Aller au contenu principal

Décisions | Chambre pénale de recours

1 resultats
P/10947/2023

ACPR/100/2025 du 03.02.2025 sur OCL/1373/2024 ( MP ) , ADMIS/PARTIEL

Descripteurs : CLASSEMENT DE LA PROCÉDURE;CONCUBINAGE;MÉNAGE COMMUN;PLAINTE PÉNALE;LÉSION CORPORELLE;VOIES DE FAIT;DÉLAI;RETARD;DROIT D'ÊTRE ENTENDU
Normes : CPP.319.al1.letd; CP.123.al6.ch2; CP.126.letc.ch2; CP.31; Cst.29.al2

république et

canton de Genève

POUVOIR JUDICIAIRE

P/10947/2023 ACPR/100/2025

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale de recours

Arrêt du lundi 3 février 2025

 

Entre

A______, représenté par Me H______, avocat,

recourant,

 

contre l'ordonnance de classement partiel rendue le 26 septembre 2024 par le Ministère public,

et

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B,
1213 Petit-Lancy, case postale 3565, 1211 Genève 3,

intimé.


EN FAIT :

A. a. Par acte expédié le 11 octobre 2024, A______ recourt contre l'ordonnance du 26 septembre précédent, notifiée le 1er octobre suivant, par laquelle le Ministère public a partiellement classé la procédure ouverte contre B______.

Le recourant conclut, avec suite de frais et dépens, d'une part, à l'annulation de cette décision et au renvoi de la cause au Ministère public, et d'autre part, au constat d'un déni de justice et à ce que l'autorité intimée soit enjointe d'instruire sa plainte pénale du 22 mai 2023, en tant qu'elle concerne l'infraction de menaces en lien avec l'événement survenu le 8 septembre 2021.

b. Le recourant, qui a sollicité l'assistance judiciaire gratuite pour la procédure de recours, a été dispensé de verser les sûretés (art. 383 CPP).

B. Les faits pertinents suivants ressortent du dossier :

a. A______ et B______ ont entretenu une relation amoureuse, entre courant 2019 et octobre 2022, dont est issue une fille, C______, née le ______ 2021.

b. Les 5 juin 2021 et 22 mai 2023, A______ a déposé plainte contre B______, notamment pour des faits de violences physiques [7 février 2021, 12 septembre 2022, 1er octobre 2022 et courant octobre 2022] et verbales [entre les 2 février et 17 mars 2020], dans le cadre de leur relation, ainsi que de tentative de contrainte [20 mars 2020] et dommages à la propriété [2 mai 2021]. Il lui reprochait également de l'avoir, le 8 septembre 2021, injurié et menacé, en lui disant qu'elle allait le détruire comme cela ne lui était jamais arrivé, que leur fille ne saurait pas qui est son père et qu'il ne serait plus qu'une "grosse merde qu'on écrasera". En octobre 2022, il avait mis un terme définitif à leur relation, qui avait "toujours été instable".

c. Par ordonnance du 6 février 2024, le Ministère public a décidé de ne pas entrer en matière, en tant que ces faits concernaient les événements survenus entre les 2 février et 17 mars 2020 [injures], 20 mars 2020 [tentative de contrainte] et courant octobre 2022 [violences physiques commises en France].

Cette décision n'a pas fait l'objet d'un recours.

d. Le 5 juin 2024, le Ministère public a ouvert une instruction contre B______ et l'a prévenue de voies de fait (art. 126 CP) et dommages à la propriété (art. 144 CP).


 

e. Il lui est reproché d'avoir, à Genève :

- le 7 février 2021, dans l'après-midi, après une première dispute avec A______ intervenue le matin même, asséné deux ou trois coups de poing au visage et au dos de celui-ci;

- le 2 mai 2021, lancé des clés sur le véhicule de A______, ce qui lui a causé des dégâts;

- le 12 septembre 2022, à la route 1______, donné trois coups de poing sur l'épaule de A______ et tenté de lui attraper la mâchoire, puis, plus tard dans la soirée, à son domicile, lui avoir attrapé le cou, l'avoir serré avec ses ongles, puis l'avoir griffé au dos et à l'épaule;

- le 1er octobre 2022, au D______ [GE], attrapé A______ au bras et lui avoir saisi la mâchoire.

f. Entendue par le Ministère public le même jour, B______ a partiellement reconnu les faits reprochés. En substance, elle admettait avoir, le 12 septembre 2022, asséné des coups sur l'épaule de A______. Elle ne se souvenait cependant pas d'avoir tenté de lui attraper la mâchoire. Ce jour-là, dans la soirée, elle lui avait bien écrit le message suivant: "C'est vrai, je t'ai roué de coups" mais cela sur un ton ironique. Un conflit les opposant était bel et bien survenu le 1er octobre 2022, mais elle ne se souvenait plus de ce qui s'était passé.

Invitée à se déterminer sur l'existence d'un ménage commun avec A______, B______ a déclaré avoir fait ménage commun avec le précité d'octobre 2020 à avril 2021, précisant avoir sous-loué son appartement pendant cette période pour s'installer chez lui. A______ n'avait pas souhaité officialiser ce domicile car cela aurait pu lui porter préjudice dans la procédure en divorce qui l'opposait à son épouse, E______, en le contraignant à payer une contribution alimentaire plus importante. Elle n'avait plus cohabité avec le prénommé depuis lors, notamment pas lorsqu'elle avait quitté son appartement de F______ [GE], en septembre 2022. Elle avait ensuite refusé que celui-ci s'installe avec elle dans la maison de G______, en France, au sein de laquelle elle avait emménagé en octobre 2022. Elle avait eu une relation amoureuse avec un autre homme entre avril et fin juillet 2022.

g. Egalement auditionné par le Ministère public, A______ a confirmé ses plaintes pénales. Il a, par ailleurs, exposé n'avoir pas fait ménage commun avec B______ avant le mois de septembre 2022, date à laquelle la prénommée avait rendu son appartement à F______ et était venue vivre chez lui, en attendant leur emménagement ensemble à G______, en France, le 1er octobre 2022. B______ avait ensuite refusé qu'il emménage avec elle. Ils avaient donc vécu ensemble, durant environ deux semaines, en septembre 2022. Depuis le début de leur relation, celle-ci était en "dents-de-scie". Il n'avait "jamais pu projeter une vie commune avec Madame B______" et bien qu'il soit heureux d'être père, ce qui n'était initialement pas le cas, le choix d'avoir une fille n'était pas commun.

h. Le 10 juillet 2024, le Ministère public a procédé à l'audition d'un témoin, qui avait assisté à la dispute du 1er octobre 2022. Celui-ci a notamment déclaré n'en avoir aucun souvenir.

i. Par avis de prochaine clôture de l'instruction du 10 juillet 2024, le Ministère public a informé les parties de son intention de rendre une ordonnance de classement partiel, s'agissant des faits des 12 septembre et 1er octobre 2022, et une ordonnance pénale, concernant les événements des 7 février et 2 mai 2021. Il leur a également accordé un délai pour déposer leurs réquisitions de preuves.

j. Par lettre du 19 juillet 2024, B______ a renoncé à formuler des réquisitions de preuves.

k. Par pli du 10 septembre 2024, A______ s'est opposé au classement partiel de la procédure et a sollicité l'audition du concierge du lieu où résidait B______, à F______, afin d'établir l'existence d'un ménage commun avec celle-ci depuis août 2022, soit depuis au moins deux mois. En effet, depuis cette date, ils dormaient chaque nuit ensemble, que ce soit chez l'un ou chez l'autre, afin de pouvoir s'occuper de leur enfant.

Il a, par ailleurs, attiré l'attention du Procureur sur le fait qu'il n'avait, à ce stade, pas traité de l'épisode du 8 septembre 2021, constitutif de l'infraction de menaces, pour lequel il avait déposé plainte le 22 mai 2023.

l. Par ordonnance pénale du 26 septembre 2024, le Ministère public a notamment déclaré B______ coupable de dommages à la propriété (art. 144 al. 1 CP) et voies de fait (art. 126 al. 1 et 2 let. c CP), en lien avec les événement survenus les 7 février et 2 mai 2021. Il l'a ensuite exemptée de peine (art. 53 CP) pour la première infraction et condamnée à une amende de CHF 300.- s'agissant de la seconde.

m. Parallèlement à cette procédure, A______ a fait l'objet d'une procédure pénale (P/4741/2021), dans le cadre de laquelle il a été condamné par arrêt de la Chambre pénale d'appel et de révision du 29 août 2023 (AARP/321/2023), notamment, à une peine pécuniaire de 80 jours-amende, ainsi qu'à une amende de CHF 2'000.-, de même qu'à une amende de CHF 800.-, pour lésions corporelles simples (art. 123 ch. 1 et 2 al. 3 et al. 5 CP), voies de fait (art. 126 al. 1 et 2 let. b et c CP) et tentative de contrainte (art. 181 CP cum 22 CP), en lien avec des faits commis au préjudice de B______ et de E______.

Cette décision, confirmée par arrêt du Tribunal fédéral 6B_1235/2023 du 8 juillet 2024, retient que A______ et B______ ont fait ménage commun, à tout le moins d'octobre 2020 à avril 2021.

C. Dans l'ordonnance querellée, le Ministère public semble retenir que les faits survenus les 12 septembre et 1er octobre 2022 pouvaient être constitutifs de lésions corporelles simples et/ou de voies de fait. Cela étant, il ne ressortait pas de la procédure que A______ et B______ vivaient en ménage commun à cette époque, de sorte que ces infractions n'étaient pas poursuivies d'office. En effet, la période de deux semaines évoquée par le plaignant durant laquelle B______ aurait vécu dans son appartement, en septembre 2022, était trop courte au sens de la jurisprudence. De plus, il ressortait du dossier que leur vie commune avait duré d'octobre 2020 à avril 2021. Elle avait, dès lors, pris fin plus d'une année avant la survenance des faits dénoncés. La plainte déposée le 22 mai 2023 était donc tardive, ce qui constituait un empêchement de procéder imposant le classement partiel de la procédure (art. 319 al. 1 let. d CPP).

D. a.a. Dans son recours, A______ reproche tout d'abord au Ministère public d'avoir omis de tenir compte – dans l'ordonnance attaquée qui n'en dit mot – de son pli du 10 septembre 2024, par lequel il sollicitait l'audition d'un témoin afin d'établir l'existence d'une cohabitation avec la prévenue depuis août 2022 déjà. L'état de fait devait donc être complété sur ce point. Cette autorité ne s'était, de plus, pas prononcée sur sa demande d'audition de témoin, de sorte qu'elle avait violé son droit à une décision motivée, ce qui justifiait l'annulation de l'ordonnance attaquée.

Il conteste ensuite l'empêchement de procéder retenu par le Ministère public. Plusieurs éléments, avancés dans son pli susvisé, dont l'audition requise, permettaient de conclure à l'existence d'un ménage commun entre début août et fin septembre 2022, soit durant presque deux mois. De plus, le Ministère public n'avait pas d'emblée exclu une prévention pénale suffisante contre la prévenue. Une condamnation paraissait ainsi nettement plus probable qu'un acquittement, de sorte qu'un classement partiel de la procédure ne pouvait pas être prononcé à ce stade, ce d'autant qu'il existait un moyen de preuve permettant de confirmer l'existence d'une vie commune.

Par ailleurs, le Ministère public avait violé son droit d'être entendu en ne disant mot sur l'infraction de menaces – en lien avec l'événement du 8 septembre 2021– dénoncée dans sa plainte du 22 mai 2023, et a fortiori en n'exposant pas pour quelle(s) raison(s) les conditions à l'ouverture de l'instruction n'étaient pas réunies sur cet aspect, ce qui constituait un déni de justice. Cette infraction était pourtant poursuivie d'office, pour être survenue dans l'année ayant suivi la fin du ménage commun formé avec la prévenue, entre octobre 2020 et avril 2021, tel que retenu par le Ministère public. Une éventuelle motivation implicite était également exclue, dans la mesure où la prévenue n'avait jamais été entendue sur ces faits et que l'autorité intimée ne les avait pas évoqués dans ses précédentes décisions, à savoir ses ordonnances de non-entrée en matière partielle du 6 février 2024 et pénale du 26 septembre 2024.

a.b. Selon le rapport du 20 décembre 2024 du greffe de l'Assistance juridique, le recourant a rendu vraisemblable que sa situation financière ne lui permettait que difficilement d'assumer les honoraires d'un avocat par ses propres moyens.

b. À réception du recours, la cause a été gardée à juger sans échange d'écritures, ni débats.

EN DROIT :

1.             Le recours est recevable pour avoir été déposé selon la forme et dans le délai prescrits (art. 385 al. 1 et 396 al. 1 CPP), concerner une ordonnance sujette à recours auprès de la Chambre de céans (art. 393 al. 1 let. a CPP) et émaner du plaignant qui, partie à la procédure (art. 104 al. 1 let. b CPP), a qualité pour agir, ayant un intérêt juridiquement protégé à la modification ou à l'annulation de la décision querellée (art. 382 al. 1 CPP).

2.             La Chambre pénale de recours peut décider d'emblée de traiter sans échange d'écritures ni débats les recours manifestement irrecevables ou mal fondés (art. 390 al. 2 et 5 a contrario CPP). Tel est le cas en l'occurrence, au vu des considérations qui suivent.

3.             Le recourant déplore une constatation incomplète des faits.

Dès lors que la Chambre de céans jouit d'un plein pouvoir de cognition en droit et en fait (art. 393 al. 2 CPP ; ATF 137 I 195 consid. 2.3.2), les éventuelles constatations incomplètes ou inexactes du Ministère public auront été corrigées dans l'état de fait établi ci-devant.

Partant, ce grief sera rejeté.

4. Le recourant reproche au Ministère public de ne pas avoir statué sur ses réquisitions de preuves du 10 septembre 2024.

4.1. À teneur de l'art. 318 al. 2 CPP, le ministère public ne peut écarter une réquisition de preuves que si celle-ci exige l'administration de preuves sur des faits non pertinents, notoires, connus de l'autorité pénale ou déjà suffisamment prouvés en droit. Il rend sa décision par écrit et la motive brièvement.

Ces motifs correspondent à ceux par lesquels le ministère public peut, de manière générale, renoncer à administrer une preuve en vertu de l'art. 139 al. 2 CPP (Message du Conseil fédéral relatif à l'unification du droit de la procédure pénale, FF 2006 1057, p. 1254). Cette dernière disposition codifie, pour la procédure pénale, la règle jurisprudentielle déduite de l'art. 29 al. 2 Cst. en matière d'appréciation anticipée des preuves (arrêt du Tribunal fédéral 6B_977/2014 du 17 août 2015 consid. 1.2).

4.2. Une violation du droit d’être entendu peut être réparée lorsque la partie lésée a la possibilité de s'exprimer devant une autorité de recours qui jouit d'un plein pouvoir d'examen. Cela vaut également en présence d'un vice grave lorsqu’un renvoi à l’instance précédente constituerait une vaine formalité et aboutirait à un allongement inutile de la procédure, incompatible avec l'intérêt de ladite partie à ce que sa cause soit tranchée dans un délai raisonnable (ATF 142 II 218 consid. 2.8.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_1135/2021 du 9 mai 2022 consid. 1.1).

4.3. En l'espèce, le Ministère public ne dit mot dans l'ordonnance querellée des motifs pour lesquels il n'a pas accédé à la demande du recourant d'audition d'un témoin. L'omission par le Ministère public de se positionner sur la réquisition de preuve a pu toutefois être réparée devant l'autorité de recours, qui jouit d'un plein pouvoir de cognition en fait et en droit (art. 393 al. 2 CPP ; ATF 137 I 195 consid. 2.3.2). Par appréciation anticipée de preuve, un renvoi de la procédure au Ministère public s'avérerait une pure formalité, étant relevé, vu ce qui suit, que l'audition sollicitée n'était utile ni pour rendre l'ordonnance querellée, ni pour prononcer le présent arrêt (cf. en ce sens, ACPR/654/2024 du 4 septembre 2024, consid. 3.3).

Ce grief sera, dès lors, rejeté.

5. Le recourant se plaint du classement partiel de la procédure ouverte contre son ex-compagne.

5.1. Le ministère public ordonne le classement de tout ou partie de la procédure lorsqu'il est établi que certaines conditions à l'ouverture de l'action pénale ne sont pas remplies ou que des empêchements de procéder sont apparus (art. 319 al. 1 let. d CPP). Tel est le cas en l’absence de dépôt d’une plainte pénale requise par le droit matériel (arrêt du Tribunal fédéral 7B_77/2022 du 12 décembre 2023 consid. 3.1).

5.2.1. Les art. 123 ch. 1 et 126 ch. 1 CP répriment, sur plainte, respectivement, les lésions corporelles simples et voies de fait infligées à une personne.

5.2.2. La poursuite a lieu d'office si ces atteintes sont commises par le partenaire de la victime, pour autant qu'ils fassent ménage commun pour une durée indéterminée et que lesdites atteintes soient survenues durant cette période ou dans l’année qui a suivi la séparation (art. 123 ch. 2 al. 6 et 126 ch. 2 let. c CP).

5.2.3. Par ménage commun, on entend une relation de concubinage stable consistant en une communauté de vie d'une certaine durée, voire durable, entre deux personnes, à caractère en principe exclusif, qui présente une composante tant spirituelle que corporelle et économique, et qui est parfois désignée comme une communauté de toit, de table et de lit. Si plusieurs années de vie commune sont certes un élément parlant en faveur d'une relation de concubinage stable, elles ne sont pas à elles seules décisives. Le juge doit au contraire procéder dans chaque cas à une appréciation de l'ensemble des circonstances de la vie commune afin d'en déterminer la qualité et si celle-ci peut être qualifiée de relation de concubinage stable (arrêt du Tribunal fédéral 6B_1235/2023 du 8 juillet 2024 consid. 6.2 et les arrêts cités). Les relations temporaires ou autres communautés limitées dans le temps doivent être exclues. Il est exigé que l'auteur et la victime fassent ménage commun pour une durée indéterminée. Il est donc nécessaire qu'un lien durable soit envisagé, et non pas une relation passagère (arrêt du Tribunal fédéral 6B_124/2022 du 23 mars 2022 consid. 1.3.2).

5.3. En l'occurrence, le recourant soutient que les faits des 12 septembre et 1er octobre 2022 se sont produits alors qu'il faisait ménage commun avec la prévenue.

Il appert que les parties ont habité sous le même toit d'octobre 2020, date à laquelle la jeune femme a sous-loué son appartement, jusqu'à la fin du mois d'avril 2021, ce que le recourant ne conteste d'ailleurs plus. Depuis lors, la prévenue argue qu'ils n’ont jamais repris la vie commune, malgré le fait qu’ils se soient fréquentés jusqu’au mois d'octobre 2022. Le recourant a, quant lui, déclaré, lors de son audition devant le Ministère public, qu'ils avaient vécu ensemble depuis septembre 2022, et ce durant deux semaines. À la suite de l'avis de prochaine clôture de l'instruction, il est revenu sur ses dires et soutient désormais que cette cohabitation a commencé en août 2022 et donc duré deux mois.

Quoiqu'il en soit, la récente cohabitation alléguée par le recourant a cessé deux à huit semaines plus tard (soit le 1er octobre 2022), lors de l'emménagement de la jeune femme dans la maison de G______, en France, que les parties avaient, selon le recourant, initialement prévu d'occuper ensemble. Cette cohabitation – même à considérer qu'elle ait duré huit semaines – fut donc courte.

Si ce critère n'est pas encore déterminant, il est renforcé par l'absence de stabilité de leur relation durant cette période. En effet, leur vie conjugale a été émaillée de nombreux conflits (selon la plainte du 22 mai 2023), qui semblent avoir eu raison de leur projet d'emménagement commun et ont mené à leur séparation définitive en octobre 2022. De surcroît, de l'aveu même du recourant, il n'a jamais pu projeter une vie commune avec la prévenue, considérant que leur relation était en "dents-de-scie" dès le début et que le choix d'avoir un enfant n'était pas commun. À cela s'ajoute que les parties ne semblaient pas entretenir de relation amoureuse exclusive. D'une part, le recourant est resté marié durant une partie de sa relation avec la prévenue et, d'autre part, cette dernière ne s'est pas cachée d'avoir eu une relation avec un autre homme, peu avant les faits objets du présent classement partiel.

Ainsi, eu égard à la durée de la cohabitation alléguée (deux à huit semaines) et au défaut de stabilité de leur relation, durant la période en cause, l'existence d'un concubinage au sens des art. 123 ch. 2 al. 6 et 126 ch. 2 let. c CP doit être niée, quand bien même les parties sont parents d'un enfant commun.

L'audition du témoin requise par le recourant ne changerait rien à ce constat, dès lors que, même à admettre une cohabitation de deux mois, telle que soutenue par celui-ci, l'existence d'un ménage commun au sens strict ferait – en tout état – défaut pour les motifs évoqués supra.

Par conséquent, les faits dénoncés, des 12 septembre et 1er octobre 2022, ne se poursuivent pas d'office et la plainte déposée le 22 mai 2023 est, dès lors, tardive, ce que le Ministère public a constaté à juste titre.

6. Le recourant invoque un "déni de justice", reprochant au Ministère public de ne pas avoir statué sur des faits du 8 septembre 2021 – constitutifs de menaces – pourtant dénoncés dans sa plainte du 22 mai 2023.

6.1. Saisi d'une plainte, le ministère public est tenu de la traiter, soit en l'instruisant (art. 309 al. 2 et 3 CPP), soit en rendant une ordonnance formelle de non-entrée en matière (art. 310 CPP) ou de classement (art. 319 CPP), un prononcé implicite étant, en principe, prohibé (arrêts du Tribunal fédéral 6B_84/2020 du 22 juin 2020 consid. 2.1.3 et 6B_819/2018 du 25 janvier 2019 consid. 3.8).

6.2. In casu, il résulte de la décision attaquée que le classement partiel de la procédure a été ordonné à l'égard de la prévenue s'agissant des faits survenus les 12 septembre et 1er octobre 2022. La motivation contenue dans cet acte ne permet pas de parvenir à une autre conclusion.

Par ailleurs, les ordonnances de non-entrée en matière partielle du 6 février 2024 et pénale du 26 septembre 2024, rendues par le Ministère public, dans le cadre de la même procédure, ne font aucunement état des faits du 8 septembre 2021.

Il n’apparaît, en outre, pas que l'autorité intimée entende traiter ultérieurement le volet de la plainte concernant ces faits. Il semble donc que cet aspect lui ait échappé, la prévenue n'ayant, au demeurant, jamais été entendue sur ces faits.

En tout état, si le Ministère public estimait qu'il existait un motif justifiant une non-entrée en matière ou un classement sur cet aspect de la plainte du recourant, il devait encore exposer son raisonnement – même bref – à ce sujet, ce d'autant qu'il appert, à première vue, que l'infraction de menaces dénoncées se poursuit d'office (cf. lettre D.a.a supra).

Aussi la cause doit-elle lui être retournée pour qu'il décide de la suite à donner à ce volet de la plainte et motive sa position – constat auquel la Chambre de céans pouvait parvenir sans interpeller, au préalable, ce magistrat, compte tenu de la nature procédurale du vice constaté (cf. arrêt du Tribunal fédéral 6B_1330/2022 du 3 juillet 2023 consid. 4 [par analogie]; ACPR/27/2024 du 17 janvier 2024, consid. 4.2; ACPR/950/2023 du 7 décembre 2023, consid. 2.5) –.

7. Le recourant sollicite le bénéfice de l'assistance judiciaire pour la procédure de recours (art. 136 al. 3 CPP).

7.1. Dite assistance est accordée à la victime – soit le lésé qui, du fait de l'infraction, subit une atteinte directe à son intégrité physique, psychique ou sexuelle (art. 116 al. 1 CPP) – lorsque cette partie est indigente, d'une part, et que l'action pénale ne paraît pas vouée à l'échec, d'autre part (art. 136 al. 1 let. b CPP).

7.2. Dans la présente affaire, le greffe de l'Assistance juridique a confirmé que le recourant n'était pas en mesure de financer par ses propres deniers sa défense par un avocat (cf. lettre D.a.b). En outre, on peut, a priori, le tenir pour une victime. Ainsi, au vu de l'issue du litige sur ce point, l'assistance judiciaire lui sera accordée pour la procédure de recours et Me H______, actuel conseil du plaignant, sera désigné en qualité de conseil juridique gratuit.

8. Le recourant étant au bénéfice de l'assistance judiciaire et obtenant partiellement gain de cause, les frais de la procédure de recours seront laissés à la charge de l'État (art. 428 al. 4 CPP).

9. Il n'y a pas lieu de fixer, à ce stade, l'indemnité due au conseil juridique gratuit du recourant, la procédure n'étant pas terminée (art. 138 al. 1 cum 135 al. 2 CPP).

* * * * *


 

 

PAR CES MOTIFS,
LA COUR :

 

Admet partiellement le recours en tant qu'il porte sur les faits du 8 septembre 2021, renvoie la cause au Ministère public pour qu'il traite ce volet et rejette le recours pour le surplus.

Laisse les frais de la procédure de recours à la charge de l'État.

Octroie l'assistance judiciaire gratuite à A______ pour la procédure de recours et désigne Me H______ à cet effet.

Notifie le présent arrêt, en copie, à A______, soit pour lui son conseil, et au Ministère public.

Siégeant :

Monsieur Christian COQUOZ, président; Mesdames Valérie LAUBER et
Françoise SAILLEN AGAD, juges; Madame Arbenita VESELI, greffière.

 

La greffière :

Arbenita VESELI

 

Le président :

Christian COQUOZ

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Voie de recours :

 

Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière pénale au sens de l'art. 78 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF;
RS 173.110); la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 78 à 81 et 90 ss LTF. Le recours doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14. Les mémoires doivent être remis au plus tard le dernier jour du délai, soit au Tribunal fédéral soit, à l'attention de ce dernier, à La Poste Suisse ou à une représentation diplomatique ou consulaire suisse
(art. 48 al. 1 LTF).