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Décisions | Chambre civile

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C/7873/2020

ACJC/1585/2022 du 29.11.2022 sur JTPI/7152/2021 ( OO ) , CONFIRME

Normes : cpc.276; CC.129
En fait
En droit

republique et

canton de geneve

POUVOIR JUDICIAIRE

C/7873/2020 ACJC/1585/2022

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre civile

du mardi 29 novembre 2022

 

Entre

Monsieur A______, domicilié ______ [Chine], requérant sur mesures provisionnelles et appelant d'un jugement rendu par la 12ème Chambre du Tribunal de première instance de ce canton le 3 juin 2021, comparant par Me Michel CELI VEGAS, avocat, rue du Cendrier 12-14, case postale 1207, 1211 Genève 1, en l'Étude duquel il fait élection de domicile,

et

Madame B______, domiciliée ______ [GE], intimée, comparant par
Me Ninon PULVER, avocate, NP & VS AVOCATES, rue des Alpes 15, case postale, 1211 Genève 1, en l'Étude de laquelle elle fait élection de domicile.

 


EN FAIT

A. Par jugement JTPI/7152/2021 du 3 juin 2021, le Tribunal de première instance a débouté A______ de toutes ses conclusions en modification de contribution d'entretien formées tant sur mesures provisionnelles (ch. 1) qu'au fond (ch. 2), arrêté les frais judiciaires à 2'200 fr. en les laissant à la charge de ce dernier (ch. 3), l'a condamné à verser à B______ 3'000 fr. à titre de dépens (ch. 4) et débouté les parties de toutes autres conclusions (ch. 5).

B. a. Par acte du 5 juillet 2021, A______ forme appel contre ce jugement et conclut à son annulation.

Sous un chapitre D intitulé "Sur mesures provisionnelles", il conclut à ce qu'il lui soit donné acte de son engagement à payer une contribution d'entretien en faveur de B______ de 500 fr. par mois depuis le dépôt de sa requête en modification déposée le 29 avril 2020.

Sous un chapitre F intitulé "AU FOND", il requiert préalablement la production par sa partie adverse de ses comptes bancaires en Suisse et à l'étranger pour les années 2016 à 2020.

Dans un sous-chapitre "Sur mesures provisionnelles", il sollicite la modification du jugement de divorce JTPI/2179/94 du 24 février 1994 et la suppression de toute contribution d'entretien en faveur de B______ dès le dépôt de sa requête. Subsidiairement, il conclut à ce qu'il soit condamné à verser à cette dernière une contribution de 500 fr. par mois jusqu'à la décision à rendre au fond.

Dans un sous-chapitre "Principalement au fond", il conclut à l'annulation du chiffre 5 du jugement de divorce JTPI/2179/94 du 24 février 1994 et à la suppression de toute contribution d'entretien en faveur de B______ dès le dépôt de sa requête. Subsidiairement, il conclut à ce qu'il lui soit donné acte de son engagement à verser une contribution de 500 fr. par mois depuis le dépôt de sa requête et jusqu'à fin décembre 2021.

b. Sur mesures provisionnelles, B______ s'est opposée à toutes les conclusions prises par sa partie adverse, avec suite de frais.

b.a B______ a conclu par ailleurs à ce que A______ soit astreint à fournir un montant de 6'000 fr. à titre de sûretés en garantie du paiement de ses dépens de première et deuxième instance.

b.b A______ a répliqué sur mesures provisionnelles en concluant à la suppression de toute contribution d'entretien due à son ex-épouse dès le dépôt de sa requête.

b.c B______ a dupliqué en persistant dans ses précédentes conclusions.

b.d Les parties se sont encore déterminées sur mesures provisionnelles les 28 août et 2 septembre 2022.

b.e Par avis du greffe de la Cour du 26 août 2022, les parties ont été informées de ce que la cause était gardée à juger sur mesures provisionnelles.

c.a Dans sa réponse au fond, B______ conclut à ce que A______ soit astreint à fournir un montant de 9'000 fr. à titre de sûretés en garantie du paiement des dépens et de première et deuxième instance et à la confirmation du jugement entrepris, le tout avec suite de frais.

c.b Dans le cadre d'un deuxième échange d'écritures sur le fond, les parties ont persisté dans leurs conclusions respectives.

c.c Par avis du greffe de la Cour du 17 novembre 2022, les parties ont été informées de ce que la cause était gardée à juger sur le fond.

d. Devant la Cour, les parties ont produit diverses pièces complémentaires.

A______ a produit un certificat médical le concernant datant du 22 juin 2021 (pièce C), un relevé bancaire d'octobre 2020 relatif à la vente du véhicule de marque C______ (pièce D), des certificats médicaux supplémentaires des 22 juin 2021 et 10 août 2022 (pièces F et H), des photographies relatives à son état de santé (pièce G), ainsi que des extraits bancaires actualisés au 12 mai, 30 juillet, 30 août et 19 septembre 2022 (pièces E, I, J et K).

B______ a produit des courriers datant de février, mars et juillet 2022, le relevé d'activités de son conseil et le relevé de compte du SCARPA au 31 août 2022.

e. Par courrier du 20 juillet 2022, le SCARPA a indiqué à la Cour qu'il n'était plus concerné par la procédure, ne détenant plus la légitimation passive.

C. Les faits pertinents suivants résultent de la procédure.

a. B______, née [B______] en 1938 à D______ (Allemagne), et A______, né en 1947 à E______ (Egypte), tous deux de nationalité suisse, se sont mariés le ______ 1974 à F______ (GE).

Ils sont les parents de G______, né en 1978 et désormais majeur.

b. Par contrat du 3 septembre 1974, les époux ont adopté le régime de la séparation de biens.

c. Par jugement de divorce JTPI/2179/94 du 24 février 1994, le Tribunal, entérinant l'accord des parties, a donné acte à A______ de son engagement à verser à B______, par mois et d'avance, la somme de 3'000 fr. à titre de contribution d'entretien jusqu'à ce qu'elle atteigne l'âge de la retraite et de 2'500 fr. au-delà.

Au moment du prononcé du jugement de divorce, B______, âgée de 55 ans, n'avait aucune formation professionnelle. Elle travaillait comme vendeuse pour 1'000 fr. par mois. Pour le surplus, elle était financièrement entretenue par son époux.

Quant à A______, issu d'une famille fortunée œuvrant dans le domaine de la bijouterie, il exerçait la profession de commerçant-bijoutier et était employé de son père dans la société H______. Il percevait alors un revenu annuel imposable de 128'000 fr.

d. En janvier 1996, A______ a quitté la Suisse pour refaire sa vie à I______ [Chine] où il a exercé comme bijoutier indépendant.

e. Il s'est remarié avec J______ avec laquelle il a eu un second enfant, K______, née en ______ 2003, devenue majeure en cours de procédure.

f. En 2003, B______ a trouvé une activité à mi-temps, rétribuée à concurrence de 2'000 fr. par mois, raison pour laquelle les parties ont convenu de suspendre la contribution versée en sa faveur tant qu'elle travaillait.

g. En 2011, B______, âgée alors de 73 ans, a dû arrêter son travail. A______ s'est engagé, par la signature d'une convention conclue entre les parties, à lui verser, dès le 1er août 2011, une contribution d'entretien de 2'000 fr. par mois.

Cette convention précisait qu'elle tenait compte de la situation économique de A______ et notamment de ses nouvelles charges de famille et que la situation serait revue en cas de diminution sensible de ses revenus.

h. En 2011 également, A______ a acquis avec sa nouvelle épouse un bien immobilier situé à L______ [GE], par l'achat des actions de la société immobilière M______, pour un montant de 450'000 fr.

i. En 2015, B______ a fait appel au SCARPA dans la mesure où A______ ne s'acquittait pas régulièrement des contributions d'entretien prévues.

Le SCARPA lui a versé des avances de pension jusqu'au 30 novembre 2018.

j. En 2017, le SCARPA a déposé une plainte pénale contre A______, pour violation d'obligation d'entretien. Cette plainte a finalement été classée, par ordonnance du 10 janvier 2018, suite au paiement par ce dernier de l'intégralité des montants dus (pour la période concernée de décembre 2015 à mai 2017).

Il ressort notamment de la procédure pénale que s'il résidait à I______, A______ se rendait régulièrement en Suisse, notamment pour ses affaires.

k. Par demande de modification du jugement de divorce formée le 29 avril 2020 et complétée par mémoire du 30 septembre 2020, A______ a conclu à ce que le Tribunal annule le chiffre 5 du jugement de divorce du 24 février 1994 relatif à la contribution à verser à son ex-épouse et renonce à le condamner au versement d'une contribution à l'entretien de B______. La demande était assortie d'une requête de mesures provisionnelles comportant les mêmes conclusions.

A l'appui de ses conclusions, A______ a expliqué, en substance, que depuis le prononcé du jugement de divorce en 1994, il avait rencontré plusieurs changements radicaux, notamment la naissance de sa fille, son départ à I______, son départ à la retraite, la cessation de toute activité et son incapacité de travailler. Sa situation financière s'était ainsi péjorée et il n'avait pas les ressources financières nécessaires pour continuer à s'acquitter de la contribution d'entretien de son ex-épouse. Il a également relevé que cette dernière pouvait demander des aides sociales afin de subvenir à ses besoins et que la contribution dont il s'acquittait pour l'entretien de sa fille était prioritaire.

l. Dans sa réponse, B______ a conclu au déboutement de A______ de ses conclusions.

Elle a expliqué qu'il était difficile de croire que son ex-époux se trouvait dans une situation financière précaire, comme il le soutenait. Tout portait à croire au contraire qu'il travaillait encore, figurant, par exemple encore en 2020 sur le site internet de l'entreprise "A______" dont elle a produit l'extrait. Elle a ajouté en audience qu'en consultant internet, il apparaissait que la situation de A______ à I______ était florissante. Pour sa part, elle ne percevait que sa rente AVS ainsi que la contribution versée par son ex-époux et ne disposait d'aucune fortune.

m. Les parties ont été entendues devant le Tribunal lors des audiences des 28 août et 19 novembre 2020 et 7 mai 2021 et ont persisté dans leurs conclusions.

A l'issue de la première audience du 28 août 2020, le Tribunal a imparti un délai à A______ pour compléter en détails sa situation patrimoniale et produire les justificatifs.

Le Conseil de B______ a déclaré qu'il y avait, en date du 7 mai 2021, un arriéré de contributions s'élevant à 8'500 fr. dans la mesure où A______ ne versait plus que 500 fr. par mois.


 

n. La situation personnelle et financière des parties s'établit comme suit.

n.a B______ est aujourd'hui âgée de 82 ans. Elle a pour seuls revenus sa rente AVS de 1'400 fr. par mois et la contribution versée par son ex-époux.

En 2022, elle a sollicité et obtenu des prestations complémentaires destinées à couvrir ses besoins vitaux, en raison du fait que la contribution d'entretien ne lui était pas régulièrement versée malgré les démarches entreprises à cette fin.

Elle déclare devoir faire face à des charges mensuelles de 3'015 fr., comprenant son entretien de base OP (1'200 fr.), son loyer (1'455 fr.), son d'assurance-maladie, subside déduit (240 fr.), ses frais médicaux non couverts (50 fr.) et ses frais de transport (70 fr.).

Elle allègue n'avoir aucune fortune ni aucune économie.

n.b A______ est âgé de 75 ans. Il ressort de la procédure que depuis son départ de la Suisse, il a développé plusieurs activités, la dernière étant sa société N______ Ltd basée à I______. Il déclare avoir arrêté de travailler en décembre 2019 et ne percevoir depuis lors comme seul revenu qu'une rente AVS d'un montant de 1'683 fr. pour lui-même et de 673 fr. pour sa fille.

Il a indiqué devant le Tribunal qu'il était séparé de sa nouvelle épouse depuis dix ans, ce qui est contesté par B______. Sa fille était scolarisée à P______ [Royaume-Uni] dans une école privée, mais était revenue à I______ à cause de la crise sanitaire où elle allait désormais poursuivre sa scolarité.

A______ allègue devoir supporter des charges mensuelles de 3'887 fr. 90, comprenant son entretien de base OP (1'200 fr.), son loyer (1'887 fr. 70.), la contribution d'entretien qu'il déclare verser à sa fille (600 fr.) et ses frais de transport (200 fr.).

Il allègue qu'il n'a aucune fortune personnelle ni entreprise active à I______.

Selon le seul décompte bancaire produit, A______ détient auprès de la banque O______ un montant d'environ 89'000 fr. qui, selon ses dires, correspond au solde d'un capital de 149'924 fr. perçu à titre de rétroactifs des rentes AVS en 2017 et utilisé pour s'acquitter de ses frais courants ainsi que de la pension en faveur de son ex-épouse et de sa fille mineure pendant ces dernières années.

S'agissant de l'appartement situé à L______ [GE], il a déclaré qu'il l'avait "mis au nom de sa femme" pour sauvegarder sa santé, car il ne voulait pas avoir de charges. Son Conseil a précisé par la suite que l'argent pour acheter l'appartement provenait de J______ et qu'en 2014, A______ lui avait cédé ses parts.

Enfin, A______ détenait un véhicule de marque C______, vendu en 2020.

o. Dans le jugement entrepris, le Tribunal a relevé que la convention privée signée en 2003 (recte 2011) par les parties tenait déjà compte du déménagement de A______ à I______, de la naissance de sa fille et également du départ à la retraite de ce dernier dans la mesure où il s'agissait d'un fait qui, bien que futur, était déjà certain. Ces éléments ne constituaient ainsi pas un motif de modification du jugement de divorce. Par ailleurs, il n'était pas démontré que la situation financière de A______ s'était particulièrement péjorée et l'empêchait de continuer à verser la contribution d'entretien à son ex-épouse. Sa situation restait peu claire, A______ n'ayant pas produit suffisamment de pièces, notamment sur sa société basée à I______, et ses explications étaient, sur certains faits, peu crédibles.

EN DROIT

1. 1.1 Dans les affaires patrimoniales, l'appel est recevable contre les décisions finales de première instance lorsque la valeur litigieuse au dernier état des conclusions est de 10'000 fr. au moins (art. 308 al. 1 et 2 CPC). Il doit être écrit et motivé et introduit auprès de l’instance d’appel dans les 30 jours à compter de la notification de la décision motivée (art. 311 al. 1 CPC) et dans les 10 jours si la décision a été rendue en procédure sommaire (art. 314 al. 1 CPC).

1.2 En l'occurrence, le jugement entrepris, notifié le 4 juin 2021 aux parties, porte sur la modification de la contribution d'entretien post-divorce, dont la valeur, capitalisée selon l'art. 92 al. 2 CPC, est supérieure à 10'000 fr.

La voie de l'appel est dès lors ouverte.

1.3 Interjeté le 5 juillet 2022, soit au terme du délai de 30 jours, l'appel est recevable en tant qu'il porte sur le prononcé du jugement au fond.

Il s'avère en revanche tardif en tant qu'il porte, à bien comprendre les conclusions, sur le prononcé des mesures provisionnelles, lesquelles sont soumises à la procédure sommaire (art. 248 let. d CPC) et sera, par conséquent, déclaré irrecevable sur ce point.

1.4 La maxime de disposition (art. 58 al. 1 CPC) et la maxime des débats atténuée (art. 55 al. 1, 277 al. 1 et 2 CPC) s'appliquent dès lors que la cause porte exclusivement sur la contribution d'entretien post-divorce (arrêt du Tribunal fédéral 5A_18/2018 du 16 mars 2018 consid. 5).

1.5 La Cour revoit la cause avec un plein pouvoir d'examen (art. 310 CPC).

1.6 Dans la mesure où les conclusions de l'appelant sont formulées de manière confuse et que son argumentation se mélange en ce qui concerne les mesures provisionnelles et le fond, ses prétentions seront traitées dans un seul et même arrêt par économie de procédure (art. 125 CPC).

2. Les parties produisent plusieurs pièces en appel.

2.1 Selon l'art. 317 al. 1 CPC, les faits et les moyens de preuve nouveaux ne sont pris en considération en appel que s'ils sont invoqués ou produits sans retard (let. a) et s'ils ne pouvaient pas être invoqués ou produits devant la première instance bien que la partie qui s'en prévaut ait fait preuve de diligence (let. b).

La diligence requise suppose que dans la procédure de première instance, chaque partie expose l'état de fait de manière soigneuse et complète et qu'elle amène tous les éléments propres à établir les faits jugés importants (arrêts du Tribunal fédéral 4A_193/2021 du 7 juillet 2021 consid. 3.1; 5A_1006/2017 du 5 février 2018 consid. 3.3; 4A_334/2012 du 16 octobre 2012 consid. 3.1, publié in SJ 2013 I 311). Ainsi, les faits et moyens de preuve qui auraient pu être présentés avant la fin des débats principaux de première instance sont irrecevables en appel (ATF 144 III 349 consid. 4.2.1; 143 III 42 consi. 4.1).

2.2 En l'espèce, l'appelant produit plusieurs pièces nouvelles concernant son état de santé et sa situation financière.

Il produit pour la première fois devant la Cour des certificats médicaux établis postérieurement au jugement entrepris les 22 juin et 25 septembre 2021 et le 10 août 2022, ainsi que des photographies, lesquels sont destinés à étayer ses problèmes de santé allégués et son incapacité à maintenir toute activité professionnelle. Or, cette question constitue l'un des moyens principaux invoqués par l'appelant pour fonder sa demande en modification du jugement de divorce. Elle a été abordée, discutée et contestée devant le Tribunal, l'appelant ayant tout au long de la procédure plaidé son incapacité à poursuivre ses activités professionnelles en raison de problèmes de santé. Il lui appartenait ainsi d'établir les faits y relatifs de manière soigneuse et complète et de produire les moyens de preuve en lien avec ceux-ci, ce d'autant plus qu'il a formellement été invité par le Tribunal à compléter en détails sa situation en produisant les pièces justificatives. L'appelant ne prétend du reste pas qu'il aurait été empêché de solliciter et d'obtenir un certificat médical concernant son état de santé pendant la procédure de première instance, ni que son état général se serait détérioré en cours de procédure. Ainsi, bien qu'établies postérieurement au prononcé du jugement, ces pièces auraient pu, en faisant diligence, être requises et obtenues antérieurement. C'est en vain que l'appelant tente de faire grief au Tribunal de ne pas avoir rendu d'ordonnance de preuve ni permis aux parties de solliciter les documents manquants à l'issue de l'instruction dès lors qu'il pouvait spontanément le faire et qu'il comparaissait, de surcroît, par avocat. Le fait que le Tribunal ait finalement retenu qu'il avait échoué à prouver ses allégués ne saurait permettre à l'appelant de compléter son offre de preuve. Partant, les pièces C, F, G et H versés par ce dernier devant la Cour sont irrecevables. En tout état de cause, ces pièces ne s'avèrent pas déterminantes pour l'issue du litige dans la mesure où si elles établissent certes des problèmes de santé concernant l'appelant, tels qu'une hypertension ou une intervention relative à une hernie, elles ne permettent en revanche pas de confirmer une incapacité totale de maintenir ses activités, comme il le soutient.

La pièce D produite par l'appelant, qui comporte un extrait bancaire datant du mois d'octobre 2020, relative au prix de vente du véhicule C______, doit elle-aussi être déclarée irrecevable puisqu'il s'agit d'un document qui existait au moment de la procédure de première instance, sans que l'appelant n'explique pour quels motifs il aurait été empêché de s'en prévaloir.

Les pièces E, I, J et K de l'appelant comprenant ses derniers extraits bancaires O______ relatifs aux mois de mai à septembre 2022 seront, quant à elles, admises dès lors qu'il avait déjà invoqué l'état de son compte bancaire en produisant un extrait devant le Tribunal et que ces pièces ne font que l'actualiser.

Enfin, les pièces produites par l'intimée concernent toutes des faits survenus postérieurement au jugement entrepris et ont été produites avec la diligence requise. Elles sont donc recevables.

3. L'appelant sollicite, préalablement, la production par sa partie adverse des relevés de ses comptes bancaires en Suisse et à l'étranger pour les années 2016 à 2020.

3.1 Conformément à l'art. 316 al. 3 CPC, l'instance d'appel peut librement décider d'administrer des preuves.

Elle peut néanmoins renoncer à ordonner une mesure d'instruction lorsque le requérant n'a pas suffisamment motivé sa requête (ATF 138 III 374 consid. 4.3) ou, d'après une appréciation anticipée des preuves, lorsque celle-ci est manifestement inadéquate, porte sur un fait non pertinent ou n'est pas de nature à ébranler la conviction qu'elle a acquise sur la base des éléments déjà recueillis (arrêt du Tribunal fédéral 5A_983/2019 du 13 novembre 2020 consid. 6.1). L'autorité jouit d'un large pouvoir d'appréciation (ATF 142 III 413 consid. 2.2.1).

En règle générale, la procédure d’appel est menée purement sur dossier, sans tenue d’une audience ni administration de preuves (ATF 142 III 413 consid. 2.2.1).

3.2 En l'espèce, l'appelant n'a fourni aucune motivation à l'appui de sa demande en production de pièces. De plus, la situation de l'intimée est suffisamment établie au vu des pièces figurant au dossier. L'intéressée ayant, en outre, récemment obtenu des prestations complémentaires démontre, s'il en était encore besoin, la précarité de sa situation, sans qu'il ne soit nécessaire d'examiner plus en détails ses relevés bancaires de ces quatre dernières années.

Par conséquent, la requête en production de pièces de l'appelant sera rejetée.

4. L'intimée requiert des sûretés en garantie de ses dépens encourus sur mesures provisionnelles comme au fond, chiffrés en dernier lieu à 9'000 fr.

En vertu de l'art. 99 al. 3 CPC, il n'y a toutefois pas lieu de fournir des sûretés ni en procédure sommaire (let. c) ni en matière de divorce (let. b).

La requête sera, dès lors, rejetée.

5. A bien comprendre les conclusions de l'appelant, ce dernier sollicite de nouvelles mesures provisionnelles devant la Cour, tendant à la réduction, voire la suppression de la contribution d'entretien dès l'ouverture de la procédure en modification le 29 avril 2020.

5.1 Saisi d'une procédure en divorce, le tribunal ordonne les mesures provisionnelles nécessaires, en appliquant par analogie les dispositions régissant la protection de l'union conjugale (art. 276 al. 1 CPC).

Après l'ouverture d'un procès en modification de jugement de divorce, le prononcé de mesures provisionnelles analogues à celles de l'art. 276 al. 1 CPC est soumis à des conditions restrictives. Compte tenu de l'autorité de la chose jugée dont bénéficie le jugement de divorce, une modification ne peut être ordonnée, à titre de mesures provisionnelles subséquentes, qu'en cas d'urgence et en présence de circonstances particulières (ATF 118 II 228 consid. 3.b; arrêts du Tribunal fédéral 5A_641/2015 du 3 mars 2016 consid. 4.1 et les références citées).

Les mesures provisionnelles étant soumises à la procédure sommaire au sens propre (art. 248 let. d, 271 et 276 al. 1 CPC), la cognition du juge est limitée à la simple vraisemblance des faits et à un examen sommaire du droit, l'exigence de célérité étant privilégiée par rapport à celle de sécurité (ATF 131 III 473 consid. 2.3; arrêt du Tribunal fédéral 5A_792/2016 du 23 janvier 2017 consid. 4.1).

5.2 En l'espèce, l'appelant sollicite des mesures provisionnelles tendant à réduire, voire supprimer la contribution d'entretien due à son ex-épouse, alléguant que sa situation financière s'est fortement péjorée, de sorte qu'il n'est plus en mesure de s'en acquitter.

Les arguments avancés par l'appelant sont les mêmes sur mesures provisionnelles que sur le fond. Il n'allègue ni a fortiori ne rend vraisemblable une urgence particulière à modifier la contribution litigieuse durant la procédure, si ce n'est la péjoration de sa situation. Or, comme il sera vu au considérant suivant, il n'est pas démontré, même sous l'angle de la vraisemblance, que sa situation actuelle l'empêcherait de continuer à s'acquitter de la contribution litigieuse. En tout état de cause, il n'est pas rendu vraisemblable que le maintien de la contribution due à l'intimée, le temps de la procédure d'appel, placerait l'appelant dans une situation précaire ou entamerait son minimum vital, ce qu'il ne prétend au demeurant pas. Le requérant n'invoque aucune raison pour laquelle il ne pourrait pas attendre l'issue de la procédure au fond et ne fait valoir aucun élément concret qui justifierait la modification immédiate de la contribution d'entretien due à l'intimée.

La requête de mesures provisionnelles sera donc rejetée.

6. Au fond, l'appelant sollicite l'annulation du chiffre 5 du jugement de divorce prononcé le 24 février 1994 et la suppression de toute contribution d'entretien en faveur de l'intimée.

6.1.1 La modification ou la suppression de la contribution d'entretien due à l'ex-conjoint, fixée dans un jugement de divorce, est régie par l'art. 129 CC. Selon cette disposition, si la situation du débiteur ou du créancier change notablement et durablement, la rente peut être diminuée, supprimée ou suspendue pour une durée déterminée (al. 1).

La modification de la pension suppose que des faits nouveaux importants et durables soient survenus dans la situation du débirentier ou du crédirentier, qui commandent une réglementation différente. La procédure de modification n'a pas pour but de corriger le premier jugement, mais de l'adapter aux circonstances nouvelles. Le fait revêt un caractère nouveau lorsqu'il n'a pas été pris en considération pour fixer la contribution d'entretien dans le jugement de divorce. Ce qui est déterminant, ce n'est pas la prévisibilité des circonstances nouvelles mais exclusivement le fait que la pension ait été fixée sans tenir compte de ces circonstances futures. On présume néanmoins que la contribution d'entretien a été fixée en tenant compte des modifications prévisibles, soit celles qui, bien que futures, sont déjà certaines ou fort probables (ATF 141 III 376 consid. 3.3.1;
138 III 289 consid. 11.1.1; arrêts du Tribunal fédéral 5A_902/2020 du 25 janvier 2021 consid. 5.1.1; 5A_230/2019 du 31 janvier 2020 consid. 6.1).

Ainsi, afin d'établir si on est en présence d'une situation qui s'est modifiée de manière durable et importante une comparaison doit être effectuée entre les constatations de fait et le pronostic effectués dans le jugement de divorce, d'une part, et les circonstances existant à la date du dépôt de la demande de modification du jugement de divorce, d'autre part. Un état de fait futur incertain et hypothétique ne constitue pas une cause de modification. Des éléments concrets relatifs à une modification prochaine des circonstances peuvent par contre être pris en considération, afin d'éviter autant que possible une nouvelle procédure ultérieure en modification (ATF 120 II 285 consid. 4b; arrêts du Tribunal fédéral 5A_230/2019 du 31 janvier 2020 consid. 7; 5A_487/2010 du 3 mars 2011 consid. 2.1.1, 2.2 et 2.3).

La survenance d'un fait nouveau - important et durable - n'entraîne toutefois pas automatiquement une modification de la contribution d'entretien. Ce n'est que si la charge d'entretien devient déséquilibrée entre les deux époux, au vu des circonstances prises en compte dans le jugement précédent, en particulier si cette charge devient excessivement lourde pour l'époux débirentier qui aurait une condition modeste, qu'une modification de la contribution peut entrer en considération (ATF 134 III 337 consid. 2.2.2). Le juge ne peut donc pas se limiter à constater une augmentation ou une diminution des revenus des parties pour admettre la demande; il doit procéder à une pesée des intérêts respectifs de chacune des parties pour juger de la nécessité d'une telle modification ou suppression dans le cas concret (ATF 137 III 604 consid. 4.1.1; arrêt du Tribunal fédéral 5A_523/2021 du 29 mars 2022 consid. 3.1 et les références citées).

6.2 En l'espèce, bien que le jugement de divorce ait fixé une contribution d'entretien post-divorce de 2'500 fr. par mois en faveur de l'intimée dès sa retraite, les parties l'ont par la suite modifiée, d'entente entre elles, en la suspendant en 2003, avant de la diminuer à 2'000 fr. par mois dès 2011, sans limitation dans le temps.

La conclusion de la convention signée en 2011 avait précisément pour but d'adapter le montant de la contribution aux nouvelles circonstances intervenues jusqu'alors dans la situation des parties, en particulier l'arrêt de travail de l'intimée ainsi que la situation économique de l'appelant dont notamment ses nouvelles charges de famille. Partant, quoi qu'en dise l'appelant, c'est à bon droit que le premier juge a considéré que son déménagement à I______ et la naissance de sa fille ne constituent aujourd'hui pas des faits nouveaux susceptibles de modifier la contribution d'entretien due à l'intimée puisque ces événements, qui remontent respectivement à 1996 et 2003, ont déjà été pris en compte pour adapter et diminuer la contribution d'entretien à 2'000 fr. par mois.

Quant au départ à la retraite et la diminution de revenus consécutive allégués par l'appelant, le Tribunal a retenu que ce dernier avait échoué à démontrer que sa situation financière s'était particulièrement péjorée, n'ayant pas fourni suffisamment de pièces et ayant donné certaines explications peu crédibles. Contestant l'appréciation du premier juge, l'appelant ne fait toutefois qu'exposer sa propre version des faits, sans apporter d'éléments concrets à l'appui de celle-ci permettant de considérer que cette appréciation serait inexacte.

S'agissant en particulier de sa société basée à I______, l'appelant n'a fourni aucun renseignement financier. Il se borne à affirmer qu'il a démissionné de son poste de directeur de la société pour des raisons de santé, sans autre explication. D'une part, il n'est pas démontré que son état de santé le contraindrait à mettre un terme à toute activité au sein de sa propre entreprise, étant ici rappelé que les pièces versées à cet égard devant la Cour sont irrecevables (cf. consid. 2.2 supra). Il figure d'ailleurs toujours en premier plan sur le site internet de la société, laissant supposer qu'il serait encore actif. Bien qu'il prétende que cela ne reflète plus la réalité, aucun élément probant ne permet d'étayer ses propos. D'autre part, il semble douteux qu'il ne perçoive plus aucun revenu de la société qu'il a lui-même fondée et développée ou qu'il en ait cédé la mainmise gratuitement.

La Tribunal a également relevé, à juste titre, qu'il apparaissait peu crédible que l'appelant, au vu de son parcours et des nombreuses années d'activité dans le domaine de la bijouterie, ne dispose que d'un seul compte bancaire, soit celui qu'il produit dans le cadre de la procédure. On ne saurait en déduire, au vu de l'opacité qui demeure autour de sa situation, une absence totale de revenu. En effet, selon les explications de l'appelant, ses seules ressources, en sus de sa rente AVS, résideraient dans le capital reçu en 2017 à titre d'arriérés de rentes AVS placé auprès de la banque O______, ce qui paraît peu compatible avec son niveau de vie, dont notamment la scolarité de sa fille en école privée à P______ [Royaume-Uni], ce qu'il a lui-même exposé lors de l'audience du 28 août 2020, et ses fréquents voyages entre I______ et Genève.

Aussi, on peine à comprendre pour quelle raison exacte il a cédé le bien immobilier acquis en 2011 à Genève à son épouse. Ses explications à cet égard n'emportent pas conviction, ayant déclaré dans un premier temps que c'était pour "sauvegarder sa santé" car il ne voulait pas avoir de charges, avant d'exposer que l'argent ayant financé le bien provenait en réalité de son épouse, raison pour laquelle il lui aurait cédé ses parts immobilières en 2014. Or, là encore, il n'apporte aucun début de preuve à l'appui de ses explications. De plus, si les fonds provenaient effectivement de son épouse, on ne voit pas pour quel motif il ne s'en est pas prévalu dès le début ni pour quelle raison il aurait attendu plus de trois ans pour lui céder les actions de la société immobilière propriétaire du bien.

Au vu de ce qui précède, c'est à bon droit que le Tribunal a considéré que les éléments du dossier laissaient présumer que la situation financière de l'appelant était en réalité bien meilleure que celle qu'il alléguait et qu'il n'était en particulier pas établi qu'elle s'était modifiée et qu'elle ne lui permettait plus de s'acquitter de la contribution mise à sa charge. Ce faisant, contrairement à ce que soutient l'appelant, le Tribunal ne lui a pas imputé un revenu hypothétique, de sorte qu'il n'y a pas lieu d'examiner cette question.

Infondé, l'appel sera rejeté.

7. Les frais d'appel et des mesures provisonnelles sollicitées devant la Cour seront arrêtés à 3'000 fr. (art. 17 et 35 RTFMC), mis à la charge de l'appelant qui succombe (art. 106 al. 1 CPC) et entièrement compensés par l'avance de frais du même montant opérée par ce dernier, laquelle demeure acquise à l'Etat de Genève (art. 111 al. 1 CPC).

Il n'y a pas lieu de percevoir des frais relatifs à la requête en fournir de suretés en garantie des dépens dans la mesure où cet aspect constitue un point mineur du litige, rejeté sans examen quant aux montants requis.

L'appelant sera, en outre, condamné aux dépens d'appel et sur mesures provisionnelles de l'intimée, lesquels seront arrêtés à 5'000 fr. TVA et débours compris, vu l'issue de la procédure et au regard de l'activité déployée par le conseil de celle-ci, ayant consisté en la rédaction de plusieurs écritures sur mesures provisionnelles et au fond (art. 84, 85 al. 1 et 90 RTFMC).

8. Il n'y a pas lieu de notifier le présent arrêt au SCARPA dans la mesure où celui-ci n'est plus partie à la procédure, faute de légitimation passive (cf. arrêt du Tribunal fédéral 5A_75/2020 du 12 janvier 2022 destiné à la publication). La Cour rectifiera d'office la désignation des parties dans le présent arrêt (cf. arrêt du Tribunal fédéral 4A_43/2017 du 7 mars 2017 consid. 1.1).

* * * * *


 


PAR CES MOTIFS,
La Chambre civile :

Sur mesures provisionnelles :

Déboute A______ de toutes ses conclusions sur mesures provisionnelles formées devant la Cour.

Préalablement :

Rejette la requête en fourniture de suretés en garantie des dépens formée par B______.

Au fond :

Déclare irrecevable l'appel interjeté le 25 juillet 2022 par A______ contre le jugement JTPI/7152/2021 rendu le 3 juin 2021 par le Tribunal de première instance dans la cause C/7873/2020 en tant qu'il porte sur le prononcé de mesures provisionnelles.

Le déclare recevable pour le surplus.

Le rejette, dans la mesure de sa recevabilité, et confirme le jugement entrepris.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Sur les frais :

Arrête les frais judiciaires d'appel et sur mesures provisionnelles à 3'000 fr., les met à la charge de A______ et dit qu'ils sont entièrement compensés par l'avance effectuée, laquelle demeure acquise à l'Etat de Genève.

Condamne A______ à verser à B______ la somme de 5'000 fr. à titre de dépens d'appel et de mesures provisionnelles.

Siégeant :

Monsieur Laurent RIEBEN, président; Monsieur Patrick CHENAUX,
Madame Fabienne GEISINGER-MARIETHOZ, juges; Madame Sandra CARRIER, greffière.

Le président :

Laurent RIEBEN

 

La greffière :

Sandra CARRIER

 


 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF supérieure ou égale à 30'000 fr.