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Décisions | Chambre pénale de recours

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P/15410/2022

ACPR/470/2024 du 24.06.2024 sur ONMMP/4122/2023 ( MP ) , REJETE

Descripteurs : ORDONNANCE DE NON-ENTRÉE EN MATIÈRE;DÉNONCIATION CALOMNIEUSE;DIFFAMATION;CALOMNIE
Normes : CPP.310; CP.303; CP.173; CP.174

république et

canton de Genève

POUVOIR JUDICIAIRE

P/15410/2022 ACPR/470/2024

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale de recours

Arrêt du lundi 24 juin 2024

 

Entre

A______, représentée par Me Sandy ZAECH, avocate, TerrAvocats Genève, rue Saint-Joseph 29, case postale 1748, 1227 Carouge,

recourante,

contre l'ordonnance de non-entrée en matière rendue le 18 octobre 2023 par le Ministère public,

et

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, 1213 Petit-Lancy, case postale 3565, 1211 Genève 3,

intimé.


EN FAIT :

A. a. Par acte expédié le 3 novembre 2023, A______ recourt contre l'ordonnance du 18 octobre 2023, notifiée le 24 suivant, par laquelle le Ministère public a refusé d'entrer en matière sur sa plainte.

La recourante conclut, préalablement, à l'octroi de l'assistance juridique pour le recours; principalement, à l'annulation de l'ordonnance querellée et au renvoi de la cause au Ministère public pour complément d'instruction.

b. La recourante a été dispensée de verser les sûretés (art. 383 CPP).

B. Les faits pertinents suivants ressortent du dossier :

a. Le 20 juillet 2022, A______ a déposé plainte contre B______, père de ses quatre enfants, pour "dénonciation calomnieuse, diffamation ou calomnie".

En septembre 2019, B______ avait enlevé leurs enfants pour les emmener, notamment, au Maroc. Ces derniers n'étaient revenus en Suisse qu'en juillet 2020. Le 1er mars 2022, elle avait été hospitalisée en France et le Tribunal de protection de l'adulte et de l'enfant (ci-après, TPAE) avait placé, en urgence, les enfants dans un foyer. Leur père avait reçu une copie de cette décision.

Le 26 avril 2022, B______, détenu alors à la prison de C______, avait, dans un courrier adressé au Ministère public [avec copie au TPAE et au Service de protection des mineurs (ci-après: SPMi)] soutenu qu'elle était impliquée, avec sa sœur et son beau-frère, dans un trafic de drogue, de grande ampleur. Or, ces accusations étaient totalement fausses, ce que le précité savait pertinemment. Il avait agi pour que des poursuites pénales soient ouvertes contre elle et "dans l'idée" de lui nuire.

b. À l'appui de sa plainte, elle a produit cette lettre de B______ du 26 avril 2022. En plus des accusations susmentionnées, celui-ci expliquait que l'un de ses amis, détenu également à la prison de C______, l'avait vue dans un appartement, à Genève, avec deux acheteurs alors qu'elle revenait de D______ [France] avec 45 kg de "shit" et 8 kg de cocaïne. Selon cet ami – qui la connaissait alors que la réciproque n'était pas vraie – elle aurait été accompagnée de sa sœur, dont le mari serait un trafiquant de drogue en Italie. B______ ajoutait être "inquiet d'apprendre que la mère de [ses] enfants [était] impliquée dans un réseau et qu'elle [avait failli] à son devoir de protection à [leur] égard". Il relevait que sa situation "statutaire" [à elle] ne lui permettait pas de quitter la Suisse et qu'elle "devrait donc être inculpée de rupture de ban". En ce qui le concernait, il souhaitait retourner au Maroc avec ses enfants.

Elle a produit également les pages 1 et 3 du courrier du 27 mai 2022, dans lequel le SPMi suggérait au TPAE de "convoquer une audience afin d'éclaircir la situation", et demandait, dans l'intervalle, de lui "retirer la garde" des enfants; et une lettre du 8 juin 2022 de sa sœur, laquelle contestait les graves accusations de B______.

c. Entendu par la police le 20 décembre 2022, le précité a reconnu avoir rédigé le courrier dénoncé, tout en niant un quelconque caractère calomnieux ou diffamatoire de ses propos. Le codétenu qui lui avait donné les informations sur A______ se prénommait "E______", était algérien et vivait désormais en Italie. Il n'avait pas de raison de douter des propos de ce dernier, ni de douter que A______ "tremp[ait] dans le trafic de drogue pour subvenir à ses besoins". Il disait avoir "agi de la sorte car [il] étai[t] inquiet pour la sécurité de [leurs] quatre enfants et [il] voulait que les autorités investiguent". Il ne voulait pas que les enfants soient "rendus" à leur mère, laquelle les avait abandonnés et en plus, les mettait "en danger avec son trafic de drogue".

C. Dans la décision querellée, le Ministère public retient que les éléments constitutifs de l'infraction de dénonciation calomnieuse n'étaient pas réunis. Il n'était pas établi que B______ aurait dénoncé A______ alors qu'il la savait innocente. Au contraire, il avait reçu des informations de la part d'un codétenu et décidé d'en avertir les autorités compétentes, après avoir été informé du placement de ses enfants en foyer en raison de l'absence de leur mère, une telle absence pouvant s'inscrire dans le cadre des faits rapportés.

Pour les mêmes motifs, les infractions de diffamation et calomnie n'étaient pas non plus réalisées. Rien ne permettait d'établir que B______ aurait agi intentionnellement dans le but de porter atteinte à l'honneur de A______, dans la mesure où il pouvait tenir, de bonne foi, le contenu de ses accusations pour vraies.

D. a. Dans son recours, A______ estime que des doutes subsistaient, faute pour le Ministère public d'avoir vérifié l'existence du prénommé "E______" et, le cas échéant, de l'avoir entendu. Une audience de confrontation entre les parties était également nécessaire. En définitive, le prononcé d'une non-entrée en matière ne se justifiait pas à ce stade.

À l'appui de sa demande d'assistance judiciaire, elle produit une attestation d'aide financière de l'Hospice général du 3 octobre 2023.

b. Dans ses observations, le Ministère public conclut au rejet du recours. Aucun élément ne permettait d'identifier le prénommé ou surnommé "E______". À supposer que tel pût être le cas, son audition serait impossible dès lors que, selon les dires de B______, il se trouverait actuellement en Italie. Une commission rogatoire pourrait y remédier, mais elle serait disproportionnée, vu les intérêts en jeu.

c. A______ réplique, soulignant que le Ministère public n'avait même pas questionné la prison de C______ afin de savoir si un "E______" y avait résidé au moment où B______ avait envoyé son courrier. Cette simple vérification aurait permis d'accréditer ou de discréditer les propos de ce dernier.

EN DROIT :

1.             Le recours est recevable pour avoir été déposé selon la forme et dans le délai prescrits (art. 385 al. 1 et 396 al. 1 CPP), concerner une ordonnance sujette à recours auprès de la Chambre de céans (art. 393 al. 1 let. a CPP) et émaner de la plaignante qui, partie à la procédure (art. 104 al. 1 let. b CPP), a qualité pour agir, ayant un intérêt juridiquement protégé à la modification ou à l'annulation de la décision querellée (art. 382 al. 1 CPP).

2.             2.1. À teneur de l'art. 310 al. 1 let. a CPP, le ministère public rend immédiatement une ordonnance de non-entrée en matière s'il ressort de la dénonciation ou du rapport de police que les éléments constitutifs de l'infraction ou les conditions à l'ouverture de l'action pénale ne sont manifestement pas réunis.

Conformément à cette disposition, la non-entrée en matière est justifiée lorsque la situation est claire sur le plan factuel et juridique. Tel est le cas lorsque les faits visés ne sont manifestement pas punissables, faute, de manière certaine, de réaliser les éléments constitutifs d'une infraction, ou encore lorsque les conditions à l'ouverture de l'action pénale font clairement défaut. Au stade de la non-entrée en matière, on ne peut admettre que les éléments constitutifs d'une infraction ne sont manifestement pas réalisés que lorsqu'il n'existe pas de soupçon suffisant conduisant à considérer un comportement punissable ou lorsqu'un éventuel soupçon initial s'est entièrement dissipé. En revanche, si le rapport de police, la dénonciation ou les propres constatations du ministère public amènent à retenir l'existence d'un soupçon suffisant, il incombe en principe à ce dernier d'ouvrir une instruction (art. 309 al. 1 let. a CPP). Cela implique que les indices de la commission d'une infraction soient importants et de nature concrète, ce qui n'est pas le cas de rumeurs ou de suppositions. Le soupçon initial doit reposer sur une base factuelle plausible, laissant apparaître la possibilité concrète qu'une infraction ait été commise (ATF 141 IV 87 consid. 1.3.1 et arrêt du Tribunal fédéral 6B_196/2020 du 14 octobre 2020 consid. 3.1). Dans le doute, lorsque les conditions d'une non-entrée en matière ne sont pas réalisées avec une certitude absolue, l'instruction doit être ouverte
(ATF 143 IV 241 consid. 2.2.1; 138 IV 86 consid. 4.1 et arrêt du Tribunal fédéral 6B_196/2020 précité).

2.2. L'art. 303 ch. 1 CP réprime notamment du chef de dénonciation calomnieuse quiconque aura dénoncé à l'autorité, comme auteur d'un crime ou d'un délit, une personne qu'il savait innocente, en vue de faire ouvrir contre elle une poursuite pénale.

Sur le plan objectif, une dénonciation calomnieuse est composée de deux éléments, soit qu'une dénonciation soit faite et qu'elle fasse porter l'accusation sur une personne innocente. La dénonciation n'est calomnieuse que si la personne mise en cause est innocente, en ce sens qu'elle n'a pas commis les faits qui lui sont faussement imputés, soit parce que ceux-ci ne se sont pas produits, soit parce qu'elle n'en est pas l'auteur. Est "innocent" celui qui a été libéré par un jugement d'acquittement ou par le prononcé d'un classement. Le juge de la dénonciation calomnieuse est, sauf faits ou moyens de preuve nouveaux, lié par une telle décision (ATF 136 IV 170 consid. 2.1; arrêt du Tribunal fédéral 6B_483/2020 du 13 octobre 2020 consid. 1.1.1). Une dénonciation pénale n'est pas punissable du seul fait que la procédure pénale ouverte consécutivement à la dénonciation est classée. L'infraction n'est réalisée que si l'innocence de la personne dénoncée a été constatée dans une procédure précédente (ATF 136 IV 170 consid. 2.2).

Sur le plan subjectif, l'auteur doit savoir que la personne qu'il dénonce est innocente. Il ne suffit donc pas qu'il ait conscience que ses allégations pourraient être fausses. Il doit savoir que son affirmation est inexacte. Aussi, le dol éventuel ne suffit pas (ATF 136 IV 170 consid. 2.1 p. 176 et les références citées). En outre, seul l’auteur qui agit dans un dessein particulier – à savoir en vue de faire ouvrir une poursuite pénale – peut se rendre coupable de dénonciation calomnieuse. Cet article consacre ainsi une infraction subjectivement spéciale (A. MACALUSO / L. MOREILLON / N. QUELOZ (éds), Commentaire romand, Code pénal II, vol. II, Partie spéciale : art. 111-392 CP, Bâle 2017, n. 19 ad art. 303).

2.3. L'art. 173 ch. 1 CP réprime le comportement de quiconque, en s'adressant à un tiers, accuse une personne ou jette sur elle le soupçon de tenir une conduite contraire à l'honneur, ou de tout autre fait propre à porter atteinte à sa considération, de même que quiconque propage une telle accusation ou un tel soupçon.

Le fait d'accuser une personne d'avoir commis un crime ou un délit intentionnel entre dans les prévisions de l'art. 173 ch. 1 CP (ATF 132 IV 112 consid. 2.2 p. 115;
118 IV 248 consid. 2b p. 250 s.; arrêt du Tribunal fédéral 6B_138/2008 du 22 janvier 2009 consid. 3.1.).

Des déclarations objectivement attentatoires à l'honneur peuvent être justifiées par le devoir d'alléguer des faits dans le cadre d'une procédure (art. 14 CP). Le justiciable est toutefois tenu de se limiter aux déclarations nécessaires et pertinentes, respectivement de présenter comme telles de simples suppositions (ATF 135 IV 177 consid. 4; arrêt du Tribunal fédéral 6B_1254/2019 du 16 mars 2020 consid. 7.1).

Le prévenu n'encourra aucune peine s'il prouve que les allégations qu'il a articulées sont conformes à la vérité ou qu'il avait des raisons sérieuses de les tenir de bonne foi pour vraies (art. 173 ch. 2 CP); il ne sera cependant pas admis à faire ces preuves s’il s’est exprimé sans motif suffisant et a agi principalement pour dire du mal d’autrui (art. 173 ch. 3 CP).

2.4. La calomnie (art. 174 CP) est une forme qualifiée de diffamation, dont elle se distingue par le fait que les allégations propagées sont fausses (arrêt du Tribunal fédéral 6B_1215/2020 du 22 avril 2021 consid. 3.1), que l'auteur a connaissance de la fausseté de ses allégations et qu'il n'y a, dès lors, pas de place pour les preuves libératoires prévues par l'art. 173 CP (arrêt du Tribunal fédéral 6B_1286/2016 du 15 août 2017 consid. 1.2).

2.5. L'honneur protégé par ces dispositions est conçu de façon générale comme un droit au respect, qui est lésé par toute assertion propre à exposer la personne visée au mépris en sa qualité d'homme. Tel est le cas lorsqu'on évoque une infraction pénale ou un comportement clairement réprouvé par les conceptions morales généralement admises (ATF 145 IV 462 consid. 4.2.2).

2.6. Selon la jurisprudence, l'art. 303 CP prime l'art. 174 CP (ATF 115 IV I consid. 2b JdT 1990 IV 109). Au cas où l'auteur ne savait pas que la personne visée était innocente, l'art. 173 CP est applicable (M. DUPUIS / L. MOREILLON / C. PIGUET / S. BERGER / M. MAZOU / V. RODIGARI (éds), Code pénal - Petit commentaire, 2e éd., Bâle 2017, n. 31 ad art. 303).

2.7. En l'espèce, rien au dossier ne permet d'affirmer que les faits dénoncés par le mis en cause aux autorités pénales auraient été examinés, ni, a fortiori, que l'innocence de la recourante aurait été constatée par une décision au sens des principes jurisprudentiels sus-rappelés. Partant, les conditions de l'art. 303 CP ne sont pas réunies (cf. ACPR/277/2024 du 22 avril 2024 consid. 2.4).

Par ailleurs, si les accusations portées par le mis en cause contre la recourante pourraient être attentatoires à l'honneur de cette dernière – puisque le précité a jeté sur elle le soupçon de s'adonner à un important trafic de drogue, soit de commettre une infraction pénale grave –, elles ont été formulées dans une dénonciation pénale, de sorte que, même si l'accusation était inexacte, les propos et assertions n'ont dépassé ni ce qui était nécessaire à la dénonciation, ni le cercle étroit de personnes tenues au secret professionnel. Ainsi, placés dans leur contexte, les propos litigieux paraissent justifiés sous l'angle de l'art. 14 CP. Quoi qu'il en soit, le mis en cause allègue avoir appris les faits dénoncés par un co-détenu dénommé "E______". Or, on ignore s'il s'agit là d'un véritable prénom ou d'un surnom et aucun nom n'est avancé, de sorte que l'acte d'enquête souhaité par la recourante paraît d'emblée voué à l'échec.

Dans ces circonstances, c'est à bon droit que le Ministère public a refusé d'entrer en matière sur la plainte.

3.             Justifiée, l'ordonnance querellée sera donc confirmée.

4.             La recourante sollicite l'assistance judiciaire gratuite pour la procédure de recours.

Vu l'issue du recours, la demande de la recourante doit être rejetée, étant précisé qu'il n'y a pas lieu d'examiner celle-ci sous l'angle du nouveau droit dans la mesure où les actes entrepris et son recours sont antérieurs à l'entrée en vigueur des nouvelles dispositions du CPP en la matière. Le résultat aurait, quoi qu'il en soit, été le même vu le rejet du recours.

5.             La recourante, qui succombe, supportera les frais envers l'État, qui seront fixés en totalité à CHF 600.- pour tenir compte de sa situation financière (art. 428 al. 1 CPP et 13 al. 1 du Règlement fixant le tarif des frais en matière pénale, RTFMP ; E 4 10.03).

* * * * *


 

PAR CES MOTIFS,
LA COUR :


Rejette le recours.

Rejette la demande d'assistance juridique gratuite pour l'instance de recours.

Condamne A______ aux frais de la procédure de recours, arrêtés à CHF 600.-.

Notifie le présent arrêt, en copie, à la recourante, soit pour elle son conseil, et au Ministère public.

Siégeant :

Madame Daniela CHIABUDINI, présidente; Mesdames Valérie LAUBER et Françoise SAILLEN AGAD, juges; Monsieur Selim AMMANN, greffier.

 

Le greffier :

Selim AMMANN

 

La présidente :

Daniela CHIABUDINI

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Voie de recours :

 

Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière pénale au sens de l'art. 78 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110); la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 78 à 81 et 90 ss LTF. Le recours doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14. Les mémoires doivent être remis au plus tard le dernier jour du délai, soit au Tribunal fédéral soit, à l'attention de ce dernier, à La Poste Suisse ou à une représentation diplomatique ou consulaire suisse (art. 48 al. 1 LTF).


 

P/15410/2022

ÉTAT DE FRAIS

 

 

 

 


COUR DE JUSTICE

 

 

 

Selon le règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais en matière pénale (E 4 10.03).

 

Débours (art. 2)

 

 

- frais postaux

CHF

10.00

Émoluments généraux (art. 4)

 

 

- délivrance de copies (let. a)

CHF

- délivrance de copies (let. b)

CHF

- état de frais (let. h)

CHF

75.00

Émoluments de la Chambre pénale de recours (art. 13)

 

 

- décision sur recours (let. c)

CHF

515.00

Total

CHF

600.00