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C/8199/2023

ACJC/1230/2023 du 21.09.2023 sur JTPI/6098/2023 ( SFC ) , JUGE

En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/8199/2023 ACJC/1230/2023

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre civile

DU JEUDI 21 SEPTEMBRE 2023

 

Entre

Monsieur A______, domicilié ______, France, recourant contre un jugement rendu par la 10ème Chambre du Tribunal de première instance de ce canton le 25 mai 2023, comparant en personne,

et

B______, sise ______ [BE], en personne.

 


EN FAIT

A.           Par jugement JTPI/6098/2023 du 25 mai 2023, expédié pour notification aux parties le 31 mai 2023, le Tribunal de première instance, saisi le 21 avril 2023 d'une requête de faillite par [l'association professionnelle et sectorielle] B______, a déclaré A______ en état de faillite dès le ______ 2023 à 8h30 (ch. 1), a arrêté les frais judiciaires à 120 fr., compensés avec l'avance opérée (ch. 2), mis à la charge du précité, condamné à en rembourser B______ (ch. 3).

Ce jugement visait un commandement de payer, poursuite n° 1______, non frappé d'opposition, portant sur 350 fr., dont le titre était libellé ainsi : "Rech. 2______/A______ Négoce", notifié par l'Office cantonal des poursuites à la demande de [l'association] B______, ainsi qu'une commination de faillite dans la poursuite susmentionnée, datée du 16 mars 2023.

B.            Par acte du 7 juin 2023 à la Cour de justice, A______ a formé recours contre ce jugement. Se prévalant de sa solvabilité et des commandes en cours, il a conclu à l'annulation de celui-ci, cela fait au rejet de la requête de faillite. Il a produit une quittance de l'Office cantonal des poursuites du 7 juin 2023, dont résulte qu'il s'est acquitté de la poursuite n° 1______, en capital, intérêts et frais.

La Cour a fait droit à la conclusion en suspension du caractère exécutoire de la décision attaquée, que comportait le recours, par arrêt du 19 juin 2023.

Le 19 juin 2023, il a été requis de A______ la production de pièces justifiant de sa solvabilité (comptes de l'année courante et des deux exercices précédents, contrats en cours, etc.) et une détermination sur la liste des poursuites en cours et des actes de défaut de biens qui lui était remise. Celle-ci comporte comme seule occurrence la commination de faillite, poursuite n° 1______, émanant de [l'association] B______. Une autre poursuite, n° 3______, d’un montant de 350 fr., intentée par [l'association] B______ y figure comme payée à l’Office.

A______ a allégué que le non paiement de la cotisation réclamée par [l'association] B______ procédait d'un oubli de sa part, qu'à cette exception près il n'avait jamais présenté de retard de paiement face à des créanciers, et qu'il développait une activité de" négoce auto en export suisse" avec des clients professionnels ne générant que peu de charges. Il a versé un document établi par une fiduciaire comportant des bilans 2021 et 2022, montrant un bénéfice de l'ordre de 13'500 fr. pour chacun de ces deux exercices.

[L'association] B______ n'a pas répondu.

Par avis du 10 août 2023, les parties ont été informées de ce que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1. L'appel étant irrecevable dans les affaires relevant de la compétence du tribunal de la faillite selon la LP (art. 309 let. b ch. 7 CPC), seule la voie du recours est ouverte (art. 319 let. a CPC; art. 174 LP).

Interjeté auprès de l'autorité compétente (art. 120 al. 1 let. a LOJ), dans le délai utile de 10 jours et selon la forme requise (art. 321 al. 1 et 2 CPC; art. 174 al. 1 LP), le recours est recevable.

Les décisions rendues en matière de faillite sont soumises à la procédure sommaire (art. 251 let. a CPC). Les faits sont établis d'office (maxime inquisitoire, art. 255 let. a CPC).

2. 2.1 Dans le cadre d'un recours, les conclusions, les allégations de faits et les preuves nouvelles sont irrecevables (art. 326 al. 1 CPC). Les dispositions spéciales de la loi sont réservées (al. 2).

En vertu de l'art. 174 al. 1 2ème phrase LP, les parties peuvent faire valoir devant l'instance de recours des faits nouveaux lorsque ceux-ci se sont produits avant le jugement de première instance. Cette disposition spéciale de la loi vise les faits nouveaux improprement dits (faux nova ou pseudo-nova), à savoir ceux qui existaient déjà au moment de l'ouverture de la faillite et dont le premier juge n'a pas eu connaissance pour quelque raison que ce soit; ces faits peuvent être invoqués sans restriction et prouvés par pièces, pour autant qu'ils le soient dans le délai de recours (ATF 139 III 491 consid. 4.4; arrêt du Tribunal fédéral 5A_243/2019 du 17 mai 2019 consid. 3.1).

Aux termes de l'art. 174 al. 2 LP, le failli peut aussi invoquer des vrais nova, à savoir des faits qui sont intervenus après l'ouverture de la faillite en première instance, pour autant qu'ils servent à établir que les conditions de l'art. 174 al. 2 LP sont réalisées; selon la jurisprudence, ces vrais nova doivent également être produits avant l'expiration du délai de recours (ATF 139 III 491 consid. 4.4; 136 III 294 consid. 3). En vertu de la lettre claire de l'art. 174 al. 2 LP, aucun autre novum n'est admissible (arrêts du Tribunal fédéral 5A_1005/2020 du 19 janvier 2021 consid. 3.1.2; 5A_252/2020 du 18 juin 2020 consid. 4.1.2).

2.2 En l'espèce, les pièces produites par le recourant sont recevables dès lors qu'elles tendent à démontrer que les conditions fixées par l'art. 174 al. 2 LP sont réunies.

3. Le recourant requiert l'annulation de la faillite prononcée sur la base de l'art. 174 al. 2 LP, exposant avoir réglé la poursuite, en capital, frais et intérêts et avoir démontré sa solvabilité.

3.1 En vertu de l'art. 174 al. 2 LP, l'autorité de recours peut annuler l'ouverture de la faillite lorsque le débiteur rend vraisemblable sa solvabilité et établit par titre que la dette, intérêts et frais compris, a été payée (ch. 1) ou que la totalité de la somme à rembourser a été déposée auprès de l'autorité judiciaire supérieure à l'intention du créancier (ch. 2), ou encore que celui-ci a retiré sa réquisition de faillite (ch. 3). Ces deux conditions, soit le paiement de la dette à l'origine de la faillite, le dépôt de la totalité de la somme à rembourser ou le retrait de la requête de faillite et la vraisemblance de la solvabilité, sont cumulatives (arrêt du Tribunal fédéral 5A_1040/2021 du 24 janvier 2022 consid. 3.1.1 et les références citées).

3.2 La solvabilité, au sens de l'art. 174 al. 2 LP, consiste en la capacité du débiteur de disposer de liquidités suffisantes pour payer ses dettes échues et peut aussi être présente si cette capacité fait temporairement défaut, pour autant que des indices d'amélioration de la situation à court terme existent. Si le débiteur doit seulement rendre vraisemblable - et non prouver - sa solvabilité, il ne peut se contenter de simples allégations, mais doit fournir des indices concrets tels que récépissés de paiements, justificatifs des moyens financiers (avoirs en banque, crédit bancaire) à sa disposition, liste des débiteurs, extrait du registre des poursuites, comptes annuels récents, bilan intermédiaire, etc. En plus de ces documents, le poursuivi doit établir qu'aucune requête de faillite dans une poursuite ordinaire ou dans une poursuite pour effets de change n'est pendante contre lui et qu'aucune poursuite exécutoire n'est en cours contre lui. L'extrait du registre des poursuites constitue un document indispensable pour évaluer la solvabilité du failli. La condition selon laquelle le débiteur doit rendre vraisemblable sa solvabilité ne doit pas être soumise à des exigences trop sévères; il suffit que la solvabilité apparaisse plus probable que l'insolvabilité. L'appréciation de la solvabilité repose sur une impression générale fondée sur les habitudes de paiement du failli (arrêts du Tribunal fédéral 5A_1040/2021 du 24 janvier 2022 consid. 3.1.2; 5A_615/2020 du 30 septembre 2020 consid. 3.1; 5A_600/2020 du 29 septembre 2020 consid. 3.1; 5A_251/2018 du 31 mai 2018 consid. 3.1 et les références).

3.3 En l'espèce, il est établi que la poursuite entamée par l'intimée a été réglée, en capital, intérêts et frais. L'absence d'autres occurrences dans la liste des poursuites tend à accréditer l'affirmation du recourant selon laquelle il n'est pas coutumier des dettes impayées. Si le bénéfice tiré de l'activité commerciale du recourant, s'agissant des deux derniers exercices, apparaît modique, la créance déduite en poursuite par l'intimée l'est également. Les explications du recourant relatives à un unique oubli de paiement sont plausibles. Rien ne permet donc de retenir qu'il serait vraisemblable que le recourant ne soit pas solvable.

Il s'ensuit que les conditions prévues par l'art. 174 al. 2 LP étant réalisées, le chiffre 1 du dispositif du jugement de faillite, sera annulé. La requête de faillite de l'intimée sera rejetée.

4. Le paiement de la dette étant intervenu postérieurement au prononcé de la faillite, la décision du premier juge de mettre les frais judiciaires de première instance, arrêtés à 120 fr., à la charge du recourant sera confirmée.

Pour le même motif, les frais du recours, arrêtés à 220 fr. (art. 52 let. b et 61 OELP), seront mis à la charge du recourant et compensés avec l'avance opérée acquise à l'Etat de Genève (art. 111 al. 1 CPC).

Il ne sera pas alloué de dépens au recourant, qui n’en a pas requis.

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre civile :

A la forme :

Déclare recevable le recours interjeté le 7 juin 2023 par A______ contre le jugement JTPI/6098/2023 rendu le 25 mai 2023 par le Tribunal de première instance dans la cause C/8199/2023-10 SFC.

Au fond :

Annule le chiffre 1 du dispositif de ce jugement.

Cela fait :

Rejette la requête de faillite formée le 21 avril 2023 par [l'association] B______.

Confirme ce jugement pour le surplus.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Sur les frais :

Arrête les frais du recours à 220 fr., compensés avec l'avance opérée, acquise à l’Etat de Genève et les met à la charge de A______.

Dit qu’il n’est pas alloué de dépens de recours.

Siégeant :

Madame Pauline ERARD, présidente; Madame Sylvie DROIN, Madame
Nathalie LANDRY-BARTHE, juges; Madame Marie-Pierre GROSJEAN, greffière.

 

La présidente :

Pauline ERARD

 

La greffière :

Marie-Pierre GROSJEAN

 


 

 

Indication des voies de recours :

 

Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière civile; la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 72 à 77 et 90 ss de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110). Il connaît également des recours constitutionnels subsidiaires; la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les
art. 113 à 119 et 90 ss LTF. Dans les deux cas, le recours motivé doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué. L'art. 119 al. 1 LTF prévoit que si une partie forme un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.