Aller au contenu principal

Décisions | Chambre civile

1 resultats
C/15976/2020

ACJC/1097/2021 du 02.09.2021 sur JTPI/4544/2021 ( SDF ) , RENVOYE

Normes : CPC.273; CPC.279; CPC.289
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/15976/2020 ACJC/1097/2021

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre civile

DU JEUDI 2 SEPTEMBRE 2021

 

Entre

Madame A______, domiciliée ______ (GE), appelante d'un jugement rendu par la 20ème Chambre du Tribunal de première instance de ce canton le 7 avril 2021, comparant par Me Livio NATALE, avocat, boulevard des Philosophes 17, 1205 Genève, en l'Étude duquel elle fait élection de domicile,

et

Monsieur B______, domicilié ______[GE], intimé, comparant par Me Marco ROSSI, avocat, SLRG Avocats, quai Gustave-Ador 2, 1207 Genève, en l'Étude duquel il fait élection de domicile.

 

 

 

 


EN FAIT

A.           Par jugement JTPI/4544/2021, notifié aux parties le 16 avril 2021, statuant sur mesures protectrices de l'union conjugale d'accord entre les parties, le Tribunal de première instance a autorisé les époux A______ et B______ à vivre séparés (ch. 1 du dispositif), attribué à l'épouse la garde des enfants mineurs C______, D______ et E______ (ch. 2), réservé à l'époux un droit de visite s'exerçant un week-end sur deux du samedi 10h jusqu'au dimanche 18h, ainsi que pendant quatre semaines par année de vacances scolaires (ch. 3), instauré une curatelle d'organisation et de surveillance des relations personnelles (ch. 4), ordonné la transmission de son jugement au Tribunal de protection de l'adulte et de l'enfant (ch. 5), mis les frais de la curatelle à la charge des parties pour moitié chacune (ch. 6), donné acte à B______ de son engagement de verser en mains de A______, par mois, d'avance et par enfant, allocations familiales non comprises, une somme de 300 fr. au titre de contribution à l'entretien de chacun des enfants, et ce à compter du 1er février 2021 (ch. 7), donné acte à B______ de son engagement de verser en mains de A______, par mois et d'avance, allocations familiales non comprises, une somme totale de 1'500 fr. au titre de contribution à l'entretien des enfants, et ce à compter du 1er janvier 2022, soit 300 fr. pour C______, 300 fr. pour D______ et 900 fr. pour E______ (ch. 8), donné acte à B______ de son engagement de rembourser d'ici au 31 décembre 2021 la dette de 10'598 fr. au nom de A______ envers F______ (ch. 9), attribué à A______ la jouissance exclusive du domicile conjugal (ch. 10), prononcé les mesures susvisées pour une durée indéterminée (ch. 11), mis les frais judiciaires – arrêtés à 520 fr. – à la charge des parties pour moitié chacune, compensé partiellement ces frais avec l'avance de 200 fr. fournie par A______, condamné B______ à payer à l'Etat de Genève la somme de 260 fr., laissé la part de A______ en 60 fr. à la charge de l'Etat de Genève, sous réserve des décisions de l'assistance juridique (ch. 12), dit qu'il n'était pas alloué de dépens (ch. 13), condamné les parties à respecter et exécuter les dispositions susvisées (ch. 14) et débouté les parties de toutes autres conclusions (ch. 15).

B.            a. Par acte déposé au greffe de la Cour de justice le 26 avril 2021, A______ appelle de ce jugement, dont elle sollicite l'annulation des chiffres 7, 8, 9 et 12 du dispositif.

"Sur mesures provisionnelles", elle conclut à ce qu'il soit fait interdiction à B______ de disposer sans son consentement écrit des avoirs déposés sur le compte 1______ dont il est titulaire auprès de G______ AG, et à ce que l'établissement bancaire concerné soit informé de cette interdiction de disposer.

Principalement, elle conclut à la restitution de l'avance de frais de 200 fr. qu'elle a fournie au Tribunal dans la mesure où elle est au bénéfice de l'assistance juridique, à la convocation d'une audience de comparution personnelle des parties et de plaidoiries finales, à la fixation de l'entretien convenable de l'enfant E______ à 300 fr. par mois, allocations familiales déduites, à la fixation de l'entretien convenable de l'enfant C______ à 400 fr. par mois et à 600 fr. par mois dès le 18 septembre 2022, allocations familiales déduites, à la fixation de l'entretien convenable de l'enfant D______ à 400 fr. par mois et à 600 fr. par mois dès le 10 février 2024, allocations familiales déduites, à la condamnation de B______ à lui verser, par mois et d'avance, allocations familiales déduites, la somme de 400 fr. dès le 8 décembre 2019 et de 600 fr. dès le 10 février 2024 à titre de contribution à l'entretien de l'enfant D______, la somme de 400 fr. dès le 8 décembre 2019 et de 600 fr. dès le 10 février 2024 à titre de contribution à l'entretien de l'enfant C______ et la somme de 300 fr. dès le 8 décembre 2019 à titre de contribution à l'entretien de l'enfant E______, à ce que B______ soit condamné à lui verser en sus la somme de 1'700 fr. par mois dès le 8 décembre 2019 en guise de frais de prise en charge, sous déduction de 2'200 fr. déjà versés, à ce qu'il soit dit que les frais extraordinaires des enfants C______, E______ et D______ seront partagés entre les parents au pro rata de leurs revenus, moyennent accord préalable et présentation de la facture y relative, à ce qu'il soit dit que les allocations familiales seront perçues par elle-même, à ce qu'il lui soit réservé le droit d'amplifier ses conclusions relatives aux contributions d'entretien une fois que la situation financière de B______ sera établie, à ce qu'elle soit exemptée de toutes avances de frais, sûretés et frais judiciaires dans la mesure où elle est bénéfice de l'assistance juridique et à ce que B______ soit débouté de toute autre conclusion, avec suite de frais judiciaires et dépens.

Subsidiairement, elle conclut à la restitution de l'avance de frais de 200 fr. qu'elle a fournie au Tribunal dans la mesure où elle est au bénéfice de l'assistance juridique, au renvoi de la cause au Tribunal pour instruire les faits et compléter le jugement entrepris, à la condamnation de l'Etat de Genève en tous les frais judiciaires et dépens de la procédure d'appel et au déboutement de B______ de toute autre conclusion.

A l'appui de ses conclusions, elle produit divers extraits de la procédure de première instance, ainsi qu'une reconnaissance de dette datée du 1er mars 2021 et soumise au Tribunal le même jour.

b. Dans sa réponse, B______ conclut au déboutement de A______ de toutes ses conclusions sur mesures provisionnelles et sur le fond, à la condamnation de celle-ci en tous les frais judiciaires et dépens de la procédure d'appel et au prononcé d'une amende disciplinaire de 2'000 fr. à la charge de l'appelante ou de son conseil.

A l'appui de ses conclusions, il produit une copie de deux récépissés postaux datés des 3 avril et 27 avril 2021.

c. A______ a répliqué, persistant dans ses conclusions.

B______ a dupliqué et renoncé à solliciter la condamnation du conseil de l'appelante à une amende. Il a persisté dans ses conclusions pour le surplus.

d. Les parties ont été avisées de ce que la cause était gardée à juger par plis du greffe du 23 juin 2021.

C.           Les éléments pertinents suivants ressortent de la procédure :

a. Les époux A______, née le ______ 1983, et B______, né le ______ 1978, tous deux ressortissants égyptiens, ont contracté mariage le ______ 2011 en Egypte.

b. Trois enfants sont issus de cette union, C______, née le ______ 2012, D______, né le ______ 2014, et E______, né le ______ 2019.

Les trois enfants sont nés à Genève, où les époux se sont installés après leur mariage.

c. B______ est également père d'une fille née d'une précédente union, H______, dont il indique qu'elle est aujourd'hui âgée de 15 ans. Cette enfant vit actuellement auprès de sa mère en Egypte.

d. En proie à des difficultés conjugales, les époux se sont séparés au mois d'octobre 2019, date à laquelle B______ a quitté le domicile conjugal du I______ [GE] pour se constituer un domicile séparé.

e. Par acte du 11 août 2020, agissant en personne, A______ a prié le Tribunal civil de prendre toute mesure utile pour régler les conséquences de la séparation et protéger ses droits, indiquant notamment que B______ ne s'acquittait plus des factures des époux, mais avait perçu et conservé un montant de plus de 8'000 fr. versé par l'assurance-maladie en rapport avec la naissance du troisième enfant.

f. Par courrier du 19 août 2020, le Tribunal première instance a prié A______ de compléter sa requête de mesures protectrices de l'union conjugale avant le 18 septembre 2020 en lui indiquant l'adresse de B______, sous peine d'irrecevabilité. A______ s'est exécutée par courrier du 17 septembre 2020.

g. Le 22 septembre 2020, le Tribunal a requis de A______ la fourniture d'une avance de frais de 200 fr., dont celle-ci s'est acquittée le 22 octobre suivant.

h. Le 9 décembre 2020, représentée par son conseil et plaidant au bénéfice de l'assistance juridique, A______ a adressé au Tribunal une requête de mesures protectrices de l'union conjugale, en indiquant que celle-ci annulait et remplaçait les conclusions qu'elle avait prises jusqu'alors.

Principalement, elle a conclu à l'autorisation de la vie séparée, à l'attribution de la jouissance exclusive du domicile conjugal du I______ [GE], à l'attribution de l'autorité parentale et de la garde sur les enfants C______, D______ et E______, à l'octroi d'un droit de visite usuel à leur père, à la condamnation de celui-ci à lui verser, par mois, d'avance et par enfant la somme de 917 fr. dès le 8 décembre 2019 à titre de contribution à l'entretien de chacun des trois enfants, à la condamnation de B______ à lui verser la somme de 2'963 fr. 70 dès le 8 décembre 2019 tant à titre de contribution à son propre entretien qu'à titre de frais de prise en charge des enfants, au versement en ses mains des allocations familiales dues aux trois enfants, ainsi qu'à son exonération de toutes avances de frais, sûretés et frais judiciaires dans la mesure où elle plaidait au bénéfice de l'assistance juridique.

A l'appui de ses conclusions, A______ a notamment allégué qu'elle n'exerçait pas d'activité lucrative et qu'elle ne parlait pas couramment le français.

i. Le Tribunal a dispensé A______ de s'acquitter d'une avance de frais de 320 fr., vu l'octroi à celle-ci de l'assistance juridique.

j. A l'audience du 16 décembre 2020, B______ s'est déclaré d'accord avec l'autorisation de la vie séparée ainsi qu'avec l'attribution à A______ de la jouissance du domicile conjugal et de la garde des enfants C______, D______ et E______. Il a remis à A______ les clés de la cave et le badge de l'entrée de l'immeuble où est situé le domicile conjugal. Il s'est opposé aux prétentions de celle-ci pour le surplus, indiquant notamment qu'après une période de chômage, il travaillait depuis le mois d'août 2020 dans un EMS, pour un salaire oscillant entre 4'600 fr. et 4'800 fr. net par mois.

Le Tribunal a imparti à B______ un délai pour produire des pièces relatives à sa situation et convoqué une audience de suite de comparution personnelle le 1er mars 2021.

k. A l'audience du 1er mars 2021, B______ a notamment déclaré que son salaire se situait toujours entre 4'700 fr. et 4'800 fr. net par mois. Il s'est engagé à contribuer à l'entretien de ses trois enfants à hauteur de 300 fr. par mois et par enfant dès le mois de janvier 2021, ainsi qu'à rembourser dans un délai d'un an la dette que A______ conservait envers un institut de recouvrement (F______) en relation avec ses frais d'accouchement, dès lors que le versement de l'assurance n'avait pas été affecté au paiement de la facture correspondante.

Par le biais de son conseil, A______ a sollicité qu'il soit fait interdiction à B______ de disposer des avoirs se trouvant sur le compte 1______ qu'il possédait auprès de G______ AG. Elle s'est référée en particulier à un jugement de conciliation égyptien produit par B______, aux termes duquel celui-ci s'engageait à contribuer à l'entretien de sa fille H______ à hauteur d'un montant d'environ 500 fr. par mois.

Les parties ont par ailleurs indiqué au Tribunal qu'elles rencontraient des difficultés en relation avec le droit de visite.

A l'issue de l'audience, le Tribunal a imparti à B______ un délai au 15 mars 2021 pour produire des pièces relatives à sa situation financière et se déterminer sur la requête en blocage de compte. Il a ordonné l'établissement d'un rapport d'évaluation par le Service d'évaluation et d'accompagnement de la séparation parentale (SEASP), fixé une audience au 31 mars 2021 portant uniquement sur la question du droit de visite et dit qu'une audience de comparution personnelle et de plaidoiries finales serait convoquée après le dépôt du rapport du Service susvisé.

l. Par courrier de son conseil du 15 mars 2021, B______ s'est opposé au blocage de son compte bancaire et a produit un bordereau de pièces relatives à sa situation financière, dont son certificat de salaire pour l'année 2020, des relevés de son compte bancaire 1______ auprès de G______ AG pour la période du 1er janvier 2020 au 3 mars 2021.

m. Les parties ont comparu à l'audience du 31 mars 2021, assistées de leurs conseils. Après mention de la personne fonctionnant en qualité d'interprète pour A______, le procès-verbal de cette audience est libellé comme suit :

" Les parties
Nous sommes parvenues à un accord sur le droit de visite. Monsieur aura les enfants un week-end sur deux du samedi 10h jusqu'au dimanche 18h et pendant 4 semaines par année de vacances scolaires.

Nous sommes d'accord avec une curatelle d'organisation du droit de visite.

Monsieur s'engage à payer CHF 300.- par mois et par enfant dès le 1er février 2021. Sous réserve des montants déjà versées, soit CHF 600.- le 28 janvier et CHF 600.- le 1er mars 2021. Je vais verser CHF 900.- demain et ce sera la contribution pour le mois d'avril et je rattraperai les CHF 600.- qui manquent.

Monsieur s'engage à rembourser d'ici le 30 décembre 2021 la dette de Madame envers F______ (CHF 10'589 fr.). Monsieur s'engage à verser dès le 1er janvier 2022 à Madame CHF 1'500.- à l'entretien des enfants, soit CHF 300.- pour les deux aînés et CHF 900.- pour le cadet avec la prise en charge de 600 fr. Ces montants sont payables allocations familiales non comprises.

Pour garantir le paiement de la dette envers F______, Monsieur a signé une reconnaissance de dette. Madame pourra exiger le paiement de ce montant auprès de Monsieur si la dette n'est pas remboursée à F______.

***

Sur quoi, le Tribunal garde la cause à juger.

La greffière
[signature illisible]"

n. Le procès-verbal susvisé a été notifié aux parties par le greffe à l'issue de l'audience. Celles-ci l'ont signé pour en accuser réception.

o. Postérieurement à cette audience, B______ a versé à A______ les sommes de 1'000 fr. le 3 avril 2021 et de 1'000 fr. le 27 avril 2021.

D.           Le jugement entrepris indique pour motivation : "Vu la requête de mesures protectrices de l'union conjugale, vu la procédure, vu l'audience du 31 mars 2021 lors de laquelle les parties sont parvenues à un accord".

EN DROIT

1.             1.1 L'appel est recevable contre les jugements de mesures protectrices de l'union conjugale – qui doivent être considérés comme des décisions provisionnelles au sens de l'art. 308 al. 1 let. b CPC (ATF 137 III 475 consid. 4.1) – dans les causes non patrimoniales ou dont la valeur litigieuse au dernier état des conclusions devant l'autorité inférieure est supérieure à 10'000 fr. (art. 308 al. 2 CPC).

Interjeté dans le délai utile de dix jours (art. 271 lit. a et 314 al. 1 CPC), suivant la forme écrite prescrite par la loi (art. 130, 131, 311 al. 1 CPC), dans une cause de nature non pécuniaire puisque portant notamment sur les droits parentaux (arrêts du Tribunal fédéral 5A_781/2015 du 14 mars 2016 consid. 1 et 5A_331/2015 du 20 janvier 2016 consid. 1), l'appel est en l'espèce recevable.

1.2 La Cour revoit la cause en fait et en droit avec un plein pouvoir d'examen (art. 310 CPC), mais uniquement dans la limite des griefs qui sont formulés
(ATF 142 III 413 consid. 2.2.4). La procédure sommaire étant applicable, la cognition du juge est toutefois limitée à la simple vraisemblance des faits et à un examen sommaire du droit (ATF 138 III 636 consid. 4.3.2; arrêt du Tribunal fédéral 5A_812/2015 du 6 septembre 2016 consid. 5.2), en se fondant sur les moyens de preuve immédiatement disponibles, tout en ayant l'obligation de peser les intérêts respectifs des parties (ATF 139 III 86 consid. 4.2; 131 III 473 consid. 2.3).

1.3 Les maximes d'office et inquisitoire illimitée sont applicables aux questions concernant les enfants mineurs (art. 55 al. 2, 58 al. 2 et 296 CPC), ce qui a pour conséquence que la Cour n'est pas liée par les conclusions des parties (art. 296 al. 3 CPC). L'obligation du juge d'établir les faits d'office ne dispense cependant pas les parties de collaborer activement à la procédure. Il leur incombe de renseigner le juge sur les faits de la cause et de lui indiquer les moyens de preuve disponibles (ATF 130 III 102 consid. 2.2; arrêt du Tribunal fédéral 5A_855/2017 du 11 avril 2018 consid. 4.3.2).

2.             Vu la maxime inquisitoire illimitée applicable, les pièces produites par les parties devant la Cour sont recevables, quand bien même certaines d'entre elles n'ont pas été soumises au Tribunal (ATF 144 III 349 consid. 4.2.1), ce qui n'est pas contesté.

3.             L'appelante reproche principalement au Tribunal d'avoir considéré que les parties étaient parvenues, à l'audience du 31 mars 2021, à un accord sur les questions relatives aux contributions d'entretien dues par l'intimé et aux aspects financiers du litige. Elle conteste avoir accepté les propositions de l'intimé sur ces points et reproche au Tribunal d'avoir gardé la cause à juger sans donner aux parties l'occasion de plaider sur les questions demeurant litigieuses.

3.1 L'art. 273 CPC, qui énonce les règles spécifiques au déroulement de la procédure sommaire en matière de mesures protectrices de l'union conjugale, prévoit à son al. 3 que le tribunal tente de trouver un accord entre les parties.

3.1.1 L'accord des époux, au sens de cette disposition, prend le plus souvent la forme d'une convention organisant de manière consensuelle un régime de séparation provisoire au sens de l'art. 176 CC. De tels accords sont notamment visés par l'art. 273 al. 3 CPC, le juge pouvant jouer en la matière un rôle conciliateur important (Tappy, in Code de procédure civile, Commentaire romand, 2ème éd., 2019, n. 45 ad art. 273 CPC).

Même si une décision judiciaire n'est pas indispensable sur les questions dont les époux disposent librement, il n'est pas douteux les parties peuvent faire ratifier un accord entre elles par le juge des mesures protectrices. Outre une certaine protection contre une remise en cause ultérieure devant le juge, cela peut d'ailleurs aussi présenter pour elles l'avantage de conférer à leur convention la force exécutoire d'un jugement et une valeur de titre de mainlevée définitive dans la poursuite. Une telle ratification est notamment la règle pour un accord passé devant le juge, conformément à l'art. 273 al. 3 CPC (Tappy, op. cit. n. 48 ad art. 273 CPC). S'agissant de la réglementation du sort d'enfants mineurs, les règles du droit matériel, telles que l'art. 287 CC, impliquent également une homologation par l'autorité de protection de l'enfant ou par le juge, notamment si sont prévues des contributions d'entretien pour enfants ou une attribution exclusive de la garde (Tappy, op. cit. n. 46a ad art. 273 CPC).

Ni le Code civil, ni le CPC ne déterminent expressément les conditions d'homologation d'une convention de mesures protectrices, qui prêtaient à discussion déjà avant le 31 décembre 2010. Selon la doctrine, il ne s'agit pas simplement d'une transaction consignée au procès-verbal et acquérant dès lors force de chose jugée selon l'art. 241 al. 1 et 2 CPC. Comme pour une convention de mesures provisionnelles, les règles matérielles (contrôle limité s'agissant de questions relevant de la maxime de disposition, plus étendu s'agissant du sort des enfants) et formelles (ratification sous forme de l'intégration de la convention dans le dispositif d'une décision) de l'art. 279 CPC relatives aux conventions des parties sur les effets du divorce s'appliquent par analogie (Tappy, op. cit. n. 48 ad art. 273 CPC).

3.1.2 L'article 279 CPC prévoit que le tribunal ratifie la convention sur les effets du divorce après s'être assuré que les époux l'ont conclue après mûre réflexion et de leur plein gré, qu'elle est claire et complète et qu'elle n'est pas manifestement inéquitable(al. 1). La convention n'est valable qu'une fois ratifiée par le tribunal. Elle doit figurer dans le dispositif de la décision (al. 2).

La ratification judiciaire peut être tacite et résulter simplement de l'intégration de la convention dans le dispositif du jugement de divorce (Tappy, op. cit. n. 23 ad art. 279 CPC). Nonobstant le texte de l'art. 279 al. 1 CPC, les parties peuvent aussi conclure un accord partiel, en chargeant le juge de trancher des points de désaccord subsistants. Dans ce cas, il faudra considérer comme complète une convention réglant toutes les questions non ainsi expressément laissées à la décision du juge. Notamment, les parties peuvent soumettre à ce dernier des conclusions communes partielles relatives aux enfants, en le chargeant de régler les autres points concernant le sort de ceux-ci (Tappy, op. cit. n. 16a ad art. 279 CPC).

3.1.3 En cas de divorce prononcé sur requête commune, l'art. 289 CPC prévoit que la décision de divorce ne peut faire l'objet que d'un appel pour vice du consentement.

Cette disposition ne limite cependant les griefs admissibles en appel qu'au sujet du prononcé du divorce lui-même. Les effets du divorce en revanche, même résultant d'une convention des parties ou de conclusions communes ratifiées, peuvent être contestés en deuxième instance selon les règles ordinaires (Tappy, op. cit., n. 7 ad art. 289 CPC).

S'il est possible d'appeler ou de recourir selon les règles ordinaires sur tous les effets du divorce, réglés d'un commun accord ou non, la portée de cette possibilité varie selon le type d'effets dont il s'agit et selon qu'on se trouve dans un divorce sur requête commune avec accord complet ou non. Ainsi, en cas de procédure sur requête commune avec accord partiel, des voies de droit avec pouvoirs de cognition ordinaires doivent permettre de contester la décision sur les points sur lesquels il n'y a eu aucune entente des parties (Tappy, op. cit. n. 15 ad art. 289 CPC). S'agissant des effets du divorce réglés d'un commun accord au contraire, un appel ou un recours sont possibles, mais seulement pour faire vérifier que les conditions pour ratifier la convention des parties et prononcer le divorce étaient réunies. Il ne s'agit pas pour l'autorité d'appel ou de recours de réexaminer et le cas échéant modifier les effets en question selon sa propre appréciation. La juridiction de deuxième instance peut en revanche substituer à celle du premier juge sa propre appréciation sur l'admissibilité de l'accord des parties en refaisant les contrôles de la convention requis par l'art. 279 CPC, d'intensité variable selon les questions. Ainsi, outre un vice de consentement, elle peut tenir compte d'une impossibilité ou d'une illégalité du partage des prestations de sortie, ou d'une iniquité manifeste de la convention sur la liquidation du régime matrimonial ou les contributions d'entretien entre époux (Tappy, op. cit. n. 16 ad art. 289 CPC).

3.1.4 Si elle admet que les effets réglés selon l'accord des parties ne méritent pas ratification, la juridiction de deuxième instance ne peut en principe pas les régler différemment elle-même. Par application analogique de l'art. 288 al. 3 CPC, elle peut notamment renvoyer la cause en première instance pour traitement de la suite éventuelle de la procédure, comme aurait dû le faire le juge inférieur s'il était lui-même parvenu à la conclusion que la convention ne pouvait être ratifiée (Tappy, op. cit. n. 16 ad art. 289 CPC).  

Une réserve doit être faite s'agissant du règlement des questions concernant les enfants. Pour celles-ci en effet, la maxime d'office s'applique également de façon générale en deuxième instance. Cela implique pour les parties la faculté de demander librement le réexamen de tels points, sans être restreintes à cet égard par les limites habituelles en matière d'allégations, de preuves ou de prétentions nouvelles. Un époux pourrait donc appeler ou recourir sur les effets du divorce relatifs aux enfants même si la décision n'a fait en la matière que reprendre des conclusions communes soumises au premier juge, et l'autorité de deuxième instance pourrait revoir ces points si elle l'estime justifié, même d'office (Tappy, op. cit. n. 16 ad art. 289 CPC).

3.2 En l'espèce, l'appelante n'invoque pas un vice du consentement pour remettre en cause l'accord sur lequel le Tribunal s'est fondé pour régler les aspects financiers du litige. Elle conteste l'existence même d'un accord sur ces points, indiquant que les déclarations communes des parties ne concernaient que les modalités des relations personnelles. Dès lors que les aspects contestés concernent l'entretien d'enfants mineurs, il n'est pas nécessaire de trancher cette question. Conformément aux principes rappelés ci-dessus, applicables par analogie aux mesures protectrices de l'union conjugale, l'appelante peut librement remettre en cause en appel les dispositions prises en relations avec des enfants mineurs, même si celles-ci ont fait l'objet d'un accord devant le premier juge, et la Cour de céans peut revoir ces dispositions si elle l'estime justifié.

A ce propos, on peut en l'espèce douter du caractère équitable des contributions d'entretien apparemment convenues, tant au regard du solde mensuel que lesdites contributions laissent à l'intimé (soit plus de 3'000 fr. par mois sur un salaire d'environ 4'700 fr. net par mois, alors que l'appelante n'est vraisemblablement pas en mesure d'exercer une activité lucrative pour subvenir à son entretien – vu notamment la garde des trois enfants dont le dernier n'est pas en âge d'être scolarisé – et que les contributions dues aux enfants devraient ainsi comprendre une contribution de prise en charge comblant autant que possible son déficit), que du montant que l'intimé s'est apparemment engagé à verser à sa fille vivant en Egypte, où le coût de la vie est notoirement inférieur à celui de la Suisse.

Il apparaît également que le Tribunal n'a pas statué sur les conclusions provisionnelles de l'appelante en blocage du compte bancaire de l'intimé, alors que ce point n'était pas couvert par les déclarations des parties à l'audience du 31 mars 2021 et que l'appelante n'a pas formellement renoncé auxdites conclusions.

Par conséquent, il sera fait droit aux conclusions de l'appelante tendant à l'annulation des chiffres 7 à 9 du dispositif du jugement entrepris. Pour la bonne forme, le chiffre 15 dudit dispositif, qui a débouté les parties de toutes autres conclusions, sera également annulé. Nonobstant les maximes d'office et inquisitoire applicables, il n'y a en revanche pas lieu pour la Cour de céans de rechercher les faits pertinents – qui n'ont pas été établis par le Tribunal et ne sont pas allégués par les parties dans leurs écritures d'appel – ni de statuer d'office sur les dispositions annulées. L'intimé s'acquitte apparemment des contributions d'entretien qu'il s'est engagé à verser et, bien que disposant désormais d'extraits du compte bancaire de l'intimé, l'appelante ne précise pas quels seraient les prélèvements ou opérations qui justifieraient de bloquer ledit compte, de sorte que l'urgence à statuer fait défaut. Afin de respecter le double degré de juridiction, la cause sera dès lors renvoyée au Tribunal pour instruction et nouvelle décision sur les questions demeurant litigieuses.

4.             4.1 La cause étant renvoyée au Tribunal pour nouvelle décision, sa décision sur les frais de première instance, qui est contestée par l'appelante, sera également annulée (ch. 12 du dispositif). Il incombera au Tribunal de statuer à nouveau sur ce point, y compris sur l'éventuelle part des frais judiciaires laissés à la charge de l'appelante en relation avec les actes initiés par celle-ci avant qu'elle ne soit admise au bénéfice de l'assistance juridique, étant rappelé que ladite assistance n'est qu'exceptionnellement accordée avec effet rétroactif (art. 119 al. 4 CPC).

4.2 Les frais judiciaires d'appel seront arrêtés à 1'000 fr. (art. 31 et 35 RTFMC) et mis à la charge des parties pour moitié chacune, vu la nature familiale du litige (art. 105 al. 1, art. 107 al. 1 let. c CPC). Dès lors que l'appelante plaide au bénéfice de l'assistance juridique, sa part des frais sera provisoirement laissée à la charge de l'Etat de Genève, qui pourra en demander le remboursement ultérieurement (art. 122 et 123 al. 1 CPC; art. 19 RAJ). L'intimé sera pour sa part condamné à payer la somme de 500 fr. à l'Etat de Genève, soit pour lui les Services financiers du Pouvoir judiciaire.

Pour les mêmes motifs, les parties conserveront à leur charge leurs propres dépens d'appel (art. 107 al. 1 let. c CPC).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre civile :

A la forme :

Déclare recevable l'appel interjeté le 26 avril 2021 par A______ contre le jugement JTPI/4544/2021 rendu le 7 avril 2021 par le Tribunal de première instance dans la cause C/15976/2020.

Au fond :

Annule les chiffres 7, 8, 9, 12 et 15 du dispositif du jugement entrepris.

Revoie la cause au Tribunal pour instruction et nouvelle décision, dans le sens des considérants.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Sur les frais :

Arrête les frais judiciaires d'appel à 1'000 fr. et les met à la charge des parties pour moitié chacune.

Dit que la part des frais judiciaires incombant à A______ est provisoirement supportée par l'Etat de Genève.

Condamne B______ à payer à l'Etat de Genève, soit pour lui les Services financiers du Pouvoir judiciaire, la somme de 500 fr.

Dit que chaque partie supporte ses propres dépens d'appel.

Siégeant :

Madame Nathalie LANDRY-BARTHE, présidente; Madame Pauline ERARD, Monsieur Cédric-Laurent MICHEL, juges; Madame Jessica ATHMOUNI, greffière.

 

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF supérieure ou égale à 30'000 fr.