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Décisions | Chambre pénale de recours

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P/11126/2014

ACPR/110/2025 du 05.02.2025 sur OTDP/2670/2024 ( TDP ) , REJETE

Descripteurs : OPPOSITION TARDIVE;FICTION DE LA NOTIFICATION
Normes : CPP.354.al1; CPP.85.al4.letA

république et

canton de Genève

POUVOIR JUDICIAIRE

P/11126/2014 ACPR/110/2025

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale de recours

Arrêt du mercredi 5 février 2025

 

Entre

A______, poste restante, ______, agissant en personne,

recourant,

 

contre l'ordonnance rendue le 21 novembre 2024 par le Tribunal de police,

 

et

LE TRIBUNAL DE POLICE, rue des Chaudronniers 9, 1204 Genève - case postale 3715, 1211 Genève 3,

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B,
1213 Petit-Lancy - case postale 3565, 1211 Genève 3,

intimés.


EN FAIT :

A. Par acte expédié le 30 novembre 2024, A______ recourt contre l'ordonnance du 21 novembre 2024, notifiée le 28 suivant, par laquelle le Tribunal de police a constaté l'irrecevabilité de son opposition à l'ordonnance pénale rendue le 28 août 2014 par le Ministère public, pour cause de tardiveté, et dit que cette ordonnance était dès lors assimilée à un jugement entré en force.

Le recourant conclut à l'annulation de ladite ordonnance.

B. Les faits pertinents suivants ressortent du dossier :

a.a. Entendu par la police le 14 juillet 2014, par suite d'une plainte déposée contre lui pour lésions corporelles simples, A______ a indiqué résider à la rue 1______ no. 2______, [code postal] Genève. Le même jour, il a par ailleurs signé le formulaire de situation personnelle et financière mentionnant cette adresse.

a.b. Le 28 août 2014, le Ministère public a rendu une ordonnance pénale à l'encontre de A______, le reconnaissant coupable de lésions corporelles simples.

a.c. Le pli recommandé contenant l'ordonnance pénale a été envoyé par le Ministère public à A______ à l'adresse rue 1______ no. 2______, [code postal] Genève, le 3 septembre 2014 et réexpédié avec la mention "non réclamé", à l'expéditeur qui l'a reçu, en retour, le 16 septembre 2014.

b.a. Dans un courriel adressé au Ministère public le 30 septembre 2024, A______ a exposé n'avoir appris que le 26 septembre 2024 l'existence de cette ordonnance.

Il avait résidé à la rue 1______ du 31 octobre 2014 [recte : 2013] au 1er septembre 2014. À compter de cette date, et jusqu'au 27 octobre 2014, il avait habité à la rue 3______, [code postal] Genève. Il n'avait jamais reçu l'ordonnance du 28 août 2014, qu'il souhaitait contester, alors qu'il avait annoncé ses deux adresses à l'Office cantonal de la population.

b.b. Par courrier recommandé expédié au Ministère public le 10 octobre 2024, A______ a déclaré former opposition à l'ordonnance pénale du 28 août 2014.

c. Par ordonnance sur opposition tardive du 16 octobre 2024, le Ministère public a transmis la cause au Tribunal de police, tout en concluant à l'irrecevabilité de l'opposition.

d. Invité à se déterminer sur l'apparente irrecevabilité de son opposition, A______ a expliqué avoir eu connaissance de l'ordonnance pénale du 28 août 2014 au cours d'une audience appointée devant le Tribunal de police le 26 septembre 2024, dans le cadre d'une autre procédure.

Il ignorait à quelle adresse l'ordonnance pénale lui avait été notifiée, mais relevait ne plus résider en Suisse depuis le 1er février 2015. N'ayant plus d'adresse stable depuis à tout le moins 2017, selon les différentes attestations produites, c'était sans faute de sa part qu'il n'avait pas pu la recevoir.

C. Dans sa décision querellée, le Tribunal de police a constaté que l'ordonnance pénale du 28 août 2014 avait été valablement notifiée le 15 septembre 2014, par courrier recommandé à l'adresse officielle de A______, qui ne l'avait pas retiré ni fait retirer. Expédiée le 10 octobre 2024, l'opposition formée était ainsi tardive, le délai pour ce faire étant arrivée à échéance le 25 septembre 2014.

D. a. Dans son recours, A______ renvoie, en substance, aux développements figurant dans ses précédentes déterminations (supra, let. B.d).

b. Ensuite de quoi, la cause a été gardée à juger sans échange d'écritures, ni débats.

EN DROIT :

1.             Le recours est recevable pour avoir été déposé selon la forme et dans le délai prescrits (art. 385 al. 1 et 396 al. 1 CPP), concerner une ordonnance sujette à recours auprès de la Chambre de céans (art. 393 al. 1 let. b CPP) et émaner du prévenu qui, partie à la procédure (art. 104 al. 1 let. a CPP), a qualité pour agir, ayant un intérêt juridiquement protégé à la modification ou à l'annulation de la décision querellée (art. 382 al. 1 CPP).

2.             La Chambre pénale de recours peut décider d'emblée de traiter sans échange d'écritures ni débats les recours manifestement mal fondés (art. 390 al. 2 et 5 a contrario CPP). Tel est le cas en l'occurrence, au vu des considérations qui suivent.

3.             Le recourant reproche au Tribunal de police d'avoir retenu à tort que son opposition n'était pas valable.

3.1. À teneur de l'art. 354 CPP, le prévenu peut former opposition contre l'ordonnance pénale devant le Ministère public, par écrit et dans les 10 jours (al. 1 let. a). Si aucune opposition n'est valablement formée, l'ordonnance pénale est assimilée à un jugement entré en force (al. 3).

En application de l'art. 356 al. 2 CPP, le tribunal de première instance statue sur la validité de l'ordonnance pénale et de l'opposition. Si l'opposition a été formée tardivement, le tribunal la déclare irrecevable.

3.2.1. Selon l'art. 85 CPP, les autorités pénales notifient leurs prononcés par lettre signature ou par tout autre mode de communication impliquant un accusé de réception (al. 2); le prononcé est réputé notifié lorsque, expédié par lettre signature, il n'a pas été retiré dans les sept jours à compter de la tentative infructueuse de remise du pli, si la personne concernée devait s'attendre à une telle remise (al. 4 let. a).

3.2.2. Une personne ne doit s'attendre à la remise d'un prononcé que lorsqu'il y a une procédure en cours, la concernant, qui impose aux parties de se comporter conformément aux règles de la bonne foi, à savoir de faire en sorte, entre autres, que les décisions relatives à la procédure puissent leur être notifiées. Le devoir procédural d'avoir à s'attendre avec une certaine vraisemblance à recevoir la notification d'un acte officiel naît avec l'ouverture d'un procès et vaut pendant toute la durée de la procédure (ATF 134 V 49 consid. 4; 130 III 396 consid. 1.2.3; arrêt du Tribunal fédéral 6B_314/2012 du 18 février 2013 consid. 1.3.1). L'obligation pour la personne de prendre des dispositions pour être atteinte naît lorsqu'elle est clairement informée par la police qu'elle fait l'objet d'une poursuite pénale (ibidem). Ainsi, un prévenu informé par la police d'une procédure préliminaire le concernant, de sa qualité de prévenu et des infractions reprochées, doit se rendre compte qu'il est partie à une procédure pénale et donc s'attendre à recevoir, dans ce cadre-là, des communications de la part des autorités, y compris un prononcé (arrêt du Tribunal fédéral 6B_448/2024 du 19 septembre 2024 consid. 3.2.2). Il est donc tenu de relever son courrier ou, s'il s'absente de son domicile, de prendre des dispositions pour que celui-ci lui parvienne néanmoins. À défaut, il est réputé avoir eu, à l'échéance du délai de garde, connaissance du contenu des plis recommandés que le juge lui adresse. Une telle obligation signifie que le destinataire doit, le cas échéant, désigner un représentant, faire suivre son courrier, informer les autorités de son absence ou leur indiquer une adresse de notification (ATF 146 IV 30 consid. 1.1.2; 141 II 429 consid. 3.1;
139 IV 228 consid. 1.1; arrêt du Tribunal fédéral 6B_448/2024 précité consid. 3.2.2).

Il faut cependant réserver le cas où la direction de la procédure est demeurée passive pendant une longue période, laissant à penser que l'affaire aurait été classée. À ce propos, le Tribunal fédéral a considéré que la notification d'une ordonnance de non-entrée en matière trois mois et demi après le dépôt de la plainte ne présentait pas une longue période (arrêt du Tribunal fédéral 1B_675/2011 du 14 décembre 2011). La Chambre de céans a eu la même appréciation s'agissant de l'écoulement d'un délai de quatre mois entre l'audition à la police du prévenu et la notification de l'ordonnance pénale (ACPR/470/2013 du 10 octobre 2013; ACPR/202/2016 du 12 avril 2016).

3.3. Les délais fixés en jours commencent à courir le jour qui suit leur notification ou l'évènement qui les déclenche (art. 90 al. 1 CPP).

Les écrits doivent être remis au plus tard le dernier jour du délai à l'autorité pénale ou à la Poste suisse (art. 91 al. 2 CPP). 

3.4. En l'espèce, il est constant que l'ordonnance pénale a été expédiée par pli recommandé du 3 septembre 2014, à l'adresse fournie par le recourant, rue 1______ no. 2______, [code postal] Genève, et que le précité n'est pas allé le retirer dans les sept jours à compter de la tentative infructueuse de notification.

Dans ces conditions, tel que l'a relevé le Tribunal de police, l'ordonnance pénale est réputée avoir été notifiée à l'échéance du délai de garde postal de sept jours, de sorte que le délai pour la contester est arrivé à échéance fin septembre 2014.

Le recourant argue du fait qu'il ne résidait plus à cette adresse à compter du 1er septembre 2014, mais à une autre adresse à Genève, ce jusqu'au 27 octobre 2014.

Or, le no. 2______, rue 1______ était l'adresse de notification que le recourant avait fournie à la police le 14 juillet 2014. Par conséquent, quand bien même il l'aurait ensuite modifiée, il lui appartenait, au vu de la procédure en cours, d'annoncer un tel changement non seulement à l'Office cantonal de la population, mais également à l'autorité de poursuite pénale – qui n'avait aucun motif de soupçonner un déménagement ‒ ou de faire le nécessaire auprès de La Poste pour faire suivre son courrier, ce d'autant qu'il explique ne pas avoir quitté la Suisse avant le 31 janvier 2015. Il devait, en outre, compte tenu de son audition par la police, s'attendre à ce que des décisions puissent lui être notifiées dans ce cadre.

Aussi, il sied de considérer qu'expédiée le 3 septembre 2014, soit moins de deux mois après l'audition du recourant à la police, à l'adresse déclarée, l'ordonnance pénale du 28 août 2014 lui a été valablement notifiée à l'issue du délai de garde de sept jours. La fiction de notification prévue à l'art. 85 al. 4 let. a CPP trouve ainsi parfaitement application en l'espèce.

Envoyée dix ans plus tard, le 10 octobre 2024, l'opposition formée par le recourant est manifestement tardive, ce que le Tribunal de police a, à juste titre, constaté.

4.             Justifiée, l'ordonnance querellée sera donc confirmée.

5.             Le recourant, qui succombe, supportera les frais envers l'État, fixés en totalité à CHF 900.- (art. 428 al. 1 CPP et 13 al. 1 du Règlement fixant le tarif des frais en matière pénale, RTFMP; E 4 10.03).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
LA COUR :


Rejette le recours.

Condamne A______ aux frais de la procédure de recours, arrêtés à CHF 900.-.

Notifie le présent arrêt, en copie, au recourant, au Ministère public et au Tribunal de police.

Siégeant :

Madame Daniela CHIABUDINI, présidente; Madame Corinne CHAPPUIS BUGNON et Monsieur Vincent DELALOYE, juges; Monsieur Julien CASEYS, greffier.

 

Le greffier :

Julien CASEYS

 

La présidente :

Daniela CHIABUDINI

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Voie de recours :

 

Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière pénale au sens de l'art. 78 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF;
RS 173.110); la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 78 à 81 et 90 ss LTF. Le recours doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14. Les mémoires doivent être remis au plus tard le dernier jour du délai, soit au Tribunal fédéral soit, à l'attention de ce dernier, à La Poste Suisse ou à une représentation diplomatique ou consulaire suisse
(art. 48 al. 1 LTF).


 

P/11126/2014

ÉTAT DE FRAIS

 

 

 

 


COUR DE JUSTICE

 

 

 

Selon le règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais en matière pénale (E 4 10.03).

 

Débours (art. 2)

 

 

- frais postaux

CHF

10.00

Émoluments généraux (art. 4)

 

 

- délivrance de copies (let. a)

CHF

- délivrance de copies (let. b)

CHF

- état de frais (let. h)

CHF

75.00

Émoluments de la Chambre pénale de recours (art. 13)

 

 

- décision sur recours (let. c)

CHF

815.00

Total

CHF

900.00