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C/8651/2023

ACJC/1402/2023 du 16.10.2023 sur OTPI/422/2023 ( SP ) , CONFIRME

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/8651/2023 ACJC/1402/2023

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre civile

DU LUNDI 16 OCTOBRE 2023

 

Entre

1)   Monsieur A______, domicilié ______,

2)   Madame B______ c/o C______ SARL, sise ______,

3)   C______ SARL, sise ______, appelants d'un jugement rendu par la 12ème Chambre du Tribunal de première instance de ce canton le 23 juin 2023, tous représentés par Me Serge PATEK, avocat, BARTH & PATEK, boulevard Helvétique 6, case postale , 1211 Genève 12,

et

Monsieur D______, domicilié ______, intimé, représenté par Me Philippe EIGENHEER, avocat, DGE Avocats, rue Bartholoni 6, case postale, 1211 Genève 4.

 


EN FAIT

A.           Par ordonnance OTPI/422/2023du 23 juin 2023, expédiée pour notification aux parties le 26 juin 2023, le Tribunal de première instance a ordonné à A______, C______ Sàrl et B______ de cesser immédiatement d'adresser des courriels ou toutes autres communications à des tiers affirmant que D______ aurait volé des données confidentielles les concernant (ch. 1), sous la menace de la peine prévue par l'art. 292 CP, dont la teneur a été rappelée (ch. 2), imparti à D______ un délai de trente jours dès notification de l'ordonnance pour faire valoir son droit en justice (ch. 4), arrêté les frais judiciaires à 1'200 fr., compensés avec l'avance versée et mis à la charge de A______, C______ Sàrl et B______, conjointement et solidairement (ch. 5), condamné ceux-ci à rembourser à D______ 1'200 fr. ainsi qu'à lui verser 2'000 fr. à titre de dépens (ch. 7), et débouté les parties de toutes autres conclusions (ch. 8).

B.            Par acte du 7 juillet 2023 à la Cour de justice, A______, C______ Sàrl et B______ ont formé appel contre cette décision. Ils ont conclu à l'annulation de celle-ci, cela fait à l'irrecevabilité de la requête, avec suite de dépens.

D______ a conclu à la confirmation de la décision entreprise, avec suite de frais et dépens.

Les parties ont répliqué et dupliqué, persistant dans leurs déclarations antérieures.

Par avis du 13 septembre 2023, elles ont été informées de ce que la cause était gardée à juger.

C.           Il résulte de la procédure les faits pertinents suivants:

a.    C______ Sàrl est une société à responsabilité limitée, inscrite au Registre du commerce genevois, qui a pour but l'exploitation d'un cabinet médical spécialisé dans le domaine des ______ et de ______.

A______, médecin ______ [spécialité], en est l'associé gérant, avec signature individuelle, D______, médecin ______ [spécialité], l'associé, sans signature, le troisième associé étant E______, avec signature collective à deux.

D______ est également associé gérant de F______ Sàrl.

Cette dernière, ainsi que C______ Sàrl et A______, sont locataires conjoints et solidaires de locaux situés au 3ème étage de l'immeuble sis no. ______ rue 1______ à Genève.

b.   D______ et A______ s'opposent dans le cadre de divers conflits.

En juillet 2022, le premier a quitté les locaux précités pour s'établir avec un confrère à une autre adresse.

c.    A______, C______ Sàrl et B______ allèguent que, entre le 7 et le 10 avril 2023, D______ s'est rendu à six reprises, dont la première fois en brisant le cylindre de la porte palière, dans les locaux du no. ______ rue 1______.

D______ allègue être venu, le 13 avril 2023, récupérer du matériel lui appartenant dans les locaux du no. ______ rue 1______.

Le 14 avril 2023, C______ Sàrl a déposé une plainte pénale notamment dirigée contre D______ pour "vol et destruction de matériel".

d.   Le 18 avril 2023, un courriel (portant la mention finale du site www.C______.ch) a été envoyé depuis l'adresse dr.A______@gmail.com, à des destinataires indéterminés. Ce courriel était rédigé ainsi:" Cher/es patient/es, Nous espérons que vous avez passé d'agréables fêtes de Pâques. Nous souhaitons porter à votre connaissance que notre cabinet du no. ______ rue 1______ a malheureusement été cambriolé pendant les fêtes de Pâques. Vos dossiers médicaux papier et informatique ont aussi été dérobés. Une enquête judiciaire est en cours et la médecine cantonale est tenue informée du dossier. Le début d'enquête permet à ce jour d'établir que Monsieur D______ est en possession et/ou a connaissance de l'endroit où se trouvent vos documents. Monsieur D______ refuse aussi de donner suite à nos requêtes répétées pour récupérer vos documents. Afin de suivre la procédure indiquée par la médecine cantonale de Genève, nous vous invitons expressément à formuler une demande auprès de Monsieur D______ pour la restitution de vos dossiers. En effet, Monsieur D______ a l'obligation déontologique de vous les restituer. Nous vous suggérons donc de lui adresser un e-mail en ce sens aux adresses suivantes: dr.D______@F______.ch et contact@F______.ch. Nous vous serions infiniment reconnaissants de bien vouloir nous tenir informés de l'issue de votre éventuelle réclamation. Par avance, nous vous remercions de votre coopération et compréhension. B______."

e.    D______ allègue qu'il a reçu " de manière quasi quotidienne" des messages de patients lui demandant la restitution de dossier. Il a produit six mails, expédiés entre les 18 et 24 avril 2023, à titre de preuve de l'allégué.

L'un d'entre eux, daté du 24 avril 2023 (expédié par une personne dont l'identité n'a pas été fournie et signalant que ses filles étaient traitées par A______) comporte, outre la requête de restitution de dossier, le passage suivant: "Selon les premiers éléments de l'enquête, aux dires du Dr A______ [sic] vous seriez l'auteur des éventuelles infractions et seriez en possession des données médicales concernant mes deux filles".

f.     Le 28 avril 2023, D______ a saisi le Tribunal d'une requête de mesures provisionnelles dirigée contre A______, C______ Sàrl et B______. Il a conclu principalement à ce qu'il soit ordonné aux précités, sous la menace de la peine prévue par l'art. 292 CP, de cesser d'adresser des courriels ou toutes autres communications à des tiers affirmant que D______ aurait volé des données confidentielles les concernant, dès la notification de l'ordonnance, subsidiairement à ce que soit constaté le caractère illicite du courriel adressé par A______, C______ Sàrl et B______ en date du 18 avril 2023 aux patients, affirmant que D______ aurait volé des données confidentielles les concernant, dans la mesure où le trouble créé par ledit courriel subsistait, et de communiquer à l'ensemble des patients visés par le courriel du 18 avril 2023 par un courriel dans les trois heures suivant la notification de l'ordonnance, le texte récapitulatif suivant: "Madame, Monsieur, Suite est faite à notre courriel du 18 avril 2023 que nous souhaitons rectifier. En effet, ce courriel laissait penser que M. D______ était en possession de vos données médicales, ou avait connaissance de l'endroit où elles se trouvent. Or, à ce jour, aucun élément ne nous permet d'affirmer ceci".

Il a pris les mêmes conclusions à titre superprovisionnel.

Par ordonnance du 28 avril 2023, le Tribunal a fait droit, ex parte, à la première des conclusions principales de D______.

A______, C______ Sàrl et B______ ont conclu à l'irrecevabilité de la requête de D______, subsidiairement au déboutement de celui-ci de toutes ses conclusions, avec suite de dépens.

Ils ont notamment produit une pièce intitulée "D______ vole les dossiers patients de A______";

A l'audience du Tribunal du 12 juin 2023, les parties, respectivement assistées et représentées par avocats, ont, à teneur du procès-verbal d'audience, plaidé et persisté dans leurs conclusions.

Sur quoi, la cause a été gardée à juger.

EN DROIT

1.             1.1 L'appel est dirigé contre une décision de première instance rendue sur mesures provisionnelles dans le cadre d'un litige concernant des prétentions tendant à la protection de la personnalité, droits de nature non pécuniaire (art. 308 al. 1 let. b CPC; ATF 142 III 145 consid. 6;127 III 481 consid. 1).

Il a été formé en temps utile et selon la forme prescrite par la loi (art. 130, 131, 142 al. 3, 311 al. 1 et 314 al. 1 CPC), de sorte qu'il est recevable.

1.2 La Cour revoit la cause en fait et en droit avec un plein pouvoir d'examen (art. 310 CPC). Les mesures provisionnelles étant soumises à la procédure sommaire (art. 248 lit. d CPC), avec administration restreinte des moyens de preuve, la cognition du juge est toutefois limitée à la simple vraisemblance des faits et à un examen sommaire du droit (ATF 131 III 473 consid. 2.3; 127 III 474 consid. 2b/bb; arrêt du Tribunal fédéral 5A_442/2013 du 24 juillet 2013 consid. 2.1 et 5.1).

2. Les appelants reprochent au Tribunal une constatation inexacte des faits, pour avoir retenu qu'"une dizaine de patients" s'était adressée à l'intimé pour restitution de dossiers.

L'état de fait dressé ci-dessus rectifie cette inexactitude de la décision attaquée.

Pour le surplus, leur critique porte sur des déclarations (notamment sur l'existence d'un motif justificatif), non reproduites dans l'ordonnance attaquée, qui auraient été effectuées à l'audience du Tribunal du 12 juin 2023, et au sujet desquelles ils offrent en preuve l'interrogatoire des parties. Dans la mesure où ils n'ont fait requérir aucune mention de telles déclarations au procès-verbal de l'audience, à laquelle ils étaient représentés par avocat, l'argument ne sera pas examiné plus avant, étant en outre rappelé que la procédure de mesures provisionnelles est limitée à la vraisemblance des faits et à une administration restreinte des moyens de preuve.

3. Les appelants font grief au premier juge d'avoir admis la légitimation passive de deux d'entre eux (A______ et C______ Sàrl), d'avoir retenu qu'il n'existait pas de motif justificatif à l'atteinte à la personnalité.

3.1 Le juge ordonne les mesures provisionnelles nécessaires lorsque le requérant rend vraisemblable qu'une prétention dont il est titulaire est l'objet d'une atteinte ou risque de l'être et que cette atteinte risque de lui causer un préjudice difficilement réparable (art. 261 al. 1 CPC).

Le tribunal peut ordonner toute mesure provisionnelle propre à prévenir ou à faire cesser le préjudice et notamment prononcer une interdiction (art. 262 let. a CPC).

Le requérant doit rendre vraisemblable tant l'existence de sa prétention matérielle de nature civile que sa mise en danger ou atteinte par un préjudice difficilement réparable, ainsi que l'urgence (Huber, Kommentar zur Schweizerischen Zivilprozessordnung, 3ème éd. 2016, n. 23 ad art. 261 CPC)

Ainsi, le requérant doit rendre vraisemblable que le droit matériel invoqué existe et que le procès a des chances de succès, la mesure provisionnelle ne pouvant être accordée que dans la perspective de l'action au fond qui doit la valider (cf. art. 263 et 268 al. 2 CPC; ATF 131 III 473 consid. 2.3; arrêt du Tribunal fédéral 5A_1016/2015 du 15 septembre 2016 consid. 5.3; Bohnet, Commentaire romand, Code de procédure civile, 2ème éd. 2019, n. 7 ad art. 261). Il doit en outre rendre vraisemblable une atteinte au droit ou son imminence, sur la base d'éléments objectifs (Bohnet, op. cit., n. 10 ad art. 261 CPC).

Doit également être rendue vraisemblable l'existence d'un préjudice difficilement réparable, qui peut être de nature patrimoniale ou immatérielle (Message relatif au CPC, FF 2006 p. 6961; Bohnet, op. cit., n. 11 ad art. 261 CPC; Huber, op. cit., n. 20 ad art. 261 CPC). Le requérant doit rendre vraisemblable qu'il s'expose, en raison de la durée nécessaire pour rendre une décision définitive, à un préjudice qui ne pourrait pas être entièrement supprimé même si le jugement à intervenir devait lui donner gain de cause. En d'autres termes, il s'agit d'éviter d'être mis devant un fait accompli dont le jugement ne pourrait pas complètement supprimer les effets (arrêt du Tribunal fédéral 4A_611/2011 du 3 janvier 2012 consid. 4.1).

Le risque de préjudice difficilement réparable implique l'urgence (Bohnet, op. cit., n. 12 ad art. 261 CPC). L'urgence est une notion relative qui comporte des degrés et s'apprécie moins selon des critères objectifs qu'au regard des circonstances. Elle est en principe admise lorsque le demandeur pourrait subir un dommage économique ou immatériel s'il devait attendre qu'une décision au fond soit rendue dans une procédure ordinaire (ATF 116 Ia 446 consid. 2 = JdT 1992 I p. 122; Bohnet, op. cit., n. 12 ad art. 261 CPC).

Rendre vraisemblable signifie qu'il n'est pas nécessaire que le juge soit convaincu de l'exactitude de l'allégué présenté, mais qu'il suffit que, sur la base d'éléments objectifs, le fait en cause soit rendu probable, sans qu'il doive pour autant exclure la possibilité que les faits aient aussi pu se dérouler autrement (ATF 130 III 321 consid. 3.3, JdT 2005 I 618, SJ 2005 I 514; ATF 120 II 393 consid. 4c; ATF 104 Ia 408).

La vraisemblance requiert plus que de simples allégués: ceux-ci doivent être étayés par des éléments concrets ou des indices et être accompagnés de pièces (ATF 138 III 636 consid. 4.3.2 et 4.4; arrêt du Tribunal fédéral 5A_893/2013 du 18 février 2014 consid. 3).

3.2 L'art. 28 CC prévoit que celui qui subit une atteinte illicite à sa personnalité peut agir en justice pour sa protection contre toute personne qui y participe (al. 1). Une atteinte est illicite, à moins qu'elle ne soit justifiée par le consentement de la victime, par un intérêt prépondérant privé ou public ou par la loi (al. 2). Il résulte de cette disposition que l'atteinte est en principe illicite, ce qui découle du caractère absolu des droits de la personnalité, l'atteinte devenant cependant licite si son auteur peut invoquer un motif justificatif décrit à l'al. 2. Il y a atteinte à la personnalité au sens de l'art. 28 CC non seulement lorsque la bonne réputation d'une personne ou son sentiment d'honorabilité sont lésés, mais aussi lorsque sa considération professionnelle ou sociale est touchée (ATF 129 III 715 consid. 4.1; arrêt du Tribunal fédéral 5A_654/2021 du 13 janvier 2022 consid. 4.2).

Pour déterminer s'il y a atteinte à l'honneur, il convient de se référer au cercle de personnes dont l'estime est importante du point de vue du lésé (arrêt du Tribunal fédéral 4A_313/2008 du 27 novembre 2008 consid. 4.2.1).

L'atteinte à l'honneur peut résulter d'allégations de fait ou d'appréciations subjectives, sans qu'il importe de savoir, dans un premier temps, si les faits allégués sont vrais, incomplets ou inexacts, ou si les critiques sont justifiées ou non (cf. ATF 122 III 449 consid. 3a). Le mode d'expression (geste, voix, écrit ou dessin) est aussi indifférent. Il suffit qu'aux yeux d'un observateur moyen la considération dont jouit une personne soit diminuée; la véracité des faits allégués ou le bien-fondé d'une critique jouent cependant un rôle important pour décider si l'atteinte est illicite ou non (ATF 103 II 161 consid. 1c; 91 II 401 consid. 3). Les opinions, commentaires et jugements de valeur sont admissibles, autant qu'ils apparaissent soutenables au regard de l'état de fait auquel ils se réfèrent, à moins que leur forme ne rabaisse inutilement la personne visée (ATF 126 III 305 consid. 4b/bb).

3.3 Selon l'art. 28a al. 1 CC, le demandeur peut requérir du juge 1. d'interdire une atteinte illicite si elle est imminente, 2. de la faire cesser si elle dure encore, 3. d'en constater le caractère illicite si le trouble qu'elle a créé subsiste (al. 1). Sont réservées les actions en dommages-intérêts et en réparation du tort moral, ainsi que la remise de gain selon les dispositions sur la gestion d'affaires (al. 3).

En matière de mesures provisionnelles, le terme "préjudice" vise non seulement un dommage ou un tort moral mais aussi un "trouble" au sens de l'art. 28a al. 1 ch. 3; le tribunal devrait l'admettre largement car c'est le propre des atteintes à la personnalité que d'être souvent difficiles à réparer (Steinauer/Fountoulakis, Droit des personnes physiques et de la protection de l'adulte, 2014, p. 218).

La qualité pour défendre (légitimation passive) appartient à l'auteur direct de l'atteinte, mais aussi à toute personne qui y participe. Le lésé peut agir contre quiconque a objectivement joué, que ce soit de près ou de loin, un rôle – même secondaire – dans la création ou le développement de l'atteinte, autrement dit contre toute personne dont la collaboration cause, permet ou favorise l'atteinte; il n'est pas nécessaire que le participant ait réalisé qu'il participait à une atteinte à la personnalité (ATF 141 III 513 consid. 5.3.1; Meier Droit des personnes, 2ème éd. 2021, n. 788).

3.4 En l'occurrence, le courriel visé par l'intimé a été expédié, sous la signature d'une assistante de l'appelant A______, depuis l'adresse de courriel de celui-ci, avec la mention préétablie du site de l'appelante C______ Sàrl. Au stade de la vraisemblance, il est conforme au texte de l'art. 28 al. 1 CC de retenir que les trois personnes contre lesquelles a été dirigée la requête de l'intimé ont permis la réalisation de l'atteinte prétendue; il n'y a, en effet, rien d'invraisemblable à admettre qu'une assistante d'un cabinet médical organisé sous forme d'une personne morale agit sur instructions du médecin, organe de la société, pour laquelle elle travaille. Le grief tombe ainsi à faux.

A bien comprendre les appelants, ceux-ci, sur la base des courriels de patients reçus par l'intimé, critiquent ensuite le Tribunal pour avoir retenu la vraisemblance de l'atteinte alléguée. Ce faisant, ils perdent de vue la rédaction de leur propre envoi auxdits patients, dont le premier juge a retenu à raison qu'elle laissait entendre que l'intimé aurait agi de façon illégale; à cet égard, le rapprochement entre la mention des dossiers dérobés, dans le cadre d'un cambriolage, et celle de la possession ou la connaissance de la localisation desdits dossiers par l'intimé, laisse peu de place à l'interprétation, à tout le moins sous l'angle de la vraisemblance, comme l'a relevé le Tribunal. Les appelants ne remettent d'ailleurs pas ce point en cause, se bornant à relever qu'un seul des patients ayant réagi auprès de l'intimé aurait explicitement utilisé le terme d'infraction; cet élément ne tend toutefois pas en leur faveur, révélant bien plutôt que leur message du 18 avril 2023 était de nature à être compris comme comportant une atteinte à la personnalité de l'intéressé, présumée illicite, sauf motif justificatif non allégué de façon recevable en l'occurrence.

Les appelants font en revanche grand cas de ce que les courriels reçus par l'intimé provenaient de patients de l'appelant A______; quand bien même ce fait aurait-il été allégué et rendu vraisemblable - ce qui n'a pas été le cas - on ne discerne pas en quoi il serait décisif, puisque, du point de vue de l'intimé, il est vraisemblable que l'estime de toute personne susceptible de consulter un médecin ______ [spécialité] à Genève est importante.

Au vu de ce qui précède, il n'y a enfin pas lieu de s'arrêter à la critique des appelants selon laquelle le premier juge n'aurait fondé sa décision que sur l'intitulé d'une pièce produite ("D______ vole des dossiers patients de A______"), puisqu'il ne s'agit que d'un élément parmi de nombreux autres retenus dans l'ordonnance.

S'agissant de la condition du préjudice difficilement réparable, dont les appelants contestent la réalisation, le Tribunal s'est référé à la nature des droits touchés. Au stade de la vraisemblance à tout le moins, cette motivation, certes lapidaire, est conforme aux principes rappelés par la doctrine, et n'est pas critiquable.

Dès lors, au vu de ce qui précède, l'ordonnance attaquée sera confirmée.

4. Les appelants, qui succombent, supporteront les frais de leur appel (art. 106 al. 1 CPC). Ceux-ci seront arrêtés à 960 fr. (art. 26, 37 RTFMC), compensés avec l'avance opérée, acquise à l'Etat de Genève (art. 111 al. 1 CPC).

Ils verseront en outre à l'intimé 1'000 fr. à titre de dépens d'appel (art. 84, 85, 88, 90 RTFMC).

* * * * *

PAR CES MOTIFS,
La Chambre civile :


A la forme :

Déclare recevable l'appel formé le 7 juillet 2023 par A______, C______ Sàrl et B______ contre l'ordonnance OTPI/422/2023 rendue le 23 juin 2023 par le Tribunal de première instance dans la cause C/8651/2023–12 SP.

Au fond :

Confirme cette ordonnance.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Sur les frais :

Arrête les frais d'appel à 960 fr., compensés avec l'avance opérée, acquise à l'ETAT DE GENEVE.

Les met à la charge de A______, C______ Sàrl et B______, solidairement entre eux.

Condamne A______, C______ Sàrl et B______, solidairement entre eux, à verser à D______ 1'000 fr. à titre de dépens d'appel.

Siégeant :

Madame Pauline ERARD, présidente; Madame Sylvie DROIN, Madame
Nathalie LANDRY-BARTHE, juges; Madame Laura SESSA, greffière.

La présidente :

Pauline ERARD

 

La greffière :

Laura SESSA

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière civile; la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les
art. 72 à 77 et 90 ss de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110). Il connaît également des recours constitutionnels subsidiaires; la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 113 à 119 et 90 ss LTF. Dans les deux cas, le recours motivé doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué. L'art. 119 al. 1 LTF prévoit que si une partie forme un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.