Aller au contenu principal

Décisions | Chambre pénale de recours

1 resultats
P/1189/2018

ACPR/495/2023 du 26.06.2023 sur OPMP/5654/2021 ( MP ) , REJETE

Descripteurs : EXPERTISE;ACCÈS À UN TRIBUNAL;DOMMAGE IRRÉPARABLE
Normes : CPP.393.al1.letb

république et

canton de Genève

POUVOIR JUDICIAIRE

P/1189/2018 ACPR/495/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale de recours

Arrêt du lundi 26 juin 2023

 

Entre

A______, domicilié ______, comparant par Me PENET Stéphane, Etude WAEBER MAITRE,

recourant

 

contre l'ordonnance d'expertise médicale rendue le 1er mars 2023 par le Tribunal de police,

 

et

B______, domicilié ______, comparant par Me C______,

Le TRIBUNAL DE POLICE, rue des Chaudronniers 9, case postale 3715, 1211 Genève 3,

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, 1213 Petit-Lancy - case postale 3565, 1211 Genève 3,

intimés


Vu :

-        l'ordonnance pénale du 14 juin 2021 condamnant B______ pour lésions corporelles simples (art. 123 ch. 1 al. 1 CP) sur A______ et à laquelle le prévenu a fait opposition;

-        l'ordonnance sur opposition du 29 novembre 2021, par laquelle le Procureur a maintenu l'ordonnance pénale et transmis la procédure au Tribunal de police. Dans une ordonnance parallèle du même jour, il a rejeté les réquisitions de preuves de B______, et, en particulier, la mise en œuvre d'une expertise médicale destinée à confirmer la compatibilité de la blessure alléguée par A______ avec les actes reprochés; une telle expertise serait redondante au vu des pièces médicales produites, et disproportionnée au regard des intérêts en jeu;

-        la requête d'expertise médicale de A______, formulée cette fois devant le Tribunal de police le 5 septembre 2022, par B______ à laquelle la partie plaignante s'est opposée;

-        la demande du Tribunal de police faite au CURML de lui désigner un médecin chargé de réaliser "l'expertise de causalité naturelle" auquel seront soumises les hypothèses selon lesquelles les lésions constatées seraient survenues antérieurement ou postérieurement aux faits reprochés, en lien avec une autre cause;

-        l'ordonnance du 1er mars 2023, notifiée le lendemain, par laquelle le Tribunal de police a ordonné cette "expertise médicale de A______";

-        le recours expédié le 9 mars 2023 par A______ qui conclut, sous suite de frais et dépens à la charge de B______, à l'annulation de l'ordonnance querellée et à ce que le Tribunal de police tienne l'audience de jugement;

-        les observations du Tribunal de police et du Ministère public;

-        celles de B______.

Attendu que :

-        il est reproché à B______, en substance, d'avoir, à Genève le 11 janvier 2018, donné à A______ à tout le moins un coup au niveau de l'épaule et de lui avoir tordu le pouce droit, lui occasionnant de la sorte une déchirure du tendon sus-épineux de l'épaule gauche et une entorse du pouce droit, constatés médicalement le 16 janvier 2018. Le dossier contient en outre un document médical concernant une opération de l'épaule subie par la partie plaignante le 28 février 2018;

-        dans sa décision querellée, le Tribunal estime ne pas disposer des compétences médicales nécessaires à résoudre la question du lien de causalité, lequel apparaît contesté par la défense, entre les actes de violence reprochés au prévenu (coup au niveau de l'épaule; torsion du pouce droit) et les lésions constatées chez le plaignant (déchirure du tendon sus-épineux de l'épaule gauche; entorse du pouce droit), y compris les hypothèses d'une survenance des lésions constatées antérieure ou postérieure aux faits reprochés, et en lien avec une cause externe;

-        dans son recours, A______ considère que le Tribunal dispose de tous les éléments pour juger sur la base du dossier et qu'ordonner une expertise 5 ans après les faits litigieux ne pourrait apporter une réponse objective et spécifique à sa situation;

-        B______ conclut à l'irrecevabilité du recours; l'ordonnance entreprise constituait une décision concernant l'avancement de la procédure non susceptible de recours immédiat, à défaut du moindre préjudice irréparable. Le recours était en outre mal fondé.

Considérant que :

-        l'acte de recours respecte les conditions formelles de recevabilité (art. 385 et 396 CPP);

-        selon l'art. 393 al. 1 let. b CPP, le recours est recevable contre les ordonnances, les décisions et les actes de procédure des tribunaux de première instance, sauf contre ceux de la direction de la procédure. Cette disposition doit être lue en corrélation avec l'art. 65 al. 1 CPP, aux termes duquel les ordonnances rendues par les tribunaux ne peuvent être attaquées qu'avec la décision finale. Les décisions contre lesquelles un recours immédiat est exclu selon les art. 65 al. 1 et 393 al. 1 let. b in fine CPP concernent non pas celles prises par la direction de la procédure, mais celles relatives à la marche de la procédure. Il s'agit en particulier de toutes les décisions qu'exigent l'avancement et le déroulement de la procédure avant ou pendant les débats;

-        s'agissant des décisions relatives à la conduite de la procédure prises avant l'ouverture des débats, la jurisprudence a confirmé qu'il convenait de limiter l'exclusion du recours à celles qui n'étaient pas susceptibles de causer un préjudice irréparable. De telles décisions ne peuvent ainsi faire l'objet ni d'un recours au sens du CPP ni d'un recours immédiat auprès du Tribunal fédéral (cf. art. 93 al. 1 let. a LTF). À l'inverse, si la décision peut causer un préjudice irréparable, elle est en principe attaquable par la voie du recours prévu par l'art. 393 CPP, puis par le recours en matière pénale auprès du Tribunal fédéral (ATF 140 IV 202 consid. 2.1; arrêt 1B 324/2016 du 12 septembre 2016 consid. 3.1.; 1B_199/2013 du 12 novembre 2013 consid. 2; 1B_569/2011 du 23 décembre 2011 consid. 2);

-        en matière pénale, le préjudice irréparable au sens de l'art. 93 al. 1 let. a LTF, respectivement au sens du CPP (cf. art. 394 let. b CPP; arrêts 1B_50/2016 du 22 février 2016 consid. 2.1; 1B_73/2014 du 21 mai 2014 consid. 1.4; 1B_189/2012 du 17 août 2012 consid. 2.1 publié in SJ 2013 I 89), se rapporte à un dommage de nature juridique qui ne puisse pas être réparé ultérieurement par un jugement final ou une autre décision favorable au recourant (ATF 141 IV 289 consid. 1.2);

-        le recours contre l'expertise ordonnée sur la base de l'art. 182 CPP n’est recevable à teneur de l'art. 393 al. 1 let. b CPP que si la décision entraîne un préjudice irréparable (Y. JEANNERET / A. KUHN / C. PERRIER DEPEURSINGE (éds), Commentaire romand : Code de procédure pénale suisse, 2ème éd., Bâle 2019, n. 32 ad art. 182);

-        si le Tribunal fédéral a précisé que la mise en oeuvre d'une expertise psychiatrique était susceptible de porter atteinte à la sphère privée et à la personnalité du prévenu et que ce dernier disposait d'un intérêt juridique protégé à en demander l'annulation ou la modification, il n'a pas retenu l'existence d'un tel préjudice s'agissant d'une expertise d'ordre purement technique (arrêts du Tribunal fédéral 1B_242/2018 du 6 septembre 2018 consid. 2.4; 1B 605/2019  du 8 janvier 2020 consid. 2);

-        en l'espèce, le Tribunal de police a ordonné l'expertise médicale de la partie plaignante fondé sur l'art. 182 CPP – et non un examen de la personne au sens de l'art. 251 al. 4 CPP – aux fins d'établir le lien de causalité naturelle entre les faits reprochés et les lésions constatées; une telle expertise réalisée sur la base des dossiers médicaux de la partie plaignante est ainsi une expertise "technique" qui ne porte aucune atteinte à la sphère privée du recourant;

-        ainsi, faute de préjudice juridique irréparable, le recours est irrecevable;

-        serait-il recevable, il est en toute hypothèse infondé;

-        l'art. 182 CPP prévoit en effet le recours à un expert lorsque le tribunal ne dispose pas des connaissances et des capacités nécessaires pour constater ou juger un état de fait;

-        le Tribunal de police estime, à juste titre, ne pas disposer des connaissances pour apprécier et juger les "hypothèses selon lesquelles les lésions constatées seraient survenues antérieurement ou postérieurement aux faits reprochés, en lien avec une autre cause";

-        le recourant, qui succombe, supportera les frais envers l'État (art. 428 al. 1 CPP), y compris un émolument de décision de CHF 900.- (art. 3 cum art. 13 al. 1 du Règlement fixant le tarif des frais en matière pénale, RTFMP; E 4 10.03);

-        l'intimé, prévenu, n'a pas chiffré ses prétentions. L'autorité pénale devant examiner d'office ce poste (art. 429 al. 2 CPP), un montant de CHF 969.30.- ,TVA de 7.7% incluse, lui sera alloué, ex aequo et bono.

* * * * *


 

PAR CES MOTIFS,

LA COUR :

Rejette le recours, dans la mesure de sa recevabilité.

Condamne A______ aux frais de la procédure de recours fixés à CHF 900.-.

Alloue à B______, pour ses frais de défense en procédure de recours, une indemnité de CHF 969.30 TTC, à la charge de l'État.

Notifie le présent arrêt, en copie, au recourant (soit pour lui son défenseur), à l'intimé (soit pour lui son défenseur), au Tribunal de police et au Ministère public.

Siégeant :

Madame Daniela CHIABUDINI, présidente; Monsieur Christian COQUOZ et Madame Alix FRANCOTTE CONUS, juges; Madame Sarah RYTER, greffière.

 

La greffière :

Sarah RYTER

 

La présidente :

Daniela CHIABUDINI

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Voie de recours :

 

Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière pénale au sens de l'art. 78 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110); la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 78 à 81 et 90 ss LTF. Le recours doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14. Les mémoires doivent être remis au plus tard le dernier jour du délai, soit au Tribunal fédéral soit, à l'attention de ce dernier, à La Poste Suisse ou à une représentation diplomatique ou consulaire suisse (art. 48 al. 1 LTF).


 

P/1189/2018

ÉTAT DE FRAIS

 

 

 

 


COUR DE JUSTICE

 

 

 

Selon le règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais en matière pénale (E 4 10.03).

 

Débours (art. 2)

 

 

- frais postaux

CHF

20.00

Émoluments généraux (art. 4)

 

 

- délivrance de copies (let. a)

CHF

- délivrance de copies (let. b)

CHF

- état de frais (let. h)

CHF

75.00

Émoluments de la Chambre pénale de recours (art. 13)

 

 

- décision sur recours (let. c)

CHF

805.00

- demande sur récusation (let. b)

CHF

Total

CHF

900.00