époque les conceptions des contractants eux-mêmes (ATF 144 III 93 consid. 5.2.2 et les réf. cit.).

Si le juge ne parvient pas à déterminer la volonté réelle et commune des parties - parce que les preuves font défaut ou ne sont pas concluantes - ou s'il constate qu'une partie n'a pas compris la volonté exprimée par l'autre à l'époque de la conclusion du contrat - ce qui ne ressort pas déjà du simple fait qu'elle l'affirme en procédure, mais doit résulter de l'administration des preuves -, il doit recourir à l'interprétation normative (ou objective), à savoir rechercher leur volonté objective, en déterminant le sens que, d'après les règles de la bonne foi, chacune d'elles pouvait et devait raisonnablement prêter aux déclarations de volonté de l'autre. Il s'agit d'une interprétation selon le principe de la confiance. D'après ce principe, la volonté interne de s'engager du déclarant n'est pas seule déterminante; une obligation à sa charge peut découler de son comportement, dont l'autre partie pouvait, de bonne foi, déduire une volonté de s'engager. Le principe de la confiance permet ainsi d'imputer à une partie le sens objectif de sa déclaration ou de son comportement, même si celui-ci ne correspond pas à sa volonté intime (ATF 144 III 93 consid. 5.2.3 et les réf. cit.).

4.3 En l'espèce, l'appelante ne soutient plus, en appel, que le versement litigieux aurait été effectué pour rembourser une dette de l'intimée envers elle; elle développe uniquement son argument subsidiaire - qu'elle a, contrairement à ce que soutient l'intimée, déjà soulevée lors des plaidoiries finales en première instance - selon lequel le versement serait intervenu de manière volontaire à fonds perdu par l'intimée.

La question de savoir si les parties se sont mises d'accord sur la conclusion d'un contrat de prêt ou sur un versement à fonds perdu de l'intimée relève de l'interprétation de leurs manifestations de volonté.

A la fin du mois de mai 2017, C______ a fait part à son associée de son sentiment d'iniquité concernant leurs chiffres d'affaires respectifs et la répartition du bénéfice de la société. Il souhaitait que soit réglée à tout le moins "la question du renflouement de la ligne de crédit" de la société, refusant que ce renflouement soit fait par le biais de sa propre activité et lui demandant de trouver une solution pour la remettre à niveau.

En janvier 2018, la ligne de crédit ayant été entièrement utilisée et la société ne disposant plus des liquidités nécessaires au paiement des salaires à venir, l'intimée a informé son associé qu'elle prévoyait d'"injecter" 100'000 fr. entre janvier et février 2018. Ce dernier lui a alors répondu qu'il "appréciait au plus haut point [son] engagement sur cette question". Les parties n'ont pas évoqué les questions d'un remboursement, de taux d'intérêts ou d'un versement à fonds perdu. Ce versement a été comptabilisé comme une créance de l'intimée au passif du bilan de l'appelante pour l'année 2018.

L'appelante ne saurait être suivie lorsqu'elle soutient que l'utilisation du terme "injecter" correspondrait nécessairement à un versement à fonds perdu, ce terme pouvant viser diverses formes d'apport en capital en faveur d'une société. En matière financière, les termes "injecter des liquidités" visent essentiellement des prêts (https://www.lafinancepourtous.com/2012/01/26/injecter-des-liquidites-ca-veut-dire-quoi/).

De plus, contrairement à ce qu'allègue l'appelante, la fiduciaire en charge de la comptabilité n'a pas indiqué, dans son courrier du septembre 2019, avoir été obligée de faire figurer au bilan le versement effectué par l'intimée comme une créance de l'intimée, mais ne pas avoir pu postérieurement - malgré les nouvelles informations qui lui avaient été communiquées - l'annuler dans la comptabilité de la société au vu des normes comptables et de révision à respecter. L'appelante n'explique pas la raison pour laquelle le montant de 100'000 fr. a été comptabilisé comme une créance de l'intimée alors qu'un versement à fonds perdu aurait dû être comptabilisé d'une autre manière, notamment sous la forme d'une attribution à la réserve légale de la société.

Comme l'a, à raison, relevé le premier juge, l'on ne saurait retenir que la volonté subjective de l'appelante correspondait à un engagement de l'intimée de verser la somme litigieuse à fonds perdu en faveur de la société, cet argument n'ayant été avancé que lors des plaidoiries finales et de manière subsidiaire à celui de l'existence d'une dette envers la société.

Il résulte ainsi d'une interprétation subjective qu'aucun élément ne plaide en faveur de la remise de 100'000 fr. par l'intimée à l'appelante à fonds perdu, alors qu'au vu du contexte général au moment où l'intimée a offert de s'exécuter, ainsi que du fait de sa comptabilisation à titre de créance, ce versement s'explique raisonnablement par la conclusion d'un contrat de prêt.

A titre superfétatoire, il sera relevé qu'il en est de même au regard d'une interprétation objective, la Cour considérant que l'intimée pouvait de bonne foi déduire du contexte global dans lequel elle s'est engagée à opérer ledit versement que celui-ci lui serait remboursé à terme.

C'est donc à raison que le Tribunal a retenu l'existence d'un contrat de prêt entre les parties relatif au versement litigieux et a condamné l'appelante à payer à l'intimée la somme de 100'000 fr. avec intérêts à 5% l'an dès la date - non contestée - du 12 août 2019.

Partant, le jugement entrepris sera confirmé.

5. Les frais judiciaires sont mis à la charge de la partie succombante (art. 95 et 106 1ère phrase CPC).

Les frais judiciaires de la procédure d'appel seront fixés à 4'500 fr. (art. 17 et 35 RTFMC), couverts par l'avance de frais du même montant opérée par l'appelante, avance qui demeure entièrement acquise à l'Etat de Genève (art. 111 al. 1 CPC).

Au vu de l'issue du litige, ces frais judiciaires seront intégralement mis à la charge de l'appelante.

Les dépens d'appel, débours et TVA compris, seront arrêtés à 5'000 fr. au regard de l'activité déployée par le conseil de l'intimée (art. 95, 104 al. 1, 105 al. 1 et 106 al. 1 CPC; art. 20, 23 al. 1, 25 et 26 al. 1 LaCC; art. 25 al. 1 LTVA; art. 84, 85 al. 1 et 90 RTFMC).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre civile :

A la forme :

Déclare recevable l'appel interjeté le 10 septembre 2021 par A______ SA contre le jugement JTPI/9332/2021 rendu le 8 juillet 2021 par le Tribunal de première instance dans la cause C/28481/2019.

Au fond :

Confirme le jugement entrepris.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Sur les frais :

Arrête les frais judiciaires d'appel à 4'500 fr., les met à la charge de A______ SA et dit qu'ils sont entièrement compensés par l'avance effectuée, laquelle demeure acquise à l'Etat de Genève.

Condamne A______ SA à payer à B______ 5'000 fr. à titre de dépens d'appel.

Siégeant :

Monsieur Ivo BUETTI, président; Madame Sylvie DROIN, Monsieur
Jean REYMOND, juges; Madame Jessica ATHMOUNI, greffière.

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF supérieure ou égale à 30'000 fr.