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Décisions | Chambre pénale de recours

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P/23468/2023

ACPR/902/2023 du 15.11.2023 sur OMP/20018/2023 ( MP ) , REJETE

Descripteurs : AUTOPSIE
Normes : cpp.253; cpp.382

république et

canton de Genève

POUVOIR JUDICIAIRE

P/23468/2023 ACPR/902/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale de recours

Arrêt du mercredi 15 novembre 2023

 

Entre

A______ et B______, domiciliés ______ [GE], agissant en personne,

recourants,

contre l'ordonnance rendue le 25 octobre 2023 par le Ministère public,

et

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, 1213 Petit-Lancy - case postale 3565, 1211 Genève 3,

intimé.


Vu :

-       l'ordonnance du 25 octobre 2023 par laquelle le Ministère public a ordonné l'autopsie et les examens toxicologiques du corps de C______, né le ______ 1973, décédé à son domicile;

-       le recours, reçu le lendemain au greffe de la Chambre de céans, formé par l'épouse du défunt, B______, et son fils, A______;

-       le rapport de police du 26 octobre 2023;

-       les observations du Ministère public du même jour concluant au rejet de l'effet suspensif ainsi que du recours au fond;

-       l'ordonnance du 26 octobre 2023 de la Direction de la procédure de la Chambre de céans (OCPR/65/2023), notifiée aux recourants le 30 suivant, rejetant la demande d'effet suspensif, leur communiquant les observations du Ministère public et leur impartissant un délai de cinq jours dès réception pour éventuellement répliquer;

-       l'absence de réponse des recourants;

-       l’autopsie du défunt réalisée le 27 octobre 2023 et la libération du corps ordonnée le même jour par le Ministère public.

Attendu que :

-       selon le rapport de police, le corps de C______ a été retrouvé inanimé, allongé sur le sol de sa chambre, par son épouse vers 17h30. Malgré un massage cardiaque prodigué par les primo-intervenants et les tentatives de réanimation des secouristes, le décès de C______ a été constaté sur place. La famille du défunt avait indiqué à la police que vers 13h30, il dormait dans son lit, étant souligné qu'il quittait rarement sa chambre en raison d'un état dépressif et souffrait en outre de diabète, d'alcoolisme, d'asthme, de tabagisme et de cholestérol. Le médecin avait établi un constat de décès à cause de dermabrasions visibles sur le haut droit du visage du défunt, compatibles avec une chute et un frottement contre le tapis;

-       par ordonnance du 25 octobre 2023, le Ministère public a ordonné l’autopsie du corps de C______;

-       les recourants indiquent que le défunt était très malade et prenait de nombreux médicaments. Il s’opposent à l’autopsie pour des raisons religieuses;

-       le Ministère public, dans ses observations, considère que la cause réelle du décès de C______ n'avait pas pu être établie. À ce stade, il n'avait notamment pas été possible d'exclure avec certitude l'éventuelle responsabilité d'un tiers, en particulier sous l'angle de l'erreur médicale et donc de la négligence. L'intérêt privé des recourants de disposer de la dépouille de C______ sans autopsie préalable ne l'emportait pas sur l'intérêt public en question.

Considérant que :

-       le recours est recevable pour avoir été déposé dans le délai prescrit (art. 396 al. 1 CPP), concerner une ordonnance sujette à recours auprès de la Chambre de céans (art. 393 al. 1 let. a CPP) et émaner de l'épouse du défunt et de son fils qui, en leur qualité de proches de la victime (art. 116 al. 2 CPP), sont habilités à contester l'autopsie ordonnée;

-       en vertu de l'art. 382 al. 1 CPP, seule la partie qui a un intérêt juridiquement protégé à la modification ou à l'annulation de la décision querellée a qualité pour recourir contre celle-ci (art. 382 al. 1 CPP). Cet intérêt doit être actuel et pratique. Ainsi, si l'intérêt actuel disparaît en cours de procédure, le recours devient sans objet et la cause est rayée du rôle (ATF 142 I 135 consid. 1.3.1 p. 143 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_1336/2018 du 19 février 2019 consid. 1.2 ; ACPR/190/2020 du 11 mars 2020 consid. 3.3);

-       en l'espèce, l'ordre d'autopsie critiqué a été exécuté et le corps du défunt restitué à sa famille;

-       partant, on peut se demander si les recourants disposent toujours d'un intérêt juridique à faire trancher leur recours;

-       cette question peut rester ouverte, dès lors que, de toute manière, le recours devrait être rejeté;

-       à teneur de l'art. 253 CPP, si, lors d'un décès, les indices laissent présumer que le décès n'est pas dû à une cause naturelle, et notamment qu'une infraction a été commise, ou que l'identité du cadavre n'est pas connue, le ministère public ordonne un premier examen du cadavre par un médecin légiste afin de déterminer les causes de la mort ou d'identifier le défunt (al. 1). Si un premier examen du cadavre ne révèle aucun indice de la commission d'une infraction et que l'identité de la personne décédée est connue, le ministère public autorise la levée du corps (al. 2). Dans le cas contraire, le ministère public ordonne la mise en sûreté du cadavre et de nouveaux examens par un institut de médecine légale ou, au besoin, une autopsie. Il peut ordonner la rétention du cadavre ou de certaines de ses parties pour les besoins de l'examen (al. 3);

-       le Tribunal fédéral a ainsi admis que l'autopsie se justifie non seulement en cas d'infraction avérée, mais également chaque fois qu'il est nécessaire de déterminer la cause précise du décès, acceptant ainsi, du point de vue du respect des droits fondamentaux, un recours relativement large à une telle mesure (T. FRACASSO / S. GRODECKI, L'examen du cadavre (art. 253 CPP) face aux droits fondamentaux, au CPP, à la médecine légale et à la pratique latine: la quadrature du cercle, in ZStrR – Band/Tome 135-2017, p. 203ss, p. 206 et les références citées);

-       quant aux recommandations R (99 3) du Comité des Ministres du Conseil de l'Europe relatives à l'harmonisation des règles en matière d'autopsie médico-légale, qui servent de base à l'interprétation de l'art. 253 CPP, elles prévoient que les autopsies devraient être réalisées dans tous les cas de mort non naturelle évidente ou suspectée, en particulier en cas de suspicion de faute médicale (art. 2 let. e) (cf. à cet égard T. FRACASSO / S. GRODECKI, op. cit., p. 219);

-       en l'occurrence, à teneur du dossier, le décès de C______ soulevait des questions, en particulier en lien avec la présence de dermabrasions sur le visage. Le médecin urgentiste a du reste délivré un constat de décès et non un certificat de décès;

-       partant, le Ministère public n'a pas contrevenu à l'art. 253 al. 1 et 3 CPP en ordonnant l'autopsie litigieuse;

-       les recourants, qui succombent, supporteront les frais envers l'État, qui comprendront un émolument de CHF 600.- (art. 428 al. 1 CPP et 13 al. 1 du Règlement fixant le tarif des frais en matière pénale, RTFMP ; E 4 10.03).

* * * * *


 

 

PAR CES MOTIFS,
LA COUR :

 

Rejette le recours pour autant qu'il conserve encore un objet.

Condamne A______ et B______ aux frais de la procédure de recours, qui comprennent un émolument de CHF 600.-.

Notifie le présent arrêt, en copie, aux recourants et au Ministère public.

 

Siégeant :

Madame Daniela CHIABUDINI, présidente; Mesdames Alix FRANCOTTE CONUS et Françoise SAILLEN AGAD, juges; Madame Oriana BRICENO LOPEZ, greffière.

 

La greffière :

Oriana BRICENO LOPEZ

 

La présidente :

Daniela CHIABUDINI

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Voie de recours :

 

Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière pénale au sens de l'art. 78 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110); la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 78 à 81 et 90 ss LTF. Le recours doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14. Les mémoires doivent être remis au plus tard le dernier jour du délai, soit au Tribunal fédéral soit, à l'attention de ce dernier, à La Poste Suisse ou à une représentation diplomatique ou consulaire suisse (art. 48 al. 1 LTF).

P/23468/2023

ÉTAT DE FRAIS

 

 

 

 


COUR DE JUSTICE

 

 

 

Selon le règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais en matière pénale (E 4 10.03).

 

Débours (art. 2)

 

 

- frais postaux

CHF

20.00

Émoluments généraux (art. 4)

 

 

- délivrance de copies (let. a)

CHF

- délivrance de copies (let. b)

CHF

- état de frais (let. h)

CHF

75.00

Émoluments de la Chambre pénale de recours (art. 13)

 

 

- décision sur recours (let. c)

CHF

600.00

Total

CHF

695.00