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Décisions | Chambre civile

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C/3369/2014

ACJC/1482/2021 du 09.11.2021 sur JTPI/7316/2021 ( OO ) , CONFIRME

Normes : CPC.78
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/3369/2014 ACJC/1482/2021

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre civile

du MARDI 9 NOVEMBRE 2021

Entre

Monsieur A______, domicilié ______ [GE], appelant d'un jugement rendu par la 14ème Chambre du Tribunal de première instance de ce canton le 4 juin 2021, comparant par Me Jean-René MERMOUD, avocat, avenue de Champel 4, 1206 Genève, en l'Etude duquel il fait élection de domicile,

Et

B______ SNC SUCCESSEUR DE C______, sise ______ [GE], intimée, comparant par Me Pedro DA SILVA NEVES, avocat, NEVES AVOCATS, rue Le-Corbusier 10, 1208 Genève, en l'Etude duquel elle fait élection de domicile, et

Monsieur C______, domicilié ______ [GE], dénoncé, comparant par Me Vincent MAITRE, avocat, WAEBER MAITRE, quai Gustave-Ador 2, case postale 3021, 1211 Genève 3, en l'Etude duquel il fait élection de domicile.


EN FAIT

A. Par jugement partiel JTPI/7316/2021 du 4 juin 2021, le Tribunal, statuant par voie de procédure ordinaire, a déclaré irrecevables les conclusions prises par A______ contre C______ tendant à ce que ce dernier soit condamné solidairement à lui payer la somme de 68'000 fr. avec intérêts à 5 % dès le 1er juin 2009 sous réserve d'amplification (chef de conclusions n° III formalisé dans le courrier du 25 février 2021 du demandeur) (chiffre 1 du dispositif) et renvoyé la question des frais à la décision finale (ch. 2).

B. a. Par acte du 29 juin 2021, A______ a formé recours contre ce jugement, qu'il a reçu le 8 juin 2021. Il conclut à son annulation et à ce que ses conclusions prises à l'encontre de C______ soient déclarées recevables.

b. B______ SNC SUCCESSEUR DE C______ s'en est rapportée à justice.

c. C______a conclu à la confirmation du jugement entrepris, avec suite de frais judiciaires et dépens.

d. Les parties ont été informées le 11 octobre 2021 de ce que la cause était gardée à juger.

C. Les faits pertinents suivants résultent du dossier :

a. La société C______ & FILS SNC, inscrite au Registre du commerce de Genève, était active dans le domaine de la ferblanterie, couverture et étanchéité. Elle a été dissoute et radiée le ______ 2015, ensuite de la sortie de l'associé E______. C______, jusque-là associé, en a continué l'exploitation sous la raison individuelle "C______".

b. En date du 3 juillet 2017, les passifs et actifs de l'entreprise "C______" ont été repris par B______ SNC SUCCESSEUR DE C______.

c. Par requête du 3 mars 2015, A______ a assigné C______ & FILS SNC en paiement de 68'000 fr. (intérêts en sus) en lien avec un contrat portant sur la réalisation de travaux de couverture.

d. Cette procédure (C/3369/2014) a été suspendue du 19 juin 2015 au 9 avril 2018 dans l'attente de la reddition d'un rapport d'expertise ordonné dans une procédure parallèle (C/1______/2011).

e. Par jugement JTPI/17542/2018 du 9 novembre 2018, confirmé par arrêt ACJC/1097/2019 du 16 juillet 2019, le Tribunal de première instance a constaté, à titre préalable, qu'entre le 15 décembre 2015 et le 3 juillet 2017, la qualité de la partie défenderesse aurait dû être rectifiée en ce sens que le défendeur était C______ et non plus C______ & FILS SNC et que, dès le 3 juillet 2017, B______ SNC SUCCESSEUR DE C______ s'était substituée à C______, de sorte qu'elle était désormais défenderesse à la procédure. Principalement, le Tribunal a rejeté la requête d'appel en cause formée par A______ contre B______ SNC SUCCESSEUR DE C______.

f. Dans sa réponse au fond du 12 mars 2020, B______ SNC SUCCESSEUR DE C______ a dénoncé le litige à C______.

g. Par courrier du 9 mai 2020, ce dernier a déclaré intervenir à la procédure en faveur de B______ SNC SUCCESSEUR DE C______ en application de l'art. 79 al. 1 let. a CPC.

h. Par ordonnance du 14 juillet 2020, le Tribunal a, entre autres points, constaté l'intervention de C______ à la procédure en faveur de B______ SNC SUCCESSEUR DE C______.

i. A l'audience du Tribunal du 26 janvier 2021, A______ a pris des conclusions (solidaires) à l'encontre de C______.

j. B______ SNC SUCCESSEUR DE C______ et C______ ont tous deux conclu à l'irrecevabilité desdites conclusions.

k. La cause a été gardée à juger sur cette question.

EN DROIT

1. 1.1 Le jugement attaqué constitue une décision partielle de première instance, laquelle est assimilée à une décision finale puisqu'elle met un terme à l'instance relativement aux demandes ou aux consorts concernés (ATF 135 III 212 consid. 1.2 ; Hohl, Procédure civile, Tome II, 2010, n. 2336 ; Jeandin, in Commentaire romand, Code de procédure civile, 2019, n. 8 ad art. 308 CPC).

Contre une telle décision, la voie de l'appel est ouverte (art. 308 al. 1 let. a CPC).

Si un recours est interjeté en lieu et place d'un appel, ou vice-versa, une conversion est admise si les conditions de recevabilité de la voie de droit correcte sont réunies, si l'acte peut être converti dans son entier, si la conversion ne porte pas atteinte aux droits de la partie adverse et si l'erreur ne résulte pas d'un choix délibéré de la partie représentée par un avocat de ne pas suivre la voie de droit mentionnée au pied de la décision de première instance ou d'une erreur grossière (arrêt du Tribunal fédéral 5A_46/2020 du 17 novembre 2020 consid. 4.1.2).

1.2 En l'espèce, l'acte a été interjeté auprès de l'autorité compétente (art. 120 al. 1 let. a LOJ), dans le délai utile de 30 jours et selon la forme prescrite par la loi (art. 130, 131, 142 al. 1 et 311 CPC), dans une affaire patrimoniale dont la valeur litigieuse au dernier état des conclusions est supérieure à 10'000 fr. (art. 91 al. 1 et 308 al. 2 CPC). Les conditions de recevabilité de l'appel sont ainsi réunies. Il en va de même des conditions supplémentaires permettant une conversion de l'acte en appel, lesquelles ont été précisées par la jurisprudence précitée.

Il s'ensuit que l'acte de recours, converti en appel, est recevable.

1.3 Dans le cadre d'un appel, la Cour revoit la cause avec un plein pouvoir d'examen en fait et en droit (art. 310 CPC).

2. Le Tribunal a considéré que la dénonciation du litige par l'intimée à C______ ne permettait pas à l'appelant de formuler des conclusions à l'encontre de ce dernier, notamment en raison du fait que les possibilités d'intervention du dénoncé étaient limitées et que celui-ci pouvait retirer en tout temps son intervention.

L'appelant, demandeur en première instance, critique ce raisonnement. Dans une argumentation quelque peu confuse et décousue, il soutient qu'il était en droit de prendre des conclusions à l'encontre du tiers dénoncé.

L'intimée s'en rapporte à justice et le tiers conclut à la confirmation du jugement entrepris.

2.1 Une partie (le dénonçant) peut dénoncer l'instance à un tiers (le dénoncé) lorsqu'elle estime, pour le cas où elle succomberait, qu'elle pourrait faire valoir des prétentions contre lui ou être l'objet de prétentions de sa part (art. 78 al. 1 CPC). La raison peut en être l’éventualité d’un recours du dénonçant qui succombe contre le dénoncé ou, inversement, d’un recours du dénoncé contre le dénonçant (Message du Conseil fédéral du 28 juin 2006 relatif au code de procédure civile suisse, in FF 2006 p. 6841 ss, p. 6897).

Le dénoncé peutintervenir sans autre condition en faveur de la partie qui a dénoncé l’instance(art. 79 al. 1 let. a CPC). S'il refuse d’intervenir ou ne donne pas suite à la dénonciation, le procès suit son cours (art. 79 al. 2 CPC).

Les effets de la dénonciation sont les mêmes que ceux de l'intervention accessoire (art. 80 CPC qui renvoie à l'art. 77 CPC), lesquels seront examinés ci-après.

2.2 L'intervenant accessoire prend part à la procédure pour appuyer l'une des parties, parce qu'il a un intérêt juridique à ce que le litige pendant soit jugé en faveur de celle-ci (art. 74 CPC).

Contrairement à l'intervention principale, l'intervention accessoire ne consiste pas à introduire une demande avec des conclusions propres (Haldy, in Commentaire romand, Code de procédure civile, 2e éd. 2019, n. 2 ad art. 74 CPC). L'intervenant accessoire soutient uniquement les conclusions d'une des parties principales, qu'il a intérêt à voir triompher (ATF 142 III 40 consid. 3.2.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 5A_603/2013 du 25 octobre 2013 consid. 4.2). Il aide l'une des parties principales à obtenir gain de cause, afin d'éviter de devoir subir ultérieurement les conséquences négatives du procès principal (arrêt du Tribunal fédéral 5A_725/2016 du 6 mars 2017 consid. 5.2 et 5.4, non publié in ATF 143 III 140 ; Hofmann/Lüscher, Le Code de procédure civile, 2e éd. 2015, p. 84 ; Bohnet, Procédure civile, 2e éd. 2014, n. 506 p. 136).

N'étant pas partie principale au procès (Hohl, Procédure civile, Tome I, 2016, n. 986 p. 166 ; Bohnet, CPC annoté, 2016, n. 1 ad art. 78), aucun jugement ne peut être rendu pour ou contre l'intervenant accessoire (Graber, in Basler Kommentar, Schweizerische Zivilprozessordnung, n. 1 ad art. 77 CPC). Le jugement rendu entre les parties principales ne peut ni lui accorder quoi que ce soit ni le condamner à quoi que ce soit (Staehelin/Schweizer, in Kommentar zur Schweizerischen Zivilprozessordnung, 3e éd. 2016, n. 3a ad art. 76 CPC), excepté s'agissant des frais de la procédure (Graber, op. cit., n. 1 ad art. 77 CPC ; Staehelin/Schweizer, op. cit., n. 3a ad art. 76 CPC).

Le jugement qui sera rendu entre les parties ne sera pas directement opposable à l'intervenant, mais aura toutefois valeur de moyen de preuve dans le procès ultérieur entre lui et la partie qu'il a assistée, le résultat défavorable à cette partie lui étant opposable (art. 77 CPC ; ATF 142 III 40 consid. 3.2.1). Dans cette hypothèse, l'intervenant ne peut agir contrairement à la volonté de la partie dont il soutient la cause (art. 76 al. 2 CPC ; ATF 142 III 629 consid. 2.1, 271 consid. 1.3 ; 138 III 537 consid. 2.2.2 ; Hohl, op. cit., Tome I, n. 1006 p. 168) ni, partant, modifier le cadre du litige (Hofmann/Lüscher, op. cit., p. 85).

2.3 En l'espèce, l'intimée a invité un tiers, soit C______, à venir la soutenir dans le procès pendant l'opposant à l'appelant.

Conformément aux principes qui viennent d'être exposés ci-avant,en procédant de la sorte, elle n'a pas ouvert action directement contre C______, mais l'a uniquement invité à participer au litige à ses côtés. De la même manière, en acceptant d'intervenir en faveur de l'intimée, C______ n'est pas devenu partie à la procédure pendante, mais a uniquement pris part au procès à titre accessoire afin de soutenir les conclusions de l'intimée.

Dans un tel cas de figure, le jugement sera rendu entre les parties principales et ne liera que celles-ci. Ladite décision ne sera pas rendue pour ou contre C______. Contrairement à l'intervenant principal, ce dernier, en tant que dénoncé et à l'instar d'un intervenant accessoire, ne fait pas valoir de conclusions propres. Il ne peut donc rien obtenir. En outre, contrairement à ce qui prévaut en cas d'appel en cause, aucune conclusion ne peut être prise contre lui, qui ne doit pas se défendre contre des conclusions adverses, même s'il a intérêt à ce que le résultat ne soit pas défavorable à la partie qu'il soutient. C______ ne pourra par conséquent pas être condamné à quoi que ce soit à l'issue de la présente procédure, excepté aux frais de justice.

Le fait que le jugement qui sera rendu entre les parties principales ait hypothétiquement un effet, en vertu du droit matériel, sur les rapports entre C______ et l'appelant ne change rien au fait que cette décision ne liera avec l'autorité de la chose jugée que les parties principales et ne pourra dès lors pas être exécutée à l'égard du dénoncé. Quant au règlement des rapports juridiques entre l'intimée et C______, il devra faire l'objet d'un procès subséquent.

C'est par conséquent à raison que le Tribunal a considéré que les conclusions prises par l'appelant contre C______ étaient irrecevables.

Dans la mesure où l'appelant n'a pas appelé ce dernier en cause en temps utile, il ne pourra faire valoir ses éventuelles prétentions à son égard que par une demande dirigée contre lui et soumise à une tentative de conciliation, comme l'a retenu le Tribunal.

Les considérations qui précèdent scellent le sort du litige sans qu'il soit nécessaire de recourir à l'examen des actes pouvant être accomplis par le dénoncé dans le cadre du procès pendant.

Partant, le jugement querellé sera confirmé par substitution de motifs.

3. Les frais judiciaires d'appel seront arrêtés à 1'200 fr. (art. 20 al. 1 et 35 RTFMC) et mis à la charge de l'appelant qui succombe (art. 106 al. 1 CPC). Ils seront entièrement compensés avec l'avance de frais du même montant fournie par ce dernier, laquelle reste acquise à l'Etat de Genève (art. 111 al. 1 CPC).

L'appelant sera par ailleurs condamné à s'acquitter des dépens de l'intimée, lesquels seront arrêtés à 500 fr. débours et TVA inclus, cette dernière s'étant brièvement déterminée, s'en rapportant à justice, sans motivation juridique (art. 84, 85, 90 RTFMC, art. 23, 25 et 26 LaCC).

Compte tenu des circonstances particulières de la présente procédure d'appel, laquelle a exclusivement porté sur la recevabilité des conclusions prises en première instance par l'appelant contre C______, il se justifie, pour des motifs d'équité, d'allouer un montant de 800 fr., débours et TVA inclus, à C______ à titre de dépens (cf. arrêt du Tribunal fédéral 4A_480/2014 consid. 3 et les références citées).

* * * * *

PAR CES MOTIFS,
La Chambre civile :

A la forme :

Déclare recevable l'appel interjeté le 29 juin 2021 par A______ contre le jugement JTPI/7316/2021 rendu le 4 juin 2021 par le Tribunal de première instance dans la cause C/3369/2014.

Au fond :

Confirme le jugement entrepris.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Sur les frais :

Arrête les frais judicaires d'appel à 1'200 fr., les met à la charge de A______ et dit qu'ils sont entièrement compensés avec l'avance fournie par ce dernier, qui reste acquise à l'Etat de Genève.

Condamne A______ à verser 500 fr. à B______ SNC SUCCESSEUR DE C______ à titre de dépens d'appel.

Condamne A______ à verser 800 fr. à C______ à titre de dépens d'appel.

Siégeant :

Monsieur Laurent RIEBEN, président ; Monsieur Patrick CHENAUX et Madame Fabienne GEISINGER-MARIETHOZ, juges ; Madame Sophie MARTINEZ, greffière.

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF supérieure ou égale à 30'000 fr.