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Décisions | Chambre pénale de recours

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P/14224/2024

ACPR/778/2024 du 28.10.2024 sur ONMMP/3451/2024 ( MP ) , REJETE

Descripteurs : ORDONNANCE DE NON-ENTRÉE EN MATIÈRE;INFRACTIONS CONTRE LE DOMAINE SECRET;APPAREIL DE PRISE DE VUE ET/OU D'ENREGISTREMENT SONORE
Normes : CPP.310; CP.179quater

république et

canton de Genève

POUVOIR JUDICIAIRE

P/14224/2024 ACPR/778/2024

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale de recours

Arrêt du lundi 28 octobre 2024

 

Entre

A______, représentée par Me Cyrielle FRIEDRICH, avocate, rue de la Fontaine 7,
1204 Genève,

recourante,

 

contre l'ordonnance de non-entrée en matière partielle rendue le 6 août 2024 par le Ministère public,

et

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, 1213 Petit-Lancy, case postale 3565, 1211 Genève 3,

intimé.


EN FAIT :

A. a. Par acte déposé le 19 août 2024, A______ recourt contre l'ordonnance du 6 précédent, notifiée le surlendemain, par laquelle le Ministère public a décidé de ne pas entrer en matière sur sa plainte en tant qu'elle porte sur les faits susceptibles d'être constitutifs de violation du domaine secret ou du domaine privé au moyen d'un appareil de prise de vues (art. 179quater CP).

La recourante conclut, sous suite de frais et dépens, à l'annulation de cette ordonnance et à l'ouverture d'une instruction contre B______ du chef de l'infraction susmentionnée. Elle sollicite également d'être mise au bénéfice de l'assistance judiciaire gratuite pour la procédure de recours.

b. La recourante a été dispensée de verser les sûretés (art. 383 CPP).

B. Les faits pertinents suivants ressortent du dossier :

a. Le 16 avril 2024, A______ a porté plainte contre son compagnon, B______.

L'avant-veille, alors qu'elle se trouvait chez sa mère, B______, qui l'avait rejointe, s'était montré menaçant envers elle lors d'une dispute, à l'issue de laquelle il avait quitté les lieux en laissant son ordinateur portable. En le consultant, elle avait trouvé un dossier nommé "A______ [surnom]", dans lequel figuraient plusieurs photographies d'elle, nue, prises à son insu. Ce n'était pas la première fois qu'elle surprenait B______ avec de tels clichés, même si elle lui avait demandé de ne pas recommencer.

b. Interrogé par la police au sujet desdites photographies prises supposément à l'insu de A______, B______ a affirmé que sa compagne était au courant. Elle lui avait déjà dit qu'elle le savait.

c. Le 7 août 2024, le Ministère public a rendu une ordonnance pénale contre B______, le déclarant coupable de menaces pour les faits survenus le 14 avril 2024, contre laquelle ce dernier a formé opposition.

C. Dans l'ordonnance querellée, le Ministère public retient qu'au vu des déclarations contradictoires des parties et en l'absence d'élément de preuve objectif propre à corroborer les faits reprochés, il était impossible de privilégier l'une ou l'autre des versions et, partant, d'établir la culpabilité de B______.

D. a. Dans son recours, A______ soutient que, par ses déclarations, B______ affirmait qu'elle "avait connaissance qu'il possédait ce type de clichés", mais cela ne permettait pas encore "de retenir qu'elle savait qu'il en avait prises (sic)". Elle avait d'ailleurs retrouvé une conversation WhatsApp – non produite avec le recours – au cours de laquelle B______ lui aurait envoyé une photographie d'elle, en petite tenue; ce à quoi elle aurait répondu: "tu as pris combien de capture d'écran ?". Cela démontrait qu'il avait pris des clichés d'elle, à son insu. Compte tenu de ces éléments, le Ministère public devait les confronter, pour déterminer l'absence de consentement à la prise des photographies litigieuses.

b. À réception du recours, la cause a été gardée à juger sans échange d'écritures, ni débats.

EN DROIT :

1.             Le recours est recevable pour avoir été déposé selon la forme et dans le délai prescrits (art. 385 al. 1 et 396 al. 1 CPP), concerner une ordonnance sujette à recours auprès de la Chambre de céans (art. 393 al. 1 let. a CPP) et émaner de la plaignante qui, partie à la procédure (art. 104 al. 1 let. b CPP), a qualité pour agir, ayant un intérêt juridiquement protégé à la modification ou à l'annulation de la décision querellée (art. 382 al. 1 CPP).

2.             La recourante s'oppose à la non-entrée en matière prononcée sur les faits litigieux.

2.1. Le ministère public rend immédiatement une ordonnance de non-entrée en matière s'il ressort de la dénonciation ou du rapport de police que les éléments constitutifs de l'infraction ou les conditions à l'ouverture de l'action pénale ne sont manifestement pas réunis (art. 310 al. 1 let. a CPP).

Conformément à cette disposition, une procédure pénale peut être liquidée par ordonnance de non-entrée en matière lorsque la situation est claire sur le plan factuel et juridique. Tel est le cas lorsque les faits visés ne sont manifestement pas punissables, faute, de manière certaine, de réaliser les éléments constitutifs d'une infraction, ou encore lorsque les conditions à l'ouverture de l'action pénale font clairement défaut. Au stade de la non-entrée en matière, on ne peut admettre l'absence manifeste des éléments constitutifs d'une infraction que lorsqu'il n'existe pas de soupçon suffisant conduisant à considérer un comportement punissable ou lorsqu'un éventuel soupçon initial s'est entièrement dissipé (arrêts du Tribunal fédéral 6B_488/2021 du 22 décembre 2021 consid. 5.3; 6B_212/2020 du 21 avril 2021 consid. 2.2; 6B_196/2020 du 14 octobre 2020 consid. 3.1).

2.2. L'art. 179quater al. 1 CP punit, sur plainte, quiconque, sans le consentement de la personne intéressée, observe avec un appareil de prise de vues ou fixe sur un porteur d'images un fait qui relève du domaine secret de cette personne ou un fait ne pouvant être perçu sans autre par chacun et qui relève du domaine privé de celle-ci.

2.3. En l'espèce, la recourante reproche au mis en cause d'avoir pris des photographies d'elle dénudée, à son insu, qu'il avait ensuite conservées dans son ordinateur. De son côté, le mis en cause soutient que la recourante était au courant de ces clichés.

Seule la question du consentement de la recourante est ainsi litigieuse. Or, les déclarations des protagonistes à cet égard sont contradictoires et aucun élément objectif ne permet de corroborer l'une ou l'autre des versions.

La recourante mentionne – pour la première fois dans son recours – des messages échangés avec le mis en cause, qu'elle n'a toutefois produits ni devant le Ministère public, ni devant la Chambre de céans. Elle ne saurait dès lors en tirer argument. Quoiqu'il en soit, la teneur alléguée desdits messages ne permet pas de conclure, contrairement à ce qu'elle soutient, que le recourant aurait pris des clichés à son insu ni, subsidiairement, qu'elle n'y aurait pas consenti.

Rien ne permet donc d'établir que les éléments constitutifs de l'infraction visée à l'art. 179quater CP sont réunis. Une audience de confrontation, sollicitée par la recourante, n'apparaît pas susceptible d'apporter des éléments probants pour modifier ce constat, la position du mis en cause étant déjà connue.

3.             Justifiée, l'ordonnance querellée sera donc confirmée. Le recours, qui s'avère mal fondé, pouvait être d'emblée traité sans échange d'écritures, ni débats (art. 390 al. 2 et 5 a contrario CPP).

4.             La recourante sollicite l'assistance juridique pour la procédure de recours.

4.1. À teneur de l'art. 136 al. 1 CPP, la direction de la procédure accorde entièrement ou partiellement l'assistance judiciaire gratuite à la partie plaignante pour lui permettre de faire valoir ses prétentions civiles lorsqu'elle ne dispose pas des ressources suffisantes et que l'action civile ne paraît pas vouée à l'échec (let. a) et à la victime, pour lui permettre de faire aboutir sa plainte pénale, si elle ne dispose pas de ressources suffisantes et que l’action pénale ne paraît pas vouée à l’échec (let. b). L'assistance judiciaire comprend, notamment, l'exonération des frais de procédure (art. 136 al. 2 let. b CPP).

4.2. La cause du plaignant ne doit pas être dénuée de toute chance de succès. L'assistance judiciaire peut être refusée lorsqu'il apparaît d'emblée que la démarche est manifestement irrecevable, que la position du requérant est juridiquement infondée (par exemple en raison du dépôt tardif de la plainte ou d'une infraction ne protégeant pas les intérêts privés) ou si la procédure pénale est vouée à l'échec, notamment lorsqu'une ordonnance de non-entrée en matière ou de classement doit être rendue (arrêt du Tribunal fédéral 1B_49/2019 du 20 mai 2019 consid. 3.1).

4.3. En l'occurrence, sans même examiner la question de l'indigence, force est de retenir que le recours était voué à l'échec pour les motifs exposés plus haut, de sorte que les conditions pour l'octroi de l'assistance judiciaire pour la procédure de recours ne sont pas remplies.

La demande sera, partant, rejetée.

5.             La recourante, qui succombe, supportera les frais envers l'État, fixés en intégralité à CHF 700.- (art. 428 al. 1 CPP et 13 al. 1 du Règlement fixant le tarif des frais en matière pénale, RTFMP ; E 4 10.03).

Le refus d'octroi de l'assistance juridique gratuite est, quant à lui, rendu sans frais (art. 20 RAJ).

* * * * *


 

 

PAR CES MOTIFS,
LA COUR :

 

Rejette le recours.

Rejette la demande d'assistance judiciaire gratuite pour la procédure de recours.

Condamne A______ aux frais de la procédure, arrêtés à CHF 700.-.

Notifie le présent arrêt, en copie, à la recourante, soit pour elle son conseil, et au Ministère public.

Siégeant :

Madame Daniela CHIABUDINI, présidente; Madame Corinne CHAPPUIS BUGNON et Monsieur Vincent DELALOYE, juges; Madame Arbenita VESELI, greffière.

 

La greffière :

Arbenita VESELI

 

La présidente :

Daniela CHIABUDINI

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Voie de recours :

 

Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière pénale au sens de l'art. 78 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110); la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 78 à 81 et 90 ss LTF. Le recours doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14. Les mémoires doivent être remis au plus tard le dernier jour du délai, soit au Tribunal fédéral soit, à l'attention de ce dernier, à La Poste Suisse ou à une représentation diplomatique ou consulaire suisse (art. 48 al. 1 LTF).


 

P/14224/2024

ÉTAT DE FRAIS

 

 

 

 


COUR DE JUSTICE

 

 

 

Selon le règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais en matière pénale (E 4 10.03).

 

Débours (art. 2)

 

 

- frais postaux

CHF

10.00

Émoluments généraux (art. 4)

 

 

- délivrance de copies (let. a)

CHF

- délivrance de copies (let. b)

CHF

- état de frais (let. h)

CHF

75.00

Émoluments de la Chambre pénale de recours (art. 13)

 

 

- décision sur recours (let. c)

CHF

615.00

Total

CHF

700.00