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Décisions | Chambre pénale de recours

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P/6636/2023

ACPR/867/2023 du 07.11.2023 sur OTMC/2847/2023 ( TMC ) , ADMIS/PARTIEL

Descripteurs : MESURE DE SUBSTITUTION À LA DÉTENTION;RISQUE DE COLLUSION;RISQUE DE RÉCIDIVE;VIOLENCE DOMESTIQUE;VICTIME
Normes : CPP.237; CPP.221; CP.180; CP.123; CP.126; CP.177

république et

canton de Genève

POUVOIR JUDICIAIRE

P/6636/2023 ACPR/867/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale de recours

Arrêt du mardi 7 novembre 2023

 

Entre

A______, domicilié ______, représenté par Me B______,

recourant,


contre l'ordonnance de prolongation des mesures de substitution rendue le 25 septembre 2023 par le Tribunal des mesures de contrainte,


et


LE TRIBUNAL DES MESURES DE CONTRAINTE
, rue des Chaudronniers 9,
1204 Genève, case postale 3715, 1211 Genève 3,

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, 1213 Petit-Lancy, case postale 3565, 1211 Genève 3,

intimés.


EN FAIT :

A. Par acte déposé le 6 octobre 2023, A______ recourt contre l'ordonnance du 25 septembre 2023, par laquelle le Tribunal des mesures de contrainte (ci-après : TMC) a prolongé les mesures de substitution en vigueur contre lui (ch. 1) et dit qu'elles courraient jusqu'au 28 mars 2024 (ch. 2).

Le recourant conclut, sous suite de frais et dépens, chiffrés à CHF 1'938.60, à l'annulation de cette décision et à la levée lesdites mesures; subsidiairement, que leur prolongation soit ordonnée pour une durée à fixer "à dire de justice" mais qui ne dépassera pas trois mois.

B. Les faits pertinents suivants ressortent du dossier :

a. A______ a été arrêté le 26 mars 2023.

Il est soupçonné de lésions corporelles simples (art. 123 CP), voies de fait (art. 126 CP), injure (art. 177 CP) et menaces (art. 180 CP) pour avoir à Genève, au domicile conjugal, sis chemin 1______ no. ______:

- depuis à tout le moins l'année 2015 jusqu'en mars 2023, à réitérées reprises, menacé de mort son épouse, C______, l'effrayant de la sorte;

- depuis à tout le moins l'année 2020, période non couverte par la prescription, jusqu'en mars 2023, à réitérées reprises, lancé des objets en direction de son épouse, dans le but de l'atteindre sans pour autant réussir, de l'avoir griffée et de lui avoir tiré les cheveux et d'avoir tenté de lui asséner des coups de pieds et de poing;

- depuis le début de l'année 2023, période couverte par le dépôt de plainte, jusqu'au 26 mars 2023, à réitérées reprises, traité son épouse, de "pute" et de "salope", l'atteignant ainsi dans son honneur.

Il lui est également reproché d'avoir, à Genève, au domicile conjugal, sis chemin 1______ no. ______, le 26 mars 2023, devant leurs enfants, D______ et E______ :

- menacé de mort son épouse, en lui disant : "je vais te pourrir la vie, je vais te tuer", l'effrayant de la sorte;

- traité son épouse de "pute" et de "salope", l'atteignant ainsi dans son honneur;

- asséné un coup de poing au front de son épouse, la blessant.

b.a. À teneur du rapport d'interpellation du 26 mars 2023, les enfants du couple ont confirmé que leur père avait, le jour-même, traité leur mère de "pute" et lui avait donné un coup de poing sur le front. C'était la première fois qu'ils assistaient à une scène de violence.

b.b. Entendue par la police le même jour, C______ a expliqué être victime de violences conjugales depuis plusieurs années. Elle vivait un enfer et avait très peur de son mari, lequel pouvait mettre ses menaces à exécution.

Au terme de son audition, elle a déposé plainte contre son mari et sollicité qu'il soit éloigné du domicile.

b.c. A______ a, quant à lui, contesté les faits reprochés. Il n'avait jamais été violent physiquement avec son épouse. Il ne se souvenait pas des mots proférés durant la dispute du 26 mars 2023 mais il s'était limité à répondre aux provocations de son épouse. Il s'agissait uniquement de "paroles en l'air". La situation conjugale était compliquée car son épouse semblait avoir honte de lui en raison de son âge. Elle ne le laissait pas participer aux activités liées aux enfants et les avait éduqués pour qu'ils ne l'aiment pas. Lui aimait sa femme.

c. À l'audience du 27 mars 2023 devant le Ministère public, le prévenu a maintenu les déclarations faites à la police. Il était soumis à son épouse et vivait un enfer à la maison. Il ne l'avait jamais frappée. C'était sa femme qui initiait les disputes et le provoquait. Elle le faisait toujours devant les enfants. Il répondait à ses provocations uniquement par des mots mais il ne s'agissait que de "paroles en l'air".

À l'issue de l'audience, la Procureure a décidé d’élargir le prévenu sous les mesures de substitution suivantes : interdiction de se rendre au domicile conjugal; interdiction d'entretenir des "rapports", sous quelque forme que ce soit, avec C______; obligation de se soumettre à un suivi thérapeutique régulier, aux rythme et conditions fixés par le thérapeute, pour ses problèmes de gestion de la violence, par exemple par le biais de l'association F______; obligation de produire en mains du Service de probation et d'insertion (ci-après, SPI), chaque mois, un certificat attestant de la régularité du suivi thérapeutique; obligation de se présenter au SPI d'ici au 30 mars 2023; obligation de suivre les règles ordonnées par ledit Service dans le cadre du suivi des mesures de substitution.

Le précité a acquiescé à ces mesures.

d. Par ordonnance du 28 mars 2023, le TMC a ratifié ces mesures et en a fixé l’expiration au 26 septembre 2023.

e. À l'audience de confrontation du 31 mai 2023, les parties ont maintenu leurs positions, chacune indiquant être soumise à l'autre.

f. Par mandat d'actes d'enquête du 1er juin 2023, le Ministère public a notamment délégué à la police l'audition de témoins, à savoir les enfants du prévenu issus d'une précédente union, ainsi que la sœur de la plaignante.

Il ressort de ces auditions que la sœur de la plaignante corrobore les propos de cette dernière, ajoutant avoir peur que le mari de celle-ci la tue, et avoir vu des marques rouges sous l'œil de sa sœur 4 ou 5 ans plus tôt. Les enfants du prévenu, majeurs, confirment, quant à eux, la position défendue par celui-ci, soit qu'il est soumis à son épouse et que les enfants du couple sont manipulés par leur mère.

g. Par pli du 25 août 2023, le Ministère public a demandé au Tribunal civil de lui tenir copie du rapport d'évaluation sociale du Service d'évaluation et d'accompagnement de la séparation parentale (ci-après, SEASP). Ce dernier l'a informé que ce rapport n'avait pas encore été rendu.

h. La plaignante s'est régulièrement plainte auprès du Ministère public que le prévenu ne respectait pas les interdictions d'entretenir des rapports, sous quelque forme que ce soit, avec elle et de se rendre au domicile conjugal. Il se rendrait très souvent à l'école des enfants et également en bas de son domicile, la dernière fois le 31 août 2023, et lui aurait envoyé plusieurs messages via l'application What's app de leur fils, la dernière fois le 7 juillet 2023, lui demandant notamment de retirer sa plainte car cela pourrait "baisser la condamnation".

i. Le 12 septembre 2023, le Ministère public a invité le prévenu à respecter les diverses mesures de substitutions auxquelles il était soumis.

j. Le 18 septembre 2023, la Procureure a saisi le TMC d’une requête en prolongation des mesures de substitution en cours, motif pris d’un risque de collusion qui perdurait vis-à-vis de la plaignante, ainsi que d'un risque de réitération, les faits de violences conjugales dénoncés s'étant déroulés sur une longue période et la police étant intervenue, en 2015, à leur domicile, à la suite d'une dispute.

k. Le prévenu s’est opposé à la requête.

C. Dans l'ordonnance attaquée, le TMC retient que les charges – sans conteste graves –demeuraient suffisantes pour justifier le maintien des mesures de substitution à la détention, considérant les déclarations de la plaignante, les photos au dossier, les constatations de la police et les déclarations de la sœur de la plaignante.

Un risque de collusion concret perdurait vis-à-vis de la plaignante malgré leur confrontation, vu les tentatives du prévenu de la contacter, faisant craindre, compte tenu de leur relation difficile, que le prévenu tente de l'influencer pour qu'elle retire sa plainte ou modifie ses déclarations.

Enfin, le risque de réitération reposait sur la durée des faits reprochés au prévenu, qui reconnaît à tout le moins disputes et injures, ainsi que sur une intervention de la police au domicile du couple en 2015 à la demande de la plaignante.

D. a.a. À l'appui de son recours, A______ fait valoir qu'il n'existait ni de charges suffisantes ni de risque de collusion ou de réitération.

En premier lieu, les témoignages des enfants issus de son premier mariage corroboraient ses déclarations quant à l'aliénation parentale exercée par son épouse sur leurs enfants communs. De plus, la plaignante ne s'était pas rendue chez un médecin pour un constat; seules les photographies prises par la police mettaient en évidence une légère rougeur sur son front. Le témoignage de la sœur de la plaignante ne revêtait aucun caractère déterminant, dès lors qu'il s'agissait pour l'essentiel d'un témoignage par "ouï-dire".

En deuxième lieu, le risque de collusion était "tout au plus" abstrait. Une audience de confrontation des parties avait déjà eu lieu. Il avait introduit une requête de mesures protectrices de l'union conjugale. Les violences conjugales étant poursuivies d'office, un retrait de plainte n'aurait aucun effet sur la procédure pénale en cours en ce qu'elle concerne les lésions corporelles et les menaces. Le Ministère public n'envisageait plus aucune mesure d'instruction que celle d'obtenir le rapport du SEASP.

Enfin, il n'avait aucun antécédent de violence conjugale ni de violence à l'égard de tiers. Des insultes, mêmes durables, ne justifiaient pas des mesures de substitution. Les violences physiques et les menaces n'étaient pas avérées. Les déclarations – contestées – de la partie plaignante ne sauraient à elles seules justifier le risque de réitération dès lors qu'elles ne reposent sur aucun élément concret. L'intervention de la police en 2015 était trop ancienne pour justifier un tel risque en 2023 alors qu'aucune plainte n'avait été déposée à l'époque.

De surcroît, la peine encourue paraissait proche de la durée des mesures de substitution déjà subies, si bien que leur prolongation violait le principe de la proportionnalité. Au regard du principe de célérité, ladite prolongation ne se justifiait également pas.

Subsidiairement, les conditions du "cas exceptionnel" permettant une prolongation de six mois n'étaient pas réalisées en l'espèce. Le fait que la durée de la prolongation permettrait de couvrir non seulement la période allant jusqu'à la clôture de l'instruction mais également le délai de mise en accusation devant le tribunal n'avait rien d'exceptionnel au sens de la disposition légale précitée. La prolongation n'aurait donc dû être prononcée que pour une durée maximale de trois mois.

a.b. Il produit, par pli du même jour, une lettre du Service de protection des mineurs (ci-après, SPMI), du 4 octobre 2023, fixant les modalités de son droit de visite avec ses enfants, dont il ressort que les parties sont "vivement" encouragées à communiquer, "au moins un minimum entre elles", dans l'intérêt de leurs enfants. L'intérêt des enfants était donc incompatible avec la prolongation des mesures de substitution, à tout le moins de celles lui interdisant d'entretenir des rapports, sous quelque forme que ce soit, avec son épouse.

b. Le TMC déclare persister dans sa décision.

c. Le Ministère public conclut au rejet du recours, sans formuler d'observations.

EN DROIT :

1. 1.1. Le recours est recevable pour avoir été déposé selon la forme et dans le délai prescrits (art. 384 let. b, 385 al. 1 et 396 al. 1 CPP), concerner une ordonnance sujette à recours auprès de la Chambre de céans (art. 222, 237 al. 4 et 393 al. 1 let. c CPP) et émaner du prévenu qui, partie à la procédure (art. 104 al. 1 let. a CPP), a qualité pour agir, ayant un intérêt juridiquement protégé à la modification ou à l'annulation de la décision querellée (art. 382 al. 1 CPP).

1.2. Les pièces nouvelles produites devant la juridiction de céans sont également recevables, la jurisprudence admettant la production de faits et de moyens de preuve nouveaux en deuxième instance (arrêt du Tribunal fédéral 1B_550/2022 du 17 novembre 2022 consid. 2.2).

2. Le recourant conteste l'existence de charges suffisantes.

2.1. Pour qu'une personne soit placée en détention provisoire ou pour des motifs de sûreté, il doit exister à son égard des charges suffisantes ou des indices sérieux de culpabilité, susceptibles de fonder de forts soupçons d'avoir commis une infraction (art. 221 al. 1 CPP). L'intensité de ces charges n'est pas la même aux divers stades de l'instruction pénale; si des soupçons, même encore peu précis, peuvent être suffisants dans les premiers temps de l'enquête, la perspective d'une condamnation doit apparaître avec une certaine vraisemblance après l'accomplissement des actes d'instruction envisageables. Au contraire du juge du fond, le juge de la détention n'a pas à procéder à une pesée complète des éléments à charge et à décharge ni à apprécier la crédibilité des personnes qui mettent en cause le prévenu. Il doit uniquement examiner s'il existe des indices sérieux de culpabilité justifiant une telle mesure (ATF 143 IV 330 consid. 2.1; 143 IV 316 consid. 3.1 et 3.2).

2.2. En l'espèce, les soupçons pesant sur le recourant – qui reconnaît l'existence d'une "banale" dispute où des injures ont été échangées – ne se sont aucunement amoindris depuis la dernière ordonnance du TMC, contre laquelle il n'avait du reste pas recouru. En effet, la plaignante a maintenu ses déclarations à l'audience de confrontation du 31 mai 2023 et les déclarations des témoins – à savoir les enfants du recourant et la sœur de la plaignante – se sont limitées à corroborer les versions données, de part et d'autres, par les parties.

Des soupçons de faits graves et suffisants continuent ainsi de peser sur le recourant.

3. Le recourant conteste tout risque de collusion et réitération.

3.1. Selon l'art. 221 al. 1 let. b CPP, applicable aux mesures de substitution par renvoi de l'art. 237 al. 4 CPP, la détention provisoire ne peut être ordonnée que lorsqu'il y a sérieusement lieu de craindre que le prévenu compromette la recherche de la vérité en exerçant une influence sur des personnes ou en altérant des moyens de preuves.

3.2. Pour admettre un risque de récidive au sens de l'art. 221 al. 1 let. c CPP, les infractions redoutées, tout comme les antécédents, doivent être des crimes ou des délits graves, au premier chef les délits de violence (ATF 143 IV 9 consid. 2.3.1 et les références). Plus l'infraction et la mise en danger sont graves, moins les exigences sont élevées quant au risque de réitération. Il demeure qu'en principe le risque de récidive ne doit être admis qu'avec retenue comme motif de détention. Dès lors, un pronostic défavorable est nécessaire pour admettre l'existence d'un tel risque (ATF 143 IV 9 consid. 2.9). Pour établir le pronostic de récidive, les critères déterminants sont la fréquence et l'intensité des infractions poursuivies. Cette évaluation doit prendre en compte une éventuelle tendance à l'aggravation telle qu'une intensification de l'activité délictuelle, une escalade de la violence ou une augmentation de la fréquence des agissements. Les caractéristiques personnelles du prévenu doivent en outre être évaluées (ATF 146 IV 326 consid. 2.3.1; arrêt du Tribunal fédéral 1B_668/2021 du 4 janvier 2022 consid. 4.1). Bien qu'une application littérale de l'art. 221 al. 1 let. c CPP suppose l'existence d'antécédents, le risque de réitération peut être également admis dans des cas particuliers alors qu'il n'existe qu'un antécédent, voire aucun dans les cas les plus graves. La prévention du risque de récidive doit en effet permettre de faire prévaloir l'intérêt à la sécurité publique sur la liberté personnelle du prévenu (ATF 137 IV 13 consid. 3-4).

3.3. Conformément au principe de la proportionnalité (art. 36 al. 3 Cst., concrétisé par l'art. 237 al. 1 CPP), le tribunal compétent ordonne une ou plusieurs mesures moins sévères en lieu et place de la détention si elles permettent d'atteindre le même but que la détention, par exemple l'interdiction d'entretenir des relations avec certaines personnes (al. 2 let. g). Cette disposition a été conçue avant tout pour éviter les risques de collusion ou de récidive, p. ex. en matière de violences domestiques (Y. JEANNERET / A. KUHN / C. PERRIER DEPEURSINGE (éds), Commentaire romand : Code de procédure pénale suisse, 2ème éd., Bâle 2019, n. 14 ad art. 237).

3.4. En l'occurrence, les époux ont été dûment confrontés et ont pu faire valoir leurs versions respectives. Le Ministère public n'envisage plus aucune autre mesure d'instruction que celle d'obtenir le rapport du SEASP, qui vise un autre contexte, soit celui de la séparation matrimoniale et les aptitudes parentales. Le risque de collusion, sous cet angle, s'est donc fortement amoindri.

Reste qu'on ne peut exclure que le recourant n'en profite, si l'interdiction de contact avec son épouse était levée, pour l'influencer ou faire pression sur elle afin qu'elle retire sa plainte ou modifie ses déclarations en sa faveur, puisqu'il a, malgré cette interdiction, déjà tenté de la contacter – notamment à cette fin –, à plusieurs reprises, et ce jusqu'à fin août 2023.

Il en résulte que le risque de collusion vis-à-vis de son épouse reste concret et que l'interdiction de contact en vigueur doit être maintenue.

Sous l'angle du risque de réitération, le recourant n'a certes pas d'antécédent judiciaire – en lien avec des actes de violences conjugales –, mais les faits soupçonnés se sont déroulés sur une longue période, entre 2015 et mars 2023, une intervention policière ayant du reste eu lieu au domicile conjugal en 2015.

La constance avec laquelle le recourant accuse son épouse d'avoir porté de fausses accusations contre lui apparaît, de plus, source de tensions. Les reproches qu'il nourrit contre son épouse (aliénation parentale, troubles obsessionnels compulsifs) semblent en outre perdurer. Si on ajoute à cela les nombreuses tentatives d'entrer en contact avec l'intéressée, malgré les mesures de substitution, on constate que le risque que le prévenu s'en prenne à nouveau à celle-ci n'est, à ce stade, pas exclu.

Les mesures ordonnées paraissent ainsi aptes et adéquates encore à ce jour pour diminuer le risque de récidive que présente le recourant.

4. Le recourant invoque une violation du principe de la proportionnalité.

4.1. À teneur des art. 197 al. 1 et 212 al. 3 CPP, les autorités pénales doivent respecter le principe de la proportionnalité lorsqu'elles appliquent des mesures de contrainte.

Les mesures de substitution ne sauraient sans autre être considérées comme des atteintes bénignes aux droits fondamentaux du prévenu (ATF 141 IV 190 consid. 3.3). À l'instar de la détention provisoire ou pour des motifs de sûreté, les mesures de substitution doivent en tout temps demeurer proportionnées au but poursuivi, tant par leur nature que par leur durée (ATF 140 IV 74 consid. 2.2). Il y a lieu de tenir compte également de la durée probable de la peine privative de liberté pour apprécier celle admissible de la détention avant jugement (ATF 133 I 168 consid. 4.1).

4.2. Selon l'art. 227 al. 7 CPP, applicable par le renvoi de l'art. 237 al. 4 CPP, la prolongation peut être de trois mois au plus, et de six mois dans des cas exceptionnels (ATF 141 IV 190 consid. 3.3).

4.3. En l'espèce, les mesures de substitution ordonnées conservent leur pertinence à ce stade, compte tenu des risques de récidive et de collusion qui subsistent.

Néanmoins, l'interdiction faite au recourant d'entretenir des rapports, sous quelque forme que ce soit, avec son épouse paraît difficilement compatible avec l'intérêt de leurs enfants, selon la missive du SPMI, du 4 octobre 2023, qui encourage notamment les parties à communiquer un minimum entre elles.

Dans ces circonstances, fixer les mesures pour la durée maximale autorisée de six mois apparaît disproportionné à ce stade de la procédure, ce d'autant que le Ministère public semble sur le point de clore l'instruction, puisqu'il n'envisage pas d'autre acte d'instruction que le versement du rapport du SEASP qui – tel que relevé ci-dessus – vise un autre contexte, soit celui de la séparation matrimoniale.

Une prolongation des mesures de substitution pour une durée de 4 mois paraît par conséquent en adéquation avec le but poursuivi, soit pallier aux risques de collusion et de récidive, et suffisante pour que le Ministère public clôture l'instruction et décide de la suite à donner à la procédure.

5. Le recours s'avère ainsi partiellement fondé. L'ordonnance querellée sera annulée en tant qu'elle prolonge les mesures de substitutions pour une durée de 6 mois, soit jusqu'au 28 mars 2024 (ch. 2) et confirmée pour le surplus. Cela étant, la prolongation des mesures de substitution sera ordonnée pour une durée de 4 mois, soit jusqu'au 28 janvier 2024.

6. Bien que le recourant n'obtient que partiellement gain de cause, il ne supportera pas les frais de la procédure de recours (art. 428 al. 1 CPP et 13 al. 1 du Règlement fixant le tarif des frais en matière pénale, RTFMP ; E 4 10.03).

7. L'indemnité de son défenseur d’office sera fixée à la fin de la procédure (art. 135 al. 2 CPP).

* * * * *


 


PAR CES MOTIFS,
LA COUR :

 

Admet partiellement le recours.

Annule l'ordonnance querellée en tant qu'elle prolonge les mesures de substitution pour une durée de 6 mois, soit jusqu'au 28 mars 2024 (ch. 2).

Dit que les mesures de substitution sont prolongées pour une durée de 4 mois, soit jusqu'au 28 janvier 2024, à charge de la Direction de la procédure d'en requérir la prolongation si elle l'estime nécessaire.

Rejette le recours pour le surplus.

Laisse les frais de la procédure de recours à la charge de l'État.

Notifie le présent arrêt, en copie, au recourant (soit, pour lui, son défenseur), au Ministère public et au Tribunal des mesures de contrainte.

Le communique, pour information, au Service de probation et d'insertion et à la partie plaignante, soit pour elle son conseil.

Siégeant :

Madame Daniela CHIABUDINI, présidente; Monsieur Christian COQUOZ et Madame Alix FRANCOTTE CONUS, juges; Madame Arbenita VESELI, greffière.

 

La greffière :

Arbenita VESELI

 

 

La présidente :

Daniela CHIABUDINI

 

 

 

 

Voie de recours :

 

Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière pénale au sens de l'art. 78 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110); la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 78 à 81 et 90 ss LTF. Le recours doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14. Les mémoires doivent être remis au plus tard le dernier jour du délai, soit au Tribunal fédéral soit, à l'attention de ce dernier, à La Poste Suisse ou à une représentation diplomatique ou consulaire suisse (art. 48 al. 1 LTF).