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Décisions | Chambre civile

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C/11034/2019

ACJC/431/2022 du 29.03.2022 sur OTPI/79/2022 ( SDF )

Normes : CPC.315
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/11034/2019 ACJC/431/2022

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre civile

du MARDI 29 MARS 2022

 

Entre

Monsieur A______, domicilié ______, Russie, appelant d'une ordonnance rendue par la 3ème Chambre du Tribunal de première instance de ce canton le 18 février 2022, comparant par Me Daniel KINZER, avocat, CMS von Erlach Partners SA, rue
Bovy-Lysberg 2, case postale, 1211 Genève 3, en l'Étude duquel il fait élection de domicile,

et

Monsieur B______, domicilié ______ [GE], intimé, comparant par
Me Caroline FERRERO MENUT, avocate, Etude Canonica & Associés, rue
François-Bellot 2, 1206 Genève, en l'Étude de laquelle il fait élection de domicile.

 


Attendu, EN FAIT, que par ordonnance sur mesures provisionnelles du 22 octobre 2019, le Tribunal de première instance a notamment condamné B______ à verser à A______, par mois et d'avance, une contribution d'entretien de 2'800 fr. dès le prononcé des mesures provisionnelles (ch. 4 du dispositif);

Que par ordonnance du 18 février 2022, le Tribunal a modifié le chiffre 4 précité et condamné B______ à verser, par mois et d'avance, à A______, une contribution d'entretien de 960 fr. par mois dès le 5 novembre 2021 (ch. 2), ordonné à A______ de venir récupérer ses affaires personnelles dans les 30 jours suivant le prononcé des mesures provisionnelles (ch. 3) et dit qu'à défaut, B______ pourrait disposer librement des affaires personnelles de A______ (ch. 4);

Qu'il a retenu que le minimum vital du droit des poursuites de B______ s'élevait à 3'234 fr. 85 et celui de A______ à 360 fr.; en ajoutant diverses charges faisant partie du minimum vital élargi qui s'élevaient à 3'003 fr 80, le solde disponible des parties était de 1'210 fr. 50, compte tenu des revenus de B______ de 7'809 fr. 15; que ce solde devait être partagé en deux, de sorte que la contribution en faveur de A______ était fixée à 960 fr.;

Que par acte expédié à la Cour de justice le 3 mars 2022, A______ a formé appel contre cette ordonnance, concluant à son annulation, avec suite de frais;

Qu'il a conclu, sur effet suspensif, à la suspension du caractère exécutoire de l'ordonnance attaquée, avec suite de frais; qu'il a invoqué que si la contribution d'entretien devait être réduite durant le procès, il ne pourrait plus subvenir à ses besoins, ce qui lui causerait un préjudice difficilement réparable, la contribution d'entretien étant sa seule source de revenus; qu'en outre, s'agissant de ses affaires personnelles, la Suisse avait fermé son espace aérien à tout vol provenant de Russie et à tous les avions russes, de sorte qu'il était dans l'impossibilité de venir récupérer ses affaires dans le délai de 30 jours imparti;

Qu'invité à se déterminer, B______ a conclu au rejet de la requête d'effet suspensif;

Que B______ a également formé appel contre l'ordonnance du 18 février 2022, notamment en tant qu'elle le condamne à verser une contribution d'entretien de 960 fr. par mois à A______, sollicitant qu'il soit dit qu'il n'en doit aucune;

Considérant, EN DROIT, que la Cour est saisie d'un appel au sens de l'art. 308 CPC;

Que l'ordonnance querellée portant sur des mesures provisionnelles, l'appel n'a pas d'effet suspensif ex lege (art. 315 al. 4 let. b CPC);

Qu'à teneur de l'art. 315 al. 5 CPC, l'exécution de mesures provisionnelles peut exceptionnellement être suspendue si la partie concernée risque de subir un préjudice difficilement réparable;

Que le préjudice difficilement réparable peut être de nature factuelle; il concerne tout préjudice, patrimonial ou immatériel, et peut même résulter du seul écoulement du temps pendant le procès; que le dommage est constitué, pour celui qui requiert les mesures provisionnelles, par le fait que, sans celles-ci, il serait lésé dans sa position juridique de fond et, pour celui qui recourt contre le prononcé de telles mesures, par les conséquences matérielles qu'elles engendrent.

Que saisie d'une demande d'effet suspensif au sens de l'art. 315 al. 5 CPC, l'autorité cantonale d'appel doit ainsi procéder à une nouvelle pesée des intérêts entre les deux préjudices difficilement réparables, celui du demandeur à l'action si la mesure n'était pas exécutée immédiatement et celui qu'entraînerait pour le défendeur l'exécution de cette mesure (ATF 138 III 378 consid. 6.3 et les références citées; 137 III 475 consid. 4.1; arrêt du Tribunal fédéral 5A_514/2012 du 4 septembre 2012 consid. 3.2.2);

Que concernant le paiement d'une somme d'argent, à teneur de la jurisprudence du Tribunal fédéral, il appartient à la partie recourante de démontrer qu'à défaut d'effet suspensif, elle serait exposée à d'importantes difficultés financières ou qu'elle ne pourrait pas obtenir le remboursement du montant payé au cas où elle obtiendrait gain de cause au fond (arrêt du Tribunal fédéral 5A_708/2013 du 14 mai 2014 consid. 1.1);

Que l'autorité de recours doit faire preuve de retenue et ne modifier la décision de première instance que dans des cas exceptionnels; elle dispose cependant d'un large pouvoir d'appréciation permettant de tenir compte des circonstances concrètes du cas d'espèce (ATF 137 III 475 consid. 4.1; arrêt du Tribunal fédéral 5A_941/2018 du 23 janvier 2019 consid. 5.3.2);

Qu'en l'espèce, le Tribunal a retenu que l'appelant devait supporter des charges mensuelles de 360 fr., lesquelles ne doivent pas être confondues avec ses dépenses, résultant des relevés bancaires de son compte C______, arrêtées à 1'230 fr., comme semble le faire l'appelant; que la contribution d'entretien de 960 fr., couvre dès lors largement ses charges; que la décision attaquée n'est pas dès lors vraisemblablement pas susceptible de causer un préjudice difficilement réparable à l'appelant; qu'il n'y a donc pas lieu, à ce stade, au vu de ce qui précède, de statuer sur le montant exact des revenus de l'intimé, qui seraient supérieurs à ceux retenus par le Tribunal selon l'appelant dans la mesure où il n'aurait pas été tenu compte de revenus tirés d'immeubles dont l'intimé serait propriétaire à Berlin, dont il n'est pas fait mention dans la décision attaquée;

Que concernant les affaires personnelles de l'appelant, ce dernier est susceptible de subir un préjudice difficilement réparable si l'intimé pouvait en disposer librement parce que l'appelant ne les avait pas récupérées dans le bref délai imparti, étant relevé que si un voyage depuis la Russie n'est pas impossible, le fait que l'appelant doive venir à Genève depuis l'étranger complique la récupération de ses affaires; que l'intimé n'invoque pour sa part aucun dommage difficilement réparable s'il devait encore, pour la durée de la procédure, conserver lesdites affaires qu'il entrepose dans un dépôt pour un coût de 149 fr. par mois; que la requête d'effet suspensif sera dès lors admise à cet égard;

Qu'il sera statué sur les frais et dépens liés à la présente décision avec l'arrêt au fond (art. 104 al. 3 CPC).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre civile :


Statuant sur requête de suspension du caractère exécutoire de l'ordonnance entreprise:

Admet la requête formée par A______ tendant à suspendre le caractère exécutoire des ch. 3 et 4 du dispositif de l'ordonnance OTPI/79/2022 rendue le 18 février 2022 par le Tribunal de première instance dans la cause C/11034/2019.

La rejette pour le surplus.

Dit qu'il sera statué sur les frais liés à la présente décision dans l'arrêt rendu sur le fond.

Siégeant :

Monsieur Laurent RIEBEN, président; Madame Sophie MARTINEZ, greffière.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Indications des voies de recours :

La présente décision, incidente et de nature provisionnelle (ATF 137 III 475 consid. 1 et 2), est susceptible d'un recours en matière civile (art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005; LTF – RS 173.110), les griefs pouvant être invoqués étant toutefois limités (art. 93/98 LTF), respectivement d'un recours constitutionnel subsidiaire (art. 113 ss LTF). Dans les deux cas, le recours motivé doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de la décision attaquée.

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.