Aller au contenu principal

Décisions | Chambre pénale de recours

1 resultats
P/16793/2023

ACPR/874/2023 du 08.11.2023 sur ONMMP/3063/2023 ( MP ) , REJETE

Descripteurs : ORDONNANCE DE NON-ENTRÉE EN MATIÈRE;CONSTATATION DES FAITS
Normes : CPP.310

république et

canton de Genève

POUVOIR JUDICIAIRE

P/16793/2023 ACPR/874/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale de recours

Arrêt du mercredi 8 novembre 2023

 

Entre

A______, actuellement détenue à la prison de B______, ______, agissant en personne,

recourante,

 

contre l'ordonnance de non-entrée en matière rendue le 4 août 2023 par le Ministère public,

 

et

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, 1213 Petit-Lancy - case postale 3565, 1211 Genève 3,

intimé.


EN FAIT :

A. Par acte expédié le 9 août 2023, A______ recourt contre l'ordonnance du 4 précédent, par laquelle le Ministère public a refusé d'entrer en matière sur sa plainte.

La recourante, sans prendre de conclusions formelles, déclare attaquer ladite ordonnance.

B. Les faits pertinents suivants ressortent du dossier :

Le 27 juillet 2023, A______ a déposé plainte contre [l'organisation] C______.

Cette organisation avait perdu, ou jeté, son jugement du Tribunal du canton de Neuchâtel alors qu'elle devait l'envoyer à la Cour Européenne des Droits de l'Homme (ci-après: CEDH). Une femme lui avait dit de ne pas faire recours car "elle lui donne un avocat". Or, elle n'avait toujours pas d'avocat cinq mois plus tard.

Elle a joint un courrier du 12 juillet 2023, qu'elle avait reçu de la CEDH, dont il ressort en particulier qu'elle avait sollicité, le 27 juin précédent, cette juridiction d'empêcher son renvoi vers la Russie. La CEDH lui précisait qu'elle devait notamment produire les jugements des instances pénales se prononçant sur son expulsion pénale et les recours contre ces jugements.

C. Dans sa décision querellée, le Ministère public considère que les faits dénoncés par A______ ne remplissaient les éléments constitutifs d'aucune infraction.

D. a. Dans son recours, A______ précise que C______, qui était venue la voir, lui avait dit avoir posté le jugement neuchâtelois le 26 mai 2023. N'ayant rien reçu, elle en concluait que C______ avait jeté le document. Elle se demandait comment faire pour déposer son recours auprès de la CEDH. Elle joint un courrier du 17 mars 2023 du Tribunal fédéral lui confirmant le recours déposé contre le jugement cantonal.

b. Dans ses observations, le Ministère public conclut au rejet du recours. Il comprenait de la plainte que la recourante avait transmis le jugement neuchâtelois à C______ à la suite de la décision de son renvoi de Suisse. Les faits dénoncés ne réunissaient pas les éléments constitutifs d'une infraction contre le patrimoine au sens des articles 137 et suivants CP, ni d'aucune autre infraction. La recourante se plaignait principalement de la gestion de son dossier par C______, sans que ces griefs, en particulier la perte du jugement neuchâtelois, ne revêtent un caractère pénal.

c. A______ réplique que C______ pouvait redemander le jugement au tribunal de Neuchâtel et le lui envoyer.

EN DROIT :

1.             Le recours est recevable pour avoir été déposé selon la forme et – les formalités de notification n'ayant pas été respectées (art. 85 al. 2 CPP) – dans le délai prescrits (art. 385 al. 1 et 396 al. 1 CPP), concerner une ordonnance sujette à recours auprès de la Chambre de céans (art. 393 al. 1 let. a CPP) et émaner de la plaignante qui, partie à la procédure (art. 104 al. 1 let. b CPP), a qualité pour agir, ayant un intérêt juridiquement protégé à la modification ou à l'annulation de la décision querellée (art. 382 al. 1 CPP).

2.             2.1. Conformément à l'art. 310 al. 1 let. a CPP, le ministère public rend immédiatement une ordonnance de non-entrée en matière s'il ressort de la dénonciation ou du rapport de police que les éléments constitutifs de l'infraction ou les conditions à l'ouverture de l'action pénale ne sont manifestement pas réunis.

Des motifs de fait peuvent justifier la non-entrée en matière. Il s'agit des cas où la preuve d'une infraction, soit de la réalisation en fait de ses éléments constitutifs, n'est pas apportée par les pièces dont dispose le ministère public. Il faut que l'insuffisance de charges soit manifeste. Le procureur doit examiner si une enquête, sous une forme ou sous une autre, serait en mesure d'apporter des éléments susceptibles de renforcer les charges contre la personne visée. Ce n'est que si aucun acte d'enquête ne paraît pouvoir amener des éléments susceptibles de renforcer les charges contre la personne visée que le ministère public peut rendre une ordonnance de non-entrée en matière (Y. JEANNERET / A. KUHN / C. PERRIER DEPEURSINGE (éds), Commentaire romand : Code de procédure pénale suisse, 2ème éd., Bâle 2019, n. 9 ad art. 310).

La non-entrée en matière peut également résulter de motifs juridiques. La question de savoir si les faits qui sont portés à sa connaissance constituent une infraction à la loi pénale doit être examinée d'office par le ministère public. Des motifs juridiques de non-entrée en matière existent lorsqu'il apparaît d'emblée que le comportement dénoncé n'est pas punissable (Y. JEANNERET / A. KUHN / C. PERRIER DEPEURSINGE (éds), op. cit, n. 10 ad art. 310).

2.2. Selon l'art. 137 al. 1 CP, est coupable d'appropriation illégitime celui qui, pour se procurer ou procurer à un tiers un enrichissement illégitime, se sera approprié une chose mobilière appartenant à autrui.

Cette disposition présuppose notamment l'appropriation d'une chose mobilière appartenant à autrui, ainsi qu'un dessein d'enrichissement illégitime de la part de l'auteur (B. CORBOZ, Les infractions en droit suisse, volume I, 3e éd., 2010, n. 9 ss ad art. 137 CP). L'acte d'appropriation signifie tout d'abord que l'auteur incorpore économiquement la chose ou la valeur de la chose à son propre patrimoine, pour la conserver, la consommer ou pour l'aliéner ; il dispose alors d'une chose comme propriétaire, sans pour autant en avoir la qualité. L'auteur doit avoir la volonté, d'une part, de priver durablement le propriétaire de sa chose, et, d'autre part, de se l'approprier, pour une certaine durée au moins. Il ne suffit pas que l'auteur ait la volonté d'appropriation, celle-ci devant se manifester par un comportement extérieurement constatable (ATF 129 IV 223 consid. 6.2.1 p. 227 ; 121 IV 25 consid. 1c; 118 IV 148 consid. 2a). Il n'y a pas d'appropriation si d'emblée l'auteur veut rendre la chose intacte après un acte d'utilisation.

Sur le plan subjectif, l'auteur doit avoir agi intentionnellement et dans un dessein d'enrichissement illégitime. Par enrichissement, on entend la réalisation d'un dommage, à savoir une lésion au patrimoine de la victime sous la forme d'une diminution de l'actif, d'une augmentation du passif, d'une non-augmentation de l'actif ou d'une non-diminution du passif, mais aussi d'une mise en danger de celui-ci telle qu'elle a pour effet d'en diminuer la valeur du point de vue économique (ATF
121 IV 104 consid. 2c et les références citées ; arrêts du Tribunal fédéral 6B_1043/2015 du 9 décembre 2015 consid. 4.2.1 et 6B_395/2015 du 25 novembre 2015 consid. 2.2).

2.3. En l'espèce, la recourante, qui ne critique pas l'argumentation du Ministère public, n'apporte aucun élément permettant d'établir qu'elle a effectivement confié son jugement neuchâtelois à C______, ni que, si tel était le cas, celle-ci l'aurait perdu.

En toute hypothèse, le dossier ne recèle aucun indice concret et concluant laissant à penser que C______ se serait appropriée ou aurait disposé, qui plus est dans le dessein de s'enrichir, du jugement en question.

C'est, ainsi, à bon droit que le Ministère public a renoncé à entrer en matière.

3.             Justifiée, l'ordonnance querellée sera donc confirmée.

4.             La recourante, qui succombe, supportera les frais envers l'État, qui seront fixés en totalité à CHF 150.- (art. 428 al. 1 CPP et 13 al. 1 du Règlement fixant le tarif des frais en matière pénale, RTFMP ; E 4 10.03).

* * * * *



PAR CES MOTIFS,
LA COUR :


Rejette le recours.

Condamne A______ aux frais de la procédure de recours, arrêtés à CHF 150.-.

Notifie le présent arrêt, en copie, à la recourante et au Ministère public.

Siégeant :

Madame Daniela CHIABUDINI, présidente; Mesdames Alix FRANCOTTE CONUS et Françoise SAILLEN AGAD, juges ; Monsieur Julien CASEYS, greffier.

 

Le greffier :

Julien CASEYS

 

La présidente :

Daniela CHIABUDINI

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Voie de recours :

 

Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière pénale au sens de l'art. 78 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110); la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 78 à 81 et 90 ss LTF. Le recours doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14. Les mémoires doivent être remis au plus tard le dernier jour du délai, soit au Tribunal fédéral soit, à l'attention de ce dernier, à La Poste Suisse ou à une représentation diplomatique ou consulaire suisse (art. 48 al. 1 LTF).


 

 

P/16793/2023

ÉTAT DE FRAIS

 

 

 

 


COUR DE JUSTICE

 

 

 

Selon le règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais en matière pénale (E 4 10.03).

 

Débours (art. 2)

 

 

- frais postaux

CHF

10.00

Émoluments généraux (art. 4)

 

 

- délivrance de copies (let. a)

CHF

- délivrance de copies (let. b)

CHF

 

- état de frais (let. h)

CHF

75.00

Émoluments de la Chambre pénale de recours (art. 13)

 

 

- décision sur recours (let. c)

CHF

65.00

Total

CHF

150.00