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Décisions | Chambre pénale de recours

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P/11692/2025

ACPR/822/2025 du 09.10.2025 sur ONMMP/3833/2025 ( MP ) , IRRECEVABLE

Descripteurs : ORDONNANCE DE NON-ENTRÉE EN MATIÈRE;AUTEUR(DROIT PÉNAL);BANQUE;COFFRE-FORT;VOL(DROIT PÉNAL)
Normes : CPP.310; CP.139

république et

canton de Genève

POUVOIR JUDICIAIRE

P/11692/2025 ACPR/822/2025

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale de recours

Arrêt du jeudi 9 octobre 2025

 

Entre

A______, domicilié ______, agissant en personne,

recourant,

 

contre l’ordonnance de non-entrée en matière rendue le 15 août 2025 par le Ministère public,

et

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B,
1213 Petit-Lancy, case postale 3565, 1211 Genève 3,

intimé.


EN FAIT :

A. a. Par acte expédié le 2 septembre 2025, A______ recourt contre l'ordonnance du 15 août 2025, notifiée le 23 suivant, par laquelle le Ministère public a décidé de ne pas entrer en matière sur sa plainte.

Le recourant conclut à l’annulation de ladite ordonnance et au renvoi de la cause au Ministère public pour ouverture d’une instruction.

b. Le recourant a versé les sûretés en CHF 1'000.- qui lui étaient réclamées par la Direction de la procédure.

B. Les faits pertinents suivants ressortent du dossier :

a. Le 2 mai 2025, A______ a déposé plainte contre inconnu pour vol auprès du poste de police B______. En substance, il était en possession, avec sa mère, C______, de deux clés du coffre-fort n° 1______ se trouvant dans l’établissement bancaire de D______ (ci-après : D______), rue 2______ no. ______, à Genève. Le 30 avril 2025, il s’était rendu avec sa mère audit coffre-fort. Celui-ci était alors à moitié vide. N’y demeuraient qu’une cédule et quelques bijoux. Les boîtes à bijoux s’y trouvant étaient rangées de manière complètement différente par rapport à la dernière fois où ils étaient venus, en novembre 2024. Après examen, ils avaient constaté que les objets et valeurs suivantes étaient manquantes :

-       dix enveloppes contenant USD 10'000.- soit au total USD 100'000.-;

-       une cédule hypothécaire;

-       un coffre contenant divers bijoux et diamants, étant précisé que la liste desdits bijoux suivrait.

b. Par complément de plainte du 6 mai 2025, il a communiqué à la police une liste des objets dérobés, soit :

1. Bague solitaire en or avec un diamant jaune (de forme émeraude)

2. Boucles d’oreilles en or et en diamants 

3. Parure en or 750/18k composée d’un collier (~40 gr) et d’un bracelet (~15 gr)

4. Bague en or blanc comportant trois perles et diamants de petite taille

5. Bague ancienne en or (56 zolotnik) avec une pierre centrale en turquoise entourée de diamants

6. Broche en forme de rose (deux ors)

7. Parure en or 18k composée d’une bague avec un large quartz fumé (30 mm x 15 mm) et de boucles d’oreilles également avec du quartz fumé

8. Pendentif avec un important quartz fumé (40 mm x 30 mm) sur une chaîne en or 18k en maille vénitienne (longueur 60 cm).

c. Par ordre de dépôt du 21 mai 2025, le Ministère public a ordonné à D______ de transmettre le listing des activités du coffre-fort entre le 1er novembre 2024 et le 30 avril 2025.

d. Par courrier du 26 juin 2025, D______ a répondu que le coffre-fort n° 1______ était rattaché à la relation bancaire de C______. La banque a précisé que dans l’hypothèse où les clés dudit coffre-fort n’étaient pas déposées dans la banque, cette dernière n’avait en principe pas d’obligation de tenir un journal de passage aux compartiments du coffre-fort. Aucune information quant aux visiteurs n’avait ainsi été enregistrée. Nonobstant cela, elle avait tout de même pu déterminer que le coffre-fort n° 1______ avait été visité le 30 décembre 2024 et le 30 avril 2025, sans garantie que la liste des passages fût exhaustive.

e. Par un second ordre de dépôt du 30 juin 2025, le Ministère public a ordonné à D______ de lui communiquer toutes informations relatives à l’accès au coffre-fort n° 1______ le 30 décembre 2024, en particulier l’identité de la personne/des personnes y ayant accédé.

f. Par courrier du 4 juillet 2025, D______ a répondu qu’en l’absence d’un journal de passage aux compartiments du coffre-fort ou de note de contact, elle n’était pas en mesure de déterminer qui avait procédé à la visite du compartiment.

C. Dans sa décision querellée, le Ministère public a constaté que malgré une enquête, il n’avait pas réussi à obtenir d’informations permettant d’identifier formellement un/des auteur(s). Il ne disposait ainsi d'aucun élément susceptible d'orienter des soupçons sur une quelconque personne. Partant, la reddition d’une ordonnance de non-entrée en matière s’imposait (art. 310 al. 1 let. a CPP).

La reprise de la procédure serait toutefois ordonnée s’il avait connaissance de nouveaux moyens de preuve et de faits nouveaux révélant une responsabilité pénale ou permettant d’identifier un ou des auteurs.

Il a ajouté à toutes fins utiles que la qualité de lésé du plaignant était « questionnable », compte tenu du courrier de D______ du 26 juin 2025 indiquant que le coffre-fort était rattaché à la relation bancaire de C______. Cette question pouvait cependant rester ouverte compte tenu de l’ordonnance de non-entrée en matière.

D. a. À l’appui de son recours, A______ considère que les faits dénoncés étaient graves en tant qu’ils portaient sur le vol d’une somme supérieure à CHF 10'000.-, de surcroît dans un établissement bancaire, ce qui nécessitait l’ouverture d’une instruction. Les victimes directes étaient sa mère et lui-même « en tant que mandataire dûment autorisé par procuration ». Plusieurs actes d’enquête étaient possibles, dont l’analyse des enregistrements vidéo de la banque et des zones concernées, l’audition de témoins potentiels (employés, tiers) et la vérification des conditions d’accès et de sécurité au coffre-fort. Une défaillance grave des systèmes de sécurité de la banque et/ou une fraude impliquant des tiers étaient possibles.

b. À réception des sûretés, la cause a été gardée à juger sans échange d'écritures, ni débats.

EN DROIT :

1. La Chambre pénale de recours peut décider d'emblée de traiter sans échange d'écritures ni débats les recours manifestement irrecevables ou mal fondés (art. 390 al. 2 et 5 a contrario CPP). Tel est le cas en l'occurrence, au vu des considérations qui suivent.

2. 2.1. Le recours a été déposé selon la forme et dans le délai prescrits (art. 385 al. 1 et 396 al. 1 CPP), concerne une ordonnance sujette à recours auprès de la Chambre de céans (art. 393 al. 1 let. a CPP) et émane du plaignant, partie à la procédure (art. 104 al. 1 let. b CPP).

2.2. La qualité pour recourir de la partie plaignante, du lésé ou du dénonciateur contre une ordonnance de classement ou de non-entrée en matière est subordonnée à la condition qu'ils soient directement touchés par l'infraction et puissent faire valoir un intérêt juridiquement protégé à l'annulation de la décision. En règle générale seul peut se prévaloir d'une atteinte directe le titulaire du bien juridique protégé par la disposition pénale qui a été enfreinte (ATF 129 IV 95 consid. 3.1 et les arrêts cités), ce qui exclut les personnes subissant un préjudice indirect ou par ricochet, tel le proche ou le créancier (ATF 92 IV 1 consid. 1 p. 2 ; arrêt du Tribunal fédéral 1B_9/2015 du 23 juin 2015 consid. 2.3.1 et les références doctrinales citées ; G. PIQUEREZ, Traité de procédure pénale suisse, 2006, n. 1027 p. 656).

2.3. En l’espèce, il ressort du dossier que la titulaire de la relation bancaire à laquelle est rattaché le coffre-fort n° 1______ est C______, soit la mère du plaignant. Seule cette dernière revêt ainsi la qualité de lésée (art. 115 al. 1 CPP). Le fait pour le recourant de disposer éventuellement d’une procuration sur ladite relation ne saurait lui conférer cette qualité également.

Il s’ensuit que le recourant ne dispose d'aucun intérêt juridique protégé pour recourir contre l’ordonnance de non-entrée en matière. Son recours est, partant, irrecevable.

Ne le serait-il pas qu’il devrait de toute manière être rejeté.

3. 3.1. Selon l'art. 310 al. 1 CPP, le ministère public rend immédiatement une ordonnance de non-entrée en matière s'il ressort de la dénonciation ou du rapport de police que les éléments constitutifs de l'infraction ou les conditions à l'ouverture de l'action pénale ne sont manifestement pas réunis (let. a) ou qu'il existe des empêchements de procéder (let. b).

Conformément à cette disposition, la non-entrée en matière est justifiée lorsque la situation est claire sur le plan factuel et juridique. Tel est le cas lorsque les faits visés ne sont manifestement pas punissables, faute, de manière certaine, de réaliser les éléments constitutifs d'une infraction, ou encore lorsque les conditions à l'ouverture de l'action pénale font clairement défaut. Au stade de la non-entrée en matière, on ne peut admettre que les éléments constitutifs d'une infraction ne sont manifestement pas réalisés que lorsqu'il n'existe pas de soupçon suffisant conduisant à considérer un comportement punissable ou lorsqu'un éventuel soupçon initial s'est entièrement dissipé. En revanche, si le rapport de police, la dénonciation ou les propres constatations du ministère public amènent à retenir l'existence d'un soupçon suffisant, il incombe en principe à ce dernier d'ouvrir une instruction (art. 309 al. 1 let. a CPP). Cela implique que les indices de la commission d'une infraction soient importants et de nature concrète, ce qui n'est pas le cas de rumeurs ou de suppositions. Le soupçon initial doit reposer sur une base factuelle plausible, laissant apparaître la possibilité concrète qu'une infraction ait été commise (ATF 141 IV 87 consid. 1.3.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_196/2020 du 14 octobre 2020 consid. 3.1). Dans le doute, lorsque les conditions d'une non-entrée en matière ne sont pas réalisées avec une certitude absolue, l'instruction doit être ouverte (arrêt 6B_196/2020 précité ; ATF 143 IV 241 consid. 2.2.1 ; ATF 138 IV 86 consid. 4.1 ; ATF 137 IV 219 consid. 7).

Une décision de non-entrée en matière peut se justifier même si les conditions du crime/délit sont réalisées, pour autant qu'aucun acte d'enquête raisonnable ne permette d'en découvrir l'auteur (arrêt du Tribunal fédéral 1B_67/2012 du 29 mai 2012 consid. 3.2). Il sied alors de mettre en balance les intérêts en jeu (ibidem), le principe de proportionnalité s'appliquant à toutes les activités étatiques (art. 5 al. 2 Cst. féd.), y compris aux investigations pénales (ACPR/555/2025 du 17 juillet 2025 consid. 3.3; ACPR/888/2021 du 16 décembre 2021 consid. 3.2 in fine ; Y. JEANNERET / A. KUHN / C. PERRIER DEPEURSINGE (éds), Commentaire romand : Code de procédure pénale suisse, 2ème éd., Bâle 2019, n. 10d ad art. 310).

3.2. Se rend coupable de vol (art. 139 CP) quiconque, pour se procurer ou procurer à un tiers un enrichissement illégitime, soustrait une chose mobilière appartenant à autrui dans le but de se l’approprier.

3.3. En l’occurrence, il ressort des investigations préliminaires du Ministère public que la banque ne tient pas de journal des passages aux coffres-forts lorsque les clés d’un compartiment ne sont pas déposées auprès d’elle, ce qui est le cas ici. Partant, il n’est pas possible de savoir qui s’est rendu au coffre-fort n° 1______ entre novembre 2024 et 30 avril 2025, la banque précisant seulement que ledit coffre avait été visité le 30 décembre 2024 et le 30 avril 2025.

Le fait que l'auteur ou les auteurs de l’infraction dénoncée ne puisse(nt) en l'espèce pas être identifié(s) constitue ainsi un motif de prononcer une ordonnance de non-entrée en matière.

L’ordonnance est également justifiée en tant qu'aucun acte d'enquête raisonnable supplémentaire ne pourrait permettre d'en découvrir l'auteur. La production du listing des activités du coffre-fort entre le 1er novembre 2024 et le 30 avril 2025 a déjà été formellement ordonnée et un nouvel ordre de dépôt de toutes autres images de vidéosurveillance de la banque serait manifestement voué à l’échec compte tenu du temps écoulé, si tant est qu'il puisse être considéré comme proportionné. On perçoit par ailleurs mal ce que l'audition des employés de la banque pourrait apporter, la soustraction litigieuse ayant été effectuée à l’intérieur d’un compartiment d’un coffre-fort dont seuls le recourant et sa mère possèdent la clé.

Enfin, une éventuelle responsabilité contractuelle de la banque n'a pas à être investiguée ici, d'éventuels manquements en termes de sécurité étant de nature civile (cf. ACPR/657/2025 du 15 août 2025).

4. Le recourant, qui succombe, supportera les frais envers l'État, qui seront arrêtés à CHF 1'000.- (art. 428 al. 1 CPP et 13 al. 1 du Règlement fixant le tarif des frais en matière pénale, RTFMP ; E 4 10.03).

* * * * *


 


PAR CES MOTIFS,
LA COUR :


Déclare le recours irrecevable.

Condamne A______ aux frais de la procédure de recours, arrêtés à CHF 1'000.-.

Dit que ce montant sera prélevé sur les sûretés versées.

Notifie le présent arrêt, en copie, au recourant et au Ministère public.

Siégeant :

Madame Corinne CHAPPUIS BUGNON, présidente ; Madame Valérie LAUBER et Monsieur Vincent DELALOYE, juges ; Madame Séverine CONSTANS, greffière.

 

La greffière :

Séverine CONSTANS

 

La présidente :

Corinne CHAPPUIS BUGNON

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Voie de recours :

 

Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière pénale au sens de l'art. 78 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF;
RS 173.110); la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 78 à 81 et 90 ss LTF. Le recours doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14. Les mémoires doivent être remis au plus tard le dernier jour du délai, soit au Tribunal fédéral soit, à l'attention de ce dernier, à La Poste Suisse ou à une représentation diplomatique ou consulaire suisse
(art. 48 al. 1 LTF).


 

P/11692/2025

ÉTAT DE FRAIS

 

 

 

 


COUR DE JUSTICE

 

 

 

Selon le règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais en matière pénale (E 4 10.03).

 

Débours (art. 2)

 

 

- frais postaux

CHF

10.00

Émoluments généraux (art. 4)

 

 

- délivrance de copies (let. a)

CHF

- délivrance de copies (let. b)

CHF

- état de frais (let. h)

CHF

75.00

Émoluments de la Chambre pénale de recours (art. 13)

 

 

- décision sur recours (let. c)

CHF

915.00

Total

CHF

1'000.00