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Décisions | Chambre pénale de recours

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P/20245/2021

ACPR/594/2024 du 14.08.2024 sur ONMMP/4828/2023 ( MP ) , REJETE

Descripteurs : ORDONNANCE DE NON-ENTRÉE EN MATIÈRE
Normes : CPP.310

république et

canton de Genève

POUVOIR JUDICIAIRE

P/20245/2021 ACPR/594/2024

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale de recours

Arrêt du mercredi 14 août 2024

 

Entre

A______, TITULAIRE B______, domiciliée c/o B______, ______ [GE], agissant en personne,

recourante,

contre l'ordonnance de non-entrée en matière rendue le 4 décembre 2023 par le Ministère public,

et

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, 1213 Petit-Lancy - case postale 3565, 1211 Genève 3,

intimé.


EN FAIT :

A. a. Par acte expédié le 14 décembre 2023, A______, TITULAIRE B______ (ci-après, A______) recourt contre l'ordonnance du 4 décembre 2023, par laquelle le Ministère public a décidé de ne pas entrer en matière sur les faits visés dans sa plainte du 13 août 2021.

La recourante conclut implicitement à l'annulation de l'ordonnance querellée afin que l'auteur des manipulations de son adresse C______ soit identifié, que cette société lui communique cette identité et que cessent les nuances subies.

b. La recourante a versé les sûretés en CHF 1'000.- qui lui étaient réclamées par la Direction de la procédure.

B. Les faits pertinents suivants ressortent du dossier :

a. A______ est une société anonyme inscrite au registre du commerce de Genève depuis le ______ 2013, ayant pour but l'exploitation d'un salon de coiffure sis à la rue 1______ no. ______. B______ et D______ ont qualité pour la représenter.

b. Le 9 août 2021, B______ a constaté que le compte de son établissement ("______ C______" - A______coiffure@______.com) avait été modifié à son insu. L’adresse du salon de coiffure était transférée à la rue 2______ et sa fermeture prochaine annoncée. Il lui était impossible d'accéder à son compte et de rectifier ces modifications, ce dont il s’est plaint à la police le 13 août 2021.

c. La police n’a pu obtenir de C______ les renseignements sollicités car elle exigeait un ordre de dépôt d’un magistrat. En conséquence, le Ministère public a ordonné à C______ Ireland Limited, à E______ [Irlande], le 9 mars 2023, de lui transmettre toutes les informations concernant le compte de A______, sans succès, la société n’acceptant pas les requêtes soumises par courriers ou courriels.

C. Dans sa décision querellée, le Ministère public a refusé d'entrer en matière sur la plainte de A______, retenant que les auteurs du piratage n'avaient pu, malgré les enquêtes de la police et ses interventions auprès de C______, être identifiés. Il existait donc un empêchement de procéder, conduisant à l'impossibilité d'entrer en matière (art. 310 al. 1 let. b CPP).

D. a. À l'appui de son recours, A______ reprend les faits qu’elle a dénoncés et en détaille ce qu’elle considère en être les conséquences, évoquant un litige civil avec son bailleur au sujet de la surface de son arcade. Elle sollicite du Ministère public qu’il délivre une ordonnance enjoignant à C______ de divulguer le nom de l’auteur du piratage de son compte.

b. Les 19 janvier et 12 février 2024, B______ et D______ ont informé la Chambre de céans de leur crainte de subir d’autres dommages en raison des faits dénoncés et de dégradations commises contre la boîte à lettres de leur domicile.

c. À réception des sûretés, la cause a été gardée à juger sans échange d'écritures, ni débats.

EN DROIT :

1.             1.1. Le recours est recevable pour avoir été déposé selon la forme et dans le délai prescrits (art. 385 al. 1 et 396 al. 1 CPP), concerner une ordonnance sujette à recours auprès de la Chambre de céans (art. 393 al. 1 let. a CPP) et émaner de la plaignante qui, partie à la procédure (art. 104 al. 1 let. b CPP), a qualité pour agir, ayant un intérêt juridiquement protégé à la modification ou à l'annulation de la décision querellée (art. 382 al. 1 CPP).

1.2. Bien que l'acte de recours ne contienne pas de conclusions formelles
(art. 385 al.1 CPP), on comprend que la recourante – qui agit en personne – souhaite l'annulation de l'ordonnance querellée et l'ouverture d'une instruction. Partant, le recours est recevable.

1.3. Les observations nouvelles, à savoir les courriers des 19 janvier et 12 février 2024, formulées après l’échéance du délai de recours de dix jours, sont irrecevables, car la motivation d'un acte doit donc être entièrement contenue dans le recours lui-même (arrêt du Tribunal fédéral 1B_120/2016 du 20 juin 2016 consid. 3.1). Cela étant, les lettres en cause, fussent-elles recevables, n’auraient pas été autrement examinées, leur contenu n’affectant pas directement la nature juridique du litige.

2.             La Chambre pénale de recours peut décider d'emblée de traiter sans échange d'écritures ni débats les recours manifestement irrecevables ou mal fondés (art. 390 al. 2 et 5 a contrario CPP). Tel est le cas en l'occurrence, au vu des considérations qui suivent.

3.             3.1. Conformément à l'art. 310 al. 1 let. a CPP, le Ministère public rend immédiatement une ordonnance de non-entrée en matière s'il ressort de la dénonciation ou du rapport de police que les éléments constitutifs de l'infraction ou les conditions à l'ouverture de l'action pénale ne sont manifestement pas réunis. le ministère public rend immédiatement une ordonnance de non-entrée en matière, s'il existe un empêchement de procéder.

Au moment de statuer sur l'ouverture éventuelle de l'instruction, le Ministère public doit examiner si les conditions d'exercice de l'action publique sont réunies, c'est-à-dire si les faits qui sont portés à sa connaissance sont constitutifs d'une infraction pénale et si la poursuite est recevable. Il suffit que l'un des éléments constitutifs de l'infraction ne soit manifestement pas réalisé pour que la non-entrée en matière se justifie (Y. JEANNERET / A. KUHN / C. PERRIER DEPEURSINGE (éds), Commentaire romand : Code de procédure pénale suisse, 2ème éd., Bâle 2019, n. 8 ad art. 310).

Des motifs de fait peuvent également justifier la non-entrée en matière. Il s'agit des cas où la preuve d'une infraction, soit de la réalisation en fait de ses éléments constitutifs, n'est pas apportée par les pièces dont dispose le Ministère public. Il faut que l'insuffisance de charges soit manifeste. De plus, le Ministère public doit examiner si une enquête, sous une forme ou sous une autre, serait en mesure d'apporter des éléments susceptibles de renforcer les charges contre la personne visée. Ce n'est que si aucun acte d'enquête ne paraît pouvoir amener des éléments susceptibles de renforcer les charges contre la personne visée que le Ministère public peut rendre une ordonnance de non-entrée en matière. L’impossibilité d'identifier l'auteur constitue également un motif de fait justifiant la non-entrée en matière (Y. JEANNERET / A. KUHN / C. PERRIER DEPEURSINGE (éds), op. cit., n. 9a ad art. 310). Tel est le cas lorsque l'identité de l'auteur de l'infraction ne peut vraisemblablement pas être découverte et qu'aucun acte d'enquête raisonnable ne serait à même de permettre la découverte des auteurs de l'infraction. Il en va ainsi, par exemple, si les investigations possibles doivent se dérouler, sur commissions rogatoires, dans un pays étranger pour tenter de découvrir les auteurs de l'infraction. Cela pourrait concerner notamment des détenteurs d'adresses IP, celles-ci pouvant vraisemblablement être localisées dans d'autres contrées, voire ne plus exister actuellement. Il sied dans un tel cadre de mettre en balance les intérêts en jeu (arrêt du Tribunal fédéral 1B_67/2012 du 29 mai 2012 consid. 3.2; ACPR/402/2019 du 31 mai 2019 consid. 3.1 et 3.2; ACPR/472/2021 du 14 juillet 2021 consid. 5.4).

Il en découle que le principe de proportionnalité a une portée en la matière, lui qui s'applique à toutes les activités de l'État (art. 5 al. 2 Cst.), y compris à l'activité du Ministère public et donc aux investigations pénales (A. KUHN / Y. JEANNERET / C. PERRIER DEPEURSINGE (éds), op.cit., n. 10d ad art. 310). Le caractère proportionné de l'enquête à mener est aussi reconnu par la jurisprudence relative à l'art. 4 CEDH qui impose "une exigence de célérité et de diligence raisonnable" (CourEDH Rantsev c. Chypre et Russie du 7 janvier 2010, requête no 25965/04).

3.2. En l'occurrence, si le piratage commis sur le compte de la recourante paraît avéré, il y a lieu de constater qu'aucun acte d'enquête en Suisse n’a permis d’en découvrir l'auteur. L'enquête de police n'a rien révélé et les démarches du Ministère public sont restées sans résultat. Il appert ainsi que la seule investigation qui pourrait, le cas échéant, faire avancer l'enquête, serait une commission rogatoire internationale dont l’admission par l’Irlande, pays concerné, n’est pas garantie, au regard de la gravité relative du délit en cause, de sorte que l’identification de l’auteur de l’infraction resterait, au bout du compte, impossible.

Ainsi, les chances de découvrir cet auteur, pratiquement inexistantes, doivent être mises en balance avec le coût, la durée et la complexité des démarches pouvant être entreprises. Par ailleurs, la recourante ne propose aucun autre acte d'enquête susceptible de conduire à une conclusion différente.

Dès lors, faute de soupçon sur un individu, l'enquête ne pouvait se poursuivre et c'est à bon droit que le Ministère public a renoncé à entrer en matière sur l’infraction dénoncée et aucune mesure d'instruction proportionnée ne paraît être à même de modifier ce constat.

4. Il résulte de ce qui précède que l'ordonnance querellée doit être confirmée.

5. La recourante, qui succombe, supportera les frais envers l'État, qui comprendront un émolument de CHF 1'000.- (art. 428 al. 1 CPP et 13 al. 1 du Règlement fixant le tarif des frais en matière pénale, RTFMP ; E 4 10.03).

* * * * *


 

PAR CES MOTIFS,
LA COUR :


Rejette le recours.

Condamne A______, TITULAIRE B______ aux frais de la procédure de recours, qui comprennent un émolument de CHF 1'000.-.

Notifie le présent arrêt ce jour, en copie, au recourant et au Ministère public.

Siégeant :

Madame Daniela CHIABUDINI, présidente; Madame Françoise SAILLEN AGAD, juge et Monsieur Louis PEILA, juge suppléant ; Monsieur Selim AMMANN, greffier.

 

Le greffier :

Selim AMMANN

 

La présidente :

Daniela CHIABUDINI

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Voie de recours :

 

Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière pénale au sens de l'art. 78 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110); la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 78 à 81 et 90 ss LTF. Le recours doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14. Les mémoires doivent être remis au plus tard le dernier jour du délai, soit au Tribunal fédéral soit, à l'attention de ce dernier, à La Poste Suisse ou à une représentation diplomatique ou consulaire suisse (art. 48 al. 1 LTF).


 

P/20245/2021

ÉTAT DE FRAIS

 

 

 

 


COUR DE JUSTICE

 

 

 

Selon le règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais en matière pénale (E 4 10.03).

 

Débours (art. 2)

 

 

- frais postaux

CHF

10.00

Émoluments généraux (art. 4)

 

 

- délivrance de copies (let. a)

CHF

- délivrance de copies (let. b)

CHF

- état de frais (let. h)

CHF

75.00

Émoluments de la Chambre pénale de recours (art. 13)

 

 

- décision sur recours (let. c)

CHF

1'000.00

Total

CHF

1'085.00