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C/2207/2023

ACJC/1358/2023 du 09.10.2023 sur JTPI/4966/2023 ( SML ) , CONFIRME

En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/2207/2023 ACJC/1358/2023

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre civile

DU LUNDI 9 OCTOBRE 2023

 

Entre

Monsieur A______, domicilié c/o B______, notaires, ______ [GE], recourant contre un jugement rendu par la 12ème Chambre du Tribunal de première instance de ce canton le 27 avril 2023,

et

C______ SARL, sise ______ [GE], intimée, comparant en personne.

 


EN FAIT

A.           Par jugement JTPI/4966/2023 du 27 avril 2023, expédié pour notification aux parties le lendemain, le Tribunal de première instance a déclaré irrecevable la requête de mainlevée formée par A______ (ch. 1), arrêté les frais judiciaires à 200 fr. compensés avec l'avance opérée, et les a mis à la charge du précité (ch. 3).

Il a retenu, "vu les titres produits, à l'exception du commandement de payer", que la requête était manifestement irrecevable.

B.            Par acte du 5 mai 2023, A______ s'est adressé à la Cour. Il a prié celle-ci de "requérir auprès de l'instance inférieure qu'elle veuille bien traiter [s]a requête avec la diligence qui incombe à une autorité judiciaire", ajoutant "compte tenu du délai de 10 jours qui m'est imparti et compte tenu de la réactivité des greffiers du Tribunal de première instance, je ne souhaitais pas courir le risque de voir ma créance auprès [sic] de C______ Sàrl s'éteindre".

Il a produit, à titre de pièce nouvelle, un commandement de payer poursuite n° 1______.

En application de l'art. 324 CPC, la Cour a invité le premier juge à donner son avis.

Outre des explications procédurales ressortant des pièces de forme de son dossier, le Tribunal, par observations du 1er juin 2023, a relevé l'absence d'une décision de levée du secret professionnel et d'un commandement de payer dans les pièces produites à l'appui de la requête, et a affirmé que le dossier ne comportait pas de titre de mainlevée.

Le 15 juin 2023, A______ a déposé une décision de levée de son secret professionnel rendue le 2 décembre 2022 par la Commission de surveillance des notaires.

C______ Sàrl n'a pas déposé de réponse.

Par avis du 31 août 2023, les parties ont été informées de ce que la cause était gardée à juger.

C.           Il résulte de la procédure de première instance les faits pertinents suivants:

a. Le 2 février 2023, A______, notaire à Genève, a adressé au Tribunal, sur formule préimprimée et en un seul exemplaire, une requête de mainlevée définitive de l'opposition formée au commandement de payer, poursuite n° 1______, portant sur 3'280 fr. avec intérêts dès le 1er novembre 2022, dirigée contre C______ Sàrl, rue 2______ no. ______ à Genève.

Il a allégué avoir dispensé des conseils juridiques à la précitée.

Bien qu'il ait coché la case "commandement de payer" de la rubrique "annexes" de la formule préimprimée, il n'a pas déposé ce titre.

Par ordonnance du 9 février 2023, le Tribunal a accordé un délai à A______ pour produire un tirage supplémentaire de la requête et, en double exemplaire, les pièces dont il entendait faire état, faute de quoi la requête serait déclarée irrecevable.

Le 14 février 2023, A______ a versé un bordereau de pièces, lequel ne comprend pas le commandement de payer susmentionné.

Le 20 avril 2023, le Tribunal a convoqué les parties à une audience fixée le 5 juin suivant. A lire l'avis du Tribunal du 1er juin 2023, cette convocation procédait d'une erreur, dans la mesure où la requête aurait dû être déclarée irrecevable faute de production du commandement de payer.

Le 21 avril 2023, une entité dont la raison sociale est D______ Sàrl, sise no. ______ rue 2______ à Genève, a signalé au Tribunal avoir réceptionné, avant de réaliser son erreur, le pli comportant la convocation à l'audience précitée, adressé à C______ Sàrl. Elle a ajouté qu'elle avait avisé de la réception du courrier la précitée, laquelle "devrait normalement venir le récupérer dans nos locaux le lundi 24.04.2023".

Le 27 avril 2023, le Tribunal a annulé l'audience fixée le 5 juin 2023.

Sur quoi, le jugement a été rendu.

EN DROIT

1. 1.1 S'agissant d'une procédure de mainlevée, seule la voie du recours est ouverte (art. 319 let. b et 309 let. b ch. 3 CPC). La procédure sommaire s'applique (art. 251 let. a CPC).

1.2 Aux termes de l'art. 321 al. 1 et 2 CPC, le recours, écrit et motivé, doit, en procédure sommaire, être introduit auprès de l'instance de recours dans les dix jours à compter de la notification de la décision motivée.

Bien que le CPC ne le mentionne pas expressément, le recours doit contenir des conclusions. Cela résulte du devoir de motivation, dès lors qu'une motivation suppose nécessairement des conclusions, qui sont fondées sur la motivation, de même que de l'art. 221 al. 1 lit. b CPC, qui est aussi applicable par analogie au mémoire de recours ou d'appel (cf. ATF 137 III 617 c. 4.2.2, SJ 2012 I 373; ATF 138 III 213 c. 2.3)

1.3 En l'occurrence l'acte parvenu à la Cour respecte le délai prévu par la loi.

Bien qu'émanant d'un professionnel du droit, il n'est pas intitulé "recours" et ne comporte pas de conclusions de fond. Il se limite, en effet, à une invitation à requérir de l'instance inférieure qu'elle traite la requête soumise, ce qui, outre que le Tribunal a à l'évidence procédé audit traitement en rendant le jugement du 27 avril 2023, n'entre pas dans les compétences légales de l'autorité de seconde instance.

Dans la mesure, toutefois, où il est possible de comprendre que l'acte a pour but d'obtenir l'annulation du jugement susmentionné, cela fait l'accueil de la requête de mainlevée, cet acte sera considéré comme un recours recevable au sens de l'art. 319 CPC.

2. Les conclusions, les allégations de faits et les preuves nouvelles sont irrecevables (art. 326 al. 1 CPC).

Les pièces déposées à la Cour sont ainsi irrecevables.

3. Dans le cadre d'un recours, le pouvoir d'examen de la Cour est limité à la violation du droit et à la constatation manifestement inexacte des faits (art. 320 CPC). L'autorité de recours a un plein pouvoir d'examen en droit, mais un pouvoir limité à l'arbitraire en fait, n'examinant par ailleurs que les griefs formulés et motivés par le recourant (Hohl, Procédure civile, Tome II, 2ème éd., Berne, 2010, n° 2307).

Le recours est instruit en procédure sommaire (art. 251 let. a CPC), la preuve des faits allégués devant être apportée par titres (art. 254 CPC). Les maximes des débats et de disposition s'appliquent (art. 55 al. 1, 255 let. a a contrario et art. 58 al. 1 CPC).

4. Le recourant reproche au Tribunal d'avoir déclaré irrecevable la requête qu'il avait déposée "aux motifs qu'il a[vait] lui-même adressé un courrier de convocation à une audience à une partie qui n'était pas en cause".

4.1 La procédure de mainlevée provisoire est une procédure sur pièces (Urkundenprozess), dont le but n'est pas de constater la réalité de la créance en poursuite, mais l'existence d'un titre exécutoire. Le juge de la mainlevée provisoire examine seulement la force probante du titre produit par le créancier, sa nature formelle - et non la validité de la créance - et lui attribue force exécutoire si le débiteur ne rend pas immédiatement vraisemblables ses moyens libératoires (ATF 145 III 160 consid. 5.1).

Le commandement de payer doit être annexé à la requête (Abbet, La mainlevée de l'opposition, 2ème éd. 2022, ad art. 84 n. 55).

4.2 Lorsque la requête ne paraît pas manifestement irrecevable ou infondée, le tribunal donne à la partie adverse l'occasion de se déterminer oralement ou par écrit (art. 253 CPC).

4.3 En l'espèce, la décision attaquée, dont la motivation est certes elliptique, fait mention de l'absence d'un commandement de payer dans les pièces produites, et retient que la requête est manifestement irrecevable, sans aucune évocation d'une supposée convocation adressée à une partie autre que celle désignée par le recourant.

Le grief du recourant ne porte donc pas.

S'il résulte des pièces de forme du dossier que l'intimée n'a pas été valablement atteinte (le pli qui lui avait été correctement adressé ayant été acheminé par erreur de la poste à un tiers), rien ne permet de déduire que cette circonstance aurait conduit le premier juge à retenir l'irrecevabilité de la demande.

Il apparaît bien plutôt que le Tribunal s'est fondé, à bon droit, sur l'art. 253 CPC, pour retenir, en l'absence de production du commandement de payer et sans qu'une réponse soit nécessaire, que la requête était manifestement irrecevable.

A cet égard, le recourant perd de vue qu'il avait été invité, par ordonnance du 9 février 2023 et sous peine d'irrecevabilité, à déposer les pièces dont il entendait faire état, au premier rang desquels devait se trouver le commandement de payer dont la mainlevée d'opposition était requise. Il avait au demeurant lui-même indiqué avoir annexé ce titre à sa requête – ce qu'il n'avait toutefois pas fait – démontrant par là qu'il avait connaissance de l'importance du dépôt de cette pièce. Faute d'avoir donné suite à l'interpellation du Tribunal, il s'est exposé à l'irrecevabilité manifeste de sa requête.

Le recours sera dès lors rejeté.

5. Le recourant, qui succombe, supportera les frais de son recours (art. 106 al. 1 CPC), arrêtés à 300 fr. (art. 48, 61 OELP), compensés avec l'avance opérée, et acquise à l'Etat de Genève (art. 111 al. 1 CPC).

Il ne sera pas alloué de dépens à l'intimée, qui ne s'est pas déterminée.

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre civile :

A la forme :

Déclare recevable le recours formé le 5 juin 2023 par A______ contre le jugement JTPI/4966/2023 rendu le 27 avril 2023 par le Tribunal de première instance dans la cause C/2207/2023–12 SML.

Au fond :

Rejette ce recours.

Déboute les parties de toute autre conclusion.

Sur les frais :

Arrête les frais du recours à 300 fr., compensés avec l'avance opérée, acquise à l'Etat de Genève, et les met à la charge de A______.

Dis qu'il n'est pas alloué de dépens de recours.

Siégeant :

Madame Pauline ERARD, présidente; Madame Sylvie DROIN, Madame Nathalie LANDRY-BARTHE, juges; Madame Marie-Pierre GROSJEAN, greffière.

La présidente :

Pauline ERARD

 

La greffière :

Marie-Pierre GROSJEAN

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 113 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours constitutionnel subsidiaire.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF inférieure à 30'000 fr.