Aller au contenu principal

Décisions | Chambre pénale de recours

1 resultats
P/933/2023

ACPR/398/2023 du 25.05.2023 sur OJMI/216/2023 ( JMI ) , REJETE

Descripteurs : SÉQUESTRE(MESURE PROVISIONNELLE);PREUVE
Normes : CPP.263

république et

canton de Genève

POUVOIR JUDICIAIRE

P/933/2023 ACPR/398/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale de recours

Arrêt du jeudi 25 mai 2023

 

Entre

 

A______, domicilié c/o B______, ______, comparant par Me C______, avocat,

recourant,

 

contre l'ordonnance de perquisition et de séquestre rendue le 3 février 2023 par le Juge des mineurs

 

et

 

LE JUGE DES MINEURS, rue des Chaudronniers 7, 1204 Genève, case postale 3686, 1211 Genève 3

intimé.


EN FAIT :

A. Par acte expédié le 17 février 2023, A______ recourt contre l'ordonnance du 3 février 2023, notifiée le 7 suivant, par laquelle le Juge des mineurs (ci-après, JMin) a ordonné le séquestre de son téléphone portable et d'une sacoche.

Le recourant conclut, sous suite de frais et dépens, à l'annulation de la décision querellée, à la levée immédiate du séquestre en tant qu'il porte sur son téléphone portable et à sa restitution immédiate, à l'allocation d'une juste indemnité à titre de réparation du tort moral au sens de l'art. 431 al. 1 CPP. Préalablement, il demande que la procédure P/1______/2022 soit versée à la présente procédure de recours, à titre de moyen de preuve.

B. Les faits pertinents suivants ressortent du dossier :

a.        À teneur du rapport d'arrestation du 12 janvier 2023, D______ (15 ans) avait été agressé le 11 novembre 2022 à la Gare E______ par une vingtaine de personnes qui lui avait tiré les cheveux et frappé; alors qu'il était tombé au sol, ses agresseurs l'avaient écrasé et l'avait frappé avec les poings ou avec "des trucs", et lui avait donné des coups de pied, au visage et au nez "comme si on shootait un ballon". La vidéo de l'agression filmée par l'un des protagonistes avait été retrouvée sur les réseaux sociaux.

A______, né le ______ 2006, identifié sur les images de vidéo-surveillance de F______, a été arrêté par la police le 12 janvier 2023, à son domicile. La perquisition, autorisée par le mineur ainsi que son père, a permis la saisie, dans la chambre de l'intéressé, d'un téléphone portable [de la marque] G______ et une sacoche blanche [de la marque] "H______".

b.        Le 13 janvier 2023, le JMin a prévenu A______ d’agression (art. 134 CP), voire de lésions corporelles simples aggravées (art. 123 ch. 1 et 2 CP), et de vol (art. 139 CP). L'intéressé a partiellement admis les faits.

c.         Par courrier du 30 janvier 2023, le conseil du prévenu a demandé au JMin une décision formelle de séquestre du téléphone portable de son client.

C. Dans sa décision querellée, le JMin considère qu'il était probable que le téléphone saisi contienne des informations en lien avec les activités délictueuses reprochée au prévenu et qu'il était dès lors indispensable de procéder à l'analyse de son contenu. Il n'était pas exclu que la sacoche saisie provienne d'une infraction et doive donc être confisquée. La mise sous séquestre de ces objets apparaissait en l'état comme la seule mesure susceptible de permettre leur mise en sûreté; ils seraient rendus au prévenu, à l'issue de l'enquête, s'ils n'avaient aucun lien avec les faits reprochés.

D. a. À l'appui de son recours, A______ demande l'apport de la P/1______/2022, dans laquelle il est prévenu à la suite de son arrestation du 7 décembre 2022, lors de laquelle son téléphone portable avait été saisi et était toujours en cours d'analyse à la police. Il avait acquis un nouveau téléphone portable après sa mise en liberté du 8 décembre 2022, lequel faisait l'objet du séquestre contesté. Or, les faits reprochés étaient antérieurs à sa première arrestation et au séquestre de son ancien téléphone; aucune des données contenues dans le nouvel appareil ne pourraient intéresser la procédure. Il ne lui était pas reproché d'avoir commis un acte pénalement répréhensible depuis sa mise en liberté le 8 décembre 2022, de sorte que le nouveau téléphone ne pouvait contenir, au vu de la chronologie des évènements, aucune donnée utile à la procédure. L'accès à ses données des réseaux sociaux était possible par le biais du téléphone séquestré le 7 décembre 2022 et/ou, au moyen de ses identifiants personnels sur tout support informatique disposant d'une connexion internet. Le séquestre de son nouveau téléphone n'était ni nécessaire ni proportionné.

b. Dans ses observations, le JMin conclut au rejet du recours. La procédure s'inscrivait dans un contexte de conflit entre bandes issues de différents quartiers lesquelles procédaient à des "descentes" lors desquelles les victimes étaient violement frappées, notamment avec des objets dangereux, comme dans la P/1______/2022 dans laquelle était impliqué le prévenu. Dans la présente procédure, le recourant avait confirmé qu'il s'agissait d'une "descente" mais avait tergiversé quant aux rôles des personnes impliquées. Le résultat de l'analyse du téléphone portable du prévenu, séquestré dans la procédure P/1______/2022, n'était pas encore connue. Le principe de proportionnalité était pleinement respecté au vu de la gravité des faits, des charges pesant sur le prévenu qui les reconnait partiellement, de la nécessité d'identifier tous les éventuels coauteurs et d'en cerner leur participation. La chronologie des faits et des arrestations ne permettait pas d'exclure que le téléphone portable séquestré le 3 février 2023 contiendrait des informations en lien avec les agressions reprochées. Il était hautement vraisemblable que le prévenu ait utilisé cet appareil pour contacter ses comparses, les informer de son arrestation puis de sa libération, de l'évolution de l'instruction et/ou discuter de leurs déclarations respectives dans les différentes procédures.

c. Le recourant n'ayant pas répliqué, la cause a été gardée à juger.

EN DROIT :

1.             Le recours est recevable pour avoir été déposé selon la forme et dans le délai prescrits (art. 3 al. 1 PPMin cum 396 al. 1, 390 al. 1 et 385 al. 1 CPP), contre une ordonnance de séquestre (art. 3 al. 1 PPMin cum 263 CPP), décision sujette à contestation auprès de la Chambre de céans (art. 39 al. 1 et 3 PPMin cum  393 al. 1 let. a CPP), et émaner du prévenu mineur (art. 18 let. a PPMin), qui est représenté par son père (art. 106 al. 2 CPP) et a qualité pour agir, disposant d'un intérêt juridiquement protégé (art. 38 al. 3 PPMin cum  382 CPP).

2. L'apport de la procédure P/1______/2022 n'apparaît pas utile au vu de ce qui suit.

3. Le recourant estime que le séquestre de son téléphone portable n'est ni nécessaire ni proportionné.

3.1. Selon l'art. 197 al. 1 CPP, toute mesure de contrainte doit être prévue par la loi (let. a), répondre à l'existence de soupçons suffisants laissant présumer une infraction (let. b), respecter le principe de la proportionnalité (let. c) et apparaître justifiée au regard de la gravité de l'infraction (let. d).

3.2. Le séquestre d'objets et de valeurs patrimoniales appartenant au prévenu ou à des tiers figure au nombre des mesures prévues par la loi. Il peut être ordonné, notamment, lorsqu'il est probable qu'ils seront utilisés comme moyens de preuve (art. 263 al. 1 let. a CPP), seront utilisés pour garantir le paiement des frais de procédure, des peines pécuniaires, des amendes et des indemnités (let. b) devront être restitués au lésé (let. c), devront être confisqués (let. d) ou pourraient servir à l'exécution d'une créance compensatrice (art. 71 al. 3 CP).

Une telle mesure est fondée sur la vraisemblance (ATF 126 I 97 consid. 3d/aa). Comme cela ressort de l'art. 263 al. 1 CPP, une simple probabilité suffit car la saisie se rapporte à des faits non encore établis, respectivement à des prétentions encore incertaines. L'autorité doit pouvoir décider rapidement du séquestre provisoire (art. 263 al. 2 CPP), ce qui exclut qu'elle résolve des questions juridiques complexes ou qu'elle attende d'être renseignée de manière exacte et complète sur les faits avant d'agir (ATF 141 IV 360 consid. 3.2; ATF 140 IV 57 consid. 4.1.2 et les références citées).

Ainsi, au début de l'enquête, un soupçon crédible ou un début de preuve de l'existence de l'infraction reprochée suffit à permettre le séquestre, ce qui laisse une grande place à l'appréciation du juge. On exige toutefois que ce soupçon se renforce au cours de l'instruction pour justifier le maintien de la mesure (A. KUHN / Y. JEANNERET / C. PERRIER DEPEURSINGE (éds), Commentaire romand : Code de procédure pénale suisse, Bâle 2019, n. 17/22 ad art. 263).

3.3. Dans le cas présent, le recourant est certes prévenu pour des faits qui se sont déroulé le 11 novembre 2022, mais il n'établit pas que le téléphone séquestré aurait été acheté après sa mise en liberté du 8 février 2023, de sorte qu'il ne peut être exclu qu'il l'avait déjà au moment des faits voire peu après. En outre, même s'il l'avait acquis comme il le prétend, il convient de suivre le JMin qui considère vraisemblable que le recourant, rétif à donner des informations sur les coauteurs de l'agression, ait eu des contacts avec eux de sorte que l'analyse de ce téléphone présente donc une utilité pour la manifestation de la vérité et les données qu'il contient sont des éléments de preuve. Il s'ensuit que le séquestre est nécessaire et proportionné.

4. Justifiée, l'ordonnance querellée sera donc confirmée.

5. Le recourant, qui succombe, supportera les frais envers l'État fixés en totalité à CHF 500.- (art. 428 al. 1 CPP et 13 al. 1 du Règlement fixant le tarif des frais en matière pénale, RTFMP ; E 4 10.03).

6.   L'indemnité du défenseur d'office sera fixée à la fin de la procédure (art. 135 al. 2 CPP).

* * * * *


 

 

PAR CES MOTIFS,
LA COUR :

Rejette le recours.

Condamne A______ aux frais de la procédure de recours, arrêtés à CHF 500.-.

Notifie le présent arrêt ce jour, en copie, à A______, soit pour lui son conseil, et au Ministère public.

Siégeant :

Madame Daniela CHIABUDINI, présidente; Mesdames Alix FRANCOTTE CONUS et Françoise SAILLEN AGAD, juges; Monsieur Xavier VALDES greffier.

Le greffier :

Xavier VALDES

 

La présidente :

Daniela CHIABUDINI

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Voie de recours :

 

Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière pénale au sens de l'art. 78 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110); la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 78 à 81 et 90 ss LTF. Le recours doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14. Les mémoires doivent être remis au plus tard le dernier jour du délai, soit au Tribunal fédéral soit, à l'attention de ce dernier, à La Poste Suisse ou à une représentation diplomatique ou consulaire suisse (art. 48 al. 1 LTF).


 

P/933/2023

ÉTAT DE FRAIS

 

 

 

 


COUR DE JUSTICE

 

 

 

Selon le règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais en matière pénale (E 4 10.03).

 

Débours (art. 2)

 

 

- frais postaux

CHF

10.00

Émoluments généraux (art. 4)

 

 

- délivrance de copies (let. a)

CHF

- délivrance de copies (let. b)

CHF

- état de frais (let. h)

CHF

75.00

Émoluments de la Chambre pénale de recours (art. 13)

 

 

- décision sur recours (let. c)

CHF

415.00

-

CHF

Total

CHF

500.00