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Décisions | Chambre pénale de recours

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P/19746/2024

ACPR/942/2025 du 14.11.2025 sur OMP/19322/2025 ( MP ) , REJETE

Descripteurs : RESTITUTION DU DÉLAI;OPPOSITION TARDIVE
Normes : CPP.94

république et

canton de Genève

POUVOIR JUDICIAIRE

P/19746/2024 ACPR/942/2025

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale de recours

Arrêt du vendredi 14 novembre 2025

 

Entre

A______, domicilié ______, Roumanie, agissant en personne,

recourant,

contre l'ordonnance de refus de restitution de délai rendue le 11 août 2025 par le Ministère public,

 

et

 

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, 1213 Petit-Lancy, case postale 3565, 1211 Genève 3,

intimé.


EN FAIT :

A. Par courrier reçu le 4 septembre 2025 au greffe du Ministère public, qui l'a transmis à la chambre de céans, A______ recourt contre l'ordonnance du
11 août 2025, expédiée par pli simple le 13 août suivant, par laquelle le Ministère public a refusé de restituer le délai d'opposition à son ordonnance du 9 janvier 2025.

Le recourant conclut à l'annulation de l'ordonnance querellée.

B. Les faits pertinents suivants ressortent du dossier :

a. Deux dépassements de vitesse ont été commis le 7 juillet 2024, à Genève, par un conducteur circulant au volant d'un véhicule immatriculé en Roumanie.

Entendu le 3 novembre 2024 par le biais d'une demande d'entraide auprès des autorités roumaines compétentes, A______ a été informé des faits qui lui étaient reprochés, qu'il a contestés.

b. Par ordonnance du 9 janvier 2025, notifiée le 23 janvier 2025, avec une traduction en roumain de son dispositif et des voies de recours, le Ministère public a condamné A______ pour violations graves des règles de la circulation routière (art. 90 al. 2 LCR) à une peine pécuniaire de 120 jours-amende à CHF 30.- l'unité, avec un sursis de trois ans, ainsi qu'à une amende de CHF 720.-.

L'intéressé y a formé opposition par pli recommandé daté du 11 février 2025, arrivé au Ministère public le 24 février suivant.

c. Par détermination adressée au greffe du Tribunal pénal, A______ a contesté la tardiveté de son opposition à l'ordonnance pénale du 9 janvier 2025, au motif de l'absence d'une traduction complète de ladite ordonnance. Il convenait, pour cette raison, d'en constater la nullité. La traduction n'étant pas "conforme", il avait dû trouver un traducteur pour l'assister. Il avait, pour cette raison également, considéré l'ordonnance comme une plaisanterie venant d'un ami ou d'une connaissance.

Par ordonnance du 6 juin 2025, le Tribunal de police a constaté que l'opposition formée par A______ était tardive.

C. Dans l'ordonnance querellée, le Ministère public a refusé de restituer le délai d'opposition, considérant que A______ n'invoquait pas d'empêchement non fautif. Le dispositif de l'ordonnance pénale du 9 janvier 2025 ainsi que les voies de droit pour s'y opposer avaient été dument traduits en langue roumaine par un traducteur-interprète, avant d'être notifiés à l'intéressé, lequel disposait dès lors de tous les éléments permettant d'en comprendre la portée et les moyens de s'y opposer. Les explications fournies n'étaient ni propres ni suffisantes à établir qu'il aurait été dans l'incapacité, dans le délai, de former opposition ou de charger quelqu'un de le faire pour lui.

D. a. Dans son recours, A______ fait valoir qu'il n'avait toujours pas reçu de traduction complète de l'ordonnance du 9 janvier 2025, ce qui le privait du droit à un procès équitable. Persistant à invoquer une nullité absolue de ladite ordonnance, il considère que la tardiveté de son opposition ne pouvait être prononcée tant qu'il n'avait pas reçu une traduction conforme.

b. À réception du recours, la cause a été gardée à juger sans échange d'écritures, ni débats.

EN DROIT :

1.             Le recours est recevable pour avoir été déposé selon la forme et dans le délai prescrits (art. 385 al. 1 et 396 al. 1 CPP), concerner une ordonnance sujette à recours auprès de la Chambre de céans (art. 393 al. 1 let. a CPP) et émaner du prévenu qui, partie à la procédure (art. 104 al. 1 let. a CPP), a qualité pour agir, ayant un intérêt juridiquement protégé à la modification ou à l'annulation de la décision querellée (art. 382 al. 1 CPP).

2.             La Chambre pénale de recours peut décider d'emblée de traiter sans échange d'écritures ni débats les recours manifestement irrecevables ou mal fondés (art. 390 al. 2 et
5 a contrario CPP). Tel est le cas en l'occurrence, au vu des considérations qui suivent.

3.             Le recourant conteste le refus de restitution de délai, invoquant l'absence de traduction complète de l'ordonnance du 9 janvier 2025.

3.1. Selon l'art. 94 CPP, une partie peut demander la restitution d'un délai imparti pour accomplir un acte de procédure si elle a été empêchée de l'observer et si elle est de ce fait exposée à un préjudice important et irréparable. Elle doit toutefois rendre vraisemblable que le défaut n'est imputable à aucune faute de sa part (al. 1).

3.2. La demande de restitution du délai doit être présentée dans les 30 jours qui suivent la fin de l'empêchement allégué (art. 94 al. 2 CPP).

3.3. La restitution de délai ne peut intervenir que lorsqu'un événement, par exemple une maladie ou un accident, met la partie objectivement ou subjectivement dans l'impossibilité d'agir par elle-même ou de charger une tierce personne d'agir en son nom dans le délai (arrêts du Tribunal fédéral 6B_401/2019 du 1er juillet 2019 consid. 2.3; 6B_365/2016 du 29 juillet 2016 consid. 2.1). Elle ne doit être accordée qu'en cas d'absence claire de faute. Il est ainsi exigé qu'il ait été absolument impossible à la personne concernée de respecter le délai ou de charger un tiers de faire le nécessaire (arrêt du Tribunal fédéral 6B_125/2011 du 7 juillet 2011 consid. 1).

Par empêchement non fautif, il faut comprendre toute circonstance qui aurait empêché une partie consciencieuse d’agir dans le délai fixé (ACPR/196/2014 du 8 avril 2014). Il s'agit non seulement de l’impossibilité objective, comme la force majeure, mais également l’impossibilité subjective due à des circonstances personnelles ou à l’erreur due au comportement d'une autorité (Y. JEANNERET/ A. KUHN/ C. PERRIER DEPEURSINGE (éds), Commentaire romand : Code de procédure pénale suisse, 2ème éd., Bâle 2019, n. 10 ad art. 94 CPP; ATF 96 II 262 consid. 1a).

3.4. Quand la personne condamnée par une ordonnance pénale ne maîtrise pas (suffisamment) la langue de la procédure (art. 68 al. 1 CPP), l'autorité doit lui traduire (art. 68 al. 2 CPP) aussi bien le dispositif de cette décision que l'indication des voies de droit pour la contester (arrêt du Tribunal fédéral 1B_564/2022 du 14 février 2023 consid. 3.2 in fine).

En règle générale, singulièrement lorsqu'il n'est pas défendu par un avocat, le prévenu a le droit que lui soient traduits, à tout le moins, le dispositif du jugement ou de l'ordonnance pénale et l'énoncé des voies de droit (Y. JEANNERET, L'ordonnance pénale et la procédure simplifiée dans le CPPin Procédure pénale suisse, Approche théorique et mise en œuvre cantonale, 2010, n. 7-9 pp. 77-78 et les références citées).

3.5. En l'espèce, le recourant, qui ne conteste pas avoir formé opposition tardivement, allègue avoir été empêché d'agir dans le délai au motif que la totalité de l'ordonnance n'avait pas été traduite.

Or, la traduction des seuls dispositif et voies de droit est conforme à la loi et à la jurisprudence.

Le recourant n'allègue par ailleurs pas qu'il n'aurait pas compris ces éléments, traduits en langue roumaine, lesquels lui sont par conséquent parfaitement opposables.

Au demeurant, le recourant avait connaissance des faits pour lesquels il était poursuivi puisqu'il avait été entendu, le 3 novembre 2024, par les autorités roumaines à la demande du Ministère public genevois. On peine à comprendre, pour le même motif, ce qui a pu le mener à penser, à réception de l'ordonnance pénale, qu'il s'agissait d'une plaisanterie.

Dans ces conditions, l'existence d'un empêchement non-fautif ne peut être retenue, de sorte que la restitution du délai pour former opposition a, à juste titre, été refusée par le Ministère public.

4.             Justifiée, l'ordonnance querellée sera donc confirmée.

5.             Le recourant, qui succombe, supportera les frais envers l'État, fixés en totalité à CHF 800.- (art. 428 al. 1 CPP et 13 al. 1 du Règlement fixant le tarif des frais en matière pénale, RTFMP ; E 4 10.03).

* * * * *


 

PAR CES MOTIFS,
LA COUR :


Rejette le recours.

Condamne A______ aux frais de la procédure de recours, arrêtés à CHF 800.-.

Notifie le présent arrêt, en copie, au recourant et au Ministère public.

Siégeant :

Madame Daniela CHIABUDINI, présidente; Madame Catherine GAVIN, juge, et
Monsieur Raphaël MARTIN, juge suppléant; Madame Séverine CONSTANS, greffière.

 

La greffière :

Séverine CONSTANS

 

La présidente :

Daniela CHIABUDINI

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Voie de recours :

 

Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière pénale au sens de l'art. 78 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110); la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 78 à 81 et 90 ss LTF. Le recours doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14. Les mémoires doivent être remis au plus tard le dernier jour du délai, soit au Tribunal fédéral soit, à l'attention de ce dernier, à La Poste Suisse ou à une représentation diplomatique ou consulaire suisse (art. 48 al. 1 LTF).

P/19746/2024

ÉTAT DE FRAIS

 

 

 

 


COUR DE JUSTICE

 

 

 

Selon le règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais en matière pénale (E 4 10.03).

 

Débours (art. 2)

 

 

- frais postaux

CHF

10.00

Émoluments généraux (art. 4)

 

 

- délivrance de copies (let. a)

CHF

- délivrance de copies (let. b)

CHF

- état de frais (let. h)

CHF

75.00

Émoluments de la Chambre pénale de recours (art. 13)

 

 

- décision sur recours (let. c)

CHF

715.00

Total

CHF

800.00