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Décisions | Chambre pénale de recours

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P/23594/2021

ACPR/151/2023 du 28.02.2023 sur OMP/675/2023 ( MP ) , REJETE

Descripteurs : DÉFENSE D'OFFICE;PREUVE;BÉNÉFICIAIRE DE PRESTATIONS D'ASSISTANCE
Normes : CPP.132

république et

canton de Genève

POUVOIR JUDICIAIRE

P/23594/2021 ACPR/151/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale de recours

Arrêt du mardi 28 février 2023

 

Entre

A______, domicilié ______, comparant par Me Elizaveta ROCHAT, avocate, place de la Taconnerie 5, 1204 Genève,

recourant,

 

contre l'ordonnance de refus de nomination d'avocat d'office rendue le 10 janvier 2023 par le Ministère public,

 

et

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, 1213 Petit-Lancy, case postale 3565, 1211 Genève 3,

intimé.


EN FAIT :

A. Par acte expédié le 23 janvier 2023, A______ recourt contre l'ordonnance du 10 janvier 2023, communiquée par pli simple, par laquelle le Ministère public a refusé d'ordonner la défense d'office en sa faveur.

Le recourant conclut, sous suite de frais et dépens, à l'annulation de l'ordonnance querellée et à être mis au bénéfice de l'assistance judiciaire, y compris pour la procédure de recours, et que Me Elizaveta ROCHAT soit nommée à ce titre.

B. Les faits pertinents suivants ressortent du dossier :

a. A______ est prévenu d'escroquerie, d'abus de confiance et de faux dans le titre, à la suite d'une plainte déposée par B______.

b. En parallèle, A______ fait l'objet d'une procédure en exécution forcée, dans le cadre de laquelle B______ intervient comme créancier poursuivant.

c. Le 21 décembre 2022, sous la plume de son conseil, A______ a sollicité du Ministère public d'être mis au bénéfice de l'assistance judiciaire, dans la mesure où son cas relevait de la "défense d'office à teneur des charges retenues pour la prévention", et à pouvoir consulter le dossier.

Seule une procuration était jointe au courrier.

d. Le 10 janvier 2023, le Ministère public lui a refusé l'accès au dossier.

C. Dans l'ordonnance querellée, le Ministère public retient qu'étant copropriétaire d'un appartement sis route 1______ no. ______, comme cela ressortait de l'inscription au Registre foncier, A______ disposait des moyens nécessaires pour se faire assister, à ses frais, par un conseil de son choix.

D. a. Dans son recours, A______ fait grief au Ministère public d'avoir tenu compte de la copropriété de cet immeuble pour exclure son indigence. Cette part de copropriété faisait l'objet d'une saisie par l'Office cantonal des poursuites (ci-après: Office des poursuites) et était, de surcroît, revendiquée par son épouse. Si le dossier pénal, auquel il n'avait pas eu accès, ne contenait pas "d'informations suffisantes concernant [s]a situation financière [ ], le Ministère public devait [l']interpeller [ ] à ce sujet".

Parmi les pièces produites à l'appui du recours figure une décision de la Chambre de surveillance des Offices des poursuites et faillites du 11 novembre 2021 (DCSO/430/21), rendue sur plainte notamment de A______ contre une mesure de l'Office des poursuites. Il en ressort que l'enquête menée aux fins d'établir la situation financière et patrimoniale de A______ s'était révélée insatisfaisante, les explications de l'intéressée à ce sujet n'étant pas "convaincantes et, en tous les cas, pas suffisamment étayées par les pièces justificatives recueillies par l'Office".

b. Dans ses observations, le Ministère public conclut au rejet du recours.

EN DROIT :

1.             1.1. Le recours est recevable pour avoir été déposé selon la forme et – faute de notification conforme à l'art. 85 al. 2 CPP – dans le délai prescrits (art. 385 al. 1 et 396 al. 1 CPP), concerner une ordonnance sujette à recours auprès de la Chambre de céans (art. 393 al. 1 let. a CPP) et émaner du prévenu qui, partie à la procédure (art. 104 al. 1 let. a CPP), a qualité pour agir, ayant un intérêt juridiquement protégé à la modification ou à l'annulation de la décision querellée (art. 382 al. 1 CPP).

1.2. Les pièces nouvelles produites devant la juridiction de céans sont recevables, la jurisprudence admettant la production de faits et de moyens de preuve nouveaux en deuxième instance (arrêt du Tribunal fédéral 1B_550/2022 du 17 novembre 2022 consid. 2.2).

2.             2.1. En dehors des cas de défense obligatoire, l'art. 132 al. 1 let. b CPP soumet le droit à l'assistance d'un défenseur à deux conditions : le prévenu doit être indigent et la sauvegarde de ses intérêts doit justifier une telle assistance, cette seconde condition devant s'interpréter à l'aune des critères mentionnés à l'art. 132 al. 2 et 3 CPP.

2.2. Une personne est indigente lorsqu'elle n'est pas en mesure d'assumer les frais de la procédure sans porter atteinte au minimum nécessaire à son entretien et à celui de sa famille (ATF 141 III 369 consid. 4.1 p. 371).

Pour déterminer l'indigence, il convient de prendre en considération l'ensemble de la situation financière du requérant au moment où la demande est présentée, celui-ci devant indiquer de manière complète et établir autant que possible ses revenus, sa situation de fortune et ses charges (ATF 135 I 221 consid. 5.1 p. 223 et les arrêts cités). Il incombe ainsi au requérant de prouver les faits qui permettent de constater qu'il remplit les conditions de la mesure qu'il sollicite. S'il ne fournit pas des renseignements suffisants (avec pièces à l'appui) pour permettre d'avoir une vision complète de sa situation financière et que la situation demeure confuse, la requête doit être rejetée (ATF 125 IV 161 consid. 4 p. 164 s.; arrêt du Tribunal fédéral 1B_436/2018 consid. 3; Y. JEANNERET / A. KUHN / C. PERRIER DEPEURSINGE (éds), Commentaire romand : Code de procédure pénale suisse, 2ème éd., Bâle 2019, n. 59b ad art. 132).

2.3. En l'espèce, le recourant a sollicité sa défense d'office au motif que celle-ci s'imposait compte tenu des charges retenues contre lui.

Contrairement à ce qu'il semble croire, réaliser les conditions d'une défense obligatoire (art. 130 CPP) ne donne pas droit – de jure – à une défense d'office. Dans sa situation, il faut encore être indigent et que l’assistance d’un défenseur soit justifiée pour sauvegarder ses intérêts (art. 132 al. 1 let. b CPP), la démonstration de la réalisation de cette première condition incombant au prévenu.

Or, à l'appui de sa demande, déposée par l'intermédiaire de son conseil, il n'a fourni aucune explication ni document en lien avec sa situation financière. Dans son recours, il conteste le bien-fondé du motif pour lequel le Ministère public a rejeté sa requête, sans pour autant donner un début d'élément aux fins d'établir son impécuniosité.

Le recourant a ainsi manqué – à deux reprises – à son devoir de collaboration tel qu'il ressort de la jurisprudence précitée, alors qu'il n'appartenait pas au Ministère public de l'interpeller à défaut de trouver au dossier les informations utiles.

De surcroît, ce manquement n'apparaît pas extraordinaire puisque des documents accompagnant son acte, il appert que, même dans le cadre de la procédure d'exécution forcée, ses explications sur sa situation financière se sont révélées insuffisantes.

Compte tenu de ce qui précède, il importe peu de savoir si la part de copropriété du recourant pouvait ou non être considérée comme un élément de sa fortune. Cette question peut en effet souffrir de rester indécise en l'occurrence, dans la mesure où l'intéressé a failli à son obligation de démontrer son indigence, à tout le moins de coopérer à l'établissement de sa situation financière, ce qui doit conduire au rejet de sa requête en nomination d'office.

3.             Exempte de critique dans son résultat, l'ordonnance querellée sera donc confirmée, par substitution de motif.

4.             Vu l'issue du recours, qui était voué à l'échec, il n'y pas lieu d'entrer en matière sur la demande d'assistance juridique pour la procédure de recours.

5.             La procédure de recours contre le refus de l'octroi de l'assistance juridique ne donne pas lieu à la perception de frais (art. 20 RAJ).

* * * * *


 

PAR CES MOTIFS,
LA COUR :


Rejette le recours.

Rejette la demande d'assistance judiciaire pour l'instance de recours.

Laisse les frais de la procédure de recours à la charge de l'État.

Notifie le présent arrêt, en copie, au recourant, soit pour lui son conseil, et au Ministère public.

Siégeant :

Madame Daniela CHIABUDINI, présidente; Monsieur Christian COQUOZ et  Madame Alix FRANCOTTE CONUS, juges; Monsieur Julien CASEYS, greffier.

 

Le greffier :

Julien CASEYS

 

La présidente :

Daniela CHIABUDINI

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Voie de recours :

 

Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière pénale au sens de l'art. 78 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110); la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 78 à 81 et 90 ss LTF. Le recours doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14. Les mémoires doivent être remis au plus tard le dernier jour du délai, soit au Tribunal fédéral soit, à l'attention de ce dernier, à La Poste Suisse ou à une représentation diplomatique ou consulaire suisse (art. 48 al. 1 LTF).