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Décisions | Chambre pénale de recours

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P/24364/2022

ACPR/360/2023 du 16.05.2023 ( MP ) , IRRECEVABLE

Descripteurs : MOTIVATION;DROIT D'ÊTRE ENTENDU

république et

canton de Genève

POUVOIR JUDICIAIRE

P/24364/2022 ACPR/360/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale de recours

Arrêt du mardi 16 mai 2023

 

Entre

A______, domicilié ______, comparant par Me B______, avocat,

recourant,


contre l'ordonnance rendue le 18 novembre 2022 par le Ministère public,

et

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, 1213 Petit-Lancy, case postale 3565, 1211 Genève 3,

intimé.


EN FAIT :

A. Par acte déposé le 13 mars 2023, A______ recourt contre l'ordonnance du 18 novembre 2022, dont il a pris connaissance, selon ses dires, au plus tôt le 1er mars 2023, par laquelle le Ministère public a ordonné l'établissement de son profil ADN.

Le recourant conclut, sous suite de frais et indemnité, à l'annulation de l'ordonnance querellée et à la destruction des échantillons prélevés. Il conclut à sa mise au bénéfice de l'assistance judiciaire pour la procédure de recours.

B. Les faits pertinents suivants ressortent du dossier :

a.        A______ a été interpellé le 16 novembre 2022, à la suite d'une transaction de stupéfiants; ses données signalétiques ont été saisies et un échantillon d'ADN a été prélevé.

b.        Le 17 novembre 2022, le Procureur l'a prévenu d'infraction à la loi sur les stupéfiants (art. 19 LStup).

c.         Lors de ses auditions, le recourant a admis avoir pris du temps avant d'ouvrir à la police, car il s'était débarrassé d'un caillou de 5 grammes de cocaïne, et s'adonner à un trafic de stupéfiants s'agissant de la marijuana et de la résine de cannabis. Il a fourni le nom de l'un de ses fournisseurs, pour lequel des échanges de messages ont été trouvés, refusant de fournir ceux des précédents.

d.        Le 18 novembre 2022, le Ministère public a rendu la décision dont recours.

e.         Par courrier du 13 mars 2023, sur interpellation du recourant, le Ministère public a motivé le prélèvement et l'établissement du profil ADN par la saisie de drogue en mains du recourant et de son comparse et l'ampleur du trafic. Des analyses ADN devraient être ordonnées, en vue de déterminer si des tiers étaient impliqués dans le trafic de stupéfiants; l'ADN du recourant était ainsi nécessaire pour procéder à des comparaisons et exclusions.

C. Dans son recours, A______ allègue la violation de son droit d'être entendu, la décision litigieuse ne comportant aucune motivation. Ladite violation ne pouvait être considérée comme étant de peu de gravité au vu de l'importance de l'atteinte à sa personnalité et de la pratique systématique des autorités genevoises s'agissant de ces établissements des profils ADN. Cette violation ne pouvait pas être réparée dans le cadre de la procédure de recours sans le priver d'un degré de juridiction. Il y avait également une violation des art. 197 et 255 CPP qui imposait une analyse casuistique – ainsi qu'une décision motivée basée sur ladite analyse – permettant de s'assurer du caractère non systématique de l'établissement de profils ADN.

D. a. Le Ministère public reprend et développe la motivation donnée dans son courrier du 13 mars 2023.

b. A______ réplique que son recours portait intégralement sur la problématique de la violation de son droit d'être entendu et du non-respect de la jurisprudence relative aux articles 197 et 255 CPP, imposant aux autorités pénales de procéder à une analyse casuistique de chaque situation individuelle et d'apporter une motivation circonstanciée aux ordonnances d'établissement d'un profil d'ADN.

Or, dans ses observations, le Ministère public motivait, a posteriori, ladite décision; il ne soutenait pas que celle-ci ait respecté initialement les exigences susvisées. La violation de son droit d'être entendu devait entrainer l'annulation de la décision attaquée indépendamment de ses chances de succès sur le fond. Le cas d'espèce était symptomatique de la pratique du Ministère public genevois qui semblait rendre, de manière quasi systématique, des ordonnances d'établissement de profils d'ADN au moyen d'un formulaire sans aucunement les motiver mais ne se pencher réellement sur les situations casuistiques qu'en cas de recours. Il s'agissait d'une violation manifeste et consciente du droit, par une autorité pénale. Considérer que cette violation des droits des parties pourrait être réparée par l'apport d'une motivation dans le cadre de la procédure de recours, permettrait à cette pratique de perdurer. Dans ces circonstances, l'admission du recours ne constituait pas qu'une vaine formalité.

EN DROIT :

1.             Le recours a été déposé selon la forme et – faute de notification conforme à l'art. 85 al. 2 CPP – dans le délai prescrits (art. 385 al. 1 et 396 al. 1 CPP), concerne une ordonnance sujette à recours auprès de la Chambre de céans (art. 393 al. 1 let. a CPP) et émane du prévenu qui, partie à la procédure (art. 104 al. 1 let. a CPP), a qualité pour agir (art. 382 al. 1 CPP).

2.             Le recourant reproche au Ministère public la violation de son droit d'être entendu, faute de motivation de la décision. Il fait en outre valoir que le vice dénoncé ne pouvait être réparé dans le cadre de la procédure de recours cantonale.

2.2.1. Le droit d'être entendu est certes une garantie constitutionnelle de caractère formel, dont la violation entraîne en principe l'annulation de la décision attaquée, indépendamment des chances de succès du recours sur le fond. Toutefois, le droit d'être entendu n'est pas une fin en soi; il doit permettre d'éviter qu'une procédure judiciaire ne débouche sur un jugement vicié en raison de la violation du droit des parties de participer à la procédure, notamment à l'administration des preuves. Lorsqu'on ne voit pas quelle influence la violation du droit d'être entendu a pu avoir sur la procédure, il n'y a pas lieu d'annuler la décision attaquée. Le recourant qui se contente de dénoncer une violation de son droit d'être entendu sans contester le fond de la décision n'a pas d'intérêt à procéder, de sorte que son recours est irrecevable (ATF 143 IV 308 consid. 1.1 publié in SJ 2018 I 25; arrêts du Tribunal fédéral 6B_259/2016 du 21 mars 2017 consid. 5.1.1; 4A_141/2016 du 26 mai 2016 consid. 1.2; 4A_554/2012 du 21 mars 2013 consid. 4.1.2 et les références citées). 

2.2.2. En l'espèce, la décision entreprise ne comprend certes pas de motivation. Cependant, après réception des observations motivées, le recourant ne prétend pas ne pas avoir compris les motifs ayant conduit à la décision querellée ni ne les critique, mais fait de son recours une question de principe reprochant au Ministère public de s'affranchir consciemment et systématiquement des dispositions légales.

Conformément à la jurisprudence mentionnée, le recours s'avère par conséquent irrecevable.

3.             Le recourant qui succombe supportera les frais envers l'État, fixés en totalité à CHF 900.- (art. 428 al. 1 CPP et 13 al. 1 du Règlement fixant le tarif des frais en matière pénale, RTFMP ; E 4 10.03).

4.             Le recourant plaide au bénéfice d'une défense d'office.

4.1. Conformément à l'art. 29 al. 3 Cst., toute personne qui ne dispose pas de ressources suffisantes a droit à l'assistance judiciaire gratuite, à moins que sa cause paraisse dépourvue de toute chance de succès. D'après la jurisprudence, un procès est dépourvu de chances de succès lorsque les perspectives de le gagner sont notablement plus faibles que les risques de le perdre, et qu'elles ne peuvent donc être considérées comme sérieuses, de sorte qu'une personne raisonnable et de condition aisée renoncerait à s'y engager en raison des frais qu'elle s'exposerait à devoir supporter (ATF 138 III 217 consid. 2.2.4; 129 I 129 consid. 2.2).

4.2. En l'occurrence, vu le caractère irrecevable du recours, il n'y a pas lieu d'indemniser le défenseur d'office.

* * * * *


 


PAR CES MOTIFS,
LA COUR :


Déclare le recours irrecevable.

Condamne A______ aux frais de la procédure de recours, fixés en totalité à CHF 900.-.

Notifie le présent arrêt, en copie, au recourant (soit, pour lui, son défenseur) et au Ministère public.

Siégeant :

Monsieur Christian COQUOZ, président; Mesdames Alix FRANCOTTE CONUS et Françoise SAILLEN AGAD, juges; Madame Séverine CONSTANS, greffière.

 

La greffière :

Séverine CONSTANS

 

Le président :

Christian COQUOZ

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Voie de recours :

 

Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière pénale au sens de l'art. 78 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110); la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 78 à 81 et 90 ss LTF. Le recours doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14. Les mémoires doivent être remis au plus tard le dernier jour du délai, soit au Tribunal fédéral soit, à l'attention de ce dernier, à La Poste Suisse ou à une représentation diplomatique ou consulaire suisse (art. 48 al. 1 LTF).


 

P/24364/2022

ÉTAT DE FRAIS

 

 

 

 


COUR DE JUSTICE

 

 

 

Selon le règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais en matière pénale (E 4 10.03).

 

Débours (art. 2)

 

 

- frais postaux

CHF

10.00

Émoluments généraux (art. 4)

 

 

- délivrance de copies (let. a)

CHF

- délivrance de copies (let. b)

CHF

- état de frais (let. h)

CHF

75.00

Émoluments de la Chambre pénale de recours (art. 13)

 

 

- décision sur recours (let. c)

CHF

815.00

-

CHF

Total

CHF

900.00