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Décisions | Chambre pénale de recours

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P/1558/2024

ACPR/191/2024 du 14.03.2024 sur ONMMP/534/2024 ( MP ) , REJETE

Descripteurs : SOUPÇON;MISE EN DANGER DE LA VIE D'AUTRUI(ART. 129 CP);ASSISTANCE JUDICIAIRE;FRAIS JUDICIAIRES
Normes : CPP.310; CPP.136.al2.letb

république et

canton de Genève

POUVOIR JUDICIAIRE

P/1558/2024 ACPR/191/2024

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale de recours

Arrêt du jeudi 14 mars 2024

 

Entre

A______, domicilié c/o B______, ______ [GE], agissant en personne,

recourant,

contre l'ordonnance de non-entrée en matière rendue le 5 février 2024 par le Ministère public,

et

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, 1213 Petit-Lancy - case postale 3565, 1211 Genève 3,

intimé.


EN FAIT :

A. Par acte expédié le 19 février 2024, A______ recourt contre l'ordonnance du 5 février 2024, notifiée le 8 suivant, par laquelle le Ministère public a refusé d'entrer en matière sur ses plaintes pénales.

Le recourant conclut à l'annulation de cette décision et sollicite l'assistance judiciaire pour le recours (dispense des frais de procédure).

B. Les faits pertinents suivants ressortent du dossier :

Par pli posté le 16 janvier 2024, reçu le lendemain par le Ministère public, A______, requérant d'asile, a déposé trois plaintes pénales, au contenu identique, contre, respectivement, la Dre C______, médecin-psychiatre, D______, psychologue, et l'association E______.

En substance, il leur reprochait de ne lui avoir prescrit aucun traitement médicamenteux ni thérapie adaptés à ses besoins. Il avait ainsi commis, le 19 octobre 2023, une tentative de suicide.

Il produisait à l'appui :

- la deuxième page d'un rapport médical établi par les HUG le 19 octobre 2023 indiquant qu'il avait consulté de lui-même après un abus médicamenteux; qu'il était suivi depuis environ 2 ans par D______ auprès de l'association E______; qu'il lui avait demandé d'établir un certificat médical pour appuyer sa demande de permis de séjour; qu'il s'était ensuite ravisé sur les conseils d'un ami, avait effacé une partie du certificat et demandé à sa psychologue de le modifier; qu'un conflit avec elle aurait alors éclaté; que triste et en colère, il était rentré chez lui et avait pris de manière impulsive 10 comprimés de Dafalgan et de Tramal (500 mg) pour se suicider; qu'il était ensuite sorti marcher dans la rue, avait bu et fumé puis s'était rendu aux Urgences. Il avait expliqué n'avoir plus d'idées suicidaires – son geste impulsif étant directement lié au conflit avec sa psychologue – et refusait toute hospitalisation. Il s'engageait à revenir aux Urgences en cas de péjoration de son état;

- un document caviardé établi le 13 octobre 2023 par la Dre C______ et D______, notant une légère amélioration de l'état de santé (trouble panique, anxiété généralisée et épisode dépressif sévère sans symptômes psychotiques) du patient depuis septembre. Sous la rubrique "Traitement nécessaire et adéquat à entreprendre" il était indiqué qu'il serait nécessaire d'intensifier le suivi psychothérapeutique (actuellement hebdomadaire) et de l'étayer par une aide médicamenteuse, "en négociation".

C. À l'appui de sa décision querellée, le Ministère public constate que les éléments dénoncés ne remplissaient pas les éléments constitutifs d'une quelconque infraction pénale.

D. a. À l'appui de son recours, A______ se plaint de ce que ces trois plaintes dirigées contre trois personnes/entité différentes aient été traitées ensemble. Les soignantes visées avaient décidé de mettre sa vie en danger en ne lui prescrivant pas de médicaments, alors qu'il en avait besoin, selon le rapport qu'il avait produit. Le Ministère public aurait dû les entendre. Qu'il ait ensuite refusé d'être hospitalisé n'y changeait rien.

Il produit la première page du rapport médical des HUG le 19 octobre 2023, de laquelle il ressort notamment qu'il souffrait d'un épisode dépressif moyen lié à un problème social, était suivi par D______ et ne prenait plus de psychotrope.

b. À réception du recours, la cause a été gardée à juger sans échange d'écritures, ni débats.

EN DROIT :

1.             1.1. Le recours est recevable pour avoir été déposé selon la forme et dans le délai prescrits (art. 90 al. 2, 385 al. 1 et 396 al. 1 CPP), concerner une ordonnance sujette à recours auprès de la Chambre de céans (art. 393 al. 1 let. a CPP) et émaner du plaignant qui, partie à la procédure (art. 104 al. 1 let. b CPP), a qualité pour agir, ayant un intérêt juridiquement protégé à la modification ou à l'annulation de la décision querellée (art. 382 al. 1 CPP).

1.2. La pièce nouvelle produite par le recourant devant la Chambre de céans est recevable (arrêt du Tribunal fédéral 1B_550/2022 du 17 novembre 2022 consid. 2.1).

2.             La Chambre pénale de recours peut décider d'emblée de traiter sans échange d'écritures ni débats les recours manifestement irrecevables ou mal fondés (art. 390 al. 2 et 5 a contrario CPP). Tel est le cas en l'occurrence, au vu des considérations qui suivent.

3.             3.1. À teneur de l'art. 310 al. 1 let. a CPP, le ministère public rend immédiatement une ordonnance de non-entrée en matière s'il ressort de la dénonciation que les éléments constitutifs de l'infraction ou les conditions à l'ouverture de l'action pénale ne sont manifestement pas réunis.

Conformément à cette disposition, la non-entrée en matière est justifiée lorsque la situation est claire sur le plan factuel et juridique. Tel est le cas lorsque les faits visés ne sont manifestement pas punissables, faute, de manière certaine, de réaliser les éléments constitutifs d'une infraction, ou encore lorsque les conditions à l'ouverture de l'action pénale font clairement défaut. Au stade de la non-entrée en matière, on ne peut admettre que les éléments constitutifs d'une infraction ne sont manifestement pas réalisés que lorsqu'il n'existe pas de soupçon suffisant conduisant à considérer un comportement punissable ou lorsqu'un éventuel soupçon initial s'est entièrement dissipé. En revanche, si le rapport de police, la dénonciation ou les propres constatations du ministère public amènent à retenir l'existence d'un soupçon suffisant, il incombe en principe à ce dernier d'ouvrir une instruction (art. 309 al. 1 let. a CPP). Cela implique que les indices de la commission d'une infraction soient importants et de nature concrète, ce qui n'est pas le cas de rumeurs ou de suppositions. Le soupçon initial doit reposer sur une base factuelle plausible, laissant apparaître la possibilité concrète qu'une infraction ait été commise (ATF 141 IV 87 consid. 1.3.1; arrêt du Tribunal fédéral 6B_196/2020 du 14 octobre 2020 consid. 3.1).

3.2. En l'espèce, le recourant semble reprocher aux deux praticiennes mises en cause de ne pas lui avoir prescrit une thérapie et une médication adéquate le 13 octobre 2023, ce qui l'avait conduit à commettre un tentamen le 19 suivant, et d'avoir ainsi mis sa vie en danger.

Il produit à cet égard un document daté du 13 octobre 2023, partiellement tronqué par ses soins, de sorte que les conclusions qu'il en tire doivent être appréhendées avec circonspection. On en ignore l'intitulé ni dans quel contexte ou à quelles fins dit document a été établi. Mais surtout, on ne saurait en déduire, comme le fait le recourant, que les deux mises en cause auraient failli dans leur mission de soins. Si elles semblent préconiser une intensification du suivi psychothérapeutique, assorti d'une médication, elles mentionnent également que tel traitement est en négociation, ce qui ne le rend pas impératif.

La situation du recourant décrite médicalement le 19 octobre 2023 n'apparaît par ailleurs aucunement alarmiste, étant relevé qu'il s'est présenté de lui-même aux Urgences après son tentamen médicamenteux, rien n'indiquant au demeurant que sa vie ait été mise concrètement en danger. Il a par ailleurs expliqué n'avoir plus d'idées suicidaires – son geste impulsif étant lié au conflit avec sa psychologue –, avoir refusé toute hospitalisation et s'être engagé à consulter en cas de péjoration de son état.

Force est dès lors de constater qu'on ne décèle aucun indice de la commission d'une quelconque infraction de mise en danger en amont de cet épisode, que ce soit de la part des deux mises en cause ou de l'association dont l'une d'elle dépend.

Leur audition n'est pas de nature à renforcer une prévention déjà inexistante.

Enfin, le recourant ne saurait faire grief au Ministère public d'avoir traité ensemble ses trois plaintes et rendu une seule décision en ce qui les concerne, vu leur identité de motifs.

4. Justifiée, l'ordonnance querellée sera donc confirmée.

5. Cette issue scelle le sort de la demande d’assistance judiciaire gratuite sous forme d'exonération des frais de justice (art. 136 al. 2 let. b CPP), dès lors que la procédure pénale était vouée à l'échec. La demande d'assistance judiciaire sera par conséquent rejetée.

6. En tant qu'il succombe, le recourant supportera les frais envers l'État, qui, compte tenu de sa situation financière qui n'apparaît pas favorable, seront réduits et fixés en totalité à CHF 500.- (art. 428 al. 1 CPP et 13 al. 1 du Règlement fixant le tarif des frais en matière pénale, RTFMP ; E 4 10.03).

* * * * *


 

 

PAR CES MOTIFS,
LA COUR :

 

Rejette le recours.

Rejette la demande d'assistance juridique gratuite.

Condamne A______ aux frais de la procédure de recours, arrêtés à CHF 500.-.

Notifie le présent arrêt, en copie, au recourant et au Ministère public.

Siégeant :

Monsieur Christian COQUOZ, président; Mesdames Corinne CHAPPUIS BUGNON et Alix FRANCOTTE CONUS, juges; Madame Arbenita VESELI, greffière.

 

La greffière :

Arbenita VESELI

 

Le président :

Christian COQUOZ

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Voie de recours :

 

Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière pénale au sens de l'art. 78 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110); la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 78 à 81 et 90 ss LTF. Le recours doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14. Les mémoires doivent être remis au plus tard le dernier jour du délai, soit au Tribunal fédéral soit, à l'attention de ce dernier, à La Poste Suisse ou à une représentation diplomatique ou consulaire suisse (art. 48 al. 1 LTF).


 

P/1558/2024

ÉTAT DE FRAIS

 

 

 

 


COUR DE JUSTICE

 

 

 

Selon le règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais en matière pénale (E 4 10.03).

 

Débours (art. 2)

 

 

- frais postaux

CHF

10.00

Émoluments généraux (art. 4)

 

 

- délivrance de copies (let. a)

CHF

- délivrance de copies (let. b)

CHF

- état de frais (let. h)

CHF

75.00

Émoluments de la Chambre pénale de recours (art. 13)

 

 

- décision sur recours (let. c)

CHF

415.00

-

CHF

Total

CHF

500.00