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Décisions | Chambre pénale de recours

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P/1541/2022

ACPR/307/2023 du 03.05.2023 sur ONMMP/234/2023 ( MP ) , IRRECEVABLE

Normes : CPP.310; CP.305; CPP.115

république et

canton de Genève

POUVOIR JUDICIAIRE

P/1541/2022 ACPR/307/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale de recours

Arrêt du mercredi 3 mai 2023

 

Entre

A______, domicilié ______ , comparant en personne,

recourant,

contre l'ordonnance de refus de jonction et de non-entrée en matière rendue le 19 janvier 2023 par le Ministère public,

et

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, 1213 Petit-Lancy - case postale 3565, 1211 Genève 3,

intimé.


EN FAIT :

A. Par acte expédié le 2 février 2023, A______ recourt contre l'ordonnance du 19 janvier 2023, notifiée le 24 suivant, par laquelle le Ministère public a refusé de joindre la présente procédure à la cause P/1______/2022 et refusé d'entrer en matière sur sa plainte.

Le recourant conclut à l'ouverture d'une instruction.

B. Les faits pertinents suivants ressortent du dossier :

a. En 2012, A______ a déposé plainte, à Genève, notamment contre les sociétés B______ GENOSSENSCHAFT (ci-après, B______) et C______ AG, ainsi que D______.

b. Sur invitation du Ministère public genevois à se déterminer sur le for, le Ministère public fribourgeois a, par décision du 25 septembre 2012, accepté sa compétence. La décision mentionnait, sous la rubrique "prévenu", uniquement le nom de D______.

c. Par lettre du 2 mars 2019, A______ a écrit à la procureure fribourgeoise pour lui demander quelle démarche elle comptait entreprendre contre B______, puisque la procédure contre D______ touchait à sa fin.

d. La magistrate lui a répondu que par sa décision du 25 septembre 2012 elle n'avait accepté sa compétence que pour la poursuite dirigée contre D______.

e. Par lettre du 21 janvier 2020 adressée à la précitée, le procureur E______, faisant référence aux "divers échanges intervenus depuis le 29 juillet 2019 résult[a]nt vraisemblablement d'un malentendu", a exposé que le Ministère public genevois avait toujours compris et considéré que la procédure de fixation de for, terminée par l'ordonnance du 25 septembre 2012, incluait la société B______.

f. Par décision du 30 janvier 2020, le Ministère public fribourgeois a accepté la compétence des autorités de ce canton pour traiter la plainte de A______.

g. Dans l'intervalle, A______ avait, le 13 janvier 2020, déposé plainte contre la magistrate fribourgeoise pour entrave à l'action pénale, auprès du Ministère public fribourgeois, qui a rendu une ordonnance de non-entrée en matière le 18 février 2020.

h. Le 20 janvier 2022, A______ a déposé plainte, à Genève, contre le procureur E______ pour entrave à l'action pénale.

Il reproche au précité d'avoir tenté de couvrir "l'erreur" de la magistrate fribourgeoise en adressant à cette dernière, le 21 janvier 2020, une lettre faisant état d'un "malentendu" et cherché, par ce moyen, à la soustraire à la justice.

Cette plainte a été enregistrée sous le présent numéro de procédure ; elle est conduite par le procureur général.

i. Le 23 juin 2022, A______ a déposé une "extension de sa précédente plainte", pour entrave à l'action pénale. La magistrate fribourgeoise avait menti sur la question du for, avec la complicité du procureur général genevois, du procureur général fribourgeois et du procureur E______.

Le volet genevois de cette plainte, soit en tant qu'elle est dirigée contre le procureur général F______, a été enregistré sous le numéro de procédure P/1______/2022 et confié à la procureure G______.

j. A______ a requis la jonction des deux procédures.

k. Invité – en qualité de personne appelée à donner des renseignements selon l'art. 178 let. d CPP –, à faire part de ses observations sur la (première) plainte de A______, le procureur E______ a exposé n'avoir, à aucun moment, eu connaissance de la plainte déposée par le précité contre la procureure fribourgeoise, celle-ci ne l'avait pas non plus contacté pour lui demander de l'aide et il n'avait jamais été question de la soustraire à une poursuite pénale dont il n'avait pas connaissance.

l. A______ a persisté dans ses conclusions.

C. Dans l'ordonnance querellée, le procureur général a considéré que, même si les deux plaintes déposées à Genève par A______ – les 20 janvier et 23 juin 2022 – avaient le même arrière-plan, à savoir la contestation du for entre les Ministères publics genevois et fribourgeois, le plaignant ne pouvait, par le biais d'une demande de jonction, tenter d'empêcher le procureur général de traiter la première. La jonction des procédures était ainsi refusée.

Dans le courrier litigieux, le procureur E______ avait émis l'hypothèse que les échanges intervenus avec la magistrate fribourgeoise résultaient d'un malentendu. Or, le simple fait d'émettre cette hypothèse ne saurait être considéré comme un acte de soustraction. La collusion, entre les Ministères publics genevois et fribourgeois, invoquée par A______ dans sa réplique n'était étayée par aucun indice.

D. a. Dans son recours, A______ soutient que, en acceptant pour la deuxième fois la compétence des autorités de son canton, alors qu'elle l'avait déjà admise en 2012, la magistrate fribourgeoise avait "chang[é] les faits dans le dossier B______", ce qui lui avait permis d'évoquer une "prétendue prescription de 2012 pour B______" et ne pas instruire contre cette société.

Ainsi, l'utilisation du terme "malendendu" par le procureur E______ dans la lettre litigieuse avait eu des effets très conséquents, puisque ce mot avait été repris par le procureur général fribourgeois pour disculper la magistrate de l'infraction d'entrave à l'action pénale. De "très forts indices" démontraient que ce terme avait été utilisé intentionnellement, de concert entre les deux ministères publics.

Le but de la jonction requise était d'empêcher le procureur général d'instruire la plainte contre le procureur E______, car les indices démontraient qu'il était aussi coupable d'entrave à l'action pénale.

b. À réception du recours, la cause a été gardée à juger sans échange d'écritures, ni débats.

EN DROIT :

1.             La Chambre pénale de recours peut décider d'emblée de traiter sans échange d'écritures ni débats les recours manifestement irrecevables (art. 390 al. 2 et 5 a contrario CPP).

Tel est le cas en l'occurrence, au vu des considérations qui suivent.

2.             2.1. Le recours a été déposé selon la forme et dans le délai prescrits (art. 385 al. 1 et 396 al. 1 CPP), concerne une ordonnance sujette à recours auprès de la Chambre de céans (art. 393 al. 1 let. a CPP).

2.2. Seule la personne qui a un intérêt juridiquement protégé à la modification ou à l'annulation de la décision querellée dispose de la qualité pour recourir (art. 382 al. 1 CPP).

2.2.1. Selon l'art. 115 al. 1 CPP, il faut entendre par lésé toute personne dont les droits ont été touchés directement par une infraction. Seul doit être considéré comme lésé celui qui est personnellement et immédiatement touché, c'est-à-dire celui qui est titulaire du bien juridique ou du droit protégé par la loi, contre lequel, par définition, se dirige l'infraction (ATF 119 Ia 342 consid. 2 p. 345 ; 119 IV 339 consid. 1d/aa p. 343). Il convient donc d'interpréter le texte de l'infraction pour en déterminer le titulaire et ainsi savoir qui a qualité de lésé (ATF 118 IV 209 consid. 2 p. 211).

2.2.2. L'art. 305 CP punit du chef d'entrave à l'action pénale celui qui aura soustrait une personne à une poursuite pénale ou à l'exécution d'une peine ou d'une mesure.

Cette norme protège le fonctionnement de la justice; d'éventuels intérêts privés à la poursuite de l'infraction apparaissent d'emblée à tel point en retrait derrière l'intérêt public que la norme ne peut être appréhendée que comme protégeant exclusivement le fonctionnement de la justice; l'invocation d'une infraction à l'art. 305 CP ne peut fonder la qualité pour agir en justice d'une partie agissant pour la défense de ses intérêts privés (ATF 141 IV 459 consid. 4.2 p. 462; arrêt du Tribunal fédéral 6B_1274/2018 du 22 janvier 2019 consid. 2.2.1 et les références citées).

2.2.3. En l'espèce, il résulte de ce qui précède que le recourant n'est pas titulaire du bien juridique touché par l'infraction à l'art. 305 CP, disposition qui vise exclusivement la protection de la justice pénale (suisse), et non ses intérêts privés à lui.

Partant, le recourant ne revêtant pas la qualité de lésé, l'intérêt juridique à recourir doit lui être dénié.

3.             Il s'ensuit que le recours, qu'il concerne le refus de jonction ou la non-entrée en matière, est irrecevable.

4.             Le recourant, qui succombe, supportera les frais envers l'État, fixés en totalité à CHF 800.-, y compris un émolument de procédure pour la présente décision (art. 428 al. 1 CPP et 13 al. 1 du Règlement fixant le tarif des frais en matière pénale, RTFMP ; E 4 10.03).

* * * * *


 


PAR CES MOTIFS,
LA COUR :


Déclare le recours irrecevable.

Condamne A______ aux frais de la procédure de recours, arrêtés à CHF 800.-.

Notifie le présent arrêt, en copie, au recourant et au Ministère public.

Siégeant :

Madame Daniela CHIABUDINI, présidente; Mesdames Corinne CHAPPUIS BUGNON et Alix FRANCOTTE CONUS, juges; Madame Séverine CONSTANS, greffière.

 

La greffière :

Séverine CONSTANS

 

La présidente :

Daniela CHIABUDINI

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Voie de recours :

 

Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière pénale au sens de l'art. 78 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110); la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 78 à 81 et 90 ss LTF. Le recours doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14. Les mémoires doivent être remis au plus tard le dernier jour du délai, soit au Tribunal fédéral soit, à l'attention de ce dernier, à La Poste Suisse ou à une représentation diplomatique ou consulaire suisse (art. 48 al. 1 LTF).


 

P/1541/2022

ÉTAT DE FRAIS

 

 

 

 


COUR DE JUSTICE

 

 

 

Selon le règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais en matière pénale (E 4 10.03).

 

Débours (art. 2)

 

 

- frais postaux

CHF

10.00

Émoluments généraux (art. 4)

 

 

- délivrance de copies (let. a)

CHF

- délivrance de copies (let. b)

CHF

- état de frais (let. h)

CHF

75.00

Émoluments de la Chambre pénale de recours (art. 13)

 

 

- décision sur recours (let. c)

CHF

715.00

 

 

 

Total

CHF

800.00