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Décisions | Chambre pénale de recours

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P/16003/2022

ACPR/848/2023 du 01.11.2023 sur OTMC/2933/2023 ( TMC ) , IRRECEVABLE

Descripteurs : DÉTENTION PROVISOIRE;MINISTÈRE PUBLIC;COMPÉTENCE RATIONE LOCI;PROROGATION DE COMPÉTENCE
Normes : CPP.221; CPP.39.al2; CPP.42; CPP.41; CPP.91.al4

république et

canton de Genève

POUVOIR JUDICIAIRE

P/16003/2022 ACPR/848/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale de recours

Arrêt du mercredi 1er novembre 2023

 

Entre

A______, représenté par Me B______, avocate, ______,

recourant,

contre l'ordonnance de prolongation de la détention provisoire rendue le 3 octobre 2023 par le Tribunal des mesures de contrainte,

et

LE TRIBUNAL DES MESURES DE CONTRAINTE, rue des Chaudronniers 9, 1204 Genève,

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, 1213 Petit-Lancy - case postale 3565, 1211 Genève 3,

intimés.


Vu :

-          l'ordonnance rendue le 3 octobre 2023 par le Tribunal des mesures de contrainte (ci-après : TMC) et notifiée le 6 suivant, prolongeant la détention provisoire de A______ jusqu'au 8 janvier 2024;

-          la reprise de la procédure par le Ministère public du canton d'Argovie, par décision du 9 octobre 2023;

-          le recours interjeté par A______, le 10 octobre 2023, contre l'ordonnance du TMC, concluant à sa libération immédiate, sous suite de frais et dépens;

-          les observations du Ministère public et du TMC des 11, respectivement 12 octobre 2023;

-          la réplique de A______ du 14 octobre 2023;

-          les observations du Ministère public du canton d'Argovie du 23 octobre 2023;

-          la réplique de A______ du 27 octobre 2023.

Attendu que :

-          dans ses observations, le Ministère public du canton de Genève conclut à l'irrecevabilité du recours, dès lors que formé postérieurement à la décision de reprise d'instruction du 9 octobre 2023 du Ministère public du canton d'Argovie;

-          dans sa réplique du 14 octobre 2023, A______, par la voix de son conseil, expose avoir reçu notification de la décision de reprise de l'instruction par le Ministère public argovien le 10 octobre 2023, soit après le dépôt de son recours. En outre, dite décision était sujette à recours. Tant que le délai de 10 jours pour ce faire n'avait pas expiré, la question du for restait ouverte et la Chambre pénale de recours restait compétente pour statuer sur le contrôle de la détention;

-          interpellé sur cette question par la Direction de la procédure de la Chambre de céans, le Ministère public du canton d'Argovie considère que cette dernière n'a pas à entrer en matière sur le recours, faute de compétence. Le Tribunal des mesures de contrainte argovien était compétent pour les recours contre la détention provisoire;

-          dans sa réplique du 27 octobre 2023, A______ persiste dans ses précédentes observations.

Considérant en droit que :

-          la fixation de for est intervenue après concertation des Ministères publics des cantons de Genève et Argovie, au sens de l'art. 39 al. 2 CPP;

-          le Ministère public du canton d'Argovie a repris l'instruction de la cause par décision du 9 octobre 2023, reçue le lendemain par le recourant;

-          dite décision est ainsi antérieure au dépôt du recours, le 10 octobre 2023. Peu importe que le recourant n'en ait eu connaissance qu'après avoir expédié son recours par la poste;

-          il résulte de l’art. 39 al. 2 CPP que la volonté du législateur était de charger le ministère public, exclusivement, de traiter ces questions, quel que soit le stade de la procédure (M. NIGGLI / M. HEER / H. WIPRÄCHTIGER, Schweizerische Strafprozessordnung / Schweizerische Jugendstrafprozessordnung, Basler Kommentar StPO/JStPO, Bâle 2014, n. 8 ad art. 39);

-          la seule règlementation dérogatoire a trait aux mesures d’urgence et aux personnes arrêtées (art. 42 al. 1 et al. 2 CPP), et ce, jusqu’à ce que la compétence ait été "définitivement" fixée. La version allemande emploie à cet égard le mot "verbindlich";

-          en d’autres termes, une fois fixé le for – décision qui ne peut être revue que pour de nouveaux justes motifs (art. 42 al. 3 CPP) –, la Chambre de céans cesse d’être compétente pour connaître d'un recours en matière de détention provisoire déposé par-devant elle (Y. JEANNERET / A. KUHN / C. PERRIER DEPEURSINGE (éds), Commentaire du Code de procédure pénale, Bâle 2019, n. 6 ad art. 42);

-          or, tel est le cas en l’espèce. La Chambre de céans est liée par l’accord intervenu entre les Ministères publics concernés;

-          en outre, le recourant ne prétend pas avoir attaqué l'attribution de for décidée par les Ministères publics concernés, au sens de l'art. 41 al. 2 CPP, de sorte que celle-ci est définitivement arrêtée;

-          partant, la Chambre de céans n'a plus aucune compétence pour statuer sur le présent recours;

-          un tribunal ne pourrait, de lui-même, transférer directement une cause à un autre tribunal qui lui apparaîtrait désormais compétent (cf. N. SCHMID / D. JOSITSCH, Schweizerische Strafprozessordnung : Praxiskommentar, 4ème éd., Zurich 2023, n. 3 in fine ad art. 39). Il s’ensuit qu'il n'y a pas lieu de transmettre le recours à l’autorité compétente du canton d'Argovie. Le principe de la transmission d’office, au sens de l’art. 91 al. 4 CPP, ne vaut qu’en matière d’observation du délai de recours, lorsque l’acte est parvenu à une autorité suisse non compétente (cf. ACPR/99/2012 consid. 5);

-          il en résulte que le recours sera déclaré irrecevable;

-          exceptionnellement, les frais du présent recours seront laissés à la charge de l'État;

-          l'indemnité du défenseur d'office sera fixée à la fin de la procédure (art. 135 al. 2 CPP).

* * * * *


 

 

PAR CES MOTIFS,
LA COUR :


Déclare le recours irrecevable.

Laisse les frais de la présente instance à la charge de l'État.

Notifie le présent arrêt, en copie, préalablement par courriel, au recourant (soit, pour lui, son défenseur), au Ministère public, au Tribunal des mesures de contrainte et au Ministère public du canton d'Argovie.

Siégeant :

Monsieur Christian COQUOZ, président; Mesdames Corinne CHAPPUIS BUGNON et Alix FRANCOTTE CONUS, juges; Madame Olivia SOBRINO, greffière.

 

La greffière :

 

Olivia SOBRINO

 

Le président :

 

Christian COQUOZ

 

 

 

 

 

 

 

Voie de recours :

 

Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière pénale au sens de l'art. 78 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110); la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 78 à 81 et 90 ss LTF. Le recours doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.